En application des dispositions de l’article L. 111-3 du code des juridictions financières, la Cour a examiné les comptes et la gestion de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM), pour les exercices 2008 à 2013.
À l’issue de son contrôle, la Cour m’a demandé, en application des dispositions de l’article R. 143-1 du même code, d’appeler votre attention sur les observations suivantes.
1- La gouvernance et le fonctionnement de l’ANGDM, héritage du passé, doivent être adaptés.
La tutelle est exercée principalement par la direction générale de l’énergie et du climat, alors que l’activité de l’ANGDM la place plutôt dans la sphère sociale.
Le dernier contrat d’objectifs de l’ANGDM portait sur la période 2006-2008 et comprenait peu d’éléments quantifiés. Un nouveau contrat a été préparé en 2013 mais il n’avait toujours pas été adopté à la fin de 2014. Il est temps d’élaborer et de mettre en place la convention, comprenant notamment un volet consacré à la lutte contre la fraude, afin de vérifier les cas de cumuls d’activité et d’allocation. De même, le comité d’audit, placé auprès du conseil d’administration et prévu par le décret n° 2004-1466 du 23 décembre 2004 portant création de l’ANGDM, doit être mis en place.
Le nombre de représentants de l’État au conseil d’administration devrait être accru pour atteindre au moins la parité avec les deux autres collèges. Dans le même esprit, le nombre de comités internes devrait être réduit afin de simplifier le fonctionnement de l’organisme.
2- La nature et le contenu des prestations doivent évoluer
Les prestations sont très variables, compte tenu du choix des pouvoirs publics de reprendre intégralement dans la réglementation les us et coutumes propres à chaque entreprise ou houillère de bassin. En pratique, des différences très importantes subsistent, par exemple en matière de logement en fonction de la région, de la catégorie professionnelle et même du type de mines - puisque les retraités des mines de fer ont un statut nettement moins avantageux. Un terme doit être mis aux remboursements des cures thermales, compte tenu des contraintes de financement de l’établissement.
3- La question de l’avenir de la structure doit être posée
La population d’ayants droit de l’ANGDM est vieillissante et tendanciellement en déclin, compte tenu de la fermeture du régime minier. Depuis 2012, elle est majoritairement composée des conjoints survivants qui bénéficient d’une pension de réversion. Du fait de la diminution de cette population, la question se pose, à terme, du maintien d’un établissement public dédié, même s’il y aura toujours une population d’ayants droit à l’horizon 2050, et du mode de gestion des prestations versées. La Cour invite les tutelles à identifier d’ores et déjà les différentes options relatives au mode de gestion de ces droits et prestations. La question d’un rapprochement avec la Retraite des Mines1 et avec la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) devrait en particulier être posée.
Si un décalage s’explique entre la baisse des effectifs employés par l’ANGDM et la baisse des ayants droits qu’elle gère, du fait notamment du vieillissement de la population et de la hausse des contentieux, qui compliquent la gestion et nécessitent des interventions plus qualitatives (transformation des logements en particulier), cet écart est excessif et ne pourra que s’aggraver.
4- La gestion interne de l’organisme doit être améliorée
La dégradation constatée du ratio prestations versées / coût de gestion devrait s’accroître au cours des prochains exercices budgétaires, ce qui n’est pas sans poser question sur l’avenir de l’organisme. En effet, les coûts de gestion augmentent, alors même que, tant le nombre de bénéficiaires, que l’encours des prestations versées diminuent. La dégradation de ce ratio pourrait même être plus forte que prévue en 2015 si l’encours continue sa diminution, au lieu de se stabiliser, avec des coûts de gestion qui continuent de progresser. Même si certaines explications tendent à justifier les tensions sur le ratio, la stabilisation devrait être au moins l’objectif à atteindre, notamment par une maîtrise accrue de la masse salariale et des autres dépenses de fonctionnement.
De manière générale, la gestion de l’organisme est insatisfaisante (hausse des dépenses de personnel et rémunérations trop élevées, ressources informatiques mal pilotées, nombre d’implantations trop important) et doit être rapidement corrigée, notamment si la décision devait être prise de conserver l’ANGDM et le dispositif actuel. La maîtrise des dépenses de fonctionnement est nécessaire pour mettre fin à l’effet de ciseaux entre prestations en baisse et dépenses de fonctionnement en hausse.
Enfin, l’information à destination des parlementaires doit être améliorée en intégrant les dépenses d’action sanitaire et sociale dans le programme budgétaire 174, consacré à l’énergie, au climat et à l’après–mines, de la mission écologie, développement et mobilité durables.
5- Les contrôles doivent être renforcés
L’ANGDM délivre environ 120 prestations pour un montant total de 567 M€ en 2013. Parmi celles-ci, le « congé charbonnier de fin de carrière », qui assure 80 % de la rémunération des bénéficiaires, auxquels il est interdit de cumuler cette rémunération avec une activité professionnelle. Le respect de cette interdiction ne fait pas l’objet de contrôles systématiques, avec un risque de cumul de revenus d’activité avec les prestations versées par l’ANGDM.
La Cour formule donc les recommandations suivantes :
- Recommandation n° 1 : Lancer une réflexion commune entre les tutelles sur les différentes options relatives au mode de gestion de ces droits et prestations et sur l’avenir de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) ;
- Recommandation n° 2 : Élaborer et mettre en place le contrat d’objectifs comprenant un volet consacré à la lutte contre la fraude ;
- Recommandation n° 3 : Installer le comité d’audit prévu par le décret du 23 décembre 2004 créant l’ANGDM ;
- Recommandation n° 4 : Mieux contrôler l’interdiction d’exercer une activité professionnelle pour les bénéficiaires du congé charbonnier de fin de carrière, afin d’éviter les cumuls de revenus d’activité et d’allocations ;
- Recommandation n° 5 : Mettre un terme au remboursement des cures thermales ;
- Recommandation n° 6 : Adopter un cadrage plus strict de la masse salariale en lien avec la réduction de l’activité liée à la diminution du nombre d’ayants droits, et revoir la politique des plus hautes rémunérations ;
- Recommandation n° 7 : Réduire le nombre d’implantations géographiques ;
- Recommandation n° 8 : Maîtriser les dépenses de fonctionnement pour lutter contre l’effet de ciseaux entre interventions en baisse et dépenses de fonctionnement en hausse ;
-=o0o=-
Je vous serais obligé de me faire connaître, dans le délai de deux mois prévu à l’article L. 143-5 du code des juridictions financières, la réponse que vous aurez donnée à la présente communication2.
Je vous rappelle qu’en application des dispositions du même code :
- deux mois après son envoi, le présent référé sera transmis aux commissions des finances, et, dans leur domaine de compétence, aux autres commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il sera accompagné de votre réponse si elle est parvenue à la Cour dans ce délai. À défaut, votre réponse leur sera transmise dès sa réception par la Cour (article L. 143-5) ;
- dans le respect des secrets protégés par la loi, la Cour pourra mettre en ligne sur son site internet le présent référé, accompagné de votre réponse (article L. 143-1) ;
- l’article L. 143-10-1 prévoit que, en tant que destinataire du présent référé, vous fournissiez à la Cour un compte rendu des suites données à ses observations, en vue de leur présentation dans son rapport public annuel. Ce compte rendu doit être adressé à la Cour, selon les modalités de la procédure de suivi annuel coordonné, convenue entre elle et votre administration.
Didier Migaud
1 Retraite des Mines : Depuis le 1er janvier 2005, l’assurance vieillesse-invalidité du régime de la sécurité sociale dans les mines et le recouvrement des cotisations du régime minier sont gérés par la direction des retraites et de la solidarité de la Caisse des dépôts et consignations.
2 La Cour vous remercie de lui faire parvenir votre réponse, sous votre signature personnelle exclusivement, sous forme dématérialisée (un fichier PDF comprenant la signature et un fichier Word) à l’adresse électronique suivante : greffepresidence@ccomptes.fr.