présentation

En application des dispositions de l’article LO. 132-3 du code des juridictions financières, la Cour exprime un avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre par branche et du tableau patrimonial relatifs à l’exercice 2014. Ces documents seront soumis à l’approbation du Parlement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Les tableaux d’équilibre correspondent à des comptes de résultat combinés1 couvrant respectivement l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, le régime général de sécurité sociale, ainsi que les organismes concourant au financement des régimes précités (le fonds de solidarité vieillesse - FSV -). Le tableau patrimonial correspond quant à lui à un bilan combiné des régimes obligatoires de base de sécurité sociale2 et des organismes concourant à leur financement (FSV), à l’amortissement de leur dette (caisse d’amortissement de la dette sociale - CADES -) et à la mise en réserve de recettes à leur profit (fonds de réserve pour les retraites - FRR -).

Les comptes des entités intégrés aux tableaux d’équilibre et au tableau patrimonial font l’objet d’une certification obligatoire par la Cour (branches et activité de recouvrement du régime général) ou, sauf exception, par des commissaires aux comptes (autres entités).

Les avis exprimés par la Cour portent comme les années antérieures sur les projets de tableaux d’équilibre, de tableau patrimonial et d’annexes relatives à ces derniers communiqués à l’été par la direction de la sécurité sociale. En effet, au moment où la Cour rend public son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, le projet de loi de financement (PLFSS) pour 2016 n’a pas encore été déposé. De ce fait, les documents qui seront soumis en définitive au Parlement sont susceptibles de différer des projets transmis à la Cour et sur lesquels elle porte les avis exprimés ci-après.

I - Avis de la Cour sur la cohérence des tableaux d’équilibre 2014

En application du 1° du A du I de l’article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale, sont soumis à l’approbation du Parlement, dans le cadre du projet de loi de financement annuel, trois tableaux d’équilibre distincts relatifs au dernier exercice clos : le tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale mentionnés dans la liste triennale annexée au PLFSS pour 2015, présenté par branche, le tableau d’équilibre du régime général, également présenté par branche et le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes précités, cette dernière catégorie comprenant uniquement le fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Établis par la direction de la sécurité sociale, les tableaux d’équilibre se présentent sous la forme de comptes de résultat retraités et simplifiés comprenant trois agrégats : le « solde », le montant total des « recettes » et le montant total des « dépenses ». Les règles retenues pour leur élaboration sont mentionnées à l’annexe 4 au projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Bien que conforme aux dispositions de l’article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale, cette terminologie favorise une confusion sur la nature des montants soumis à l’approbation du Parlement : les « recettes » et les « dépenses » ne correspondent pas à des recettes encaissées et à des dépenses décaissées au sens de la comptabilité budgétaire de l’État et de ses opérateurs, mais à des produits et à des charges d’une comptabilité générale établie en droits constatés3, auxquels certains retraitements sont apportés (voir C – 3 - infra) ; de même, le « solde » correspond à un résultat de comptabilité générale et non à un solde de trésorerie.

A - Les tableaux d’équilibre pour l’exercice 2014

Les tableaux d’équilibre présentés ci-après figureront dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 soumis à l’approbation du Parlement.

La Cour n’a pas été rendue destinataire par la direction de la sécurité sociale du projet d’annexe au PLFSS 2016 qui contient des informations intéressant les tableaux d’équilibre4. Les appréciations portées sont donc exprimées sous réserve des informations supplémentaires ou de nature différente que pourrait contenir cette annexe à la suite des observations exprimées par la Cour dans le cadre du présent avis.

Au titre de l’exercice 2014, les projets de tableaux d’équilibre transmis à la Cour font apparaître un déficit global de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse de -12,8 Md€ (soit l’équivalent de 0,6 % du PIB), contre -16,0 Md€ en 2013 (soit 0,8 % du PIB).

Le déficit de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale s’est réduit à -9,3 Md€, contre -13,1 Md€ en 2013.

En son sein, le déficit du régime général s’est contracté à -9,7 Md€, contre -12,5 Md€ en 2013. Par ailleurs, le déficit du FSV a atteint -3,5 Md€, contre -2,9 Md€ en 2013. Le sous-ensemble formé par le régime général et le FSV a ainsi dégagé un déficit de -13,2 Md€, contre -15,4 Md€ en 2013.

Tableau n° 27 : ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

La liste triennale annexée au projet de loi de financement pour 2015 mentionne 39 régimes obligatoires de base de sécurité sociale, dont la liste est présentée en annexe. Parmi ces régimes, deux d’entre eux sont intégrés au régime général (régime spécial d’assurance vieillesse des chemins de fer secondaires et régime d’assurance maladie de la chambre de commerce et d’industrie de Paris, en voie d’extinction). En dehors du régime général, il s’agit de quinze régimes d’assurance vieillesse, de deux régime d’assurance maladie, de sept régimes d’accidents du travail - maladies professionnelles, de trois régimes mixtes d’assurance vieillesse et d’assurance maladie, de trois régimes mixtes d’assurance vieillesse et d’accidents du travail - maladies professionnelles et de huit régimes mixtes d’assurance maladie, d’assurance vieillesse et d’accidents du travail - maladies professionnelles.

Tableau n° 28 : régime général de sécurité sociale

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Tableau n° 29 : organisme concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale 

B - Avis de la Cour

Conformément aux dispositions de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005, la Cour exprime son « avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre par branche du dernier exercice clos ».

À ce titre, la Cour s’assure de l’établissement des tableaux d’équilibre en fonction des données comptables des entités entrant dans leur champ, de l’élimination de l’ensemble des produits et des charges réciproques de ces entités, de la pertinence des autres retraitements effectués au regard des principes comptables applicables et de la permanence de ces règles. De manière générale, elle apprécie la qualité de l’information procurée au Parlement dans le cadre et à l’appui des tableaux d’équilibre.

En outre, l’appréciation de la Cour tient compte des opinions exprimées sur les comptes des régimes de sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse par leurs auditeurs externes (Cour pour les branches et l’activité de recouvrement du régime général et commissaires aux comptes pour les autres régimes et le fonds de solidarité vieillesse).

En application du 2° du VIII de l’article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale, auquel renvoie l’article LO. 132-3 du code des juridictions financières, la Cour a procédé à des vérifications sur les tableaux d’équilibre de l’exercice 2014, établis par la direction de la sécurité sociale, qui seront soumis à l’approbation du Parlement à l’article premier du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

À l’issue de ces vérifications et au regard des éléments d’information qui lui ont été communiqués par la direction de la sécurité sociale, la Cour estime que les tableaux d’équilibre qui seront soumis à l’approbation du Parlement à l’article premier du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 fournissent une représentation cohérente des recettes, des dépenses et du solde qui en découle, en exprimant cependant les quatre observations suivantes :

1. comme les exercices précédents, la présentation distincte du solde du fonds de solidarité vieillesse de ceux des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et, en leur sein, de celui du régime général, procure une information partielle sur le déficit des régimes de sécurité sociale pour l’exercice 2014 (voir C – 1 – infra) ;

2. le Parlement ne dispose toujours pas, dans le cadre des annexes au projet de loi de financement de la sécurité sociale, d’un éclairage suffisant sur la nature et l’évolution des recettes et des dépenses à l’origine de la formation des soldes mentionnés dans les tableaux d’équilibre soumis à son approbation (voir C – 2 – infra) ;

3. le manque de sécurité et de traçabilité dans l’élaboration matérielle des tableaux d’équilibre ne permet pas de réduire à un niveau non significatif le risque d’anomalies qui affecteraient les montants de recettes et de dépenses qui y sont indiqués. Les tableaux d’équilibre sont de plus établis en procédant à des contractions de produits et de charges contraires au cadre normatif fixé par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale pour l’établissement des comptes sociaux (principe général de non-compensation) (voir C – 3 – infra) ;

4. si les états financiers de la totalité des régimes de sécurité sociale intégrés aux tableaux d’équilibre sont désormais certifiés, avec ou sans réserve(s), les opinions exprimées par la Cour et par les commissaires aux comptes continuent à souligner leur qualité perfectible, en raison notamment de la persistance d’insuffisances des dispositifs de contrôle interne et de difficultés comptables (voir C – 4 – infra).

C - Motivations détaillées de l’avis de la Cour

1 - Une présentation partielle du déficit des régimes obligatoires de base et du régime général

Dans le cadre des projets de loi de financement de la sécurité sociale, le Parlement est notamment invité à approuver un tableau d’équilibre au titre des « organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale », concernant exclusivement le fonds de solidarité vieillesse (FSV).

L’isolement du FSV dans un tableau d’équilibre distinct nuit à la lisibilité de l’information procurée sur les résultats du régime général et de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.

En effet, l’essentiel des ressources (9/10èmes) du FSV bénéficie à la branche vieillesse du régime général, ce qui a pour effet de réduire, toutes choses égales par ailleurs, son déficit. Pour autant, les ressources affectées au fonds (une fraction de la CSG, d’autres contributions sociales et certaines impositions) ne couvrent pas la totalité de ses concours aux régimes de sécurité sociale (prises en charge de cotisations et de prestations), ce qui conduit à placer le fonds en déficit.

L’absence de rattachement du FSV au tableau d’équilibre du régime général de sécurité sociale à proportion des prises en charge de cotisations et de prestations dont le FSV le fait bénéficier conduit à minorer le niveau du déficit du régime général (à hauteur de -3,2 Md€ pour 2014) par rapport à la réalité des ressources dont la branche vieillesse du régime général a réellement disposé au titre de ce même exercice5.

Le déficit de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (-9,3 Md€) est également minoré à hauteur de la totalité de celui du FSV (-3,5 Md€).

Afin de faire apparaître le déficit véritable de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et, en leur sein, celui du régime général, la Cour recommande :

de supprimer le tableau d’équilibre relatif à la catégorie des « organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale » ;

d’intégrer une rubrique « FSV» distincte, d’une part dans le tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, d’autre part dans celui du régime général de sécurité sociale.

Tout en continuant à assurer une information propre aux produits, aux charges et au résultat du fonds de solidarité vieillesse, une présentation de cette nature permettrait de fournir une information plus pertinente sur ceux de l’ensemble des régimes et du régime général de sécurité sociale.

2 - Un défaut persistant d’information du Parlement sur la consistance et l’évolution des recettes et des dépenses

Le Parlement est invité à approuver les tableaux d’équilibre relatifs au dernier exercice clos et figurant à l’article premier du projet de loi de financement de l’année suivante (PLFSS), sans disposer d’une information suffisante sur la nature et l’évolution des recettes et des dépenses par rapport à l’exercice précédent, ni des écarts par rapport aux tableaux d’équilibre prévisionnels qu’il a précédemment adoptés.

L’annexe B du PLFSS atténue cette limite d’information en présentant dans un même tableau, sur des périmètres identiques à ceux des tableaux d’équilibre, les montants totaux de produits et de charges et ceux des résultats des trois années précédentes (qui incluent celle relative au dernier exercice clos, objet du présent avis), de l’année du projet de loi de financement et des quatre années suivantes.

Par ailleurs, l’annexe C décrit, par grandes masses, les produits de l’ensemble des régimes obligatoires de base, du régime général et de l’organisme concourant à leur financement (FSV).

Enfin, l’annexe 4 au PLFSS décompose le montant total des recettes et des dépenses6 des tableaux d’équilibre par grandes catégories au titre de l’année de la nouvelle loi de financement, de l’année en cours et de l’année précédente (correspondant à celle des tableaux d’équilibre du dernier exercice clos, objet du présent avis) et caractérise (uniquement en pourcentage) l’évolution des montants par rapport à l’exercice précédent.

Néanmoins, l’information procurée par ces annexes demeure encore insuffisante. À titre illustratif, les prestations légales, qui représentent une part prépondérante des charges, sont présentées dans l’annexe 4 sous la forme d’un montant global, non ventilé entre les principales natures de prestations. Les impôts et taxes affectés sont également présentés uniquement sous la forme d’un montant global. Par ailleurs, les annexes précitées ne commentent pas les principales évolutions, ni les facteurs qui en sont à l’origine. Elles se distinguent ainsi de l’annexe 9 du PLFSS relative au tableau patrimonial, qui procure au Parlement une information détaillée et précise sur la nature et l’évolution des actifs et passifs de la sécurité sociale (voir II - infra).

Selon la direction de la sécurité sociale, les limites de l’information procurée au Parlement au titre des tableaux d’équilibre soulignées par la Cour seraient compensées par les informations détaillées contenues dans les rapports de la commission des comptes de la sécurité sociale (de juin et de septembre, pour ce dernier rendu public quelques jours avant le dépôt du projet de loi de financement annuel). Toutefois, ces documents n’ont pas la qualité d’une annexe au projet de loi de financement et ne sont pas conçus pour fournir au Parlement une information de synthèse sur la formation des résultats des régimes de sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse, complétée d’une information plus détaillée sur les produits et les charges.

L’information fournie au Parlement devrait être de même nature que celle qui lui est communiquée dans le cadre du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’État. Son exposé des motifs procure en effet une information de synthèse sur l’exécution des recettes et des dépenses au regard de l’année précédente et des prévisions initiales, complétée dans des annexes par une information détaillée sur la nature et l’évolution des recettes et des dépenses. Dans cet esprit, la Cour a recommandé d’anticiper et de renforcer l’analyse des résultats de l’exécution des lois de financement, par l’instauration d’une nouvelle loi de résultat de la protection sociale qui serait examinée de façon conjointe avec la loi de règlement du budget de l’État7.

La Cour réitère sa recommandation d’assurer une information de synthèse du Parlement sur la consistance et l’évolution par rapport à l’exercice précédent des produits et des charges indiqués pour leur montant global dans les tableaux d’équilibre en procurant sur ce point, dans le cadre des annexes au projet de loi de financement, une information d’un niveau de détail et d’une qualité homogènes à celle contenue dans l’annexe 9 pour ce qui concerne le tableau patrimonial8.

3 - Des fragilités liées aux modalités d’élaboration des tableaux d’équilibre

a)Le manque de sécurité et de traçabilité du retraitement des données comptables

Les tableaux d’équilibre sont élaborés à partir des tableaux de centralisation des données comptables (TCDC) qu’établissent les régimes de sécurité sociale parallèlement à leurs états financiers. Ces documents, sont des comptes de résultat détaillés présentés sous la forme d’une balance comptable de produits et de charges. Ils ont pour objet d’assurer un classement homogène des produits et des charges au sein de mêmes rubriques en vue de leur consolidation dans le cadre des tableaux d’équilibre.

La direction de la sécurité sociale vérifie la conformité des TCDC aux comptes de résultat des régimes, des branches du régime général et des autres régimes et du FSV et leur apporte les corrections qui s’avèrent nécessaires.

Selon une pratique constante, le TCDC du régime des mines n’intègre par les produits et les charges au titre des œuvres, mais uniquement leur solde. De ce fait, les montants totaux de produits
et de charges du tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base sont minorés (à hauteur de 352 M€ et de 385 M€ respectivement pour 2014).

Conformément à l’objet des tableaux d’équilibre, la direction de la sécurité sociale procède à la neutralisation des écritures symétriques de produits et de charges liées à des transferts internes aux branches (17,5 Md€ pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale9, dont 1,8 Md€ au sein du régime général), les transferts entre branches (13,1 Md€ pour l’ensemble des régimes10, dont 12,1 Md€ au sein du régime général), ainsi que les transferts réciproques des branches maladie et accidents du travail - maladies professionnelles avec la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (soit 18,4 Md€ pour l’ensemble des régimes, dont 15,0 Md€ pour le régime général)11.

Pour l’expression de son avis sur les tableaux d’équilibre, la Cour s’est successivement assurée :

- de la conformité des TCDC validés par la direction de la sécurité sociale aux comptes de résultats des branches du régime général, des autres régimes les plus importants et du fonds de solidarité vieillesse ;

- de la correcte agrégation des comptes de produits et de charges ;

- de la correcte neutralisation des transferts internes aux branches, entre branches et entre régimes (dans le tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes).

Dans le cadre des vérifications précitées, la Cour n’a pas identifié d’anomalie lors de l’examen des retraitements précités.

Cependant, les conditions d’utilisation des outils bureautiques pour l’élaboration des tableaux d’équilibre induisent un risque sur l’intégrité des données chiffrées. Le manque de formalisation de l’objet et de l’enchaînement des fichiers utilisés pour le retraitement des données figurant dans les TCDC ne permet pas non plus d’écarter l’éventualité que des erreurs matérielles affectent les montants de produits et de charges indiqués dans les tableaux d’équilibre.

b)Des contractions de produits et de charges non conformes aux normes comptables

Au-delà de la neutralisation des transferts décrits supra, les tableaux d’équilibre relatifs au dernier exercice clos, objet du présent avis, sont présentés, comme ceux relatifs à l’année en cours et à l’année à venir, en regroupant en recettes les éléments positifs et négatifs qui concernent les prélèvements publics affectés aux régimes de sécurité sociale et en dépenses les éléments positifs et négatifs qui concernent les prestations dont ils assurent le versement.

Ce mode de présentation induit des contractions de produits et de charges, qui conduisent à intégrer aux tableaux d’équilibre :

- en réduction des produits : les pertes sur créances de cotisations, de CSG et d’impositions irrécouvrables (admissions en non-valeur, abandons de créances et remises de pénalités) ;

- selon le cas, en réduction ou en majoration des produits : l’augmentation ou la diminution des dépréciations de créances sur les cotisants et des provisions pour risques et charges relatives aux prélèvements sociaux ;

- selon le cas, en majoration ou en réduction des charges : l’augmentation ou la diminution des provisions pour rappels de prestations sociales et des dépréciations de créances sur les prestations.

Comme la Cour l’a régulièrement souligné, ces retraitements s’écartent du cadre normatif fixé par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale pour l’établissement des comptes sociaux et du principe comptable général de non-compensation des produits et des charges. Ils minorent substantiellement les montants de produits et les charges par rapport à ceux retracés dans les comptes annuels des régimes de sécurité sociale et du FSV (à hauteur de 21,7 Md€ pour l’ensemble des régimes, dont 18 Md€ pour le régime général et 0,2 Md€ pour le FSV). Seul le solde correspond bien à l’agrégation des soldes comptables des régimes, tandis que les recettes et les dépenses ne correspondent pas aux produits et aux charges arrêtés selon le référentiel comptable applicable aux organismes de sécurité sociale.

4 - L’évolution des opinions de la Cour et des commissaires aux comptes sur la qualité des comptes

a)Les opinions exprimées sur les comptes 2014

À l’exception de treize régimes de petite taille12 auxquels s’attachent des enjeux financiers limités, les comptes pour l’exercice 2014 de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale mentionnés dans la liste triennale annexée au projet de loi de financement pour 2015 ainsi que ceux du FSV font l’objet, selon le cas, d’une certification par la Cour (régime général de sécurité sociale et État) ou bien d’une certification ou d’un examen limité13 par un ou plusieurs commissaires aux comptes (autres régimes de sécurité sociale et FSV).

Le tableau ci-après synthétise les opinions exprimées par les auditeurs externes :

Tableau n° 30 : la certification des états financiers 2014 des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du FSV14

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

b)Les opinions exprimées par la Cour sur les comptes des branches et de l’activité de recouvrement du régime général

Pour le deuxième exercice consécutif, la Cour a certifié avec des réserves les états financiers pour l’exercice 2014 de l’ensemble des entités du régime général de sécurité sociale. Si l’évolution de ses constats lui permet de lever certaines parties de réserves, elle reconduit toutefois le nombre de réserves sur les comptes des quatre branches et de l’activité de recouvrement, en raison de progrès limités en 2014. L’approfondissement des travaux d’audit effectués dans l’ensemble des branches a conduit à renforcer certains constats, sans que cela soit le signe d’une détérioration générale de la qualité des comptes.

Dans les branches maladie et AT-MP, les constats ont porté principalement sur la consolidation des tests nationaux de « reliquidation » des prestations en nature facturées directement à l’assurance maladie et sur les indemnités journalières. Ces tests ont mis en évidence une incidence financière élevée sur les comptes des erreurs de liquidation et appellent la CNAMTS à mettre en œuvre des actions fortes et structurées visant à réduire l’incidence de ces erreurs au détriment de l’assurance maladie ou des assurés sociaux.

Dans la branche famille, si certains progrès ont été observés avec le déploiement effectif d’indicateurs et d’objectifs de qualité de la liquidation des prestations, les résultats obtenus en 2014 restent en deçà des attentes fortes exprimées par la Cour. En effet, le dispositif de contrôle interne ne repose pas encore sur une analyse des risques de la branche qui permette de structurer les contrôles effectués en fonction des risques à couvrir et d’améliorer leur efficacité et la justification des comptes demeure imparfaitement assurée. La Cour a appelé à nouveau la CNAF à mettre en œuvre des mesures correctives fortes. À défaut, elle serait conduite à réévaluer la portée des observations qu’elle exprime sur les comptes de la branche famille.

Dans la branche vieillesse, les efforts ont porté en 2014 sur une homogénéisation des résultats des caisses régionales en matière de qualité de la liquidation des prestations. Le risque attaché aux erreurs de liquidation reste cependant significatif, notamment en ce qui concerne l’exhaustivité des reports de données de carrière aux comptes des assurés.

S’agissant de l’activité de recouvrement, la Cour a constaté des progrès s’agissant de l’évaluation des dépréciations de créances (correction des principales distorsions), mais relève la persistance de faiblesses du contrôle interne pour les prélèvements sociaux sur les salaires et les revenus de remplacement et le maintien d’incertitudes et de désaccords concernant l’évaluation des principales estimations comptables. S’agissant des prélèvements sur les revenus des travailleurs indépendants, les progrès du dispositif de contrôle interne ont permis d’alléger l’expression de la réserve de la Cour, même si des incertitudes significatives continuent à affecter une partie des montants comptabilisés au titre de ces prélèvements en 2014.

c)Les opinions exprimées par les commissaires aux comptes sur les comptes des autres régimes et du FSV

Pour la première fois, les commissaires aux comptes ont certifié avec des réserves les états financiers du RSI, en cohérence avec l’allègement de la réserve exprimée par la Cour sur les états financiers de l’activité de recouvrement au titre des prélèvements sociaux des travailleurs indépendants relevant du dispositif de l’interlocuteur social unique.

Compte tenu de la poursuite des progrès engagés en 2013 dans la conception du dispositif de contrôle interne, les commissaires aux comptes ont certifié, pour la deuxième année consécutive, les états financiers du régime des mines, avec des réserves relatives notamment aux insuffisances du contrôle interne. Comme pour 2013, les réserves exprimées par les commissaires aux comptes sur les états financiers du régime des mines prennent en compte, de manière plus circonscrite, la partie de la réserve exprimée par la Cour sur les comptes de la branche maladie du régime général relative au manque de fiabilité de la répartition entre les différents régimes d’assurance maladie des dotations et forfaits versés aux établissements et services médico-sociaux.

S’agissant des états financiers du régime agricole et à l’instar de l’exercice précédent, une réserve pour limitation dans l’étendue des travaux d’audit est exprimée au titre de la totalité des flux de prestations maladie et de prélèvements sociaux et d’impositions issus d’une notification par des tiers, notamment la branche maladie et l’activité de recouvrement du régime général ainsi que l’État, compte tenu des réserves exprimées par la Cour sur les états financiers de ces entités.

En dépit des nouvelles améliorations apportées au dispositif de contrôle interne relatif aux prestations en nature, une opinion de certification avec réserves sur les états financiers de l’établissement national des invalides de la marine (ENIM) est reconduite en l’absence d’incidence en 2014 de ces plans d’actions sur l’efficacité du contrôle interne. Celle sur les comptes de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales est à nouveau motivée par la justification encore insuffisante des flux de cotisations et de compensations d’exonérations relatives aux auto-entrepreneurs notifiés par l’ACOSS et renforcée par deux nouvelles réserves relatives aux insuffisances des contrôles généraux informatiques et à une incertitude relative aux modalités d’estimations comptables des cotisations à recevoir.

Comme les exercices précédents, les comptes des autres régimes et du FSV ont été certifiés sans réserve.

II - Avis de la Cour sur la cohérence du tableau patrimonial au 31 décembre 2014

En application du 3° du A du I de l’article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale, est soumis à l’approbation du Parlement, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale annuel, un rapport figurant à l’annexe A de ce même projet15. En vertu du II de l’article LO. 111-4 du même code, ce rapport présente notamment un tableau, établi au 31 décembre du dernier exercice clos, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement (fonds de solidarité vieillesse - FSV -), à l'amortissement de leur dette (caisse d’amortissement de la dette sociale- CADES -) ou à la mise en réserve de recettes à leur profit (fonds de réserve pour les retraites - FRR -).

Élaboré par la direction de la sécurité sociale, le tableau patrimonial a pour objet d’assurer l’information du Parlement sur la situation patrimoniale de la sécurité sociale et de ses principales composantes. À ce titre, il consolide l’ensemble des bilans des régimes et organismes compris dans son périmètre (en l’espèce, les actifs et les passifs des régimes obligatoires de base ainsi que ceux du FSV, de la CADES et du FRR), après neutralisation des opérations réciproques au titre des relations financières entre ces entités. Les règles retenues pour son élaboration et la consistance de ses rubriques sont détaillées à l’annexe 9 au projet de loi de financement de la sécurité sociale, où sont par ailleurs justifiés les besoins de trésorerie des régimes et organismes habilités à recourir à l’emprunt.

Par nature ou de fait, le périmètre du tableau patrimonial est moins étendu que celui de la loi de financement de la sécurité sociale. Outre le régime général de sécurité sociale16, il comprend seulement dix-huit autres régimes. En effet, vingt régimes en sont écartés, soit en l’absence de bilan, soit, en accord avec la Cour, parce que le montant total de leur bilan est inférieur à 200 M€ et qu’ils ne sont par ailleurs pas autorisés à recourir à l’emprunt par la loi de financement de l’année17. De fait, le montant agrégé de leurs bilans est négligeable (inférieur à 0,2 Md€ au 31 décembre 2014).

A - Le tableau patrimonial18 au 31 décembre 2014

Le tableau patrimonial au 31 décembre 2014 présenté ci-après figurera à l’annexe A qui sera soumise à l’approbation du Parlement à l’article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale
pour 2016.

Tableau n° 31 : tableau patrimonial au 31 décembre 2014

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Par analogie avec la présentation des comptes de l’État, le montant présenté en capitaux propres (-110,7 Md€ au 31 décembre 2014) pourrait être assimilé à la situation nette consolidée des entités du champ des lois de financement de la sécurité sociale. En 2014, les capitaux propres ont connu une légère augmentation (+0,1 Md€)19 :

- en 2014, le tableau patrimonial présente pour la première fois depuis sa création un résultat net d’ensemble positif de 1,4 Md€, en amélioration de 3,1 Md€ par rapport à 2013. À titre principal, cette évolution traduit la poursuite de la réduction du déficit global du régime général, des autres régimes et du FSV qui, sur le périmètre du tableau patrimonial, est passé de -16 Md€ en 2013 à -12,7 Md€ en 2014, soit une réduction de 3,3 Md€20. Ce résultat net d’ensemble incorpore non seulement les résultats déficitaires des régimes et du FSV, mais aussi les résultats excédentaires dégagés par la CADES et par le FRR à hauteur respectivement de 12,7 Md€ et de 1,4 Md€. Ces derniers n’ont toutefois pas pour objet de compenser les résultats déficitaires des régimes et du FSV relatifs au même exercice. Les résultats excédentaires de la CADES doivent contribuer à éteindre, d’ici à 2024 en l’état actuel des prévisions, la dette sociale engendrée par l’accumulation des déficits qui lui ont été transférés. Celui du FRR a quant à lui vocation à concourir à long terme au financement des régimes d’assurance vieillesse, après déduction des versements annuels qu’il doit effectuer jusqu’en 2024 à la CADES ;

- le report à nouveau, qui reflète les déficits cumulés des années passées, apporte une contribution négative à la variation des capitaux propres (à hauteur de 4,3 Md€). L’absence de reprise par la CADES au cours de l’année 2014 des déficits 2013 des branches maladie (6,8 Md€) et famille (3,2 Md€)21 induit une forte dégradation du report à nouveau du régime général (-10 Md€ en 2014 contre -4,3 Md€ en 2013)22. Le report à nouveau négatif de la CADES s’est quant à lui réduit de 2,3 Md€ en raison d’une reprise des déficits (10 Md€)23 moins élevée que son résultat 2013 affecté en report à nouveau au 31 décembre 2014 (12,4 Md€).

L’endettement financier net de la sécurité sociale, qui correspond à la différence entre le passif24 et l’actif financiers25, a continué à augmenter (121,4 Md€ au 31 décembre 2014 contre 118 Md€ à fin 2013) et ce, à un rythme plus élevé que lors de l’exercice précédent (+2,9 % contre +1,6 % un an plus tôt) :

- l’endettement financier net du régime général a fortement augmenté (34,6 Md€ au 31 décembre 2014 contre 28,3 Md€ un an plus tôt, dont 30,1 Md€ et 23,7 Md€ respectivement portés par l’ACOSS26), sous l’effet de l’accumulation des déficits des branches de prestations, repris seulement partiellement par la CADES ces dernières années et qui demeurent par conséquent financés par l’ACOSS, ainsi que sous l’effet du transfert à l’ACOSS du financement des déficits cumulés du régime agricole (MSA)27 ;

- les autres régimes présentent un excédent de trésorerie nette de 8,1 Md€, en amélioration de 2,2 Md€ par rapport à l’exercice précédent, principalement sous l’effet de la réduction de l’endettement externe du régime agricole précédemment évoquée ;

- l’endettement financier net de la CADES a faiblement augmenté (133,3 Md€ au 31 décembre 2014 contre 132,9 Md€ un an plus tôt).

B - Avis de la Cour

Conformément aux dispositions de la loi organique du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la Cour exprime son « avis sur la cohérence du tableau patrimonial du dernier exercice clos ».

À ce titre, la Cour s’assure de l’établissement du tableau patrimonial en fonction des données comptables des entités entrant dans son champ, de l’élimination de l’ensemble des actifs et des passifs réciproques de ces entités et de la pertinence des autres retraitements des données comptables effectués. De manière générale, elle apprécie la qualité de l’information procurée au Parlement dans le cadre et à l’appui du tableau patrimonial.

En outre, l’appréciation de la Cour tient compte des opinions exprimées sur les comptes des régimes de sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse par leurs auditeurs externes (Cour s’agissant des branches et de l’activité de recouvrement du régime général et commissaires aux comptes pour les autres régimes, le fonds de solidarité vieillesse, la caisse d’amortissement de la dette sociale et le fonds de réserve pour les retraites).

En application du 2° du VIII de l’article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale, auquel renvoie l’article LO. 132-3 du code des juridictions financières, la Cour a procédé à des vérifications sur le projet de tableau patrimonial au 31 décembre 2014, établi par la direction de la sécurité sociale, qui figurera à l’annexe A soumise à l’approbation du Parlement à l’article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 ainsi que sur les éléments d’information qui seront intégrés aux annexes A et 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour cette même année.

À l’issue de ces vérifications et au regard des éléments d’information qui lui ont été communiqués par la direction de la sécurité sociale, la Cour estime que le tableau patrimonial qui sera soumis à l’approbation du Parlement à l’article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 fournit une représentation cohérente de la situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2014, en exprimant cependant les deux observations suivantes :

1. Malgré des améliorations à leur justification, les actifs et passifs respectifs des régimes de base du régime social des indépendants intégrés au tableau patrimonial demeurent imparfaitement distingués de ceux des régimes complémentaires de retraite et d’invalidité – décès qui n’en relèvent pas (voir C – 1 – infra) ;

2. les opinions exprimées par la Cour et par les commissaires aux comptes continuent à souligner la qualité perfectible des comptes des régimes de sécurité sociale intégrés au tableau patrimonial 2014, en raison notamment des insuffisances des dispositifs de contrôle interne et de la persistance de difficultés comptables (voir C – 2 – infra).

Par ailleurs, la Cour appelle l’attention sur les éléments suivants, qui sont nécessaires à la compréhension des informations procurées par le tableau patrimonial au regard de celles portées dans les états financiers de certaines entités majeures de son périmètre :

- les dettes comptabilisées par le fonds de réserve pour les retraites (FRR) à l’égard de la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) (21 Md€ au 31 décembre 2014)28 ont été réintégrées à ses capitaux propres, en l’espèce les « dotations »29, compte tenu de l’absence de comptabilisation par la CADES de créances réciproques sur le FRR30. Cette remarque n’a pas d’incidence sur le montant total des capitaux propres retracé par le tableau patrimonial, mais uniquement sur leur ventilation entre la CADES et le FRR ;

- en application de la réglementation comptable31, le FRR comptabilise ses actifs financiers à une valeur de marché (35,9 Md€ au 31 décembre 2014) et, dans ses capitaux propres, un écart positif d’estimation par rapport au coût d’acquisition des actifs en question (3,4 Md€) ;

- dans le cadre de l’adossement du financement du régime des industries électriques et gazières (IEG) à la branche vieillesse du régime général en 2005, les employeurs des IEG ont versé une soulte à la CNAVTS à hauteur de 3,1 Md€. Cette caisse nationale l’a elle-même reversée au FRR, qui en assure la gestion jusqu’en 202032. Conformément à la réglementation comptable (voir supra), le FRR réévalue à chaque clôture d’exercice les actifs financiers qu’il gère pour le compte de la CNAVTS (4,4 Md€ au 31 décembre 2014), tandis que celle-ci comptabilise à sa valeur nominale la soulte dont la gestion financière a été confiée au FRR (soit 3,1 Md€ au 31 décembre 2014). Dans le tableau patrimonial, la différence entre les montants inscrits en comptabilité par la CNAVTS et par le FRR (soit 1,4 Md€) fait l’objet d’un reclassement en produit constaté d’avance, en conformité avec le traitement comptable de cette opération défini par le Haut conseil interministériel de la comptabilité des organismes de sécurité sociale (HCICOSS)33.

C - Motivations détaillées de l’avis de la Cour

1 - Une ventilation encore imparfaitement assurée du bilan du RSI entre les régimes de base intégrés au tableau patrimonial et les régimes complémentaires

Le périmètre du tableau patrimonial porte uniquement sur les régimes de base. De ce fait, les données comptables relatives aux régimes de base et aux régimes complémentaires doivent être dissociées.

Les informations communiquées à cette fin par le régime social des indépendants (RSI) et le régime agricole (mutualité sociale agricole ou MSA) ont conduit la direction de la sécurité sociale à retenir respectivement 5,1 Md€ (sur un bilan total de 20,5 Md€ au 31 décembre 2014) et 6,1 Md€ (sur un bilan total de 6,7 Md€ au 31 décembre 2014) d’actifs et de passifs au titre des régimes de base maladie et vieillesse intégrés au tableau patrimonial.

Si des améliorations notables ont été apportées aux éléments de justification communiqués à la Cour34, le RSI continue à rencontrer des difficultés pour isoler, au sein de son bilan global, les actifs et passifs respectifs des régimes de base intégrés au tableau patrimonial et des régimes complémentaires qui n’en relèvent pas.

Ces difficultés ont pour traduction un déséquilibre (d’un montant agrégé de 149 M€) entre les montants totaux de l’actif et du passif des régimes de base que compense un déséquilibre de sens inverse entre ceux de l’actif et du passif du régime complémentaire.

Les anomalies comptables à l’origine de ce déséquilibre affectent la fiabilité des données intégrées au tableau patrimonial au titre des régimes de base du RSI.

2 - Les opinions exprimées par les auditeurs externes sur la qualité des comptes 2014

S’agissant des entités qui sont comprises dans le champ du tableau patrimonial, mais pas dans celui des tableaux d’équilibre, les états financiers du FRR au 31 décembre 2014 ont été certifiés sans réserve par ses commissaires aux comptes et l’auditeur contractuel de la CADES n’a pas émis d’observation sur ses états financiers à la même date35.

Pour ce qui concerne les régimes et le fonds de solidarité vieillesse qui sont compris dans le champ des tableaux d’équilibre comme de celui du tableau patrimonial, il est renvoyé aux développements précédents sur les tableaux d’équilibre (voir I – C – 4. supra).

Au regard des opinions de certification avec réserves exprimées par la Cour sur les états financiers du régime général, de certification avec réserves exprimées par les commissaires aux comptes sur ceux d’autres régimes (RSI, régime agricole, régime des mines, ENIM et CNAVPL), la fiabilité des données comptables intégrées au tableau patrimonial est imparfaitement assurée pour ce qui concerne notamment les estimations comptables relatives à l’actif circulant (évaluation des dépréciations de créances, des produits à recevoir et des charges à payer) et aux provisions pour risques et charges.

conclusion et recommandations

Au regard des projets communiqués à la Cour, les tableaux d’équilibre et le tableau patrimonial qui seront soumis à l’approbation du Parlement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 fournissent une image cohérente du résultat et de la situation patrimoniale des entités comprises dans leurs périmètres.

S’agissant du tableau patrimonial relatif au dernier exercice clos (2014), la Cour estime que le projet qui lui a été communiqué, ainsi que les informations détaillées et précises sur la nature et l’évolution des actifs et passifs qui figureront à l’annexe 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, permettent d’éclairer dûment le Parlement sur les données soumises à son approbation.

En revanche, les limites relatives aux tableaux d’équilibre et soulignées à plusieurs reprises par la Cour perdurent. L’absence d’éclairage dans l’annexe 4 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 sur la consistance et l’évolution des recettes et des dépenses et la persistance de contractions de produits et de charges, en contrariété avec les principes comptables généraux, ne permettent pas au Parlement de disposer d’une information appropriée pour l’adoption des tableaux d’équilibre.

La Cour rappelle à nouveau que les informations contenues dans les rapports de la commission des comptes de la sécurité sociale, répondent à un objet, à un niveau de détail et à un mode d’exposition distincts de ceux propres à des annexes à des lois de financement et ne permettent pas de compenser l’absence de communication au Parlement d’une information de synthèse sur la formation des résultats des régimes obligatoires de base, du régime général et du fonds de solidarité vieillesse.

La Cour formule ainsi les recommandations suivantes :

Source : supprimer le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes de sécurité sociale et intégrer une rubrique propre au fonds de solidarité vieillesse (FSV) dans les tableaux d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale d’une part et du régime général de sécurité sociale d’autre part (recommandation réitérée) ;

Source : assurer l’information du Parlement sur la formation des résultats retracés par les tableaux d’équilibre en intégrant à l’annexe 4 au projet de loi de financement des informations littéraires et chiffrées détaillées sur la consistance et l’évolution des produits (« recettes ») et des charges
(« dépenses »), sur le modèle de l’annexe 9 au PLFSS pour ce qui concerne le tableau patrimonial (recommandation réitérée) ;

Source : mettre fin sans délai aux contractions de produits et de charges dans les tableaux d’équilibre, en contrariété avec le cadre normatif fixé par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale pour l’établissement des comptes des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (recommandation réitérée).

Annexe : liste des régimes (hors régime général) intégrés au tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, présentés par branche.

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]



1. Le terme de combinaison désigne la consolidation des comptes d’entités qui n’ont pas de liens capitalistiques entre elles, mais qui entretiennent des relations suffisamment étroites pour justifier l’établissement de comptes communs dans lesquelles sont éliminées leurs opérations réciproques.




2. À l’exception des régimes dépourvus d’un bilan et de régimes mineurs qui en sont pourvus.




3. Depuis 1996, la comptabilité des organismes de sécurité sociale doit être tenue en droits constatés.




4. Annexe 4 relative aux recettes et dépenses des régimes par catégorie et par branche.




5. Cour des comptes Rapport de certification des comptes du régime général de sécurité sociale - exercice 2014, p. 74, juin 2015, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.




6. L’annexe 4 décompose les charges depuis la loi de financement pour 2012, à la suite d’une demande de la Cour.




7. Cour des comptes Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2014, chapitre V : les lois de financement de la sécurité sociale, une ambition à élargir, p. 153-176, septembre 2014, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.




8. Dans l’attente de la communication par la direction de la sécurité sociale du projet d’annexe 9 relatif au projet de loi de financement pour 2016, cette mention vise de manière rétrospective l’annexe 9 au projet de loi de financement pour 2015.




9. À titre principal, neutralisation de la compensation démographique généralisée entre les régimes d’assurance vieillesse, des compensations bilatérales des branches maladie et AT-MP du régime général à certains régimes, de la prise en charge des déficits des branches maladie et vieillesse de certains régimes par celles du régime général, de l’adossement au régime général du financement du régime spécial d’assurance vieillesse des industries électriques et gazières et des prises en charge de cotisations par les régimes maladie en faveur des praticiens et auxiliaires médicaux.




10. À titre principal, neutralisation des concours de la branche famille à la branche vieillesse de nature directe (cotisations d’assurance vieillesse des parents au foyer) et indirecte (compensation auprès du FSV de la prise en charge par ce dernier des majorations pour enfants en faveur des régimes d’assurance vieillesse), des prises en charge par la branche famille de cotisations et de CSG dans le cadre de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) et de la compensation de la branche AT-MP à la branche maladie du régime général au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles.




11. Cette neutralisation a pour objet de faire apparaître la contribution effective de la CNSA au financement des dépenses de l’ONDAM médico-social (soit 1,1 Md€ pour l’ensemble des régimes, dont 0,9 Md€ pour le régime général).




12. Comme les régimes d’assurance maladie et vieillesse de ports autonomes, la retraite des cultes d’Alsace-Moselle, les rentes d’accidents du travail du département de Paris, ou les régimes de chemin de fer secondaires.




13. Un examen limité consiste en la mise en œuvre de travaux moins étendus que ceux diligentés dans le cadre d’un audit (essentiellement entretiens avec la direction et procédures analytiques). Lorsqu’il n’en a pas identifié, il procure de ce fait un niveau d’assurance moins élevé sur l’absence d’anomalies significatives dans les comptes.




14. Par rapport aux 39 régimes mentionnés dans la liste annexée au projet de loi de financement pour 2015, figurent ici 34 régimes (regroupement en un seul régime – le régime agricole - des régimes des salariés et des non-salariés agricoles et également en un seul régime - le régime social des indépendants - des régimes maladie des indépendants, du régime vieillesse des artisans et du régime vieillesse des commerçants ; intégration au régime général en 2013 du régime spécial d’assurance vieillesse des chemins de fer secondaires et du régime d’assurance maladie de la chambre de commerce et d’industrie de Paris).




15. Rapport retraçant la situation patrimoniale [au 31 décembre du dernier exercice clos] des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l'amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour la couverture des déficits constatés [pour le dernier exercice clos].




16. L’activité de recouvrement et les quatre branches du régime général (maladie,
AT-MP, famille et vieillesse).



17

. Sont notamment concernés, au titre de l’absence de bilan qui lui serait propre, le régime des pensions civiles et militaires de l’État et, au regard de leur caractère faiblement significatif sur le plan financier, les fonds communs des accidents du travail (FCAT) et des accidents du travail agricole (FCATA), le service de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (SASPA), les régimes de retraite de l’Opéra de Paris et de la Comédie française et, nouvellement en 2014, le fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État (FSPOEIE), ainsi que le fonds d’allocation temporaire d’invalidité des agents des collectivités locales (FATIACL). L’écart entre le nombre total de régimes intégrés ou, à l’inverse, non pris en compte dans le périmètre du tableau patrimonial (37 au total) et celui des régimes mentionnés dans la liste annexée au projet de loi de financement pour 2015 (39) correspond à deux régimes intégrés juridiquement et comptablement à des branches du régime général (régime spécial d’assurance vieillesse des chemins de fer secondaires et régime d’assurance maladie de la chambre de commerce et d’industrie de Paris).



18

. Le tableau patrimonial n’est pas présenté à périmètre constant, les deux régimes retirés de ce dernier en 2014 (FSPOIE et FATIACL) n’affectant que marginalement la comparabilité des exercices (le montant cumulé de leur bilan s’élève à 0,15 Md€ et celui de leurs capitaux propres à 0,1 Md€ au 31 décembre 2014).



19

. Au titre des exercices précédents, ils s’étaient dégradés (-6,7 Md€ en 2012 et
-3,6 Md€ en 2013).



20


. L’écart par rapport au solde retracé par les tableaux d’équilibre (soit -12,8 Md€) est lié à l’intégration de l’ACOSS, qui dégage un résultat comptable excédentaire en 2014 (33 M€), au périmètre du tableau patrimonial, mais non à celui des tableaux d’équilibre.



21


. Dans la limite du double plafond de 62 Md€ de reprises de déficits de la branche vieillesse et du FSV au titre des exercices 2011 à 2018 en cumul et de 10 Md€ de reprises par an fixé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.



22


. Ces déficits 2013 d’un total de -10 Md€ sont affectés en report à nouveau en 2014. Cet effet est atténué par une reprise d’une partie du déficit 2012 de la branche maladie (4 Md€) et par le résultat 2013 de la branche AT-MP (+0,6 Md€).



23


. Le décret n° 2014-97 du 3 février 2014 a transféré à la CADES les déficits de la branche vieillesse et du FSV pour l’exercice 2013 (6 Md€) et une partie du déficit constaté de la branche maladie pour 2012 (à hauteur de 4 Md€, au regard d’un déficit 2012 d’un montant total de 5,85 Md€).



24


. Pour l’essentiel, il s’agit de l’endettement social porté par la CADES et par l’ACOSS.



25


. Les actifs financiers sont principalement détenus par le FRR (37,2 Md€), la CADES (8,7 Md€ au titre du préfinancement du remboursement d’emprunts) et le régime de retraites de la Banque de France (4,6 Md€).



26


. À titre principal, l’endettement financier de l’ACOSS comprend des titres émis sur les marchés financiers (24,2 Md€) et un prêt à moyen terme souscrit auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations (6 Md€).



27


. Une avance de l’ACOSS au régime agricole de 2,5 Md€ est venue se substituer fin 2014 à un crédit relais bancaire de 1,7 Md€ contracté par la CCMSA. Cette avance « intra-périmètre » du tableau patrimonial qui figure en dette d’exploitation au bilan du régime agricole est neutralisée dans le cadre du tableau patrimonial, mais vient accroître l’endettement financier de l’ACOSS et, ce faisant, du régime général.



28


. En vue de financer une partie des reprises de déficits des branches famille, maladie et vieillesse du régime général et du FSV, la LFSS 2011 a prévu le versement par le FRR à la CADES de 2,1 Md€ par an entre 2011 et 2024, soit 29,4 Md€ au total.



29


. Par analogie avec le traitement comptable des versements du FRR aux régimes de retraite alors prévu à partir de 2020 (avis n° 2008-10 du conseil national de la comptabilité – CNC -), les versements du FRR à la CADES sont opérés en premier lieu sur les réserves du fonds et, quand celles-ci sont épuisées, sur ses dotations. De ce fait, dans le tableau patrimonial, le montant restant dû à la CADES a été reclassé dans le poste « dotations » du FRR.



30


. Dans l’annexe à ses comptes, la CADES mentionne ces ressources en tant qu’engagements reçus du FRR.



31


. Avis n° 2003-07 du conseil national de la comptabilité (CNC).



32


. Le HCICOSS a défini en 2005 le traitement comptable de cette opération, révisé en 2009 au titre des comptes 2008.



33


. Dont les missions ont depuis lors été confiées au conseil de normalisation des comptes publics (CNoCP).



34


. Notes méthodologiques, balance générale ventilée par régimes et tableau de passage entre les bilans par régimes et le bilan combiné.



35


. La CADES soumet volontairement ses états financiers à un audit contractuel. Dans son rapport sur la qualité des comptes des administrations publiques de l’exercice 2013 (Cour des comptes, La qualité des comptes des administrations publiques, p. 25, octobre 2014, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr), la Cour a estimé qu’au regard des enjeux financiers liés à ses activités, les états financiers de la CADES devraient faire l’objet d’une certification obligatoire en application de dispositions légales.