présentation

Dans ce chapitre, la Cour analyse l’évolution des comptes de la sécurité sociale en 2014 par rapport à 2013 et les prévisions retenues dans les lois de financement initiales de la sécurité sociale pour 2014 et pour 2015, ainsi que l’actualisation des projections que comportait la loi de financement rectificative du 8 août 2014.

En 2014, dans un environnement économique dégradé qui a freiné la progression spontanée des recettes, la croissance toujours soutenue des dépenses n’a pu être neutralisée que par un apport de nouvelles ressources. Les déficits sociaux, tout en restant à des niveaux élevés, ont pu ainsi connaître une diminution limitée, conforme aux prévisions initiales et affectant très inégalement les branches du régime général (I).

Au vu des prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2015, cette réduction limitée des déficits en 2014 connaîtrait un ralentissement marqué en 2015. Les dépenses connaîtraient une progression toujours soutenue en termes réels, tandis que les recettes seraient peu dynamiques, en l’absence, contrairement à 2014, de mesures significatives d’augmentation.

Cette pause dans la diminution des déficits décale désormais le retour à l’équilibre nettement au-delà de 2018 et conduit à différer l’amorce d’une inflexion de la dette sociale, dont la part financée à très court terme par l’ACOSS ne cesse d’augmenter, ce qui au regard des risques de remontée des taux d’intérêt, rend urgent d’organiser rapidement leur reprise par la CADES (II).

I - En 2014, une réduction limitée des déficits qui se maintiennent à des niveaux élevés

Les déficits du régime général et des autres régimes obligatoires de base ont poursuivi en 2014 la réduction entamée au lendemain de la crise financière des années 2008-2009, mais à un rythme lent, comparable à celui de 2013.

Le déficit agrégé du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’est inscrit à un niveau très légèrement supérieur (de 0,3 Md€) à l’objectif retenu dans la loi de financement initiale. Cette amélioration a concerné l’ensemble des branches du régime général selon une ampleur variable.

A - Une amélioration modeste des déficits, en ligne avec les objectifs initiaux

1 - Des déficits toujours importants, une réduction très inégale selon les branches

Le déficit cumulé des régimes obligatoires de base et du FSV s’est établi à -12,8 Md€ en 2014, en réduction de -3,2 Md€ par rapport à 2013.

Le mouvement de baisse observé depuis 2010 (déficit de -29,3 Md€) s’est ainsi poursuivi avec une diminution proche de celle de 2013 (-3,1 Md€), mais inférieure à celle des années précédentes (-3,5 Md€ en 2012 ; -7 Md€ en 2011).

Ce déficit reste supérieur d’environ 4 Md€ à son niveau, déjà très élevé, d’avant la crise.

Graphique : évolution des déficits sociaux (2008-2014)

[Graphique à consulter dans le fichier Word ou pdf Joint].

Cette amélioration a été permise par le recul de 2,8 Md€ du déficit du régime général, qui s’est inscrit à -9,7 Md€ et par l’excédent de 0,4 Md€ enregistré par les autres régimes obligatoires de base, après un déficit de 0,6 Md€ en 20131.

Tableau n° 1 : évolution des déficits sociaux (2008-2014)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf Joint].

Contrairement à l’année précédente, marquée par une détérioration des soldes des branches maladie (-0,9 Md€) et famille (-0,7 Md€), toutes les branches du régime général ont connu une amélioration en 2014, quoique d’ampleur très inégale. Les déficits des branches maladie, famille et vieillesse se sont ainsi réduits, respectivement, de 0,3 Md€, 0,5 Md€ et 1,9 Md€ et l’excédent de la branche AT-MP a augmenté de 0,1 Md€.

La contraction marquée du déficit de la branche vieillesse a plus que compensé l’alourdissement du déficit du FSV (passé de -2,9 Md€ à -3,5  Md€ en 2014), permettant une amélioration de 1,3 Md€ du solde agrégé de la branche vieillesse et du FSV. Ce dernier s’inscrit à -4,7 Md€, contre -6,0  Md€ l’année précédente.

Graphique n° 2 : déficits des branches du régime général et du FSV (2008-2014)

[Graphique à consulter dans le fichier Word ou pdf Joint].

2 - Des déficits proches en définitive des prévisions initiales

Les modifications du cadrage macroéconomique pour 2014 introduites dans la loi de finances rectificative de juin 2014 et la loi de finances initiale pour 20152 ont conduit à dégrader fortement les hypothèses sur lesquelles reposaient les prévisions de déficits sociaux.

La prévision de croissance du PIB pour 2014 est ainsi passée de +1 % en loi de financement initiale et en loi de financement rectificative pour 2014 à +0,4 % dans la loi de financement initiale pour 2015, tandis que la prévision d’inflation pour 2014 passait dans le même temps de +1,2 % à +1,1 %, puis à +0,5 %. La progression attendue de la masse salariale du secteur privé a été revue à la baisse de 0,6 point, passant de +2,2 % en loi de financement et en loi de financement rectificative pour 2014 à +1,6 % en loi de financement pour 2015.

Tableau n° 2 : variations du PIB et de la masse salariale (2010-2014)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

En conséquence, la loi de financement pour 2015 a revu à la hausse le déficit du régime général et du FSV attendu pour 2014, le portant à -15,4 Md€, soit son niveau de 2013. Cette dégradation de 2,1 Md€ par rapport à la prévision de la loi de financement rectificative d’août 2014 a résulté pour l’essentiel d’une réduction de la prévision de recettes du régime général3.

Cette réestimation est apparue a posteriori surévaluée, puisque le déficit effectif du régime général et du FSV lui a été inférieur de 2,2 Md€4. Cet écart s’explique pour plus des deux tiers par l’évolution des recettes, supérieures en définitive de 1,7 Md€ à la dernière prévision.

Les produits tirés des cotisations sociales, du forfait social et de la CSG se sont en particulier montrés plus dynamiques que prévu, à hauteur de respectivement 0,5 Md€, 0,3 Md€ et 0,4 Md€, tandis que le montant de l’ensemble des remises pharmaceutiques excédait de près de 0,2 Md€ la prévision de fin d’année5.

De même, des dépenses légèrement inférieures aux prévisions ont été constatées sur certains postes, à hauteur de 0,5 Md€ pour les prestations sociales, notamment pour l’assurance maladie, de 0,3 Md€ pour les charges de gestion courante et de 0,1 Md€ pour les dépenses d’action sociale.

Cette conjonction d’écarts favorables, tant en recettes qu’en dépenses, explique que le déficit effectif, loin de se dégrader dans les proportions envisagées dans la loi de financement pour 2015, se soit inscrit à un niveau finalement proche de la prévision de la loi de financement initiale pour 2014 comme de la prévision révisée de la loi de financement rectificative d’août 2014.

Le solde des autres régimes de base a également enregistré une évolution plus favorable qu’anticipé : estimé à -0,5 Md€ dans la loi de financement initiale, puis réduit à -0,2 Md€ dans la loi de financement rectificative et à -0,1 Md€ dans la loi de financement pour 2015, il s’est finalement inscrit en excédent à la clôture des comptes, à +0,4 Md€.

Tableau n° 3 : comparaison des déficits de 2014 avec les prévisions

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

3 - Une composante structurelle du déficit en réduction

La sensibilité des recettes et du solde à la croissance de l’économie peut s’apprécier à travers l’analyse des composantes structurelle et conjoncturelle du déficit. Comme elle l’avait fait sur l’exercice 20136, la Cour a appliqué la méthodologie utilisée dans l’article liminaire de la loi de financement rectificative7 à l’ensemble constitué du régime général et du FSV.

Méthodologie suivie pour l’évaluation du solde structurel

L’approche suivie consiste à calculer le solde conjoncturel, constitué de la perte de recettes liée à l’écart de production, celui-ci étant égal à la différence accumulée entre la croissance effective et la croissance potentielle du PIB. Ce solde conjoncturel est ensuite déduit du solde effectif pour obtenir le solde structurel. Ce calcul repose sur l’hypothèse que l’évolution spontanée des recettes est fonction de la croissance du PIB en valeur avec une élasticité égale à 0,888.

Selon ces estimations, qui sont à considérer avec une certaine précaution en raison de leur champ restreint, le déficit du régime général et du FSV serait dû en 2014 pour un peu plus de 70 % à la faiblesse de la croissance économique par rapport à son potentiel estimé, la part conjoncturelle du déficit étant de -9,5 Md€ (cf. tableau n° 4 infra).

Le Haut Conseil des finances publiques s’est cependant interrogé9 sur la pertinence d’un écart de production durablement creusé se traduisant, dans la prévision du Gouvernement, par une composante conjoncturelle élevée de déficit.

Il resterait en tout état de cause, sous ces hypothèses, une composante structurelle proche de 4 Md€ dans le déficit agrégé du régime général et du FSV.

Tableau n° 4 : estimation du solde structurel du régime général et du FSV (2013-2014)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

B - Des recettes tirées par des mesures nouvelles, une progression des dépenses plus rapide que celle du PIB

Le déficit du régime général et du FSV a poursuivi sa réduction en 2014 sous l’effet d’une augmentation des recettes (+3 %) plus vigoureuse que celle des dépenses (+2,2 %). L’apport de recettes fiscales supplémentaires a joué un rôle décisif dans l’amélioration des soldes. En effet, bien qu’en décélération depuis deux ans, le rythme de progression des charges nettes est resté très supérieur à ceux du PIB et de la masse salariale des entreprises du secteur privé.

1 - Une contribution déterminante des recettes nouvelles à la réduction des déficits

Les recettes du régime général et du FSV10 ont totalisé 332,8 Md€, en progression de +3 % (contre + 3,6 % en 2013). Leur croissance en 2014 a été deux fois plus rapide que celle de la masse salariale privée (+1,5 %).

Tableau n° 5 : recettes du régime général et du FSV (2012-2014)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Les cotisations sociales et les produits de CSG dont l’assiette est assise sur les revenus d’activité, ainsi que les contributions sociales, ont progressé moins rapidement en 2014, contrairement aux impôts et taxes affectés.

Ces derniers ont été tirés en particulier par les mesures nouvelles de recettes inscrites dans la loi de financement initiale (cf. tableau n° 6 infra), pour compenser notamment l’impact du ralentissement économique anticipé à l’automne 2013. Avec l’effet report en année pleine de mesures antérieures, ces dispositions ont apporté 5,3 Md€11  de ressources nouvelles au régime général et au FSV, assurant un peu plus de la moitié de la croissance des recettes observée en 2014 (+9,9 Md€). En leur absence, le déficit du régime général et du FSV ne se serait pas réduit de 2,2 Md€, mais creusé de 3,1 Md€.

Dans ce contexte, la croissance des produits nets a été tirée par la forte augmentation des recettes fiscales (+8,9 %, contre +1,4 % en 2013), qui a apporté un surcroît de ressources par rapport à 2013 de 3,4 Md€ pour le régime général et le FSV.

En particulier, l’affectation à la branche maladie de 3 Md€ de TVA nette supplémentaire12 (cf. schéma infra) a joué un rôle déterminant dans l’évolution des déficits. Elle a permis la compensation par l’État à la branche famille de l’impact de la baisse de 0,15 point du taux de cotisations familiales (1 Md€) d’une part et la rétrocession à cette même branche de la recette fiscale procurée par la réforme du quotient familial (1 Md€), ainsi que la rétrocession à la branche maladie des recettes générées par la fiscalisation des contributions des employeurs aux contrats d’assurance santé complémentaire (1 Md€) d’autre part.

Cette rétrocession du produit de ces deux prélèvements fiscaux supplémentaires a été déterminante pour tenir l’objectif de réduction des déficits fixé par la loi de financement initiale (-2,2 Md€), puisqu’elle a apporté à la sécurité sociale 2 Md€ de ressources additionnelles nettes en 2014.

Tableau n° 6 : impact des mesures de recettes sur les produits du régime général et du FSV en 2014

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Le schéma qui suit retrace les principaux transferts d’affectation d’impôts et de CSG ayant affecté les branches du régime général et le FSV en 2014, en particulier les 3 Md€ de TVA nette supplémentaire affectés à la branche maladie13.

Schéma n° 1 : principaux transferts d’affectation d’impôts et de CSG ayant affecté les branches du régime général et le FSV en 2014

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Contrairement aux impôts et taxes affectés en forte progression, les cotisations sociales, principale composante des recettes, ont enregistré une hausse de +2,4 % en 2014, moindre que celle de l’année précédente (+3,2 %) mais supérieure à celle de la masse salariale privée, dont l’évolution des cotisations dépend directement. Les cotisations de la branche vieillesse ont en particulier été tirées par des hausses de taux14. En sens contraire, l’impact de la baisse de 0,15 point du taux de cotisations familiales inscrite dans la loi de financement initiale pour 2014 a été de -1,1 Md€.

Les produits de CSG attribués au régime général et au FSV (76,4 Md€) n’ont progressé que de +1,2 % en 2014. Ils ont bénéficié du dynamisme de la CSG sur les revenus de remplacement (+4,5 %) et de la progression plus modérée de celle sur les revenus d’activité (+ 1,6 %), qui assurent ensemble près de 90 % de cette contribution15.

Les contributions sociales ont apporté au régime général et au FSV des ressources en hausse par rapport à 2013 (+2,2 %).

2 - Une progression des dépenses moins rapide qu’en 2013, mais encore nettement supérieure à celle du PIB

Les charges nettes du régime général ont atteint 343,8 Md€ en 2014, en hausse de +2,2 % par rapport à 2013. Si leur décélération s’accentue (+2,7 % en 2013 et +2,9 % en 2012), elles ont continué à augmenter à un rythme nettement plus soutenu que la croissance du PIB et que celle de la masse salariale (respectivement +1,3 et +1,5 %).

Tableau n° 7 : dépenses du régime général (2012-2014)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Leur évolution s’explique pour l’essentiel par la progression des dépenses de la branche maladie (+2,2 % en 2014, après +2,4 % en 2013) et de la branche vieillesse (+2 %, après +3,9 %), ces deux branches étant à l’origine de 80 % des dépenses du régime général16.

Les prestations légales constituent la principale composante des dépenses nettes du régime général17. Elles ont progressé de +2,4 % en 2014, soit moins rapidement qu’en 2013 (+2,9 %), mais plus fortement que l’ensemble des dépenses (+2,2 %). A joué en ce sens le dynamisme des prestations sociales versées par la branche maladie (+2,8 %18, contre +2,5 % l’exercice précédent) et, dans une moindre mesure, par la branche vieillesse (+2,5 %, après +4,0 % en 2013).

Les dépenses de l’ONDAM19, inférieures de 1,2 Md€ à l’objectif initial et de 0,4 Md€ à celui révisé en loi de financement rectificative puis par la loi de financement pour 2015, ont été supérieures de 4,2 Md€ à leur niveau de 2013, leur progression respectant le taux de croissance de +2,4 % fixé pour l’ONDAM 2014.

C - Des résultats très contrastés entre les branches du régime général comme avec le FSV

1 - Branche maladie : un déficit à peine réduit et toujours élevé, une part croissante dans le déficit du régime général et du FSV

Le déficit de la branche maladie s’est établi à -6,5 Md€ en 2014, en baisse de 0,3 Md€ seulement par rapport à 2013, alors que la loi de financement initiale visait une réduction de 0,8 Md€. S’il représente une part des charges nettes de la branche en léger recul (3,9 %, après 4,1 % en 2013), sa contribution au déficit total du régime général et du FSV s’est accrue en 2014 pour la seconde année consécutive, pour atteindre près de la moitié de ce dernier (49,2 %).

Les charges ont crû de +2,2 % (soit +3,7 Md€), contre +2,4 % l’année précédente, soit une progression moins soutenue que celle des produits (+2,5 %). La forte hausse des prestations sociales (2,8 %, soit +4,3 Md€), qui comptent pour 94 % dans les charges de la branche, y a directement contribué.

Cette progression a été tirée par les dépenses entrant dans le champ de l’ONDAM (+2,8 %, contre +2,4 % en 2013), du fait en particulier d’une vive progression des soins de ville (+3,9 %).

Les dépenses hors ONDAM ont également sensiblement augmenté (+2,4 %, contre cependant +3,3 % l’année précédente)20, mais elles n’ont, en raison de leur part réduite dans les dépenses, contribué qu’à hauteur de 0,3 Md€ à la hausse de 4,3 Md€ au total des prestations servies par la branche.

Tableau n° 8 : formation du résultat 2014 de la branche maladie

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Les produits, en progression de 2,5 % (soit +3,9 Md€), ont été soutenus par la croissance des remises conventionnelles versées par les fabricants de médicaments (+0,6 Md€) en lien avec les nouveaux traitements contre l’hépatite C21 et par des recettes fiscales apportées par la loi de financement pour 2014.

L’affectation à la branche maladie de 3 Md€ de TVA nette s’est accompagnée du transfert à la branche famille de la contribution sur les jeux et paris, du prélèvement sur les stock-options et d’une fraction de CSG. Les recettes apportées par la taxe sur les tabacs ont enregistré un recul de 0,9 Md€22, tandis que les produits de CSG s’inscrivaient, en raison de la réduction de la part affectée à la branche, en retrait de 0,5 Md€ (-0,9 %) par rapport à l’année précédente. Enfin, le transfert des recettes du forfait social à la branche vieillesse et au FSV a été compensé par l’attribution d’une fraction du prélèvement social sur les revenus du capital.

2 - Branche AT-MP : un excédent conforté malgré l’alourdissement de charges de transferts

La branche AT-MP est demeurée excédentaire en 2014, affichant un solde de +0,7 Md€ (après +0,6 Md€ en 2013).

Tableau n° 9 : formation du résultat 2014 de la branche AT-MP

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

L’évolution du résultat a été plus positive qu’anticipé23, les cotisations ayant été en définitive supérieures de 0,3 Md€ à l’estimation initiale (et de 0,2 Md€ à la prévision révisée en loi de financement pour 2015) et les prestations inférieures de près de 0,3 Md€ à celle inscrite dans la loi de financement initiale (et de 0,2 Md€ à la dernière prévision).

Les produits nets ont à nouveau augmenté en 2014 à un rythme soutenu (+3,1 %, après +3,9 % en 2013), tirés principalement par le dynamisme des cotisations sociales nettes (+3,8 %, contre +5 % en 2013). Les charges nettes ont connu un vif rebond (+2,8 % après la baisse de
-3,1 % enregistrée en 2013) du fait de l’augmentation de 0,3 Md€ de la contribution de la branche au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante24 et d’une hausse de 0,1 Md€ des prestations d’incapacité temporaire.

3 - Branche famille : un déficit toujours proche de 3 Md€ malgré une légère amélioration

Le déficit de la branche famille s’est inscrit à -2,7 Md€ en 2014, en diminution de 0,5 Md€ par rapport à 2013. Il représente une part en recul des charges nettes de la branche (4,6 % contre 5,5 % en 2013).

La croissance des charges nettes de la branche s’est ralentie à 2,1 %, après 2,7 % en 2013, sous l’effet essentiellement de la décélération des prestations légales (+0,8 % en 2014 au lieu de +2,4 % en 2013) permise par la faible revalorisation de la base mensuelle de calcul des allocations familiales25 et par la progression modérée des allocations logement.

Les transferts de charges, principalement à la CNAVTS pour l’assurance vieillesse des parents au foyer et au titre des majorations de pensions pour enfants, ont progressé moins rapidement qu’en 2013.

Les prestations extra-légales d’action sociale et les charges de gestion courante ont été tirées par l’intégration dans les comptes de la branche des prestations extra-légales et des charges de gestion courantes de la mutualité sociale agricole. Après neutralisation de cette intégration, l’augmentation des charges nettes de la branche n’a été que de 1,5 % en 2014.

Les produits ont progressé deux fois plus rapidement qu’en 2013 (+3,2 %, au lieu de +1,5 %) grâce à l’apport d’une fraction de CSG auparavant affectée à la branche maladie26 et à celui de recettes fiscales et contributions sociales affectées précédemment à d’autres régimes27.

Ces mouvements ont permis de rétrocéder à la branche le gain fiscal attendu de la réforme du quotient familial, pour près de 1 Md€ et de compenser la réduction de 0,15 point du taux de cotisations familiales intervenue en 201428, à l’origine d’un recul de 0,2 % des cotisations sociales nettes.

Tableau n° 10 : formation du résultat 2014 de la branche famille

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

4 - Branche vieillesse : un déficit en net recul sous l’effet d’un ralentissement des charges et de l’apport de ressources nouvelles

La branche vieillesse a contribué plus fortement que les autres branches à la réduction du déficit du régime général en 2014. Après un recul de 0,7 Md€ en 2013, son déficit s’est en effet contracté de 1,9 Md€ pour s’établir à -1,2 Md€, son niveau le plus bas depuis dix ans.

Conforme à l’objectif retenu par la loi de financement initiale pour 2014 et inférieur de 0,4 Md€ à la prévision révisée en fin d’année, il ne représente plus que 1 % des charges nettes de la branche, contre 2,7 % en 2013.

Sa part dans le déficit du régime général et du FSV s’est, à l’inverse de celle de la branche maladie, très fortement réduite depuis trois ans. Le constat est identique si l’on agrège le déficit de la branche et celui du FSV, comme le montre le graphique suivant.

Graphique n° 3 : contribution du déficit de la branche vieillesse et du FSV au déficit cumulé du régime général et du FSV (2009-2014)

[Graphique à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

La baisse du déficit résulte de la poursuite d’un rythme de progression des produits près de deux fois supérieur à celui des charges, dans un contexte marqué par le très net ralentissement de ces dernières29.

Les prestations sociales nettes, qui représentent 93 % des charges, ont augmenté de +2,4 %, contre +3,9 % en 2013. Cette moindre progression est due principalement à l’absence de revalorisation des pensions en 2014, après une revalorisation de +1,3 % en 2013. Dans une moindre mesure, elle s’explique aussi par une dynamique des départs en retraite favorable en 2014 (-4 %), à la suite du recul de l’âge légal introduit en 2010. La baisse des transferts de compensation généralisée vieillesse a également contribué à freiner les charges de la branche.

Tableau n° 11 : formation du résultat 2014 de la branche vieillesse

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Plus de la moitié de la hausse des produits en 2014 (2,8 Md€ sur 4,2 Md€) est imputable au dynamisme des cotisations sociales (+4 %) résultant des hausses de taux introduites par la réforme des retraites30 (cf. tableau n° 6 supra). Les prises en charge de cotisations et de prestations par le FSV et l’amélioration de la situation financière du régime des salariés agricoles ont contribué à la progression marquée (+4 %, soit +1,2 Md€) des produits de transferts.

À l’inverse, les contributions, impôts et taxes nets affectés à la branche ont enregistré une forte décélération (+3 %, contre +9,4 % l’année précédente). Contrairement à 2013, aucune mesure nouvelle significative n’est intervenue, mais des réaffectations entre branches ont été opérées : la fraction du forfait social affectée à la CNAVTS a été augmentée (+2,7 Md€), en contrepartie de la diminution de la part de la taxe sur les salaires et de la fraction de prélèvement social sur les revenus du capital lui revenant31.

5 - Le Fonds de solidarité vieillesse : une aggravation préoccupante du déficit

Le déficit du FSV s’est creusé de 0,6 Md€ en 2014, passant de -2,9 Md€ à -3,5 Md€, soit un niveau supérieur de 0,1 Md€ à la prévision de la loi de financement initiale. Il représente désormais 17 % de ses charges nettes, contre 14,7 % en 2013 et sa part dans le déficit cumulé du régime général et du FSV a augmenté très fortement en 2014 (28,5 %, contre 18,8 % en 2013).

La croissance toujours élevée des charges nettes (+4,8 %, après +4,5 % en 2013) contraste avec un freinage brutal des produits (+1,9 %, contre +14,5 % l’année précédente), qui illustre l’évolution heurtée caractérisant les recettes du FSV depuis plusieurs années.

Le dynamisme des charges résulte principalement de la hausse des prises en charge de cotisations au titre des périodes de chômage (+5,7 %), sous l’effet de la hausse du nombre de chômeurs et de l’incidence de l’augmentation des taux de cotisation vieillesse sur le calcul des prises en charge. Il s’explique aussi par la progression des prises en charge de prestations (+3,3 %), sous l’effet principalement du versement d’une prime exceptionnelle de 40 € aux retraités percevant une pension inférieure à 1 200 € mensuels (232 M€).

La refonte de la répartition des contributions sociales et des recettes fiscales entre organismes de sécurité sociale engagée par la loi de financement pour 2013 a permis l’augmentation des impôts et taxes affectés (+0,9 Md€32) et de la CSG nette (+0,4 Md€)33 affectés au FSV, en partie compensée par une réduction de contributions sociales de -0,9 Md€, sous l’effet notamment du transfert à la branche vieillesse d’une fraction du forfait social jusqu’alors affectée au FSV.

Tableau n° 12 : formation du résultat 2014 du FSV

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

La réduction des déficits sociaux s’est ainsi poursuivie à un rythme modéré en 2014. Cependant, le niveau élevé auquel se sont maintenus les déficits a continué à alimenter la dette sociale et s’inscrit désormais dans une trajectoire de redressement des comptes sociaux dégradée.

II - Un retour à l’équilibre désormais repoussé au-delà de 2018

La loi de financement rectificative de la sécurité sociale d’août 2014 affichait une ambition de rétablissement de l’équilibre des comptes à l’issue d’une période de trois ans. Selon cette trajectoire, le déficit du régime général et du FSV devait baisser de plus de 4,4 Md€ dès 2015 et le retour à l’équilibre était prévu en 2017.

La Cour, dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 201434, avait souligné le caractère volontariste de ces prévisions et estimé qu’elles étaient soumises à de nombreux aléas.

Elles ont été de fait très sensiblement révisées dès la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Alors que le scénario dessiné par la loi de financement rectificative d’août 2014 prévoyait un retour à l’équilibre du régime général et du FSV en 2017, les prévisions actualisées par la loi de financement pour 2015 font perdurer un déficit au moins jusqu’en 2018.

A - En 2015, un ralentissement marqué du rythme de réduction des déficits

Les prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale publiées en juin 2015 indiquent un ralentissement marqué du rythme de réduction des déficits en 2015. L’amélioration du solde des branches famille et vieillesse serait compensée par la dégradation de ceux de la branche maladie et du FSV et par un excédent moins élevé que prévu de la branche AT-MP.

Tableau n° 13 : soldes du régime général et du FSV

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

1 - Des recettes contraintes par la faible progression de la masse salariale, des mesures nouvelles plus faibles que précédemment

Les recettes du régime général et du FSV augmenteraient de +1,3 % en 2015 d’après les prévisions de la commission des comptes de juin 2015. Ces dernières ont été légèrement revues à la hausse pour le régime général par rapport à la loi de financement pour 2015 pour le régime général, en particulier pour la branche vieillesse35, sans impact sur le solde de l’ensemble constitué du régime général et du FSV.

Tableau 14 : prévisions de recettes par branche du régime général et du FSV pour 2015

Les moindres recettes par rapport aux prévisions de la loi de financement rectificative d’août 2014 atteignent 6,8 Md€. Cet écart est dû principalement à la forte révision à la baisse des prévisions de progression de la masse salariale. Prévue initialement à +2,2 % en 2014 et à +3,5 % en 2015 dans la loi de financement rectificative, sa progression a été revue à +1,6 % en 2014 et à +2 % en 2015 dans la loi de financement pour 2015 et à nouveau révisée dans le programme de stabilité d’avril 2015 à +1,4 % et à +1,3 % respectivement pour les deux années 2014 et 2015.

Cet écart de 3 % au total sur deux ans entre les prévisions de la loi de financement rectificative pour 2014 et celles du programme de stabilité est dû à parts égales à une révision à la baisse des prévisions de croissance en volume et à une prévision d’inflation plus faible.

Tableau n° 15 : prévision de croissance du PIB et de la masse salariale du secteur privé en 2015

a)Des pertes de recettes liées au pacte de responsabilité compensées à la fois par de nouvelles recettes et par des allègements de dépenses

Les mesures d’allègement des prélèvements sociaux au titre du pacte de responsabilité et de solidarité ont été fixées par la loi de financement rectificative pour 2014. Celle-ci a prévu qu’elles soient intégralement compensées pour les régimes de sécurité sociale.

Mesures d’allègement des prélèvements sociaux décidées pour 2015 dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité

Les principales mesures du pacte de responsabilité mises en œuvre au 1er janvier 2015 sur le périmètre de l’ensemble du régime général et du FSV sont les suivantes :

- une exonération complète au niveau du SMIC et dégressive jusqu’à 1,6 SMIC des cotisations patronales de sécurité sociale (dans la limite d’un point pour les cotisations d’accidents du travail - maladies professionnelles), pour 0,3 Md€ ;

- une baisse de 1,8 point des cotisations d’allocations familiales pour les salaires inférieurs à 1,6 SMIC et une exonération de 3,1 points de cotisations famille pour les travailleurs indépendants dont les revenus sont inférieurs à 140 % du plafond de la sécurité sociale, pour 4,7 Md€ ;

- la suppression de la C3S pour les PME, pour 1 Md€, cette dernière mesure étant accompagnée de l’intégration financière du régime social des indépendants au régime général ;

soit un montant total de 6 Md€.

Les modalités de la compensation du coût de ces mesures pour les régimes de sécurité sociale ont été définies par la loi de financement et la loi de finances pour 2015. Elles ont été dimensionnées pour couvrir à la fois le coût des mesures d’allègement des prélèvements sociaux au titre du pacte de responsabilité (6 Md€), les dépenses supplémentaires induites par l’intégration financière du régime sociale des indépendants (RSI) au régime général (2,5 Md€) et la mise en œuvre de l’engagement pris par les pouvoirs publics de transférer au FSV le produit du gain attendu par l’État de la fiscalisation en 2015 des majorations de pensions pour enfants (1,2 Md€), soit au total 9,6 Md€.

Modalités de compensation des mesures arrêtées par les pouvoirs publics

Ces modalités sont les suivantes :

- transfert à l’État de la fraction des aides personnelles au logement jusqu’ici financée par la branche famille ; cette mesure réduirait les dépenses de la branche famille de 4,8 Md€ en 2015 ;

- prélèvement à la source des cotisations sur les caisses de congés payés, soit +1,5 Md€ ;

- affectation à la CNAMTS du prélèvement de solidarité sur les revenus du capital, soit +2,4 Md€ ;

- compensation par dotation budgétaire des exonérations sur les heures supplémentaires, soit +0,4 Md€ ;

- baisse de 1,04 point de la part de TVA nette attribuée à la CNAMTS, soit -1,5 Md€ ;

- modification de la répartition des droits sur les tabacs, soit -0,3 Md€ ;

- affectation d’une fraction de C3S à la CNAMTS et à la CNAVTS pour financer l’intégration du RSI, soit +2,5 Md€ ;

- prise en charge par la CNAMTS de la formation médicale des médecins, soit -0,1 Md€ ;

soit 9,6 Md€ au total (aux arrondis près).

b)Une augmentation spontanée des recettes qui resterait faible, des mesures nouvelles en recettes très inférieures à celles de 2014

Les mesures nouvelles de l’année 2015, dont la plus grande part est liée à la première année de mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, auraient un impact net limité sur le montant des recettes du régime général et du FSV. Ainsi, à la différence de 2014, le régime général et le FSV ne bénéficient pas de ressources supplémentaires.

Tableau n° 16 : impact des mesures de recettes sur les produits du régime général et du FSV en 2015

Hors mesures nouvelles, la progression des recettes du régime général et du FSV serait de 5 Md€, soit +1,5 %, supérieure à la progression telle qu’estimée dans le programme de stabilité d’avril 2015 de la masse salariale du secteur privé (+1,3 %).

Tableau n° 17 : évolution spontanée des recettes du régime général et du FSV en 2015

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

L’élasticité des recettes du régime général et du FSV au PIB serait de 0,75, soit légèrement inférieure à sa tendance de long terme, évaluée à 0,8 pour les cotisations sociales et à 1 pour les autres prélèvements36. Cet infléchissement est principalement dû à une prévision d’évolution de la masse salariale (+1,3 %), sur laquelle sont assises 80 % des recettes du régime général, sensiblement inférieure à la progression du PIB en valeur (+2,0 %).

Les aléas qui entourent la prévision de recettes

La prévision de recettes retenue dans le rapport de la commission des comptes de juin 2015 ne paraît pas soumise à des risques de dégradation importants.

Elle pourrait même le cas échéant s’avérer légèrement sous-estimée. L’hypothèse de croissance économique sur laquelle elle repose a été qualifiée de « prudente » par le Haut conseil des finances publiques dans son avis du 13 avril 2015 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au programme de stabilité. Les dernières prévisions de l’INSEE37 font apparaître une croissance attendue pour 2015 de +1,2 % en volume et de +2,2 % en valeur. L’augmentation de la masse salariale pourrait également être plus forte que les prévisions actuellement retenues.

2 - Des dépenses qui continueraient à croître à un rythme soutenu en termes réels, à périmètre constant

Les dépenses du régime général progresseraient de +1,3 %, après +2,2 % en 2014 et +2,7 % en 2013.

Tableau n° 18 : dépenses par branche du régime général et du FSV en 2015

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Cependant, les dépenses à la charge du régime général connaissent plusieurs modifications de périmètre par rapport à celles de 2014. Liées à la mise en œuvre du pacte de responsabilité, elles ont pour effet de réduire leur rythme de progression.

Tableau n° 19 : impact des mesures de périmètre sur les charges du régime général en 2015

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Hors mesures de périmètre (-2,2 Md€), l’augmentation des dépenses du régime général serait de 6,8 Md€ et leur taux de progression de +2,0 %, supérieur à celui de la croissance spontanée des recettes (+1,5 %).

À périmètre constant, les dépenses de la branche maladie progresseraient de +2,6 %38, malgré les mesures d’économie annoncées par les pouvoirs publics dans le programme de stabilité d’avril 2015 pour compenser les effets négatifs de la faiblesse de l’inflation sur les finances publiques39.

Les dépenses de la branche vieillesse progresseraient de +2,1 % à périmètre constant40, malgré l’absence de revalorisation annuelle des pensions en 2015.

Les dépenses de la branche famille, qui baisseraient sous l’effet de la prise en charge par l’État de la fraction des aides personnelles au logement jusque-là financée par la branche, augmenteraient faiblement à périmètre constant de +0,2 %. La modulation des allocations familiales en fonction des ressources, mise en œuvre au 1er juillet 2015, apporterait une économie de -0,4 Md€ sur l’année et la poursuite de la réforme de la prestation d’accueil du jeune enfant aurait également une incidence
de -0,4 Md€ en 2015.

Compte tenu de ces éléments et d’une inflation qui devrait s’établir à un niveau quasi nul en 2015 d’après les dernières prévisions de l’INSEE41, le rythme d’augmentation des dépenses en termes réels resterait élevé, à +1,9 % à périmètre constant.

Tableau n° 20 : taux de croissance des dépenses du régime général en termes réels (2012-2015)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Des efforts supplémentaires de modération de l’évolution tendancielle des dépenses apparaissent ainsi encore nécessaires. Il existe en effet un risque de dérapage des dépenses en valeur lors du retour, à partir de 2016, à un taux d’inflation positif comme prévu dans le scénario macroéconomique du programme de stabilité. Cette perspective nécessite une maîtrise accrue de la progression en volume de la dépense.

B - Une trajectoire de réduction des déficits qui se décale

1 - Des projections dégradées

Le tableau suivant présente les prévisions de solde du régime général et du FSV telles qu’elles figuraient dans la loi de financement rectificative d’août 2014 d’une part et telles qu’elles résultent des données d’exécution pour 2014, des prévisions actualisées de la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2015 pour l’année 2015 et de la loi de financement pour 2015 pour les années 2016 à 2018 d’autre part.

Tableau n° 21 : évolution des déficits du régime général et du FSV : réalisations 2012-2014, prévisions 2015-2018

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Le scénario de la loi de financement rectificative pour 2014 reposait sur des hypothèses de reprise de la croissance économique et de l’inflation qui assureraient une augmentation rapide des recettes. La révision de ces prévisions par la loi de financement pour 2015 à l’automne 2014 a conduit à une nouvelle trajectoire d’évolution des déficits à partir de 2016, en fort décalage par rapport aux prévisions antérieures.

Graphique n° 4 : évolution des déficits du régime général et du FSV : réalisations 2012-2014, prévisions 2015-2018

[Graphique à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Comme le montre le tableau suivant, selon les prévisions de la loi de financement pour 2015, les recettes du régime général augmenteraient sur la période 2016-2018 à un rythme moyen de +3,5 % par an, avant prise en compte des mesures liées au pacte de responsabilité et de solidarité.

Tableau n° 22 : prévisions de recettes du régime général et du FSV (2015-2018)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Ces prévisions sont fondées sur une hypothèse de reprise de la croissance de la masse salariale du secteur privé qui atteindrait +3,5 % dès 2016 et +4,2 % en 2017 et 2018. Elles reposent aussi sur le principe d’une compensation intégrale des mesures prévues par le pacte de responsabilité par des recettes ayant le même rendement.

Mesures d’allègements de prélèvements sociaux prévues pour 2016 et 2017 dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité

Les mesures du pacte de responsabilité et de solidarité en 2016 et 2017 auraient une incidence de 9,5 Md€ sur les recettes :

- poursuite de la réduction des cotisations d’allocations familiales, avec la suppression de 1,8 point pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC au 1er janvier 2016 (4,5 Md€) ;

- poursuite de la suppression progressive de la C3S jusqu’en 2017 (5 Md€ supplémentaires en 2016 et 2017).

Ces mesures devraient être intégralement compensées pour les régimes de sécurité sociale, mais les modalités de la compensation ne sont pas arrêtées.

Les dépenses du régime général progresseraient de +2,3 % en moyenne d’après la loi de financement pour 2015, soit à un rythme qui s’inscrit dans la continuité des années précédentes (+2,2 % en 2014, +2,2 % hors mesures nouvelles en 2015).

Tableau n° 23 : prévision de dépenses du régime général et du FSV (2015-2018)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

2 - Un risque d’aggravation supplémentaire des déficits reportant un retour à l’équilibre au mieux en 2021

Le scénario macroéconomique qui fonde les hypothèses de recettes de la loi de financement pour 2015 a été révisé assez sensiblement à la baisse par le programme de stabilité d’avril 2015 pour les années 2015 à 2018.

Tableau n° 24 : prévision de croissance du PIB et de la masse salariale du secteur privé dans le programme de stabilité (2015-2018)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Ainsi, la croissance du PIB prévue dans le programme de stabilité et la progression de la masse salariale seraient inférieures aux prévisions de la loi de financement pour 2015.

En retenant les hypothèses de sensibilité du solde du régime général indiquées par le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 201542, la révision du scénario macroéconomique conduit à abaisser les prévisions de recettes et de dépenses.

Les mesures d’ajustement supplémentaires en 2016

Les pouvoirs publics ont intégré au programme de stabilité des mesures d’économies supplémentaires portant uniquement sur les dépenses, à hauteur de 5 Md€ en 2016 pour l’ensemble des administrations publiques, afin d’atteindre le rythme de maîtrise de la dépense prévu par la loi de programmation des finances publiques, malgré une inflation pour 2016 plus basse qu’attendu (1 % au lieu de 1,4 %).

Ce plan porte à hauteur de 2,2 Md€ sur les dépenses de santé et de protection sociale, avec notamment la révision à la baisse de l’augmentation de l’ONDAM de +2 % à +1,75 %. Les autres mesures n’ont pas été détaillées dans le programme de stabilité.

La fixation de la progression de l’ONDAM à +1,75 % au lieu de +2 % sur la période 2016-2018 aurait une incidence sur les dépenses du régime général, toutes choses égales par ailleurs, de -0,3 Md€ en 2016, de -0,6 Md€ en 2017 et de -0,9 Md€ en 2018. La diminution de l’inflation anticipée par rapport à la prévision de la loi de financement pour 2015 a également un impact à la baisse sur la revalorisation des prestations retraite et famille.

Compte tenu du report de la date de revalorisation des prestations de retraite au 1er octobre depuis la loi de financement rectificative pour 2014, une absence de revalorisation au 1er octobre 2015, conforme aux prévisions d’inflation nulle en 2015 dans le programme de stabilité, conduirait à une moindre dépense d’environ 1 Md€ en 2016. Pour les années ultérieures, l’effet sur la revalorisation annuelle des retraites pourrait atteindre -1,3 Md€ en 2017 et -1,6 Md€ en 2018. S’agissant des prestations familiales, l’impact serait d’environ -200 M€ en 2016, -400 M€ en 2017 et -600 M€ en 2018.

Au total, l’incidence sur les dépenses du régime général de la moindre hausse de l’ONDAM et de la baisse des prévisions d’inflation peut être estimée à -1,5 Md€ en 2016, -2,3 Md€ en 2017 et -3,1 Md€ en 2018.

Tableau n° 25 : projection des recettes et des dépenses du régime général et du FSV revues en fonction des hypothèses du programme de stabilité (2015-2018)

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

L’effet net de ces révisions de sens contraire sur les recettes et les dépenses liées aux prévisions macroéconomiques du programme de stabilité serait négatif pour le solde du régime général et du FSV. Estimé à -0,4 Md€ pour 2015 dans les prévisions du rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, il se traduirait par une aggravation supplémentaire du déficit de -1,6 Md€ en 2017 et de -2,2 Md€ en 2018.

Avec un déficit de l’ordre de -5 Md€ en 2018 et un rythme de réduction de ce dernier de 2 Md€ par an en moyenne, comme observé depuis 2012, le retour à l’équilibre ne serait pas atteint à l’horizon 2020, mais interviendrait au mieux en 2021.

La révision à la baisse des recettes attendues pourrait s’avérer insuffisante si la masse salariale progressait plus lentement que prévu dans le programme de stabilité. En effet, le Haut Conseil des finances publiques a considéré que les prévisions de ce dernier à l’horizon 2018 sont prudentes, mais que la remontée de l’inflation et des salaires pourrait être plus tardive. Toutes choses égales par ailleurs, une telle évolution se traduirait par une dégradation plus marquée des soldes du régime général et du FSV à cette date, décalant encore le rétablissement de l’équilibre des comptes sociaux et la résorption de la dette sociale.

C - Une dette sociale de plus en plus financée à court terme à transférer rapidement à la CADES

1 - Sous réserve de la réalisation des prévisions de déficit, un début de réduction de la dette désormais repoussé à 2016

La loi de financement pour 2011 a organisé le transfert à la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) des déficits de la branche vieillesse et du FSV pour les années 2011 à 2018, dans la limite d’un montant annuel de 10 Md€ et d’un montant total de 62 Md€. La loi de financement pour 2014 a permis en outre l’intégration des déficits maladie et famille des années 2012 et suivantes dans les reprises autorisées jusqu’en 2018, sans modifier les limites posées par la loi de financement pour 2011, ni allonger la durée de vie prévisible de la CADES43.

La dette reprise par cette dernière restant à amortir a atteint un point haut en 2011 à 142,8 Md€, avec la reprise massive des déficits accumulés du régime général (65,3 Md€) et du régime de retraite des exploitants agricoles (2,5 Md€). Des recettes nouvelles ont alors été affectées pour leur financement (0,28 point supplémentaire de CSG, par redéploiement entre les attributaires de ce prélèvement à taux inchangé, 1,3 point de prélèvement supplémentaire sur les revenus du capital, 2,1 Md€ de versement annuel du fonds de réserve pour les retraites jusqu’en 2024). Les recettes annuelles de près de 16 Md€ financent aujourd’hui un peu plus de 3 Md€ de charges d’intérêt et près de 13 Md€ d’amortissement. La dette portée par la CADES devrait ainsi pouvoir poursuivre sa réduction à un rythme proche du rythme actuel jusqu’au terme des reprises de dette déjà programmées. En l’absence de nouvelle reprise de dette, à partir de 2018, le rythme de diminution de la dette s’accélèrerait.

Toutefois, il subsiste à la fin de chaque exercice une part des déficits cumulés des branches maladie et famille non repris par la CADES qui vient augmenter le besoin de financement de l’ACOSS au-delà du déficit annuel de la CNAVTS et du FSV, qui est repris par la CADES l’année suivante. Le cumul de ces déficits non repris pourrait s’élever à 27,6 Md€ fin 2018 au titre des seules branches maladie et famille. En outre, selon les hypothèses retenues, la totalité des déficits de la branche vieillesse et du FSV fin 2018 ne pourra être reprise dans le cadre de l’enveloppe des 62 Md€ : un déficit résiduel d’au moins 2 Md€ resterait à la charge de l’ACOSS à ce titre, portant le total des déficits non repris par la CADES à près de 30 Md€ selon les prévisions de loi de financement pour 2015.

L’endettement total constitué de la situation nette de la CADES et de la somme des déficits du régime général portés par l’ACOSS à la fin de chaque exercice se stabiliserait à près de 160 Md€ à fin 2015 d’après les prévisions des pouvoirs publics figurant dans la loi de financement pour 2015, soit un décalage d’une année par rapport aux estimations antérieures, puis commencerait à diminuer en 2016.

Tableau n° 26 : évolution de la dette sociale à la charge de la CADES et de l’ACOSS : réalisations 2011-2014, prévisions 2015-2018

[Tableau à consulter dans le fichier Word ou pdf joint.]

Le rythme de réduction resterait faible en 2016 (2,5 Md€) et augmenterait ensuite pour atteindre 10 Md€ en 2018, soit une réduction de 21 Md€ entre fin 2014 et fin 2018.

Cependant, le risque d’aggravation supplémentaire analysé supra, en fonction des hypothèses macroéconomiques du programme de stabilité, aurait, s’il se réalisait, un effet cumulé de l’ordre de 4 Md€ en fin de période. La réduction de la dette n’atteindrait alors que 17 Md€ entre fin 2014 et fin 2018.

2 - Une augmentation préoccupante de la part de la dette sociale financée à court terme par l’ACOSS, une exposition accrue à une remontée des taux d’intérêt

Selon le scénario retenu dans la loi de financement pour 2015, la persistance de déficits élevés du régime général se traduirait par des déficits cumulés portés par l’ACOSS qui atteindraient un point haut à 32,5 Md€ en 2016 et resteraient proches de 30 Md€ au moins jusqu’en 2018. Une perspective de cette nature reviendrait à banaliser une situation exceptionnelle : l’ACOSS n’a eu à financer des besoins à très court terme supérieurs à 30 Md€ qu’une seule fois, à fin 2010, à la suite du déficit historique connu par le régime général du fait de la crise de 2008-2009.

La part de la dette sociale financée à court terme par l’ACOSS, qui était de 0,3 % en 2011 après le transfert précité à la CADES est passée à 19 % en 2014. Elle atteindrait 21 % en 2015 et 21,5 % à l’horizon 2018. Cette situation distingue nettement la structure de la dette des organismes de sécurité sociale de celle de l’État, financée principalement à moyen et long terme44.

Par ailleurs, des aléas négatifs pèsent sur cette partie de la dette sociale à un double titre.

D’une part, les projections pour les années 2016 à 2018 sont, comme souligné précédemment, soumises au risque d’une conjoncture macroéconomique moins favorable que prévu et notamment une reprise moins rapide de la progression de la masse salariale, avec comme indiqué un impact évalué à près de 4 Md€ au total sur les soldes des exercices 2017 et 2018.

D’autre part, cette dette est financée à court terme45 et se trouve donc exposée au risque d’une remontée des taux d’intérêt. Le programme de stabilité 2015-2018 se fonde sur une remontée progressive des taux courts et longs d’ici à 2018, qui resteraient cependant inférieurs d’au moins 50 points de base aux niveaux prévus dans le programme 2014-2017. Par rapport à ce scénario, un accroissement supplémentaire de 100 points de base des taux courts alourdirait de 0,3 Md€ la charge annuelle de la dette portée par l’ACOSS, pour un effet cumulé de près de 1 Md€ sur la dette d’ici à 2018.

Au total, la dette portée par l’ACOSS pourrait ainsi être alourdie d’environ 5 Md€ à l’horizon 2018. Elle atteindrait alors près de 35 Md€.

En outre, la dette portée par la CADES est également soumise à un risque de taux sur les nouvelles émissions et sur l’encours de dette à taux variable ou révisable. La sensibilité de la charge d’intérêts annuelle de la CADES à une hausse de 100 points de base des taux courts et longs peut être évaluée aujourd’hui à 0,4 Md€ au bout d’un an. Une hausse de taux de 100 points de base conduirait ainsi à dégrader, toutes choses égales par ailleurs, de plus de 1 Md€ la situation nette de la CADES à fin 2018.

Au total, les risques sur la dette sociale liés à l’environnement économique et financier sur la période 2016-2018 peuvent être estimés à 6 Md€ à fin 2018. Dans cette hypothèse, la dette sociale atteindrait encore 145 Md€ à fin 2018 et sa réduction serait limitée à 15 Md€ entre fin 2014 et fin 2018.

3 - La nécessité d’organiser rapidement un transfert des déficits à la CADES, aujourd’hui ni prévu, ni financé

La persistance de déficits accumulés portés et financés à court terme par l’ACOSS est aussi un moyen d’échapper au dispositif instauré par le Parlement afin d’assurer le financement de l’amortissement de la dette sociale. En effet, toute reprise supplémentaire de déficit par la CADES doit être, selon les dispositions organiques en vigueur46 et sous le contrôle du Conseil constitutionnel, assortie du transfert à la CADES des ressources nécessaires à son amortissement total à l’échéance prévue pour les dettes déjà reprises, soit 2024. La dette conservée par l’ACOSS en dehors de toute perspective d’amortissement ne permet pas d’envisager une disparition totale de la dette sociale à cette échéance.

Comme la Cour l’a déjà recommandé à plusieurs reprises47, il est nécessaire d’organiser rapidement la reprise par la CADES de la part des déficits actuellement financés par l’ACOSS qui ne sont couverts par aucun mécanisme d’amortissement. Cette part devrait s’élever à 13,5 Md€ fin 201548 et, selon les hypothèses de déficits 2016-2018 de la loi de financement pour 2015, augmenter progressivement jusqu’à 29,7 Md€ fin 2018. La reprise au plus tôt de ces déficits devrait alors intervenir pour 13,5 Md€ début 2016, puis pour 7,2 Md€ début 201749, pour 5 Md€ début 201850 et pour 4 Md€ début 201951.

Ces reprises supplémentaires supposeraient, dans le cadre actuel fixé par les lois organiques et pour maintenir à 2024 l’échéance d’amortissement total de la dette de la CADES, d’affecter à la CADES 3 Md€ de recettes supplémentaires dès 2016, soit l’équivalent de 0,23 point de CRDS. Si ces reprises supplémentaires étaient différées, le montant des ressources annuelles supplémentaires à affecter à la CADES serait d’autant plus important que les reprises interviendraient tard, à horizon d’amortissement total inchangé. À titre d’illustration, une reprise différée à début 2018 nécessiterait de transférer à cette date non plus 3, mais 4 Md€ de recettes annuelles supplémentaires pour assurer un amortissement total d’ici 2024, soit l’équivalent de 0,3 point de CRDS.

Enfin, dans l’hypothèse où une nouvelle loi organique prévoirait, par dérogation aux dispositions en vigueur, un accroissement de la durée de la dette sociale, organiser ces reprises sans recettes supplémentaires pour la CADES repousserait d’environ deux ans le terme de l’amortissement total de la dette, ce qui prolongerait d’autant les prélèvements obligatoires qui lui sont affectés et alourdirait au final d’au moins 5 Md€ la charge cumulée des intérêts de la dette sociale.

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

L’année 2014 a été marquée par une réduction modeste, de 2,2 Md€, du déficit de l’ensemble constitué du régime général et du FSV. Ce résultat n’aurait cependant pu être atteint sans de nouvelles mesures de recettes. En dépit de sa diminution, le déficit, sous l’effet notamment du creusement du solde du FSV, continue à s’inscrire à un niveau très supérieur à celui, déjà très élevé, d’avant la crise économique de 2008-2009.

En 2015, dans un contexte de faible augmentation de la masse salariale, la trajectoire de réduction des déficits connaîtrait un ralentissement marqué, les comptes du régime général et du FSV dégageant selon les prévisions de la commission des comptes de juin 2015 un résultat globalement inchangé par rapport à l’année précédente. Hors effet des mesures nouvelles liées au pacte de responsabilité et de solidarité, dont la neutralité sur le régime général et le FSV devrait être assurée, les dépenses augmenteraient encore de 1,9 % en termes réels. Les mesures nouvelles en recettes prévues, plus limitées qu’en 2014, ne compenseront pas cette dynamique toujours soutenue.

Selon les prévisions des pouvoirs publics, le retour à un taux d’inflation positif à partir de 2016 et le redressement attendu de la croissance devraient permettre une augmentation des recettes à un taux de l’ordre de 3,5 % par an entre 2016 et 2018, ainsi que la reprise sur cette période d’une trajectoire de réduction des déficits. Ce scénario, s’il était strictement tenu, permettrait une stabilisation de la dette sociale en 2015, puis un début de réduction de cette dernière à partir de 2016. Il est cependant conditionné au redressement effectif du taux de croissance de la masse salariale, qui pourrait s’avérer moins rapide que prévu, avec pour conséquence un risque d’aggravation des déficits par rapport aux prévisions.

La perspective d’un retour à l’équilibre, programmé pour 2017 puis régulièrement décalé, ne figure plus dans l’horizon de projection des comptes de la sécurité sociale. Il est reporté au-delà de 2018. Les estimations qui peuvent être faites au regard des hypothèses macroéconomiques du programme de stabilité d’avril 2015 mettent en lumière que le rétablissement de l’équilibre des comptes sociaux ne serait atteint, au mieux, qu’en 2021.

Cet éloignement de l’un des objectifs majeurs de redressement des finances publiques apparaît particulièrement préoccupant.

Ce report expose à de forts aléas la dette sociale, tout particulièrement celle portée par l’ACOSS, qui atteindrait près de 30 Md€ à fin 2018, voire 35 Md€ si certains risques se réalisaient. Cette dette financée à très court terme sera affectée par le redressement des taux d’intérêt, qui atteindrait près de 2 % à l’horizon 2018 d’après les prévisions du programme de stabilité. Elle est surtout exposée à un risque de taux particulièrement fort dans une période de relative instabilité des prévisions d’inflation et de taux d’intérêt. Au total, les risques sur la dette sociale liés à l’environnement économique peuvent être estimés à 6 Md€ à fin 2018.

Cette situation dangereuse impose notamment de transférer sans délai à la CADES la dette actuellement portée par l’ACOSS, dont ce n’est pas la mission et de lui faire reprendre au fur et à mesure les déficits à venir des branches famille et maladie, dont le transfert n’est toujours pas organisé. Plus ce transfert sera tardif, plus il nécessitera de mobiliser, sur une courte période, des ressources annuelles conséquentes pour éteindre la dette sociale d’ici à son terme aujourd’hui prévu en 2024.

Le décalage à un horizon imprécis du retour à l’équilibre ne traduit pas seulement les effets de la persistance d’une croissance ralentie et d’une inflation très faible. Il illustre aussi une insuffisante inflexion de l’augmentation en volume des dépenses de sécurité sociale. La consolidation durable des finances sociales impose une maîtrise beaucoup plus affirmée des dépenses en termes réels, que seules des réformes en profondeur peuvent assurer.

Comme chaque année, le présent rapport illustre les champs sur lesquels des réformes structurelles sont susceptibles d’infléchir la dépense sur la durée, sans remettre en cause les principes sur lesquels est fondée la sécurité sociale, notamment l’égal accès aux soins et la qualité de ces derniers s’agissant de l’assurance maladie.

La Cour formule ainsi les recommandations suivantes :

1. redéfinir la trajectoire de réduction des déficits en fonction d’un objectif réaffirmé et d’un calendrier réajusté de retour rapide à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale ;

2. à cet effet, renforcer les mesures structurelles d’économies, telles que celles recommandées dans les différents chapitres du présent rapport, afin de réduire durablement le rythme de progression des dépenses ;

3. organiser sans attendre davantage la reprise par la CADES des déficits des branches maladie et famille actuellement portés par l’ACOSS et de ceux des années à venir, en prévoyant, conformément aux dispositions de la loi organique du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, les recettes nécessaires à l’amortissement complet de la dette sociale à son terme prévu ;

4. mettre fin au sous-financement structurel du FSV (recommandation réitérée).

1. Cette amélioration est due principalement à la réduction du déficit du régime de retraite des exploitants agricoles (-0,2 Md€, après -0,6 Md€ en 2013), sous l’effet de la baisse des charges de prestations et de la bonne tenue des cotisations et à l’excédent dégagé par la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (de +0,4 Md€, après un déficit de -0,1 Md€ en 2013), sous l’effet notamment de la poursuite de l’augmentation des taux de cotisations.




2. Cour des comptes, Situation et perspectives des finances publiques, juin 2015, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.




3. La seule baisse de 0,6 point de la prévision de croissance de la masse salariale privée a réduit de 1,2 Md€ les perspectives de recettes pour le régime général. Le ralentissement du PIB et la faible inflation ont par ailleurs freiné la progression de celles tirées de la quote-part de TVA affectée à la sécurité sociale.




4. Les difficultés des prévisions intégrées aux lois de financement sont réelles (Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, pour 2014, chapitre VI : les prévisions intégrées aux lois de financement de la sécurité sociale : une fiabilité à renforcer, un suivi à mieux assurer, p. 177-197, septembre 2014, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr), mais il était jusqu’à présent peu courant que le déficit effectif se révèle plus proche de la prévision initiale que de celle révisée à la fin de l’exercice.




5. Sur l’évolution du montant des remises en 2014 par rapport à l’année précédente, voir chapitre III du présent rapport : l’objectif national de dépenses d’assurance maladie : une dynamique de croissance toujours soutenue en 2014, une trajectoire de ralentissement conditionnée par la réalisation d’économies, p. 95-142.




6. Cour des comptes, Rapport sur l’application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, chapitre I : la situation et les perspectives financières de la sécurité sociale : une réduction plus ralentie qu’attendue des déficits, une trajectoire de redressement très fragile p. 24, septembre 2014, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.




7. L’hypothèse de croissance potentielle est ici celle du programme de stabilité 2015-2018 d’avril 2015. L’écart de production a été ajusté à la marge (de 3,4 % à 3,3 %) en fonction des données de croissance révisées par l’INSEE depuis la publication du programme de stabilité.




8. Rapport entre le taux de croissance spontanée des recettes et le taux de croissance du PIB en valeur. L’élasticité est de 0,8 pour les cotisations sociales et de 1 pour les autres prélèvements. Cf. note méthodologique de l’indicateur n°2 du programme de qualité et d’efficience « financement » en annexe I au PLFSS pour 2014.




9. Avis n° HCFP-2015-01 du 13 avril 2015 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2015 à 2018, dont la Cour a analysé la portée dans son rapport La situation et les perspectives des finances publiques, p. 128 et suivantes, juin 2015, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.




10. Les recettes sont constituées des cotisations sociales assises sur les revenus d’activité (58 %), des produits de CSG (23 %), d’autres impôts, taxes et contributions sociales (12 %), des prises en charge de cotisations par l’État ainsi que, s’agissant du régime général (branche vieillesse), des transferts du FSV liés à la prise en charge par ce dernier de cotisations et de prestations.




11. La Cour a recommandé dans le Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2014 (p. 57) que soit présentée dans la loi de financement de la sécurité sociale une évaluation a posteriori du rendement effectif des mesures nouvelles adoptées l’année précédente. 




12. Augmentation de 5,88 % à 7,85 % au 1er janvier 2014 de la fraction affectée au financement de la branche.




13. Le schéma n’intègre pas le versement au FSV de 1 Md€ de reliquats de contribution sociale de solidarité (C3S), non affectés à la couverture des déficits du régime social des indépendants.




14. Mises en place par le décret du 2 juillet 2012, la loi de financement pour 2014 et la loi du 20 janvier 2014 sur la justice et la sauvegarde du système de retraites.
Cf. tableau n° 6
supra.



15

. Ont pesé en sens inverse la baisse des produits de la CSG sur les revenus du patrimoine (-5,9 %) et de la CSG sur les produits de placement (-2,3 %).



16
. La part est de 47 % pour la branche maladie, de 33 % pour la branche vieillesse, de 17 % pour la branche famille et de 3 % pour la branche AT-MP.



17

. Elles en ont représenté 91,6 % en 2014, les transferts entre organismes et les charges de gestion courante ne comptant que pour 3,8 % et 3,2 %, respectivement.



18

. L’écart avec le taux de progression de l’ONDAM (+2,4 %) est lié à la prise en compte des remises conventionnelles sur les médicaments en moindres dépenses dans le cadre du suivi de l’ONDAM, alors qu’elles constituent des recettes sur un plan comptable.



19

. La Cour analyse en détail l’évolution de l’ONDAM dans le chapitre III du présent rapport, p. 95-142.



20

. Ont joué en ce sens, en particulier, la croissance des prestations d’invalidité (+5,3 %) et celle des soins aux étrangers (+7,4 %).



21

. Sur l’évolution du montant des remises en 2014 par rapport à l’année précédente, voir dans le présent rapport chapitre III : l’objectif national de dépenses d’assurance maladie : une dynamique de croissance toujours soutenue en 2014, une trajectoire de ralentissement conditionnée par la réalisation d’économies, p. 95-142.



22

. Part affectée à la branche passée de 68,14 % à 60 %, au bénéfice de la mutualité sociale agricole (MSA).



23

. Le résultat prévisionnel pour 2014 avait été fixé à l’origine à +0,1 Md€, puis rehaussé à +0,3 Md€ dans la loi de financement rectificative d’août 2014, avant d’être ramené à +0,2 Md€ dans la loi de financement pour 2015.



24

. La baisse de la contribution en 2013 constituait une mesure ponctuelle, rendue possible par la réalisation par le FIVA d’excédents au cours des exercices antérieurs.



25

. En pourcentage de laquelle sont fixées les prestations familiales.



26
. L’attribution à la branche famille de 0,05 point de CSG supplémentaire a porté à 11,8 % (au lieu de 10,8 %) la part de produit qui lui est affectée, générant environ 0,8 Md€ de produits additionnels en 2014.



27

. Dont l’affectation intégrale du produit de la taxe sur les véhicules de sociétés, des prélèvements sur les stock-options et des contributions sur les jeux et paris, pour un montant total de 1,4 Md€.



28

. Cette réduction neutralise pour les entreprises l’augmentation (+0,15 point) des cotisations patronales vieillesse inscrite dans la réforme des retraites de janvier 2014.



29

. Les produits ont crû de 3,8 % et les charges de 2 %, après +5,7 % et +3,9 %
en 2013.



30


. Décret du 2 juillet 2012 sur les carrières longues (+0,1 point) et loi du 20 janvier 2014 sur le système de retraites (+0,3 point).



31


. La fraction de la taxe sur les salaires est passée de 56,8 % à 53,5 % (-0,4 Md€) et celle du prélèvement social sur les revenus du capital de 2,75 % à 1,15 % (-1,9 Md€).



32


. Près de 0,4 Md€ de ce surcroît de recettes ont été procurés par la taxe sur les salaires et 0,5 Md€ par les produits tirés de la C3S. Ces derniers ont augmenté en 2014 du fait de l’attribution au FSV de la majeure partie du reliquat de C3S recouvré par le RSI au titre des exercices antérieurs à 2011.



33


. Le FSV a bénéficié en 2014 d’une hausse de 0,06 point de la part de CSG qui lui est affectée, prélevée sur la part affectée à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Il reçoit 11,9 % des produits de CSG et le régime général 71,6 % (branches famille et maladie), le solde étant attribué à la CADES et à la CNSA.



34


. Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2014, chapitre I : la situation et les perspectives financières de la sécurité sociale, p. 18-57, septembre 2014, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.



35


. En raison de transferts plus importants du FSV au titre de la prise en charge de cotisations (chômeurs, stagiaires de la formation professionnelle et apprentis).



36


. Cf. note méthodologique de l’indicateur n° 2 du programme de qualité et d’efficience « financement » en annexe I à la loi de financement pour 2014.



37


. Cf. note de conjoncture de juin 2015.



38


. Hors coût de l’intégration financière du RSI, soit 1 Md€ et de la prise en charge de la formation médicale des médecins (0,1 Md€).



39


. Voir chapitre III du présent rapport : L’objectif national de dépenses d’assurance maladie : une dynamique de croissance toujours soutenue en 2014, une trajectoire de ralentissement conditionnée par la réalisation d’économies structurelles, p. 95-142.



40


. Hors coût de l’intégration financière du RSI, soit 1,4 Md€.



41


. Note de conjoncture de l’INSEE de juin 2015.



42


. Soit 2 Md€ de variation des recettes pour une variation de 1 % de la masse salariale, 1,4 Md€ de variation des dépenses pour une variation de 1 % des dépenses dans le champ de l’ONDAM et également 1,4 Md€ sur la revalorisation des prestations retraite et famille pour une variation de 1 % du taux d’inflation.



43


. Selon les projections réalisées par la CADES, la date probable d’amortissement des dettes dont la reprise est prévue par la loi se situe en 2024.



44


. La part des bons du Trésor à moins d’un an (BTF) représente 11,5 % de la dette négociable de l’État à fin 2014. Sur un besoin de financement de l’État de 179,1 Md€ en 2014, 172 Md€ ont été financés par des émissions à moyen et long terme. Voir Cour des comptes, le budget de l’État en 2014, p. 40-50, mai 2015, la Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.



45


. La maturité moyenne des instruments de dette (billets de trésorerie et Euro commercial papers) émis par l’ACOSS est inférieure à trois mois.



46


. Loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale modifiée par la loi organique du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale.



47


. Cour des comptes, Rapports sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2011, chapitre III : le financement des déficits sociaux, p. 100 à 105, septembre 2011, pour 2012, chapitre I : le déficit et l’endettement de la sécurité sociale : situation 2011 et perspectives, p. 47-50, septembre 2012, pour 2013, chapitre I : le déficit et l’endettement de la sécurité sociale : situation 2012 et perspectives, p. 48-51, septembre 2013 et pour 2014, chapitre V : les lois de financement de la sécurité sociale, une ambition à élargir, p. 169 et 170, septembre 2014, la Documentation française, disponibles sur www.ccomptes.fr.



48


. Une partie des 31,8 Md€ de dette prévisible portée par l’ACOSS fin 2015 correspond à des déficits dont la reprise par la CADES est déjà prévue et financée (3,7 Md€ de déficit 2015 de la branche vieillesse et du FSV et 14,6 Md€ de déficit des branches maladie et famille antérieurs à 2015).



49


. Soit les déficits prévisionnels maladie et famille au titre de 2016.



50


. Soit les déficits prévisionnels maladie et famille au titre de 2017.



51


. Soit les déficits prévisionnels maladie, famille, vieillesse et FSV au titre de 2018.