rapport n° 2017-0357

Syndicat intercommunal d’assainissement de La Pray  
(Rhône)

jugement n° 2018-0003

Trésorerie DE CHAZAY D’AZERGUES

 

audience publique du 23/01/2018

code n° 069 050 934

délibéré du 23/01/2018

exercice 2011

prononcÉ le : 19 fevrier 2018

 

 

République française

 

Au nom du peuple français

 

La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-ALPES
(Statuant en 5èmesection)

 

Vu le réquisitoire n° 34-GP/2017 à fin d’instruction de charge pris le 26 juin 2017 par le procureur financier près la chambre régionale des comptes Auvergne-RhôneAlpes ;

Vu le courrier de notification du réquisitoire en date du 28 août 2017 adressé à M. Jean-François X..., comptable, et à M. Pierre Y..., président du syndicat intercommunal d’assainissement de La Pray, dont ils ont accusé réception les 29 et 31 août 2017 ;

VU le code général des collectivités territoriales ;

VU le code des juridictions financières ;

VU l’article 60 de la loi de finances pour 1963 n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée, notamment par l’article 90 de la loi de finances rectificative n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;

VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du § VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifiée ;

VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique ;

VU les lois et règlements relatifs à la comptabilité des communes et des établissements publics locaux ;

VU les arrêtés de la présidente de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes relatifs aux attributions, à la composition et aux compétences des sections et des formations de délibéré ;

VU l’arrêté de la présidente de la chambre régionale des comptes portant délégation de signature à M. Alain LAIOLO, président de la 5ème section ;

VU la décision du président de la 5ème section, agissant par délégation de la présidente de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, en date du 10 août 2017, désignant M. Nicolas BILLEBAUD, conseiller, comme rapporteur pour instruire la charge identifiée dans le réquisitoire susvisé ;

VU les demandes d’informations adressées le 4 septembre 2017 à M. Jean-François X... et le 10 novembre 2017 à M. Pierre Y... ;

VU les observations écrites de M. Jean-François X..., enregistrées au greffe le 28 septembre 2017 ;

VU les observations écrites de M. Pierre Y..., enregistrées au greffe le 24 novembre 2017 ;

VU le compte produit en qualité de comptable du syndicat intercommunal d’assainissement de La Pray par M. Jean-François X... pour l’exercice 2011 ;

VU le rapport n° 2017-0357 de M. Nicolas BILLEBAUD, conseiller, magistrat instructeur, déposé au greffe de la chambre le 27 novembre 2017 ;

VU les lettres du 28 novembre 2017 informant le comptable concerné et l’ordonnateur de la clôture de l’instruction ;

VU les lettres du 3 janvier 2018 informant le comptable concerné et l’ordonnateur de la date fixée pour l’audience publique et les accusés de réception délivrés le 12 janvier 2018 par M. Jean-François X... et le 5 janvier 2018 par M. Pierre Y... ;

Vu les conclusions n° 17-357 du procureur financier en date du 13 décembre 2017 ;

Vu le courrier adressé par M. Jean-François X... le 13 décembre 2017, enregistré au greffe de la chambre le 14 décembre 2017 ;

Entendu en audience publique M. Nicolas BILLEBAUD, conseiller, en son rapport ;

Entendu en audience publique M. Denis LARRIBAU, procureur financier, en ses conclusions ;

Entendu en audience publique M. Pierre Y..., président du syndicat intercommunal d’assainissement de La Pray ;

En l’absence du comptable concerné dûment informé de la tenue de l’audience ;

Après avoir délibéré hors la présence du public, du rapporteur et du procureur financier ;

Après avoir entendu en délibéré, M. Charles THEROND, conseiller, réviseur en ses observations ;

 

 

 

En ce qui concerne la présomption de charge unique relative à l’absence de diligences adéquates, complètes et rapides afin de permettre le recouvrement d’un titre d’un montant de 6 000 €

Sur les réquisitions du ministère public,

Attendu que par le réquisitoire n° 34-GP/2017 du 26 juin 2017, le procureur financier près la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a saisi la juridiction sur le fondement du § III de l’article L. 242-1 du code des juridictions financières, devenu depuis l’article L. 242-4 du même code, à fin d’ouverture d’une instance à l’encontre de M. Jean-François X... au titre de sa gestion comptable du syndicat intercommunal d’assainissement de La Pray ;

Attendu quen son réquisitoire, le procureur financier relève que le comptable mis en cause n’aurait pas accompli les diligences adéquates, complètes et rapides afin de recouvrer un titre de recettes détenu par le syndicat intercommunal d’assainissement de La Pray pour un montant de 6 000 ;

Attendu que le procureur financier conclut de ce qui précède que M. Jean-François X... a pu engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire par l’insuffisance des diligences exercées en vue du recouvrement du titre ; qu’il se trouverait ainsi dans le cas prévu par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, et qu’il y a lieu en conséquence d’ouvrir l’instance prévue au § III de l’article L. 242-1 du code des juridictions financières, devenu depuis l’article L. 242-4 du même code, aux fins de déterminer leur responsabilité encourue ;

Sur le titre retenu par le réquisitoire,  

Attendu que l’état des restes à recouvrer joint au compte de gestion de l’exercice 2015 fait apparaître, au compte 4116 « Clients – contentieux », les éléments suivants :

 

Exercice

N° de pièce

Date de prise en charge

Débiteur

Montant

Diligence exercée

Diligence exercée

Diligence exercée

2010

T-35

29/03/2010

SARL EST’IM

M. Z... Frédéric

6 000,00 €

Cdt avec frais 18/06/2010

OTD bancaire négative 22/10/2012

Liquidation judiciaire 22/10/2012

Sur les observations du comptable mis en cause,

Attendu que dans ses observations enregistrées au greffe de la juridiction le 28 septembre 2017, M. Jean-François X... fait état d’incohérences de dates apparaissant dans le réquisitoire, des diligences apparaissant antérieures à la prise en charge du titre ; qu’il a réalisé une opposition à tiers détenteur, transmise à la banque du débiteur, qui en a accusé réception le 6 octobre 2010 ; que le caractère inopérant de cette action n’en altère pas la validité pour interrompre la prescription de son action en recouvrement dès lors qu’elle est intervenue à une date antérieure à celle de la liquidation judiciaire de la société débitrice, prononcée le 3 mai 2011 ; que l’absence de réception par le débiteur de l’opposition à tiers détenteur ne peut valablement lui être opposée ;

 

Sur les observations de l’ordonnateur,

Attendu que dans ses observations enregistrées au greffe le 24 novembre 2017, M. Pierre Y... indique que le syndicat a admis la créance litigieuse en non-valeur par délibération du 8 novembre 2016 ;

 

Sur la responsabilité du comptable,

Attendu qu’aux termes de l’article 60-I modifié de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes,…… de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu’ils dirigent » ; que « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, …..dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique » ; que « leur responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu’une recette n’a pas été recouvrée» ;

Attendu qu’il résulte de l’article 11 du décret n° 62-1587 du 29 mars 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, dans sa rédaction applicable à la date des faits, que les comptables publics sont seuls chargés de la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs et de la conservation des pièces justificatives des opérations et des documents de comptabilité ; que l’article 12 du même texte dispose qu’en matière de recettes, les comptables sont tenus d’exercer le contrôle, dans la limite des éléments dont ils disposent, de la mise en recouvrement des créances de l’organisme public et de la régularité des réductions et des annulations des ordres de recettes ; qu’en application des dispositions de l’article 19 de ce décret, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des opérations dont ils sont chargés aux termes de l’article 11, ainsi que de l’exercice régulier des contrôles prévus aux articles 12 et 13, dans les conditions fixées par les lois de finances ;

Attendu que le titre litigieux a été pris en charge par le comptable le 29 mars 2010 ; que le délai de prescription quadriennale de la créance courrait à compter de cette date et expirait donc, en l’absence d’acte interruptif, le 29 mars 2014 ;

Attendu que dans l’intervalle, la société débitrice a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 3 mai 2011, publié au BODACC le 19 mai 2011 ; que la déclaration des créances doit intervenir, en application de l'article R. 622-24 du code de commerce, dans les deux mois suivant la publication, à peine de forclusion ; qu’en l’espèce, le comptable devait déclarer la créance litigieuse avant le 19 juillet 2011, ce qu’il n’a pas fait ; qu’après l’expiration du délai, le recouvrement du titre s’est donc trouvé définitivement impossible ; qu’en l’absence d’inscription de la créance dans la procédure collective, la circonstance que le comptable ait réalisé une opposition à tiers détenteur le 22 octobre 2012 est sans effet sur la préservation des chances du syndicat de recouvrer la créance litigieuse ;

Attendu qu’il résulte de ce qui précède, qu’en ne déclarant pas la créance dans le cadre de la procédure collective, le comptable n’a pas réalisé les diligences adéquates, rapides et complètes de nature à préserver le cours de la prescription quadriennale prévue à l’article L.  1617-5 précité du code général des collectivités territoriales ; qu’en conséquence
M. Jean-François X... a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire à hauteur de 6 000 € sur le fondement de l’article 60 de la loi précitée du 26 février 1963 ;

 

Sur le préjudice financier pour le syndicat intercommunal d’assainissement de La Pray,

Attendu que l’article 60-VI de la loi du 23 février 1963, modifié par la loi n° 20111978 du 28 décembre 2011, dispose que, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret en Conseil d'État en fonction du niveau des garanties mentionnées au II./ Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné ou que, par le fait du comptable public, l'organisme public a dû procéder à l'indemnisation d'un autre organisme public ou d'un tiers ou a dû rétribuer un commis d'office pour produire les comptes, le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;

Attendu le non-recouvrement de la créance, qui a appauvri le syndicat, est constitutif d’un préjudice financier ; que toutefois, le tribunal de commerce de Lyon a clôturé la procédure de liquidation judiciaire par jugement du 25 avril 2012, pour insuffisance d’actif ; que dans ces circonstances, il n’apparaît pas que les débiteurs à titre chirographaire, dont aurait fait partie le syndicat, auraient pu être désintéressés ; que dès lors, le fait que le comptable ne se soit pas conformé à ses obligations de préservation de la créance par une déclaration dans les délais requis au mandataire liquidateur est en l’espèce indifférent au constat d’un préjudice financier ; que le manquement relevé ne peut donc être considéré comme la cause du préjudice financier subi par le syndicat intercommunal d’assainissement de La Pray ;

Sur la somme mise à la charge du comptable, 

Attendu que le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du § VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dispose dans son article 1 que « la somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré » ; que le cautionnement fixé pour la trésorerie du Bois d’Oingt en 2011 était de 109 000 € ; que le montant maximal de la somme dont la chambre peut obliger le comptable à s’acquitter ne peut dès lors excéder 163,50 € pour l’exercice 2011 ;

Attendu que le comptable ayant omis de déclarer la créance litigieuse dans la procédure collective ouverte en vue de la liquidation de l’entreprise débitrice, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en laissant à la charge de M. X... une somme non rémissible de 163 € ;

 

PAR CES MOTIFS

DECIDE

Article 1er :

Il est laissé à la charge de M. Jean-François X... une somme non rémissible de 163 € sur l’exercice 2011.

 

Article 2 :

La décharge de M. Jean-François X... pour sa gestion de l’exercice 2011 est subordonnée au paiement de la somme non rémissible mise à sa charge.

 

 

 

Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, cinquième section, le vingt-trois janvier deux mille dix-huit.

Présents : M. Alain LAIOLO, président de section, président de séance ;

                       M. Michel BON, premier conseiller,

M. Antoine LANG, premier conseiller,

Mme Jennifer EL-BAZ, conseillère,

M. Charles THEROND, conseiller.

 

 

La greffière

Le président de séance

 

 

 

 

 

 

 

 

Brigitte DESVIGNES

Alain LAIOLO

 

 

 

 

La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

Voies et délais de recours :

 

En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.

 

 

 

1/6 – jugement  2018-0003