Formation plénière  
Centre hospitalier de Bayeux  
département du Calvados)  
14 005 999  
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Centre des finances publiques de  
Bayeux-Monceaux-en-Bessin  
Exercice 2015  
Jugement n° 2018-13  
Audience publique du 15 mars 2018  
Prononcé du jugement le 6 juin 2018  
JUGEMENT  
REPUBLIQUE FRANÇAISE  
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS  
LA CHAMBRE,  
Vu le réquisitoire n° 2017-030 du 28 novembre 2017 du procureur financier près la chambre régionale  
des comptes Normandie, enregistré au greffe le même jour ;  
Vu les comptes rendus en qualité de comptable du centre hospitalier de Bayeux pour l’exercice 2015,  
er  
par M. Didier X... du 1 janvier au 31 décembre 2015 ;  
Vu les justifications produites au soutien des comptes ou recueillies au cours de l’instruction ;  
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifié ;  
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable  
publique ;  
Vu le code de la santé publique ;  
Vu l’arrêté du premier président de la Cour des comptes du 15 novembre 2013 relatif Ã  l’examen des  
comptes et de la gestion des établissements publics de santé ;  
Vu le code des juridictions financières ;  
Vu le rapport n° 2018-0011 de Mme Anne Robert, premier conseiller, magistrat chargé de l’instruction ;  
Vu les conclusions n° 2018-0011 du procureur financier du 6 mars 2018 ;  
Entendu, lors de l’audience publique du 15 mars 2018, Mme Robert en son rapport, M. Stéphane  
Guillet, procureur financier, en les conclusions du ministère public, M. X..., comptable, la parole lui  
ayant été donnée en dernier ;  
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ORDONNE CE QUI SUIT  
Charge unique :  
Attendu que par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes  
Normandie de la responsabilité encourue par M. X..., pour avoir, au cours de l’exercice 2015 et sur  
les mois de novembre et décembre, payé à des aides-soignants titulaires du centre hospitalier de  
Bayeux, dans les conditions spécifiées en annexe, une somme totale de 6 196,94 euros  
correspondant à une prime spéciale de sujétion (5 725,60 euros) et à une prime forfaitaire  
(
471,34 euros) et ceci en l’absence d’une pièce justificative exigible ;  
Sur le manquement présumé du comptable  
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Attendu qu’aux termes des dispositions du 2 alinéa du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 :  
les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils  
«
sont tenus d'assurer en matière […] de dépenses […] dans les conditions prévues par le règlement  
général sur la comptabilité publique » ; qu’au titre de l’article 19 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre  
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012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, le comptable public est tenu d'exercer le  
contrôle « 2° s'agissant des ordres de payer : […] d) de la validité de la dette dans les conditions  
prévues à l'article 20 » ; que ce dernier dispose que « le contrôle des comptables publics sur la validité  
de la dette porte sur : […] 3° l'intervention des contrôles préalables prescrits par la réglementation  
[
…] ; 5° la production des pièces justificatives […] » ; qu’enfin, l’article D. 1617-19 du code général  
des collectivités territoriales dispose qu’« avant de procéder au payement d’une dépense ne faisant  
pas l’objet d’un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales […] ne doivent  
exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à  
l’annexe I du présent code et établie conformément à celle-ci […] » ; que ces dispositions s’appliquent  
aux établissements publics de santé, comme précisé au point « 1. Collectivités Â» des « définitions et  
principes Â» de l’annexe I du code général des collectivités territoriales et à l’article D. 6145-54-3 du  
code de la santé publique ;  
Attendu qu’il appartient ainsi au comptable d'apprécier si les pièces fournies présentent un caractère  
suffisant pour justifier la dépense engagée ; que, pour établir ce caractère suffisant, il lui incombe de  
vérifier, en premier lieu, si l'ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature comptable  
applicable lui ont été fournies et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d'une part, complètes et  
précises, d'autre part, cohérentes au regard de la catégorie de la dépense définie dans la  
nomenclature applicable et de la nature et de l'objet de la dépense telle qu'elle a été ordonnancée ;  
Attendu qu’à cet égard, en application de l’annexe I de l’article D. 1617-19 susvisé, le comptable est  
notamment tenu d’exiger, s’agissant des primes et indemnités, visées au 2 du c de la rubrique  
n° 220223 Â« Primes et indemnités », une « décision individuelle d’attribution prise par le directeur  
[
…] ».  
Attendu qu’en l’espèce, et comme cela est d’ailleurs reconnu tant par le comptable que par  
l’ordonnateur, il ne résulte pas de l’instruction qu’une décision individuelle d’attribution prise par le  
directeur ait été en possession du comptable ;  
Attendu que tant le comptable que l’ordonnateur soutiennent que lesdites primes sont statutairement  
prévues par la réglementation ; qu’ils en déduisent qu’une décision individuelle n’était donc pas  
nécessaire ;  
Attendu que l’article 1 de l’arrêté du 23 avril 1975 relatif à l’attribution d’une prime spéciale de sujétion  
et d’une prime forfaitaire aux aides-soignants prévoit Â« qu’une prime spéciale de sujétion égale Ã  10  
p. 100 de leur traitement budgétaire brut et une prime forfaitaire mensuelle de 100 F peuvent être  
attribuées aux aides-soignants des établissements relevant du livre IX du code de la santé publique » ;  
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Attendu qu’ainsi le décret susvisé, sans conférer de droit particulier, ouvre simplement la possibilité  
pour ces agents de percevoir lesdites primes sous réserve d’une décision individuelle attributive ;  
Attendu que l’omission de cette obligation dans les fiches élaborées par le pôle national de soutien au  
réseau comptable (PNSR) ne saurait exempter le comptable d’exiger cette pièce prévue par l’article  
D. 1617-19 susvisé ; qu’il en va de même de la circonstance, invoquée par l’ordonnateur, que  
l’établissement recourait aux prestations d’un groupement d’intérêt public pour la production de  
fichiers de paye ;  
Attendu dès lors que M. X... a engagé sa responsabilité en s’abstenant de suspendre le payement  
dans l’attente de la production des décisions individuelles attendues ;  
Sur l’existence d’un préjudice financier  
Attendu que le VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée prévoit que « lorsque le  
manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n’a pas causé de préjudice financier Ã   
l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée,  
pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce […] Lorsque le manquement  
du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public  
concerné […] le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la  
somme correspondante » ;  
Attendu que le payement d’une somme non due par un établissement public cause Ã  ce dernier un  
préjudice financier ;  
Attendu que le comptable comme l’ordonnateur considèrent que la prime spéciale de sujétion et la  
prime forfaitaire sont partie intégrante de la rémunération de aides-soignants ; qu’ainsi les sommes  
versées au titre de novembre et décembre 2015 étaient dues ;  
Attendu cependant que l’article 1 de l’arrêté du 23 avril 1975 susvisé ne confère aucun droit aux  
bénéficiaires potentiels en l’absence de décision individuelle attributive ; qu’ainsi le versement d’une  
prime spéciale de sujétion ou d’une prime forfaitaire en l’absence de ladite décision ne repose sur  
aucun fondement juridique et constitue une dépense indue ;  
Attendu dès lors que les payements effectués par M. X... doivent être regardés comme ayant causé  
un préjudice à l’établissement au sens des dispositions précitées ;  
Sur le débet  
Attendu qu’aux termes du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, le comptable doit être constitué  
débiteur des sommes irrégulièrement payées lorsque son manquement a causé un préjudice financier  
à la personne publique ; qu’il y a en conséquence lieu de constituer M. X... débiteur, au titre de  
l’exercice 2015, d’une somme de 6 196,94 euros ;  
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, « les débets portent intérêt  
au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire  
des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date doit être fixée au 4 décembre 2017 ;  
Sur le respect des règles de contrôle sélectif de la dépense  
Attendu que l’article 60 de la loi du 23 février 1963 prévoit qu’aucune remise gracieuse totale ne peut  
être accordée au comptable si celui-ci ne s’est pas conformé aux règles du contrôle sélectif des  
dépenses ;  
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Attendu qu’un plan de contrôle au titre de l’exercice 2015 a été produit par M. X... ; que ce plan apparaît  
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conforme aux dispositions des articles 3 et 4 de l’arrêté du 25 juillet 2013 portant application du 1  
alinéa de l’article 42 du décret du 7 novembre 2012 susvisé ;  
Attendu que ledit plan ne comportait aucune disposition particulière relative à un contrôle sélectif des  
payements des primes spéciales de sujétion et des primes forfaitaires ;  
Attendu que les catégories de dépenses non recensées dans un plan de contrôle sélectif restent  
soumises à l’ensemble des contrôles prévus par les articles 19 et 20 du décret du 7 novembre 2012  
susvisé ; qu’il appartenait en conséquence au comptable de procéder au contrôle exhaustif des  
dépenses en cause ;  
Attendu que dans ces conditions, M. X... ne pourra ne pourra se voir accorder une remise gracieuse  
totale du débet ;  
PAR CES MOTIFS,  
Article 1 : M. X... est constitué débiteur du centre hospitalier de Bayeux, de la somme de six mille  
cent quatre-vingt-seize euros quatre-vingt-quatorze centimes (6 196,94 €) au titre de l’exercice 2015,  
à raison de payements de primes spéciales de sujétion et de primes forfaitaires ; cette somme est  
augmentée des intérêts de droit à compter du 4 décembre 2017 ;  
Article 2 : M. X... ne pourra recevoir remise totale du débet précité ;  
Article 3 : M. Didier X... ne pourra être déchargé de sa gestion au titre de l’exercice 2015 qu’après  
apurement du débet.  
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes Normandie par M. Christian Michaut, président,  
M. Hubert La Marle, président de section, M. Marc Beauchemin, président de section-réviseur,  
M. Philippe Boëton et Mme Estelle Fontaine, premiers conseillers.  
La greffière,  
Le président,  
Véronique LEFAIVRE  
Christian MICHAUT  
Collationné, certifié conforme à la minute étant au Greffe  
de la Chambre et délivré par moi Secrétaire Général  
Christian QUILLE  
La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit  
jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux  
de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter  
main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.  
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CONDITIONS D'APPEL :  
Code des juridictions financières – article R. 242-19 et suivants : « Les jugements rendus par les  
chambres régionales des comptes peuvent être attaqués dans leurs dispositions définitives par la  
voie de l'appel devant la Cour des comptes Â» (…) – article R. 242-23 Â« L’appel doit être formé dans  
le délai de deux mois à compter de la notification du jugement. »  
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