PRÉSENTATION
À plusieurs reprises ces dernières années, la Cour a examiné les principales opérations immobilières conduites, à Paris et en région parisienne, par le ministère des affaires étrangères. Par trois fois, elle a souligné dans son rapport public annuel, d’abord en 20051 puis en 20082, les sérieuses défaillances de l’exercice de la fonction immobilière au sein de cette administration.
Dans ce contexte, la Cour a souhaité dresser le bilan de deux des principaux investissements lancés durant la dernière décennie : d’un côté, le centre des archives diplomatiques de La Courneuve et de l’autre, le siège des services centraux du ministère, rue de la Convention à Paris. À cette occasion, elle s’est également intéressée à deux projets désormais engagés : d’une part, la réhabilitation de l’aile des archives du bâtiment du quai d’Orsay et d’autre part, le déménagement du service de la valise diplomatique sur le site de La Courneuve.
Malgré un indéniable effort de rationalisation (I), ce contrôle de suivi de l’action du ministère des affaires étrangères en matière immobilière a confirmé la persistance des insuffisances déjà constatées, non seulement dans la programmation des travaux et leur financement (II), mais aussi dans l’exercice de la fonction de maître d’ouvrage (III). Outre les conséquences de ces dysfonctionnements pour les finances publiques, l’enquête a, une nouvelle fois, montré que le ministère n’a pas su se donner les moyens nécessaires pour éviter de telles dérives.
Adopté en 2006, le premier schéma pluriannuel de stratégie immobilière du ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI) s’est fixé comme principal objectif de rassembler l’ensemble des services centraux parisiens sur les trois sites du quai d’Orsay, de la rue de la Convention et de La Courneuve. Huit ans plus tard, le MAEDI est loin d’avoir satisfait cette ambition. Celle-ci ne pourra se réaliser sans combler les insuffisances de financement actuellement constatées.
Dans son insertion au rapport public de 2008 consacrée aux « opérations immobilières Kléber / Convention à Paris », la Cour rappelait que la nouvelle politique immobilière de l’État avait pour objectif « d’aboutir à un parc moins onéreux et mieux adapté au service public ».
Dans cette perspective, le schéma pluriannuel de stratégie immobilière du ministère a permis, entre 2007 et 2014, de réduire le nombre des implantations du MAEDI en région parisienne de neuf à cinq3 et la surface utile nette occupée par ses services de 39 %. En outre, cet effort s’est traduit par une baisse des coûts immobiliers proportionnelle à celles des surfaces, les dépenses ayant diminué de plus de 34 % sur la même période.
Par ailleurs, grâce à la densification de ses différents sites, le ministère a atteint sur l’ensemble de ses sites un ratio de surface utile nette par poste de travail de 13,25 m², meilleur que celui de la moyenne des administrations françaises (15,75 m²). Sur le site de la rue de la Convention, le ratio est même de 11,63 m², inférieur à l’objectif de 12 m² par agent fixé par France Domaine.
Ces avancées sont cohérentes avec l’un des objectifs de la politique immobilière de l’État qui vise à la diminution du coût de la fonction immobilière en allouant aux services des surfaces rationalisées et en cédant les surfaces excédentaires.
Néanmoins, le schéma immobilier du MAEDI devrait, à l’avenir, prendre également en compte les perspectives d’évolution prévisible des effectifs de ses services centraux, de son organisation administrative, de son activité et de ses métiers, afin de prévoir ses besoins immobiliers.
Malgré ces résultats positifs, le schéma immobilier n’a pas encore permis, comme prévu, un regroupement des services parisiens du MAEDI sur trois sites. Ce résultat ne pourra être atteint qu’au terme de deux autres opérations.
La première est celle de l’installation du service de la valise diplomatique sur le site de La Courneuve, qui permettra de libérer les locaux aujourd’hui loués à Châtillon.
La deuxième opération est celle des travaux à venir dans le bâtiment du quai d’Orsay, dont la première tranche est la rénovation de l’aile dite des archives. Elle devrait permettre de créer les postes de travail nécessaires à l’installation des personnels encore hébergés sur le site du boulevard des Invalides.
Mais, à ce jour, le ministère ne dispose pas des crédits nécessaires pour financer la seconde tranche des travaux du quai d’Orsay, estimée à 100 M€. Il espérait percevoir une indemnisation de 69 M€ après le transfert, en 2009, d’un immeuble situé boulevard Saint-Germain au ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE). Or ce schéma ne s’est pas réalisé, le MEDDE ayant été privé des produits de cession qu’il attendait pour le site de Ségur-Fontenoy4.
Faute de financement et dans l’état actuel du dossier, le MAEDI ne sera pas en capacité de mener à terme son schéma pluriannuel de stratégie immobilière.
Lorsqu’elle a examiné « les opérations immobilières du ministère des affaires étrangères », dans le rapport public de 2005, la Cour avait dénoncé « une programmation d’ensemble irréaliste » et « une sous-estimation quasiment systématique du coût des opérations ».
Ces carences n’ont toujours pas disparu, comme le montrent les différentes opérations contrôlées. Elles ont mis en évidence un manque de réalisme de certaines projections, temporelles ou financières, du MAEDI.
Par ailleurs, dans ce même document, la Cour avait insisté sur le fait que « toutes possibilités doivent être systématiquement envisagées et systématiquement évaluées afin que les décisions qui seront prises (…) correspondent le mieux possible à des besoins exactement appréhendés ».
Or plusieurs décisions récentes ont montré l’inverse.
Le manque de réalisme s’est d’abord manifesté dans la planification temporelle de différents projets.
Le schéma immobilier prévoyait en 2006 une mise en œuvre « à l’horizon 2010 ». Mais, à ce jour, l’administration du ministère est encore implantée dans cinq lieux différents en région parisienne.
L’opération de rénovation de l’aile des archives du bâtiment du quai d’Orsay a connu bien des vicissitudes. Alors que ces locaux ont été libérés dans le courant de l’année 2009, à l’occasion du déménagement des archives diplomatiques vers le nouveau site de La Courneuve, les travaux de réhabilitation n’ont toujours pas commencé. Ils ont, non seulement été reportés, en raison d’une absence de financement (cf. supra), mais ils ont également subi des retards. Alors qu’il était prévu, fin 2013, que les travaux démarrent dans le courant de l’année 2014, le calendrier prévisionnel ne laisse plus guère entrevoir, de façon réaliste, un commencement du chantier qu’au début de l’année 2016 et une livraison au mieux en 2018.
Le coût de l’inoccupation de ces locaux, d’une surface de 2 200 m², au cours des cinq dernières années, a été évalué à plus de 6 M€ de loyers budgétaires. Au total, cet espace sera resté inoccupé pendant neuf ans.
Le manque de réalisme s’est aussi manifesté dans les projections financières de plusieurs projets immobiliers.
Pour prendre possession de l’ancien siège de l’Imprimerie nationale, rue de la Convention, le MAEDI a, entre le 18 juin 2007 et le 31 mars 2009, dépensé près de 440 M€, correspondant au prix du bâtiment ainsi qu’aux loyers versés pour le maintien de ses services centraux dans deux immeubles avenue Kléber et rue Monsieur, à Paris, vendus pour financer cette opération.
La somme totale a dépassé de plus de 47 M€ les estimations du ministère qui, au printemps 2008, évaluait les dépenses à environ 392 M€.
Il en est allé de même pour les travaux d’aménagement engagés dans l’immeuble de la rue de la Convention au mois de juin 2008, les locaux ayant été livrés à l’état de « plateaux libres ». Au cours de l’été 2007, le montant de ce chantier avait été estimé à 26,75 M€. Par la suite, au mois de mars 2008, avant même le début des opérations, le MAEDI a révisé à la hausse ce coût prévisionnel : il est passé à 31,08 M€, soit une hausse de plus de 16 %.
Au final, au 31 décembre 2013, 34,56 M€ ont été consommés pour ces travaux d’aménagement, soit une hausse de 11,20 % par rapport aux estimations du mois de mars 2008 et de 29,20 % par rapport aux prévisions initiales de l’été 2007. En outre, les dépenses d’équipement informatique et téléphonique, ainsi que les frais de déménagement, ont ajouté près de 2,8 M€ à ce montant, porté au total à 37,36 M€.
La sous-évaluation des projections initiales, qu’elles portent sur la durée ou sur le coût des travaux, témoigne d’évidentes lacunes dans les études préalables à l’engagement des opérations immobilières. Ce manque de réalisme a aussi affecté la qualité de la programmation des travaux. Il ne pouvait en résulter que des coûts supplémentaires.
La mauvaise prise en compte des besoins fonctionnels de l’administration ou de ses usagers s’est illustrée dans différents projets. Elle a débouché sur des réalisations peu pertinentes au regard des services qu’elles devaient rendre.
L’illustration la plus flagrante en est donnée par les salles de lecture du site de La Courneuve. Elles s’étendent sur une surface de plus de 1 700 m² et offrent quelque 210 places, alors qu’en 2013 la moyenne quotidienne du nombre de lecteurs n’était que de 36 personnes, avec un pic de 50 personnes au mois de juillet 2013. Ces espaces prévus pour la lecture apparaissent donc surdimensionnés, tout particulièrement la salle des archives qui s’étend sur 820 m² et peut accueillir 156 personnes.
Cette situation résulte, pour l’essentiel, d’un report de l’opération, d’abord envisagée en 2001 puis repoussée en 2005 pour des raisons de financement. Le programme des travaux avait été rédigé au mois de mai 2001 et n’a donné lieu, par la suite, à aucune révision globale. À cette époque, l’informatique n’était pas aussi développée qu’aujourd’hui et nombre de documents ne pouvaient être consultés qu’en format papier et non numérique. Une affluence plus importante était en conséquence attendue dans les salles de lecture.
Un autre exemple concerne le site de Convention. Le ministre des affaires étrangères, à l’occasion d’une visite sur ce chantier, le 29 janvier 2008, a demandé que soit créé un restaurant « club » pouvant accueillir 50 personnes, sur une surface de 140 m² attenante au centre de conférence. Cette infrastructure a coûté près de 640 000 €.
Certaines opérations immobilières illustrent un manque d’anticipation et l’absence de suivi des priorités initiales.
Lorsque le ministère a, en 2001, engagé les premières études pour la construction du bâtiment de La Courneuve, il avait prévu d’y installer le service de la valise diplomatique. Mais ce projet a été abandonné en 2006, lorsque le ministre a souhaité faire des économies sur ce programme particulier. Pourtant, au dernier trimestre de l’année 2011, le projet d’un déplacement du service de la valise diplomatique vers le bâtiment de La Courneuve a été relancé et les travaux d’implantation ont alors été programmés. Le coût du report de la décision peut être chiffré entre 300 000 et 600 000 €, même si le projet de 2006 ne prenait pas en compte les normes, notamment de sécurité, du programme actuel.
Les priorités ont, également, été perdues de vue lorsqu’au mois de mai 2008, le secrétaire d’État à la coopération et à la francophonie a obtenu de ne pas installer son cabinet au quai d’Orsay, comme cela était initialement prévu, mais dans le bâtiment de la rue de la Convention5. Cette décision a remis en cause une partie de la programmation des travaux alors engagés sur ce site puisque les quelque 820 m² du nouveau cabinet ministériel (bureaux du secrétaire d’État et de son directeur de cabinet, salle à manger / salle de réunion polyvalente, office / cuisine) devaient accueillir des bureaux, qui étaient d’ailleurs presque achevés. Cet ample réaménagement a entraîné un surcoût de plus de 2 M€.
Des bouleversements, moins importants, ont aussi été provoqués par l’arrivée, sur le site de la rue de la Convention, de la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger, au mois de juin 2012. Des personnels ont dû être déplacés, des bureaux transformés, une cuisine et une salle à manger réalisées, alors même que se trouve, dans le même bâtiment, un restaurant « club » peu utilisé et offrant ces facilités. L’ensemble de ces travaux a engendré une dépense de plus de 220 000 €.
Par deux fois déjà, la Cour a souligné les insuffisances de la gestion immobilière du ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI) et la nécessité de renforcer ses compétences dans ce domaine. Elle a appelé à la mise en place d’ « un véritable plan de professionnalisation de la fonction immobilière, visant à créer un pôle de compétence indispensable pour l’exercice d’une fonction essentielle ».
En dépit de ces observations, ses derniers contrôles confirment la persistance de carences dans les fonctions de maître d’ouvrage et de programmation. Ces défaillances ont eu pour conséquence une multiplication des modifications de la nature des chantiers comme des marchés publics, générant de multiples surcoûts. En outre, l’ensemble de la chaîne hiérarchique a démontré de sérieux dysfonctionnements en matière de gestion immobilière.
La maîtrise d’ouvrage demeure défaillante. Ses modalités d’exercice conduisent à des choix de nature à remettre en cause l’objectif, le calendrier et le budget des projets envisagés.
Tel a été le cas de la modification de l’aménagement des espaces de travail de la rue de la Convention. Les surfaces en question étaient conçues initialement pour être largement décloisonnées, malgré les réserves des représentants de l’administration et des agents, et d’ailleurs le ministre avait, lors de sa visite précitée sur le site le 29 janvier 2008, insisté sur la réalisation d’espaces de travail ouverts. Sur cette base, des travaux significatifs ont été engagés au mois de juin 2008.
Pourtant, au cours du premier semestre 2009, lors d’une visite aux personnels nouvellement installés dans les locaux, le ministre a changé de position : il a accordé aux agents la possibilité de demander des cloisonnements complémentaires. Dès lors, de nouvelles modifications et des ajouts de cloisons ont dû être réalisés, générant un surcoût de près de 24 % sur le marché correspondant, qui est passé de 2,55 à 3,15 M€. En outre, la décision de cloisonner les bureaux, alors que la climatisation avait, dès l’origine, été conçue pour des espaces décloisonnés, a engendré un dysfonctionnement de ce système et un contentieux contraignant le ministère à dépenser plus de 1 M€.
Un deuxième cas montre le manque d’anticipation du ministère : alors que le centre Kleber où elle se tenait d’ordinaire avait été vendu, le ministère a tardivement décidé de tenir la conférence des ambassadeurs annuelle de 2009 dans le centre de conférence ministériel du bâtiment de la rue de la Convention, alors qu’il n’était pas encore terminé. Ceci a entraîné la réalisation de travaux imprévus, qui ont dû être faits dans l’urgence, notamment la nuit et le week-end.
Lors du rapport public de 2005, la Cour avait souligné que « les nombreux dysfonctionnements constatés trouvent leur origine principale dans la dilution des responsabilités entre les différents acteurs des opérations contrôlées, à tous les niveaux de la hiérarchie ».
Ces errements ont depuis perduré. Ils se sont manifestés sur le chantier de la rue de la Convention. La multiplication des intervenants (notamment ministre, cabinet et secrétaire général) et des demandes additionnelles par rapport au projet initial ont conduit à la conclusion de 34 avenants. Parmi eux, 10 ont entraîné une hausse de plus de 20 % des marchés initiaux concernés, induisant un surcoût de plus de 4,6 M€ sur des marchés dont le montant initial était de 9,2 M€.
Le sous-calibrage des équipes chargées de suivre les opérations des sites Convention et La Courneuve (quatre personnes au sein du bureau France de la direction des immeubles et de la logistique) et le manque de formation spécifique en matière de maîtrise d’ouvrage des fonctionnaires placés à la tête de cette structure ne leur ont pas permis de s’opposer aux demandes d’adaptation ou d’ajustement du projet initial, de tendance inflationniste, émanant de la hiérarchie du ministère.
Leur positionnement ne leur a pas, non plus, permis d’éviter de passer des avenants bouleversant l’économie des marchés auxquels ils se rapportaient.
Postérieurement au contrôle de la Cour, le ministère a procédé à un renforcement de ses équipes et de ses compétences.
Il pourrait également continuer à explorer la voie de la délégation de la maîtrise d’ouvrage.
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
À plusieurs reprises, la Cour a alerté le ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI) sur les risques de dérive en matière immobilière nés de la remise en cause des programmations initiales, de défaillances dans la maîtrise d’ouvrage ou d’un manque de professionnalisme des équipes chargées de la fonction immobilière.
Pourtant, ces errements se sont reproduits dans les principales opérations conduites en région parisienne, notamment sur les sites de la rue de la Convention et de La Courneuve.
Le sous-dimensionnement des équipes chargées de suivre ces projets ambitieux, les délais trop courts imposés pour la conduite de certains travaux, les insuffisances de certaines études préalables pour identifier les besoins fonctionnels ou les priorités et les modifications de la programmation décidées par la plus haute hiérarchie du ministère ont été autant de facteurs contribuant à des dépassements de coûts.
Au regard de ces constats, la Cour formule les recommandations suivantes :
1. prendre en compte, dans le schéma immobilier du MAEDI, les perspectives d’évolution prévisible des effectifs de ses services centraux, de son organisation administrative, de son activité et de ses métiers ;
2. renforcer les compétences, techniques et juridiques, de la direction des immeubles et de la logistique du ministère afin d’assurer la qualité et la fiabilité des opérations immobilières et de veiller à la stabilité des programmes ainsi définis ; à défaut, envisager le recours à une maîtrise d’ouvrage déléguée.
Réponse du ministre des affaires étrangères et du développement international
Concernant la rationalisation du dispositif :
Le schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) du MAEDI a été validé en 2009. Ce ministère a depuis lors largement progressé en réduisant de neuf à cinq ses implantations en Ile-de-France et de 39 % la surface utile nette occupée par ses services. Le ratio de surface utile nette par poste de travail est passé de 20,9 m2 en 2007 à moins de 12 m2 en 2014, respectant ainsi les normes de France Domaine. En quelques années, le MAEDI a donc réalisé 80 % des objectifs de son SPSI.
Si ce ministère n'a pu, à ce stade, réduire à trois le nombre de ses sites, comme prévu dans son SPSI, cette situation résulte d'une absence de financement qui n'est pas de son fait, comme le reconnait la Cour dans son rapport.
Concernant la programmation des travaux :
Sur la planification
C'est en raison de l'absence de crédits précitée que l'opération de rénovation de l'aile des archives n'a pu être réalisée. Le MAEDI, en cédant le bâtiment du Bd Saint-Germain, attendait en retour 69 M€. Or, le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l'Énergie, qui s'est installé dans ce bâtiment, ne l'a pas dédommagé de cette cession, lui même n'ayant pu obtenir les fonds attendus de la vente du site Ségur-Fontenoy. Sur mon insistance, cette hypothèque financière a été partiellement levée par un courrier du Ministre chargé du Budget, en date du 29 novembre 2013, accordant au MAEDI un montant de 28 M€ sur la part mutualisée du compte d'affectation spéciale 723. Depuis lors, les études techniques ont commencé et un assistant à la maîtrise d'ouvrage a été désigné.
Sur la programmation financière des travaux effectués sur le bâtiment de Convention
S'agissant des différences relevées dans l'évaluation des coûts, le chiffrage de 26,75 M€ de l'été 2007 ne tenait pas compte de l'ensemble des dépenses d'études et de travaux. Il ne peut donc être comparé avec les chiffres de mars 2008 et décembre 2013, qui les prennent en considération.
Sur la prise en compte des besoins des services
Le surdimensionnement de la salle du site de la Courneuve dédiée à la consultation des ouvrages et archives originales (820 m2 et 150 places assises) résulte d'une évaluation de la fréquentation qui n'a pas, dans un premier temps, tenu ses promesses. Deux projets devraient contribuer à augmenter cette fréquentation :
L'ouverture du portail internet des Archives diplomatiques permettra pour la première fois une présentation numérique de la totalité des inventaires (avec échantillon de documents significatifs de la richesse des collections). L'expérience de l 'ouverture en septembre 2013 d'une salle des inventaires virtuelle des Archives nationales, qui s'est accompagnée d'une hausse de la fréquentation à Pierrefitte-sur-Seine, vient confirmer les études selon lesquelles une partie du public ne se rend en bibliothèque ou centre d'archives qu'après avoir pu préparer sa visite sur internet (cas notamment des chercheurs ne résidant pas à Paris).
La restructuration de la salle de consultation , avec l'installation d'une zone de travail dans laquelle les lecteurs, étudiants, chercheurs et particuliers pourront bénéficier d'un environnement calme et convivial avec accès au wifi et mise à disposition d'environ 6 000 ouvrages en libre-service, devrait permettre de fidéliser un nouveau public. Avec l'ouverture du campus Condorcet en 2016, plus de 12 700 étudiants et chercheurs sont attendus sur les sites de Paris Nord et Aubervilliers, en majorité en sciences humaines.
En ce qui concerne le restaurant « Club » installé dans le bâtiment de Convention, ce lieu sert de salon de réception lors des événements accueillis au Centre de conférences ministériel et est régulièrement utilisé par les cabinets ministériels et les services du MAEDI installés sur le site de Convention.
Concernant le respect des priorités :
La Cour regrette que le MAEDI n'ait pas respecté les priorités de sa programmation immobilière à propos du projet d'installer le service de la Valise diplomatique à La Courneuve.
Comme cela a été indiqué à la Cour, le MAEDI n'a pas été en mesure de réaliser l'aile du bâtiment affectée à cette activité en 2006, compte tenu du montant limité de l'enveloppe financière qui lui avait été attribuée par le ministère en charge du budget.
En outre, la conception de la valise diplomatique, tant dans la programmation de 2001 que dans celle qui aurait pu être contractualisée en 2006, ne correspondait pas aux critères actuels. En effet, depuis le 1er mars 2006, la valise fret a obtenu un agrément « chargeur connu », qui impose une dissociation des locaux et des circuits de traitement avec la valise accompagnée, qui obéissent désormais à des normes différentes en matière de sûreté. Le nouveau projet d'installation de la valise dissocie 590 m2 dévolus à la valise fret et 390 m2 pour la valise accompagnée. Il sera l’occasion d'un réinvestissement conséquent sur la sûreté, afin de respecter les exigences de la Direction générale de l'aviation civile et du Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale, le service de la valise étant un « point d'intérêt vital ».
Concernant le professionnalisme des services :
Sur la maîtrise d 'ouvrage
Ce ministère ne saurait être tenu pour responsable des conséquences de la modification des cloisonnements. Le maître d'œuvre et les entreprises, partenaires contractuels du MAEDI, auraient dû prévenir et gérer les éventuelles conséquences négatives de cette décision sur le bon fonctionnement du bâtiment. Le MAEDI a porté cette affaire en justice et attend la décision du juge.
Sur la chaîne hiérarchique et la professionnalisation de la fonction immobilière
Comme la Cour le recommande, les compétences des services du MAEDI en charge de l'immobilier ont été récemment renforcées :
la direction des Immeubles et de la Logistique a, depuis le 1er mars 2013, pris la succession du service des immeubles et de la logistique ;
trois experts immobiliers expérimentés ont pris leurs fonctions en septembre 2014 pour suivre les projets en France, et le recrutement du chef de bureau est en cours ;
en ce qui concerne le projet de rénovation de l'aile des archives, un marché d'assistant à maîtrise d'ouvrage a été passé avec une équipe couvrant un large spectre de compétences ;
d'autres marchés ont été passés pour apporter à la direction des Immeubles et de la Logistique le soutien de conseils juridiques (cabinets d'avocats spécialisés en maîtrise d'ouvrage publique), d’architectes et d'économistes.
Je relève enfin que deux expériences de délégation de maîtrise d'ouvrage ont été tentées mais n'ont pas abouti :
le projet d'Agence de gestion des immeubles à l'étranger n'a pu voir le jour, le ministère du Budget ayant refusé tout recours à l'emprunt ;
une expérimentation envisagée avec la SOVAFIM en 2011 n’a pas été mise en œuvre, à la suite notamment des interrogations de la Cour des comptes.
Si les remarques de la Cour sur certains errements passés peuvent paraître fondées, les critiques formulées à l'encontre de l'ensemble de la politique immobilière du MAEDI ne me semblent pas refléter les efforts engagés ces dernières années pour mettre en œuvre le SPSI de ce Ministère et professionnaliser sa filière immobilière.
Réponse commune du ministre des finances et des comptes publics et du secrétaire d’État chargé du budget
Nous partageons l’orientation générale du rapport de la Cour des comptes visant à améliorer la qualité du pilotage de la fonction immobilière au sein du ministère des affaires étrangères et du développement international.
Ce document étant exclusivement consacré à l’organisation interne de ce ministère, il n’appelle toutefois pas de commentaire particulier de notre part.
Réponse de l’ancien ministre des affaires étrangères et européennes (M. Bernard Kouchner)
Malheureusement, je ne peux vous apporter des éléments de réponse à ce sujet.
1 Cour des comptes, Rapport public annuel 2005. Les opérations immobilières du ministère des affaires étrangères, p. 65-90. La Documentation française, mars 2005, 532 p., disponible sur www.ccomptes.fr
2 Cour des comptes, Rapport public annuel 2008, Tome I. Les opérations immobilières Kléber / Convention à Paris, p. 635-650 et Le centre des archives diplomatiques du ministère des affaires étrangères et européennes, p. 671-675. La Documentation française, février 2008, 694 p., disponible sur www.ccomptes.fr
3 Les cinq implantations sont les bâtiments parisiens du quai d’Orsay, de la rue de la Convention, du boulevard des Invalides, le site de La Courneuve et un local industriel pris à bail à Châtillon.
4 Cour des comptes, Rapport public annuel 2014, Tome II. Sovafim : un réexamen indispensable, p. 349-374. La documentation française, février 2014, 428 p., disponible sur www.ccomptes.fr
5 Il devait, en effet, quitter ses anciens locaux du 20 rue Monsieur, à Paris, après que ce site a été vendu.