CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES
PROVENCE-ALPES-CÔTE D’AZUR
Deuxième section
Jugement n° 2018-0018
Commune de Beausoleil
(Alpes-Maritimes)
Trésorerie de Menton Municipale
Exercice 2015
Rapport n° 2018-0001
Audience publique du 27 mars 2018
Délibéré le 27 mars 2018
Prononcé le 28 juin 2018
J U G E M E N T
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur,
VU le réquisitoire n° 2017-0038 en date du 28 août 2017 par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de
M. A pour sa gestion du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015, en sa qualité de comptable public de la commune de Beausoleil ;
VU les notifications du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de l’instruction à M. A en date du 4 septembre 2018 et au maire de Beausoleil en date du 5 septembre 2018 ;
VU les comptes de la commune de Beausoleil de l’exercice 2015 ;
VU le code général des collectivités territoriales ;
VU le code des juridictions financières ;
VU l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
VU le décret n° 2007-23 du 5 janvier 2007 modifiant le décret n° 2001-654 du 19 juillet 2001 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels des collectivités locales et établissements publics mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et abrogeant le décret n° 91-573 du 19 juin 1991 ;
VU le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
VU l’arrêté du 5 janvier 2007 fixant le montant maximum de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article 14 du décret n° 2001-654 du 19 juillet 2001 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels des collectivités et établissements publics mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et abrogeant le décret n° 91-573 du 19 juin 1991 ;
VU l'arrêté n° 2017-25 du 18 décembre 2017 du président de la chambre fixant l'organisation des formations de délibéré et leurs compétences pour 2018 ;
VU la décision du 31 août 2017 par laquelle le président de la chambre a désigné
Mme Emmanuelle Colomb, première conseillère, comme rapporteure ;
VU les questionnaires adressés par le magistrat instructeur le 19 septembre 2017,
le 8 novembre 2017 et le 8 décembre 2017 ;
VU les réponses reçues du comptable par courriels du 17 octobre 2017 (enregistré au greffe le même jour sous le n° 1508), du 20 novembre 2017 (enregistré au greffe le même jour sous le
n° 1678) et du 22 décembre 2017 (enregistré au greffe le 3 janvier 2018 sous le n° 10) ;
VU l’attestation de cautionnement du comptable ;
VU l’ensemble des autres pièces du dossier ;
VU le rapport déposé le 8 janvier 2018 par Mme Emmanuelle Colomb, première conseillère ;
VU les conclusions n° 2018-0001 du 20 février 2018 du procureur financier ;
VU les lettres du 21 février 2018 informant l’ordonnateur et le comptable de la date fixée pour l’audience publique ;
Après avoir entendu en audience publique le rapporteur et les conclusions orales de
M. Marc Larue, procureur financier, le comptable et l’ordonnateur, dûment informés de l’audience, n’étant ni présents ni représentés ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier et après avoir entendu Mme Judith Ascher, première conseillère, réviseure, en ses observations ;
Sur les circonstances constitutives de force majeure
ATTENDU que, dans ses réponses susvisées du 20 novembre 2017 et du 22 décembre 2017,
M. A fait état des difficultés affectant le bon fonctionnement du poste comptable, liées à une situation de sous-effectif n’ayant pas permis aux agents de mener à bien l’ensemble de leurs tâches ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a estimé que les circonstances ainsi évoquées n’étaient pas constitutives d’un cas de force majeure ;
ATTENDU en effet que l'existence de circonstances constitutives de la force majeure doit résulter d'événements extérieurs, imprévisibles et irrésistibles ; que tel n'est pas le cas des difficultés du poste comptable exposées par M. A ; que ces difficultés, insusceptibles dès lors d’exonérer le comptable de sa responsabilité, pourront toutefois être utilement invoquées au soutien d’une demande de remise gracieuse présentée devant le ministre en charge du budget et des comptes publics ;
ATTENDU qu'il y a lieu dès lors pour la chambre de se prononcer sur l'existence de manquements de la part du comptable mis en cause par le réquisitoire ;
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par son réquisitoire du 28 août 2017, le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable de la commune de Beausoleil avait procédé le 9 juin 2015, par mandat collectif n° 2340 imputé sur le compte 64118 « autres indemnités », au paiement d’une somme totale de 1 470 € à sept éducateurs territoriaux des activités physiques et sportives (ETAPS) en règlement de frais de déplacement, sans avoir exercé, en méconnaissance des dispositions des articles 19 et 20 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, le contrôle de la validité de la dette et, à ce titre, vérifié la production des pièces justificatives ;
ATTENDU en effet que le procureur financier a relevé qu’aucune décision individuelle n’avait été produite à l’appui du mandat alors que la réglementation en vigueur en imposait la production, qu’il s’agisse de la rubrique 210223 « primes et indemnités » de l’annexe I du code général des collectivités territoriales ou de sa rubrique 61812 relative à la « prise en charge des frais de déplacement engagés sur le territoire » ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « Les comptables sont personnellement et pécuniairement responsables (…) du paiement des dépenses (…) » et que leur « responsabilité personnelle et pécuniaire (…) se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée (…) » ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 19 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, « Le comptable est tenu d'exercer le contrôle : / (…) 2° S'agissant des ordres de payer : / (…) d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à l'article 20 (…). » ; qu’aux termes de l’article 20 de ce même décret, « Le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur : / (…) 4° La production des pièces justificatives (…). » ; qu’enfin, aux termes de l’article 38 de ces mêmes dispositions, « (…) Lorsqu'à l'occasion de l'exercice des contrôles prévus au 2° de l'article 19 le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe l'ordonnateur (…) » ;
ATTENDU qu’en application de l’article L. 1617-3 du code général des collectivités territoriales susvisé, l’article D. 1617-19 du même code dispose : « Avant de procéder au paiement d’une dépense ne faisant pas l’objet d’un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales (…) ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l’annexe I du présent code » ; que la rubrique 210223 « primes et indemnités » de l’annexe I dudit code prévoit la production, à l’appui du mandat, des pièces suivantes : « 1. Décision de l’assemblée délibérante fixant la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités ; / 2. Décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent » ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 17 octobre 2017 susvisée, le comptable a indiqué que la rubrique 210223 de l’annexe I susmentionnée, seule pertinente en l’espèce, imposait la production d’une « décision de l’assemblée délibérante fixant la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités » ; qu’il soutient à ce titre que la délibération du
4 février 2015 par laquelle le conseil municipal de Beausoleil a décidé d’octroyer aux ETAPS le bénéfice de l’indemnité annuelle prévue par le décret du 5 janvier 2007 susvisé, d’un montant unique et forfaitaire de 210 €, était en elle-même suffisamment précise pour que toute « décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent », également prévue à la rubrique 210223, soit en l’espèce superflue ;
ATTENDU que l’ordonnateur n’a pas répondu au réquisitoire ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a relevé qu’aucune décision individuelle prévue à la rubrique 210223 « autres indemnités » de l’annexe I du code général des collectivités territoriales n’avait été produite au cours de la phase d’instruction du réquisitoire, alors même que la délibération du 4 février 2015 posait deux conditions au versement effectif de l’indemnité et ne pouvait donc se suffire à elle-même ; qu’il a également retenu, à titre subsidiaire, qu’une décision individuelle s’imposait également, en application de la rubrique 21812, dans l’hypothèse où les paiements en cause devaient être regardés comme des remboursements de frais ; qu’il en a conclu que, faute d’avoir disposé des pièces justificatives propres à lui permettre de vérifier la validité de la dette et d’avoir suspendu le paiement,
M. Gérard Cochet avait engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire et causé à la collectivité un préjudice financier correspondant au montant dudit paiement indu ;
ATTENDU qu’il résulte de l’instruction que le comptable a réglé à sept ETAPS de la commune de Beausoleil, par un mandat collectif n° 2340 du 9 juin 2015 imputé sur le compte 64118 « autres indemnités », la somme totale de 1 470 € en règlement d’une indemnité forfaitaire pour frais de déplacement occasionnés ;
ATTENDU qu’il est constant qu’aucune décision individuelle prise par l’autorité investie du pouvoir de nomination n’a été jointe audit mandat ;
ATTENDU que le versement de l’indemnité en cause, instituée par le décret du 5 janvier 2007 susvisé au bénéfice des agents itinérants amenés à utiliser leur véhicule personnel pour les besoins du service et dont un arrêté ministériel du même jour a fixé le montant forfaitaire annuel à 210 €, a été autorisé par une délibération du conseil municipal de Beausoleil
du 4 février 2015 ; qu’aux termes de celle-ci, l’assemblée délibérante a décidé « d’allouer [l’indemnité] pour les éducateurs sportifs qui exercent sur cinq sites différents à l’intérieur de la commune », afin que leur soient « remboursés les frais occasionnés pour les déplacements [lorsqu’ils] utilisent leur véhicule personnel » ; que le versement de l’indemnité est ainsi conditionné aux modalités pratiques d’exercice des missions et à l’utilisation effective d’un véhicule personnel ; que, rien ne permettant au comptable de préjuger que l’ensemble des ETAPS remplissait ces critères, seule une décision du maire de la commune de Beausoleil permettait de désigner nommément les agents éligibles ; que le comptable n’est donc pas fondé à soutenir que la délibération du 4 février 2015 déterminant le cadre d’emploi concerné et le montant forfaitaire annuel de l’indemnité était suffisamment précise en elle-même et qu’une décision individuelle, dont la production était expressément prévue par la réglementation en vigueur, était superflue ;
ATTENDU qu’à supposer même que les sommes en litige puissent être regardées comme constitutives de remboursements de frais de déplacement à l’intérieur du territoire de la commune de résidence administrative au sens de la rubrique 21812 alinéa f, celle-ci exigeait de même manière une « décision de l’autorité territoriale », ainsi d’ailleurs que la production d’états de frais appuyés de justificatifs au titre des « pièces générales » prévues à la rubrique 21811 à laquelle elle renvoie ;
ATTENDU ainsi qu’en toute hypothèse, le comptable ne disposait pas, au moment du paiement, des pièces justificatives suffisantes prévues par les dispositions précitées de l’annexe I du code général des collectivités territoriales, de telle sorte qu’il ne pouvait matériellement s’assurer de la validité de la dette ;
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède que M. A a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire en s’abstenant de suspendre le paiement du mandat visé dans le réquisitoire, alors qu’il se trouvait dans l’impossibilité de procéder aux contrôles auxquels l’obligent les dispositions décrétales susvisées ;
Sur le préjudice
ATTENDU qu’aux termes du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante (…) » ;
ATTENDU que ni ordonnateur ni le comptable, qui a indiqué dans sa réponse
du 17 octobre 2017 que la commune de Beausoleil n’avait subi aucun préjudice, n’ont développé d’argumentation sur ce point ;
ATTENDU que le constat de l’existence ou non d’un préjudice financier et de son imputabilité au comptable relève de l’appréciation que le juge des comptes est amené à porter sur ces deux points à l’analyse des pièces du dossier ;
ATTENDU qu’en l’absence des pièces justificatives attestant de la volonté de l’organe compétent de la commune de Beausoleil de procéder au paiement de l’indemnité forfaitaire pour frais de déplacement prévue par le décret du 5 janvier 2007 susvisé aux sept agents bénéficiaires, la dépense était indue ; que son paiement, directement imputable aux manquements du comptable à ses obligations susmentionnées, a donc causé un préjudice financier à la commune ;
ATTENDU qu’il convient dès lors de constituer M. A, comptable en fonctions à la date du paiement en litige, débiteur de la somme de 1 470 € correspondant au montant de l’indemnité litigieuse versé au cours de l’exercice 2015 ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité du comptable correspond à la notification du réquisitoire intervenue le 4 septembre 2017 ;
Sur le respect des règles de contrôle sélectif des dépenses
ATTENDU qu’aux termes du deuxième alinéa du paragraphe IX de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du paragraphe VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse totale des sommes mises à leur charge s’ils ont respecté les règles de contrôle sélectif des dépenses ; que cette condition est déterminée « sous l’appréciation du juge des comptes » ;
ATTENDU que, dans sa réponse, le comptable a transmis le plan de contrôle hiérarchisé de la dépense (CHD) validé par le supérieur hiérarchique le 20 septembre 2010, mais a également indiqué qu’il avait « abandonné » le contrôle a posteriori de la paie à la date du manquement constaté ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a estimé que le contrôle hiérarchisé de la dépense n’ayant pas été réalisé de l’aveu même du comptable, il y avait lieu de retenir que le plan de CHD n’a pas été respecté ;
ATTENDU qu’il résulte du plan de CHD fourni par le comptable que le contrôle de la paie des sept agents bénéficiaires de l’indemnité forfaitaire pour frais de déplacement, portant notamment sur la production des pièces justificatives prévues par la réglementation, relevait d’un contrôle a posteriori par sondage, sur la base d’un échantillon de 5 % des paies ; que le comptable a admis sa propre carence dans l’exercice de ce contrôle, qui n’était plus effectué au cours de
l’exercice 2015 et n’aurait été repris qu’en juillet 2017 ;
ATTENDU que, pour ce motif, il y a lieu de considérer que les règles de contrôle sélectif des dépenses n’ont pas été respectées ;
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par son réquisitoire du 28 août 2017, le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable de la commune de Beausoleil avait procédé au cours de
l’exercice 2015, par l’effet des mandats susmentionnés, au règlement d’heures supplémentaires rémunérées au bénéfices de 24 agents recrutés en contrats aidés, sans avoir exercé, en méconnaissance des dispositions des articles 19 et 20 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, le contrôle de la validité de la dette et, à ce titre, de vérifier l’exactitude de la liquidation et la production des pièces justificatives;
ATTENDU en effet que le procureur financier, après avoir indiqué que les agents en cause, contractuels de droit privé ne relevaient pas du régime indemnitaire des agents de droit public et estimé que la rubrique pertinente de l’annexe I du code général des collectivités territoriales était la rubrique approchante 210224 relative aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires, a retenu que le comptable avait procédé aux paiements sans disposer des décomptes individuels ayant servi de base à la liquidation ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « Les comptables sont personnellement et pécuniairement responsables (…) du paiement des dépenses (…) » et que leur « responsabilité personnelle et pécuniaire (…) se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée (…) ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 19 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, « Le comptable est tenu d'exercer le contrôle : / (…) 2° S'agissant des ordres de payer : / (…) d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à l'article 20 (…). » ; qu’aux termes de l’article 20 de ce même décret, « Le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur : / (…) 2° L'exactitude de la liquidation / (…) 4° La production des pièces justificatives (…) » ;
ATTENDU qu’en application de l’article L. 1617-3 du code général des collectivités territoriales susvisé, l’article D. 1617-19 du même code dispose : « Avant de procéder au paiement d’une dépense ne faisant pas l’objet d’un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales (…) ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l’annexe I du présent code » ; que le point 5 du chapitre introductif de cette annexe relatif aux définitions et principes prévoit : « Lorsqu'une dépense n'est pas répertoriée dans la liste, le comptable doit demander, en se référant si possible à une dépense similaire répertoriée, les pièces justificatives qui lui permettent d'effectuer ses contrôles » ;
ATTENDU que le comptable soutient dans ses réponses des 17 octobre 2017 et 20 novembre 2017 susvisées que les décomptes individuels mentionnés au 2 de la rubrique 210224 étaient superfétatoires en l’espèce, dès lors que le nombre d’heures effectuées par chaque agent ainsi que leur taux d’indemnisation figuraient explicitement sur les bulletins de paie joints aux mandats ; qu’il ajoute par ailleurs qu’aucune délibération fixant la liste des emplois éligibles, telle que prévue au 1 de la même rubrique, ne pouvait être davantage exigée, puisque les dispositions du code du travail qui s’appliquent aux agents contractuels de droit privé instituent pour règle que toute heure effectuée au-delà de la durée légale hebdomadaire emporte automatiquement rémunération en heure supplémentaire ;
ATTENDU que l’ordonnateur n’a pas répondu au réquisitoire ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a considéré que le comptable avait apporté la preuve qu’il disposait avec les bulletins de paie des agents des éléments nécessaires au contrôle effectif de l’exacte liquidation des dépenses ; qu’après avoir rappelé que le réquisitoire ne s’était pas fondé sur le défaut de production d’une délibération fixant la liste des emplois éligibles, il a conclu que la responsabilité de M. A ne pouvait être engagée et qu’il y avait donc lieu de lever la charge ;
ATTENDU qu’il résulte des dispositions du point 5 du chapitre introductif de l’annexe I du code général des collectivités territoriales, rappelées par l’instruction codificatrice n° 07-024-M0 du 30 mars 2007, qu’en l’absence d’une dépense répertoriée dans la liste des pièces justificatives, le comptable doit se référer à une dépense similaire répertoriée ; que la rubrique 210224 de l’annexe I précitée « Indemnités horaires pour travaux supplémentaires (8) », dont la note (8) précise « Au sens de l’article 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale », prévoit les pièces justificatives suivantes à l’appui des paiements : « 1. Délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ; / 2. Décompte indiquant par agent et par taux d’indemnisation le nombre d’heures effectuées (10) » ; / 3. Le cas échéant, décision justifiant le dépassement du contingent mensuel autorisé. » ; que la note (10) à laquelle renvoie le 2 ci-dessus précise que « Cette pièce peut prendre la forme d’états automatisés, elle n'est pas exigée lorsque ses indications figurent dans l'état nominatif décompté individuel ou collectif visé au 1 de la sous-rubrique 21021 » ;
ATTENDU qu’il résulte de l’instruction que le comptable a réglé à 24 agents titulaires de contrats aidés employés par la commune de Beausoleil des heures supplémentaires rémunérées, par mandats collectifs mensuels établis tout au long de l’exercice 2015 ; que les contrats aidés sont des contrats à durée déterminée de droit privé régis par le code du travail ; que, si cette législation les place hors du champ d’application des règles relatives à la fonction publique territoriale et ne leur ouvre pas droit aux éléments de rémunération susceptibles d’être versés aux agents publics territoriaux, c’est sans préjudice toutefois de la majoration salariale qui s’applique à toute heure effectuée au-delà de la durée légale hebdomadaire en vertu des articles L. 3121-10 et L. 3121-22 du code du travail alors en vigueur ; qu’ainsi, les heures supplémentaires versées aux agents bénéficiant de contrats aidés ne constituent pas des indemnités horaires pour travaux supplémentaires au sens de l’article 88 précité de la loi du 26 janvier 1984, mais peuvent toutefois être regardées comme constituant une dépense similaire répertoriée à la rubrique 210224 de l’annexe I précitée, à laquelle le comptable devait utilement se référer pour exercer son contrôle ;
ATTENDU que le 2 de la rubrique 210224 précise que le « décompte indiquant par agent et par taux d’indemnisation le nombre d’heures effectuées » peut prendre la forme d’états automatisés et n'est pas exigé lorsque les indications figurent dans l'état nominatif décompté individuel ou collectif visé au 1 de la sous-rubrique 21021 ; que ladite sous-rubrique définit l’état nominatif comme celui faisant apparaître les éléments suivants : « -le grade, l'échelon, l'indice, l'indication du temps de travail, le taux horaire ; / -la période ouvrant droit à rémunération et le nombre d'heures effectives ; / -le traitement brut mensuel ; / -l'indemnité de résidence ; / -le supplément familial de traitement ; / -la NBI ; / -chaque prime ou indemnité de manière individualisée ; / -les heures supplémentaires ; / -les indemnités d'astreintes ou de permanences ; / -le montant des rémunérations soumis aux précomptes ; / -les montants de ces précomptes ; / -le traitement net mensuel ; / -la somme nette à payer. » ; qu’ainsi, les bulletins de paie individuels versés à l’appui des mandats collectifs visés par le réquisitoire, qui indiquent en l’espèce, pour chaque agent, le taux de rémunération et le nombre d’heures supplémentaires effectuées, tiennent lieu par eux-mêmes d’états nominatifs précis et probants ; que le comptable apparaît ainsi fondé à soutenir qu’il disposait, avec les bulletins de paie des agents, des pièces justificatives nécessaires et suffisantes pour exercer valablement son contrôle en matière de validité de la dette et en particulier de la correcte liquidation du montant de la dépense ;
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la question de l’éventuel défaut de production d’une délibération qui n’avait pas été retenu dans le réquisitoire pour caractériser la présomption de manquement, qu’il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. A au titre de la charge n° 2 ;
Par ces motifs :
DÉCIDE
Article 1er : En ce qui concerne la charge n° 1, M. A est constitué débiteur de la commune de Beausoleil au titre de l’exercice 2015 pour la somme de 1 470 € (mille quatre cent soixante-dix euros) augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 4 septembre 2017 ;
Les règles de contrôle sélectif des dépenses n’ont pas été respectées en l’espèce ;
Article 2 : Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. A au titre de la charge n° 2 ;
Article 3 : Il est sursis à décharge de M. A au titre de sa gestion pour
l’exercice 2015 dans l’attente de l’apurement du débet prononcé à l’article 1er du présent jugement ;
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur, le vingt-sept mars deux mille dix-huit.
Présents : M. Bernard Debruyne, président de section, présidant la séance, Mme Judith Ascher, première conseillère, et Mme Sidonie Réallon, conseillère.
La greffière adjointe,
Patricia GUZZETTA | Le président de la deuxième section
Bernard DEBRUYNE |
La République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de leur notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.