S3/2180265/SH
1ère section
Jugement n°2018-14 J
Audience publique du 12 avril 2018
Prononcé du 27 avril 2018
| COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION PLAINE COMMUNE (93)
Exercices 2010 à 2014
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République Française,
Au nom du peuple français,
La Chambre,
Vu le réquisitoire du 16 mars 2017, par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X… au titre de sa gestion des exercices 2011 à 2013 et de Mme Y…, au titre de sa gestion des exercices 2013 et 2014, comptables de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune, notifié aux comptables ainsi qu’à l’ordonnateur ; M. X… en a accusé réception le 6 avril 2017, l'ordonnateur ainsi que Mme Y… le 7 avril 2017 ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune, par M. X…, du 1er janvier 2010 au 30 juin 2013 ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la communauté d’agglomération de Villejuif, par Mme Y…, du 1er juillet 2013 au 31 décembre 2014 ;
Vu les justifications produites au soutien du compte en jugement ;
Vu l'article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
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Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l'article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances, rectificative pour 2011 ;
Vu le rapport de M. Jean-Marc Dunoyer de Segonzac, premier conseiller, magistrat chargé de l'instruction
Vu les conclusions du procureur financier ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendu lors de l’audience publique du 12 avril 2018 M. Jean-Marc Dunoyer de Segonzac, premier conseiller en son rapport, Mme Banderet-Rouet, procureure financière, en ses conclusions ;
Entendu en délibéré M. Patrick Prioleaud, réviseur, en ses observations ;
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes Île-de-France de la responsabilité encourue par les comptables à raison du non recouvrement de titres de recettes (présomptions de charge n° 1 à 6) ; que, par le même réquisitoire, la procureur financier a également saisi ladite chambre de la responsabilité encourue par Mme Y…, à raison du paiement du solde d’un marché de travaux sans en déduire les pénalités de retard dues par l'entreprise (présomption de charge n° 7) ;
Attendu qu'aux termes du I de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 de finances pour 1963 susvisée : « Outre la responsabilité attachée à leur qualité d'agent public, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, du paiement des dépenses, de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, désignées ci-après par le terme d'organismes publics, du maniement des fonds et des mouvements de comptes de disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. / Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique. / La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu'un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu'une recette n'a pas été recouvrée, qu'une dépense a été irrégulièrement payée ou que, par le fait du comptable public, l'organisme public a dû procéder à l'indemnisation d'un autre organisme public ou d'un tiers ou a dû rétribuer un commis d'office pour produire les comptes. [...] » ;
Sur le recouvrement des recettes :
Attendu que, selon l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 et l’article 18 du décret du 7 novembre 2012 susvisés, dans le poste comptable qu'il dirige, le comptable public est seul chargé, de la prise en charge des ordres de recouvrer qui lui sont remis par les ordonnateurs, du recouvrement des ordres de recouvrer et des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou tout autre titre exécutoire et de l'encaissement des droits au comptant et des recettes liées à l'exécution des ordres de recouvrer ; qu’aux termes de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : « L’action des comptables publics chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recette. Le délai de quatre ans mentionné à l’alinéa précédent est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription. » ;
En ce qui concerne les présomptions de charge n° 1 à 2, soulevées à l’encontre de M. X… au titre des exercices 2011 et 2012 :
Attendu qu’il est fait grief à M. X… de ne pas avoir recouvré les titres de recettes n° 1373, pris en charge par le comptable le 26 juillet 2007, émis à l’encontre de la ville d'Epinay-sur-Seine, personne publique, d'un montant de 111 425,00 €, selon l'état des restes à recouvrer du compte 44316 et n° 3232, d'un montant de 156 357,00 €, pris en charge le 11 décembre 2007, émis à l’encontre de la ville d'Epinay-sur-Seine, selon l'état des restes à recouvrer du compte 44312 (présomption de charge n°1), ainsi que du titre n° 5389, d'un montant de 49 300,00 €, pris en charge le 31 décembre 2008, émis à l’encontre la ville d'Epinay-sur-Seine, selon l'état des restes à recouvrer du compte 46726 (présomption de charge n°2) ;
Attendu que l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée dispose que : « La prescription est interrompue par : toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. [...] » ;
Mais attendu que M. X… produit à l'appui de sa réponse, les demandes de paiements adressées par lui-même à la ville d'Épinay sur Seine, une lettre reçue par la ville le 1er novembre 2009, suivie d'une seconde reçue par la ville le 10 août 2010, demandant le paiement des titres n° 1373, 3232 et 5389 ; que ces demandes de paiement ont interrompu la prescription de l'action en recouvrement du comptable, reportée par conséquent au 11 août 2014, date à laquelle M. X… avait quitté ses fonctions ; que, par suite, il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité du comptable à raison des présomptions de charge n° 1 à 2 soulevées à l’encontre de M. X… au titre des exercices 2011 et 2012 ;
En ce qui concerne la présomption de charge n° 3, soulevée à l’encontre de M. X… au titre de l’exercice 2011 :
Attendu qu’il est fait grief à M. X… de ne pas avoir recouvré les titres de recettes n° 3176 pour un montant de 2 030,87 €, pris en charge par le comptable le 25 octobre 2007, émis à l’encontre de M. Z… et n° 2195, d'un montant de 1 825,39 €, pris en charge le 31 décembre 2008, émis à l’encontre de M. A… ;
Attendu que, s’agissant du titre n° 2195, le comptable produit la preuve de son complet recouvrement ; qu’il n'y a plus lieu d'engager sa responsabilité ;
Attendu que, s’agissant du titre n° 3176 émis à l’encontre d’une personne privée, le comptable mentionne un commandement de payer qui aurait été notifié le 7 janvier 2008, interrompant la prescription de son action en recouvrement ; que, outre que la prescription n’aurait été repoussée qu’au 7 janvier 2012, le comptable n’apporte aucune preuve de l'exécution de ce commandement, sinon une copie d’écran ;
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Attendu que l'historique des diligences menées par le comptable public en vue du recouvrement d'une créance restant à recouvrer, mentionné sur une capture d'écran et imprimé, qui consiste en des données issues de l'application informatique Hélios, ne peut se voir reconnaître de valeur probante, dès lors qu'il ne constitue pas la démonstration de la réalisation effective, régulière, complète et opérante des diligences recensées ; qu’en l’espèce le comptable n’apporte pas la preuve de la réalisation des diligences retracées ;
Attendu que le comptable s’appuie en outre sur une délibération du conseil communautaire du 24 novembre 2009 pour soutenir qu’il ne pouvait pas procéder aux poursuites utiles ; que, toutefois, aux termes de son unique article, cette délibération « autorise, à compter du 15 décembre 2009, et à titre permanent le comptable assignataire à procéder à l'émission des commandements de payer et aux actes de poursuites subséquents pour le recouvrement de l'ensemble des titres de recettes émis par Plaine-Commune, à l'exception des trop-perçus et non retenus sur rémunération émis à l'encontre des personnels et anciens personnels de la communauté d'agglomération pour lesquels le comptable assignataire est uniquement autorisé à émettre des commandements de payer et doit solliciter l'avis de l'ordonnateur pour tout autre acte de poursuite. » ; que par suite, le comptable disposait bien pour les créances litigieuses, d'une autorisation permanente d’émettre des commandements de payer, sans avoir à solliciter l'avis de l'ordonnateur ; qu’il pouvait donc interrompre le délai de prescription en adressant une mise en demeure de payer aux créanciers privés ;
Attendu que, faute de diligences adéquates avérées interrompant la prescription de recouvrement du titre, celle-ci est intervenue le 26 octobre 2011, le titre en question ayant été pris en charge le 25 octobre 2007 ;
Attendu que par suite M. X…, comptable en fonctions, a manqué aux obligations mentionnée au I précité de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu que lorsque le juge des comptes estime que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement des recettes, faute d'avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l'organisme public concerné ; que lorsqu'il résulte de l’instruction, notamment des éléments produits par le comptable qu'à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l'insolvabilité de la personne qui en était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme imputable audit manquement ; que M. X… n’apportant aucun élément relatif à l’insolvabilité du débiteur, son manquement a causé un préjudice financier à la communauté d'agglomération de Plaine-Commune ;
Attendu qu’aux termes du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée : « Lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi il y a lieu de constituer M. X… débiteur de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune pour la somme de 2 030,87 € ;
Attendu qu’aux termes du VIII du même article : « Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 6 avril 2017, date de réception du réquisitoire par M. X… ;
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En ce qui concerne la présomption de charge n° 4, soulevée à l’encontre de M. X… au titre de l’exercices 2012 :
Attendu que la présomption de charge n° 4 porte sur le non recouvrement de plusieurs titres de recettes d'un montant total de 41 884,26 €, émis en 2008 ;
Attendu, en premier lieu, qu’il est fait grief à M. X… de ne pas avoir recouvré deux titres de recettes, n° 1678 pour un montant de 22 595,61 €, pris en charge par le comptable le 26 juin 2008, et n° 2551, d'un montant de 9 951 €, pris en charge le 10 septembre 2008, émis à l’encontre d’EDF ;
Mais attendu que le comptable a produit des pièces dans lesquelles les services d’EDF font clairement référence aux titres et aux créances qu’ils représentent ; que dans ces documents, EDF reconnaît la dette vis-à-vis de la communauté d’agglomération et explique que celle-ci est apurée sous la forme d’avoirs, au bénéfice de la communauté d’agglomération ; que ces dernières pièces valent reconnaissance de dette, et emportent donc interruption du délai de prescription du recouvrement des créances litigieuses ; que dans ces conditions il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de M. X…, comptable alors en fonctions, dans le recouvrement des titres n° 1678 et 2551 ;
Attendu, en deuxième lieu, qu’il est fait grief à M. X… de ne pas avoir recouvré le titre de recettes, n° 3260 pour un montant de 1400,31 €, pris en charge par le comptable le 15 octobre 2008, émis à l’encontre de la société « Espérance » ;
Attendu que le comptable indique que l'application informatique Hélios ne permet pas de rééditer les commandements de payer et que le débiteur a contesté la créance par deux courriers des 30 avril et 22 juin 2010 ; qu’en outre, la radiation de l'entreprise du registre du commerce le 2 avril 2013 ne lui aurait pas permis de poursuivre le recouvrement ;
Attendu que l'historique des diligences menées par le comptable public en vue du recouvrement d'une créance restant à recouvrer, mentionné sur une capture d'écran et imprimé, qui consiste en des données issues de l'application informatique Hélios, ne peut se voir reconnaître de valeur probante, dès lors qu'il ne constitue pas la démonstration de la réalisation effective, régulière, complète et opérante des diligences recensées ; qu’en l’espèce le comptable n’apporte pas la preuve de la réalisation des diligences retracées ;
Attendu que les courriers de la société débitrice ne font référence ni au titre en cause ni au montant de la créance ; qu’ils ne peuvent être rattachés de manière certaine au titre n° 3260 en cause et valoir reconnaissance de dette ;
Attendu qu’il ressort de la publication des annonces légales relatives à cette société, que celle-ci a cessé son activité le 8 septembre 2010, puis a été radiée du registre du commerce le 10 avril 2013, après avoir publié pour la dernière fois ses comptes (exercice clos le 31/12/2009) le 3 août 2011 ; que par l'effet de la prescription quadriennale de l'article L. 1617‑5 du CGCT et à défaut d'acte l’interrompant, dont l'existence serait attestée, ou de tout autre acte portant reconnaissance de dette, le recouvrement du titre n° 3260 s’est trouvé définitivement compromis le 16 octobre 2012, soit plusieurs mois avant la radiation de l'entreprise du registre du commerce ; que, de plus, la cessation d'activité d'une société n'entraine pas la disparition de la personne morale, tant que les opérations de liquidation n'ont pas été menées à leur terme, l'article 1844-8 du code civil stipulant que « La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci. » ; qu’il appartenait au comptable de se rapprocher du greffe du tribunal de commerce compétent afin de présenter la créance de l'établissement public au liquidateur ;
Attendu que, faute de diligences adéquates avérées interrompant la prescription de recouvrement du titre, celle-ci est intervenue le 16 octobre 2012, le titre en question ayant été pris en charge le 15 octobre 2008 ;
Attendu qu’il y a lieu de considérer que M. X… n’a pas accompli dans les délais appropriés toutes les diligences requises ; qu’ainsi, il a manqué aux obligations mentionnées au I précité de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 en ce qui concerne le recouvrement du titre n° 3260 ;
Attendu, en troisième lieu, qu’il est fait grief à M. X… de ne pas avoir recouvré le titre de recettes, n° 1491 pour un montant de 3 198 €, pris en charge par le comptable le 9 juin 2008, émis à l’encontre de la maison des artisans de Marseille (SARL LMAM) ;
Attendu que le comptable indique que cette entreprise a été radiée du registre du commerce le 25 février 2010, ce qui l’a empêché de poursuivre le recouvrement du titre litigieux ;
Attendu qu’il ressort de la publication des annonces légales relatives à cette société, que, par jugement publié au BODACC le 16 décembre 2012 a été ouverte, le 28 novembre 2012, une procédure de redressement judiciaire, la date de cessation des paiements ayant été fixée au jour de l'ouverture de la procédure, les déclarations de créances étant à déposer dans les deux mois de la publication du jugement ; que par un jugement du 17 mars 2014 a été prononcée la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ;
Attendu que le titre n° 1491 ayant été pris en charge par le comptable le 9 juin 2008, son recouvrement s'est trouvé définitivement compromis par l'effet de la prescription quadriennale le 10 juin 2012, faute de l’accomplissement des diligences adéquates, soit plusieurs mois avant l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ; qu’il appartenait au comptable de se rapprocher du greffe du tribunal de commerce compétent afin de présenter la créance de l'établissement public au liquidateur ;
Attendu que, faute de preuve de l’accomplissement d’une diligence interrompant la prescription, il y a lieu de considérer que M. X… n’a pas accompli dans les délais appropriés toutes les diligences requises ; qu’ainsi, il a manqué aux obligations mentionnées au I précité de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, en ce qui concerne le recouvrement du titre n° 1491 ;
Attendu, en quatrième lieu, qu’il est fait grief à M. X… de ne pas avoir recouvré les titres de recettes, n° 64 et 1060 pour des montants respectifs de 2184,60 € et de 1157,55 €, pris en charge par le comptable, respectivement, le 1er février 2012 et le 17 avril 2012, émis à l’encontre de la société Vidéo communication France (VCF) ;
Mais attendu que le comptable invoque au surplus la radiation de la société du débiteur du registre du commerce le 24 janvier 2008, soit avant la prise en charge des titres, le 1er février 2008 pour le titre n° 64 et le 17 avril 2008 pour le titre n° 1060 ; que la dissolution sans liquidation de la société par décision de l'associé unique a été en effet publiée au BODACC le 17 janvier 2008, que la décision de radiation de la société du registre du commerce société l’a été le 10 février 2008 ; qu’aux termes de l'article 1844-5 du code civil « En cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation. Les créanciers peuvent faire opposition à la dissolution dans le délai de trente jours à compter de la publication de celle-ci. » ; que ledit délai ayant expiré avant même la prise en charge du titre n° 1060, le comptable ne pouvait procéder aux diligences adéquates en vue de son recouvrement ; que pour ce qui est du titre n°64, il en est de même compte tenu du peu de temps écoulé entre sa prise en charge (1er février 2008) et la forclusion de l'opposition (16 février 2008) ; que, dans ces conditions, il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de M. X…, comptable alors en fonctions, dans le recouvrement des titres n° 64 et 1060 ;
Attendu, en cinquième lieu, qu’il est fait grief à M. X… de ne pas avoir recouvré le titre de recettes, n° 4810 et pour un montant de 2184,60 €, pris en charge par le comptable le 11 décembre 2012 émis à l’encontre d’une personne privée ; mais que cette dernière ayant soldé sa dette, il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de M. X… au titre du recouvrement du titre n° 4810 ;
Attendu qu’il résulte de ce qui précède qu’au titre de la charge n° 4, la responsabilité de M. X… est seulement engagée pour n’avoir pas recouvré le titre de recettes, n° 3260 pour un montant de 1400,31 € émis à l’encontre de la société « Espérance », et le titre de recettes, n° 1491 pour un montant de 3 198 € émis à l’encontre de la maison des artisans de Marseille (SARL LMAM) ;
Attendu que, s'agissant de la créance sur la société « Espérance », le comptable n'établit pas qu'à la date du manquement, le 15 octobre 2012, celle-ci était irrécouvrable en raison de l'insolvabilité de la société, cette insolvabilité ne pouvant, au mieux, être raisonnablement considérée comme acquise qu'à la date de sa radiation du registre du commerce en avril 2013 ; qu’il en va de même pour la créance sur l'entreprise « La Maison des artisans de Marseille », dont le recouvrement s'est trouvé définitivement compromis avant la date d'ouverture de la procédure collective, et pour laquelle rien n'indique que la société était insolvable à la date du manquement ; qu’ainsi, en application du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, il y a lieu de constituer M. X… débiteur de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune pour la somme de 4 598,31 € ; qu’en application du VIII du même article, ce débet portera intérêt à compter du 6 avril 2017 ;
En ce qui concerne la présomption de charge n° 5, soulevée à l’encontre de M. X… au titre de l’exercices 2013 :
Attendu qu’il est fait grief à M. X… de ne pas avoir recouvré le titre de recettes, n° 418 pour un montant de 1 222,50 €, pris en charge par le comptable le 4 mars 2009, émis à l’encontre de « B... » ;
Attendu que le comptable rappelle que les commandements de payer générés par l'application Hélios sont adressés directement aux débiteurs par les services informatiques de la direction générale ; que l’application Hélios confirme l'envoi de commandements les 5 juin 2009 et 18 février 2011 ; qu’il précise par ailleurs que le débiteur a changé d'adresse et que les recherches conduites n'ont pas permis de trouver sa nouvelle adresse ; que la disparition du débiteur ne lui permettait pas de poursuivre le recouvrement du titre et justifiait sa présentation en non-valeur ;
Attendu que la copie d’écran ne saurait pallier l’absence de la réalisation effective, régulière, complète et opérante des diligences recensées à l’écran ; qu’en outre le comptable n'apporte aucune pièce à l'appui de ses dires quant à l’impossibilité de retrouver le débiteur ; que, faute de diligences adéquates avérées interrompant la prescription de recouvrement du titre, celle-ci est intervenue le 5 mars 2013, le titre en question ayant été pris en charge le 4 mars 2009 ;
Attendu que, faute de preuve de l’accomplissement de diligences interrompant la prescription, M. X… ne peut être regardé comme ayant accompli dans les délais appropriés toutes les diligences requises ; qu’ainsi, il a manqué aux obligations mentionnées au I précité de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
6, cours des Roches – Noisiel – BP 187 – 77315 MARNE-LA-VALLEE CEDEX 2 – T + 33 1 64 80 88 88 – crcidf@idf.ccomptes.fr
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Attendu que M. X… n'apportant aucun élément relatif à l’insolvabilité du débiteur, son manquement doit être regardé comme ayant causé un préjudice financier à la communauté d'agglomération de Plaine-Commune ; qu’ainsi, en application du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, il y a lieu de constituer M. X… débiteur de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune pour la somme de 1 222,50 € ; qu’en application du VIII du même article, ce débet portera intérêt au taux légal à compter du 6 avril 2017 ;
En ce qui concerne la présomption de charge n° 6, soulevée à l’encontre de Mme Y… au titre de l’exercices 2013 :
Attendu qu’il est fait grief à Mme Y… de ne pas avoir recouvré le titre de recettes, n° 2629 pour un montant de 1 546,00 €, pris en charge par le comptable le 3 septembre 2009, émis à l’encontre de la société « TIZI TRANS Sté » ;
Attendu qu’il ressort de la publication des annonces légales relatives à cette société qu'une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte le 10 juin 2010, soit après la prise en charge du titre ; que le comptable devait, en vertu des dispositions combinées des articles L. 622 24, L. 622-26, L. 641-3, R. 622-24 et R. 641-25 du code de commerce, adresser la déclaration de cette créance au liquidateur dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement au BODACC ; qu’aucune pièce du dossier n’atteste de cette déclaration ; que par suite, en ne déclarant pas la créance dans le délai de deux mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure de liquidation judiciaire, le comptable a privé la communauté d'agglomération de la possibilité d'être admise dans la répartition de l'actif liquidé ;
Attendu toutefois qu’à la date à laquelle Mme Y… est entrée en fonction, le 1er juillet 2013, le recouvrement était déjà définitivement compromis ; qu’ainsi, il n’y a pas lieu de mettre en jeu sa responsabilité au titre de la charge n° 6 ;
Sur le paiement des dépenses : présomption de charge n° 7, soulevée à l’encontre de Mme Y… au titre de l’exercices 2014 :
Attendu qu’il est fait grief à Mme Y… d’avoir payé à trois entreprises Secobat, Sodelect et Chauvin, titulaires des lots n° 4 ,6, 8 et 9 du marché de travaux de création du bâtiment administratif du centre technique communautaire à Pierrefitte-sur-Seine, le solde de ces lots, par des mandats du 15 août 2014, sans déduire les pénalités de retard dues par l'entreprise ;
Attendu que la comptable soutient que « le retard dans l'exécution des travaux n'était pas du fait des entreprises […] mais de la collectivité qui aurait dû fournir une décision de prolongation des travaux » et produit un certificat administratif, daté du 30 mai 2017, confirmant la responsabilité de la collectivité dans le retard ; que « les pénalités n'étaient dès lors pas dues par les entreprises » ;
Attendu cependant que si les retards peuvent être imputables à des circonstances de force majeure ou à des causes extérieures à la volonté du cocontractant, cela n'emporte pas de conséquences sur l'appréciation de la responsabilité du comptable, lequel doit veiller à ce que lui soit produite la pièce, lui permettant de vérifier que l'autorité compétente s'est effectivement prononcée sur les retards constatés dans l'exécution du marché, et, ceci au moment du paiement ;
Attendu que le certificat administratif du 30 mai 2017 signé par le directeur des bâtiments et de la logistique, ne peut constituer la décision dont le comptable doit disposer au moment de la mise en paiement, d’autant moins que seule l’assemblée délibérante est compétente pour exonérer le cocontractant du paiement des pénalités de retard ;
Attendu qu’il résulte de ce qui précède que Mme Y… a manqué aux obligation mentionnée au I précité de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, et engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu qu’en ne déduisant pas les pénalités de retard, Mme Y… a payé des dépenses que la communauté d’agglomération ne devait pas ; qu’au surplus ces pénalités avaient notamment pour objet de compenser le dommage causé à l’organisme public par le retard dans la disposition du bâtiment ; qu’il s’ensuit que le manquement du comptable a causé un préjudice financier à la communauté d’agglomération ; que par conséquent, le manquement de Mme Y… a causé à la communauté d’agglomération un préjudice financier au sens du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée ; que les pénalités de retard non déduites, d’un montant total de 86 000 €, étant supérieures au montant des mandats de paiement des soldes des lots précités, respectivement, les mandats n° 13093 pour le lot n°4 d’un montant de 3 777,83 €, n° 13091 pour le lot n° 8 d’un montant de 3 887,00 €, n° 13087 et 13089 pour le lot n° 9 de 21 274,69 €, et de 5 794,91 €, il y a lieu de fixer le montant du débet au montant total des mandats litigieux, soit une somme de 34 734,43 € au titre de l'exercice 2014 ; qu’en application du VIII du même article, ce débet portera intérêt au taux légal à compter du 7 avril 2017 ;
Attendu qu'aux termes du deuxième alinéa du IX du même article : « Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. Hormis le cas de décès du comptable ou de respect par celui-ci, sous l'appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée au comptable public dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu par le juge des comptes, le ministre chargé du budget étant dans l'obligation de laisser à la charge du comptable une somme au moins égale au double de la somme mentionnée au deuxième alinéa dudit VI » ; que, selon le l'article 1 er du décret du 10 décembre 2012 : « La somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré. » ;
Attendu qu’il résulte du plan de contrôle hiérarchisé des dépenses appliqué en 2014, que les marchés de travaux à procédure adaptée comportant une avance et/ou un acompte et/ou une clause de révision de prix et/ou de la sous-traitance, devaient être contrôlés exhaustivement ; que les marchés de travaux du centre communautaire à Pierrefitte-sur-Seine ont été passés selon une procédure adaptée ; que le CCAP applicable à tous les lots comporte une clause de révision des prix ; que par suite le paiement des soldes de ces marchés devait faire l'objet d'un contrôle exhaustif de la part du comptable ; que ledit plan de contrôle n’ont pas été respecté ; que dès lors, en cas de remise gracieuse du débet prononcé, le ministre chargé du budget devra laisser à la charge de Mme Y… une somme au moins égale à trois millièmes du montant du cautionnement du poste comptable pour l'exercice 2014, soit 729 € ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : au titre de l’exercice 2011, M. X… est constitué débiteur de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune pour la somme de 2 030,87 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 6 avril 2017 (charge n° 3).
Article 2 : au titre de l’exercice 2012, M. X… est constitué débiteur de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune pour la somme de 4 598,31 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 6 avril 2017 (charge n° 4).
Article 3 : au titre de l’exercice 2013, M. X… est constitué débiteur de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune pour la somme de 1 222,50 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 6 avril 2017 (charge n°5).
Article 4 : Il est sursis à la décharge de M. X… pour sa gestion durant les exercices 2011, 2012 et 2013 jusqu'à constatation de l'apurement des débets prononcés ci-dessus.
Article 5 : Mme Y… est déchargée de sa gestion pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2013.
Article 6 : au titre de l’exercice 2014, Mme Y… est constituée débitrice de la communauté d'agglomération de Plaine-Commune pour la somme de 34 734,43 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 7 avril 2017 (charge n° 7). En cas de remise gracieuse, le ministre chargé du budget devra laisser à sa charge une somme au moins égale à 729 €.
Article 7 : Il est sursis à la décharge de Mme Y… pour sa gestion durant l'exercice 2014 jusqu'à constatation de l'apurement du débet prononcé ci-dessus.
Fait et jugé par MM. Alain Stéphan, président de séance ; Patrick Prioleaud, président de section et Hervé Beaudin, premier conseiller.
En présence de M. Reynald Husson, greffier de séance.
Reynald Husson |
Alain Stéphan |
En conséquence, la République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre les dispositions définitives dudit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 249-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
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