RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE DISCIPLINE BUDGÉTAIRE ET FINANCIÈRE,
siégeant à la Cour des comptes, en audience publique, a rendu l’arrêt suivant :
Vu le code des juridictions financières, notamment le titre 1er de son livre III, relatif à la Cour de discipline budgétaire et financière ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions relatives à la fonction publique hospitalière ;
Vu la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, notamment ses articles 49-I et 49-II ;
Vu le décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Vu le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l’organisation du travail dans les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, notamment son titre II ;
Vu le décret n° 2003-507 du 11 juin 2003 relatif à la compensation et à l’indemnisation du service d’astreinte dans les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Vu l’arrêté du 24 mars 1967 modifié relatif aux conditions d’attribution de primes de service aux personnels de certains établissements énumérés à l’article 2 de la loi du 9 janvier 1986 ;
Vu le jugement n° 2012-0021 du 5 octobre 2012 de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur sur les comptes rendus pour les exercices 2008 et 2009 par M. Babut, en qualité de comptable de l’Assistance Publique - Hôpitaux de Marseille ;
Vu la lettre du 25 mai 2012, enregistrée le 31 du même mois au parquet général, par laquelle le procureur financier dirigeant le ministère public près la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur a informé le procureur général de la décision prise par cette juridiction de déférer à la Cour de discipline budgétaire et financière diverses irrégularités qu’il avait relevées à l’occasion du contrôle des comptes et de la gestion de l’Assistance Publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) ;
Vu le réquisitoire du 16 juillet 2012, par lequel le procureur général a saisi de cette affaire le premier président de la Cour des comptes, président de la Cour de discipline budgétaire et financière ;
Vu la décision du 26 juillet 2012, par laquelle le président de la Cour de discipline budgétaire et financière a désigné comme rapporteur M. Patrice-Luc Adment, premier conseiller de chambre régionale des comptes ;
Vu les lettres du 24 octobre 2012 du procureur général, par lesquelles ont été mis en cause dans cette affaire MM. Guy Vallet, directeur général de l’AP-HM du 11 mars 2002 au 30 avril 2008 et M. Jean-Paul Ségade, directeur général du 1er mai 2008 au 21 janvier 2013, ensemble les avis de réception de ces lettres ;
Vu la lettre du 27 mars 2013 du procureur général par laquelle a été mis en cause dans cette affaire M. Jean-Claude Babut, comptable de l’AP-HM du 2 novembre 2006 au 30 avril 2009, ensemble l’avis de réception de cette lettre ;
Vu la lettre du président de la Cour de discipline budgétaire et financière du 18 juillet 2013 transmettant au procureur général le dossier de l’affaire, après dépôt du rapport de M. Adment, en application de l’article L. 314-4 du code des juridictions financières ;
Vu la lettre du procureur général, en date du 26 juillet 2013, informant le président de la Cour de discipline budgétaire et financière de sa décision, après communication du dossier de l’affaire, de poursuivre la procédure en application de l’article L. 314-4 du code des juridictions financières ;
Vu les lettres du 29 juillet 2013, par lesquelles le président de la Cour de discipline budgétaire et financière a transmis pour avis, en application de l’article L. 314-5 du code des juridictions financières, le dossier de l’affaire au ministre de l’économie et des finances et à la ministre des affaires sociales et de la santé, ensemble les avis de réception de ces lettres ;
Vu la décision du procureur général du 20 mars 2015 renvoyant MM. Vallet, Ségade et Babut devant la Cour de discipline budgétaire et financière, en application de l’article L. 314-6 du code des juridictions financières ;
Vu les lettres du 20 mars 2015 du procureur général à MM. Vallet, Ségade et Babut, les informant de sa décision de les renvoyer devant la Cour, ensemble les avis de réception de ces lettres ;
Vu les lettres recommandées adressées le 27 mars 2015, par la greffière de la Cour de discipline budgétaire et financière, à MM. Vallet, Ségade et Babut, les invitant à prendre connaissance du dossier et les citant à comparaître le 26 juin 2015 devant la Cour de discipline budgétaire et financière, ensemble les avis de réception de ces lettres ;
Vu la lettre du 28 avril 2015 par laquelle le président de la Cour de discipline budgétaire et financière a autorisé M. Babut, sur sa demande, à ne pas comparaître personnellement à l’audience, en application de l’article L. 314-10 du code des juridictions financières, ensemble l’avis de réception de cette lettre ;
Vu la demande présentée par M. Vallet, adressée au président de la Cour par courriels des 14 et 18 mai 2015, tendant à faire citer MM. Edouard Couty, directeur général de l’offre de soins au ministère de la santé à l’époque des faits et Pierre Fuentes, président de la commission médicale d’établissement à l’époque des faits, en tant que témoins à la séance publique de jugement, et vu les permis, délivrés le 27 mai 2015 par le président de la Cour, après conclusions du procureur général, de citer ces personnes à cette audience ;
Vu les lettres recommandées de la greffière de la Cour de discipline budgétaire et financière du 27 mai 2015 transmettant aux témoins, MM. Couty et Fuentes, une convocation à l’audience publique de jugement, ensemble les avis de réception de ces lettres ;
Vu les mémoires produits par M. Vallet, le 22 mai 2015, Me Deruy pour M. Ségade, le 29 mai 2015, et M. Babut, le 22 mai 2015, ensemble les pièces à l’appui, ainsi que les pièces complémentaires remises le jour de l’audience par MM. Vallet et Ségade ;
Vu les autres pièces du dossier, notamment les procès-verbaux d’audition et le rapport d’instruction de M. Adment ;
Entendu le rapporteur, M. Adment, résumant le rapport écrit, en application des articles L. 314-12 et R. 314-1 du code des juridictions financières ;
Entendu le ministère public, résumant la décision de renvoi, en application des articles L. 314-12 et R. 314-1 du code des juridictions financières ;
Entendu sous serment les témoins, MM. Couty et Fuentes, en leur déposition, en application de l’article L. 314-10 du code des juridictions financières ;
Entendu le procureur général en ses conclusions, en application de l’article L. 314-12 du code des juridictions financières ;
Entendu les explications et observations de MM. Vallet et Ségade, la défense ayant eu la parole en dernier ;
Sur l’absence d’avis du ministre de l’économie et des finances et de la ministre des affaires sociales et de la santé
1. Considérant que si les avis du ministre de l’économie et des finances et de la ministre des affaires sociales et de la santé n’ont pas été communiqués à la Cour, cette circonstance ne saurait faire obstacle à la poursuite de la procédure, en application de l’article L. 314-5 du code des juridictions financières ;
Sur la prescription
2. Considérant que l’article L. 314-2 du même code dispose que « La Cour ne peut être saisie après l’expiration d’un délai de cinq années révolues à compter du jour ou aura été commis le fait de nature à donner lieu à l’application des sanctions prévues […] » ;
3. Considérant que la communication du 25 mai 2012 du ministère public près la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur a été enregistrée au parquet général le 31 mai 2012, qu’il en résulte que tous les faits postérieurs au 31 mai 2007 ne sont pas couverts par la prescription ;
Sur la compétence de la Cour
4. Considérant qu’en application du b) du I de l’article L. 312-1 du code des juridictions financières, tout fonctionnaire ou agent civil ou militaire de l’État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics ainsi que des groupements de collectivités territoriales est justiciable de la Cour de discipline budgétaire et financière ; qu’il en résulte que les fonctionnaires de l’État ainsi que les fonctionnaires ou agents de l’AP-HM, qui est un établissement public, sont justiciables de la Cour ;
Sur les faits, leur qualification et l’imputation des responsabilités
Sur le paiement irrégulier d’astreintes
5. Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret n° 2003-507 du 11 juin 2003 : « Le temps passé en astreinte dans les conditions prévues par le titre II du décret du 4 janvier 2002 susvisé donne droit soit à une compensation horaire, soit à une indemnisation.
La compensation horaire est fixée au quart de la durée totale de l’astreinte à domicile.
L’indemnisation horaire correspond au quart d’une somme déterminée en prenant pour base le traitement indiciaire brut annuel de l’agent concerné au moment de l’astreinte dans la limite de l’indice brut 638 augmenté le cas échéant de l’indemnité de résidence, le tout divisé par 1 820.
Sous réserve du respect de la procédure prévue à l’article 3 ci-après, cette indemnisation peut, à titre exceptionnel, dans un secteur d’activité et pour certaines catégories de personnels, être portée au tiers de la somme évoquée au précédent alinéa, lorsque le degré des contraintes de continuité de service mentionnées à l’article 20 du décret du 4 janvier 2002 susvisé est particulièrement élevé dans le secteur et pour les personnels concernés » ;
6. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que la compensation des astreintes sous forme d’indemnisation est exclusive de toute forme de récupération horaire ; que son montant doit être fonction du traitement indiciaire annuel de l’agent dans la limite de l’indice brut 638 auquel peut s’ajouter l’indemnité de résidence ; que cette somme est versée au prorata du temps passé, limité au quart de ce dernier et que cette part peut, dans certains cas, être portée par exception jusqu’au tiers du temps, selon les contraintes de continuité du service ; que cette adaptation ne peut concerner que les personnels des services les plus exposés ;
7. Considérant que l’AP-HM ne s’est pas soumise à ces exigences ; qu’elle a payé ces astreintes, pour les services informatiques jusqu’au 1er octobre 2009 et pour les autres services jusqu’au 1er août 2010, en référence au taux appliqué aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) ; que le taux horaire ainsi appliqué comprenait donc une majoration non prévue ; qu’en outre, les montants versés n’étaient pas plafonnés à l’indice brut 638 ; que cette décision a été prise par le conseil d’administration de l’établissement en 1994, dans l’attente d’une modification de la réglementation qui a évolué en 2003, rendant en tout état de cause caduc ce dispositif présenté comme transitoire ;
8. Considérant que les sommes ainsi payées de manière irrégulière ont porté préjudice à l’établissement, sans qu’il soit nécessaire d’en établir avec précision le montant ;
9. Considérant que la mise en paiement des sommes précitées a enfreint les règles d’exécution des dépenses de l’établissement par le non-respect des limites posées par la réglementation à l’indemnisation des astreintes ; que ces paiements au-delà des plafonds réglementaires ont permis aux agents bénéficiaires de percevoir des sommes qui ne leur étaient pas dues ; qu’en conséquence ces agents ont bénéficié d’un avantage pécuniaire qu’aucun texte ne pouvait justifier ;
10. Considérant que la mise en paiement et le règlement de ces sommes n’ont été rendus possibles qu’en raison de défaillances dans la chaîne d’engagement de la dépense, laquelle relève du pouvoir de l’ordonnateur et de ses services ;
11. Considérant que, malgré six années passées à la direction générale de l’établissement, M. Vallet n’a pas mis fin à ces irrégularités ;
12. Considérant que, même si il y a mis fin à partir d’octobre 2009, M. Ségade a contribué à ces paiements irréguliers ;
13. Considérant que M. Babut, comptable en charge du versement de la paye des agents pendant les années en cause, aurait dû constater l’absence ou l’insuffisance des pièces justificatives requises par la nomenclature comptable pour contrôler la liquidation des dépenses ; qu’il aurait dû s’opposer au règlement des sommes mandatées et alerter l’ordonnateur sur cette absence de pièces justificatives ; que l’action de son successeur est à l’origine directe de la mise au jour des irrégularités et des procédures de régularisation ;
14. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que la responsabilité de MM. Vallet et Ségade est engagée pour ces faits au titre des articles L. 313-3, L. 313-4 et L. 313-6 du code des juridictions financières ; que celle de M. Babut l’est également au titre des articles L. 313-4 et L. 313-6 du même code ;
Sur le paiement irrégulier de primes « d’intéressement »
15. Considérant qu’afin de compenser les pertes de rémunération des agents liées à la régularisation du paiement des astreintes dites « non dérangées », M. Ségade a envisagé l’instauration d’une « prime provisoire d’intéressement à la performance collective des services » dans le cadre de la loi « hôpital, patients, santé, territoires (HPST) » du 21 juillet 2009 ;
16. Considérant qu’à la suite du refus du comptable de payer cette prime nouvelle, le directeur général a, en juillet 2010, après avis du comité technique d’établissement et information de l’agence régionale de santé, imputé une « prime d’intéressement » sur le reliquat de la prime de service ;
17. Considérant que cette prime était proposée « aux agents volontaires pour réaliser des astreintes » ; que son montant, de 200 € nets mensuels par agent, a été versé d’août à décembre 2010 et pendant l’année 2011 ;
18. Considérant qu’aux termes de l’article 2 de l’arrêté du 24 mars 1967 relatif à l’attribution de la prime de service aux personnels de certains établissements « […] les montants individuels de la prime de service sont fixés, pour un service annuel complet, en considération de la valeur professionnelle et de l’activité de chaque agent » ;
19. Considérant qu’il n’est pas démontré, en l’état du dossier soumis à la Cour, d’une part, que l’attribution de ces primes d’intéressement ne s’inscrivait pas dans les modalités de répartition du reliquat de la prime de service et que, d’autre part, les plafonds globaux et individuels encadrant la prime de service aient été dépassés ;
20. Considérant que l’engagement et l’attribution de ces primes d’intéressement par M. Ségade n’ont pas enfreint, à l’époque où ils sont intervenus, de règles relatives à l’exécution des dépenses de l’établissement, au sens des articles L. 313-3 et L. 313-4 du code des juridictions financières ; qu’en l’absence d’octroi à autrui d’avantage injustifié, l’infraction définie à l’article L. 313-6 du code des juridictions financières n’est pas constituée ;
Sur le paiement irrégulier de la prime dite « prime de service » aux agents contractuels
21. Considérant qu’une prime dite spécifique a été versée entre 2008 et 2010 à plus de 120 agents contractuels de la filière informatique, pour un montant total, sur la période, de 948 111,10 € ;
22. Considérant que cette prime était fondée sur des délibérations du conseil d’administration en date des 28 juin 1991 et 10 juin 1996 ; que le versement de cette prime s’est inscrit dans le cadre de la prime de service ;
23. Considérant que l’autorité administrative compétente peut, dans la limite des dispositions législatives et réglementaires applicables, fixer les conditions de la rémunération des agents contractuels qu’elle emploie ; qu’il n’a pas été établi qu’en l’espèce des dispositions législatives ou réglementaires faisaient obstacle à ce que l’établissement décide de l’attribution des primes en cause à des agents contractuels ;
24. Considérant que, peu de temps après l’intervention de décisions du Conseil d’État du 23 mars 2009 et du 16 novembre 2009 statuant sur des litiges relatifs à l’attribution de la prime de service à ces agents contractuels, M. Ségade a mis un terme à ces versements en obtenant de la part des agents concernés une modification de leur contrat de travail à compter de 2010 ;
25. Considérant que l’engagement et l’attribution de ces primes de service par MM. Vallet et Ségade et leur paiement par M. Babut n’ont pas enfreint, à l’époque où ils sont intervenus, de règles relatives à l’exécution des dépenses, au sens des articles L. 313-3 et L. 313-4 du code des juridictions financières ; qu’en l’absence d’octroi à autrui d’avantage injustifié, l’infraction définie à l’article L. 313-6 du code des juridictions financières n’est pas constituée ;
Sur le versement d’autres indemnités irrégulières à des agents contractuels
26. Considérant qu’entre 2008 et 2010, 10 agents contractuels ont bénéficié du versement d’une prime de technicité, pour un montant de 50 920,76 €, et huit agents contractuels ont perçu une indemnité forfaitaire technique, pour un montant de 112 209,80 € ;
27. Considérant que ces versements ont été basés dans certains cas sur des contrats passés plus de dix ans auparavant ; que l’intitulé de ces rémunérations visait à étendre aux agents concernés des mécanismes existant pour les personnels titulaires ;
28. Considérant qu’aux termes de l’article 4 du décret susvisé du 6 février 1991 « les agents [contractuels de droit public des établissements hospitaliers] sont recrutés par contrat écrit. […]. Outre sa date d’effet et la définition des fonctions occupées, le contrat détermine les conditions d’emploi de l’agent et notamment les modalités de sa rémunération. Il indique les droits et obligations de l’agent, lorsque ceux-ci ne relèvent pas d’un texte de portée générale […] » ;
29. Considérant que, ainsi qu’il a été dit, l’autorité administrative compétente peut, dans la limite des dispositions législatives et réglementaires applicables, fixer les conditions de la rémunération des agents contractuels qu’elle emploie ; qu’il n’a pas été établi qu’en l’espèce des dispositions législatives ou réglementaires faisaient obstacle à ce que l’établissement décide de l’attribution des indemnités en cause à des agents contractuels ;
30. Considérant que les contrats de travail des agents concernés prévoyaient l’attribution de ces indemnités ; que ces contrats étant par nature individuels, il n’était pas nécessaire que le directeur de l’établissement prenne au surplus un arrêté individuel d’attribution desdites indemnités ;
31. Considérant que l’engagement et l’attribution de ces indemnités par MM. Vallet et Ségade et leur paiement par M. Babut n’ont pas enfreint, à l’époque où ils sont intervenus, de règles relatives à l’exécution des dépenses de l’établissement, au sens des articles L. 313-3 et L. 313-4 du code des juridictions financières ; qu’en l’absence d’octroi à autrui d’un avantage injustifié, l’infraction définie à l’article L. 313-6 du code des juridictions financières n’est pas constituée ;
Sur les circonstances
32. Considérant que, sur les quatre griefs examinés, les responsabilités de MM. Vallet et Ségade sont en définitive impliquées du seul fait d’avoir engagé et attribué des indemnisations au titre de la compensation d’astreintes dites « non dérangées » à des agents de l’établissement et celle de M. Babut du fait d’avoir payé ces indemnisations ;
33. Considérant que le dispositif irrégulier a été élaboré et mis en œuvre en toute transparence tant vis-à-vis du conseil d’administration de l’établissement que de l’autorité de tutelle ;
34. Considérant que, s’il peut être reproché à M. Vallet d’avoir manqué de vigilance en laissant perdurer le dispositif irrégulier de versement d’indemnisations pour astreintes dites « non dérangées » mis en place en 1994, il doit être tenu compte de ce qu’il a dû, lors de sa prise de fonction en mars 2002 et de la période qui a suivi, faire face à de sérieuses difficultés et mettre en œuvre de multiples priorités ; que, compte tenu de la situation de l’établissement et des termes de la mission qui lui avait été alors confiée, il a été contraint d’en hiérarchiser et d’en planifier le traitement ;
35. Considérant que, malgré les tensions sociales caractérisant de longue date l’établissement et conformément aux instructions qu’il avait reçues, M. Vallet a mis en œuvre un accord sur la réduction du temps de travail sans utiliser l’enveloppe de 660 postes accordée par l’agence régionale de l’hospitalisation, ainsi que l’a confirmé M. Couty lors de son audition ; que M. Vallet a également engagé et mené à son terme, dans les temps et dans le cadre des crédits prévus, le projet d’établissement dont l’AP-HM ne disposait pas à sa prise de fonction, ainsi que l’ont confirmé M. Fuentes, lors de son audition et le directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation, lors de l’instruction ;
36. Considérant que M. Vallet, désormais retraité, a exercé des fonctions de directeur général de très importants établissements hospitaliers, avec un savoir-faire et un sens du service public attestés par de nombreux témoignages ; que, par la suite, il a été chargé, en sa qualité d’inspecteur général des affaires sociales, de mettre en place des administrations provisoires d’établissements hospitaliers en grandes difficultés financières, en Corse et en Martinique ;
37. Considérant que, dès le courant de l’année 2009, M. Ségade a mis fin au paiement d’une partie des indemnisations irrégulières, soit dans des délais relativement rapides par rapport à sa prise de fonction et bien que cette remise en ordre ait donné lieu à des contestations violentes, dont certaines dirigées directement contre sa personne ;
38. Considérant que si M. Babut n’a pas fait preuve d’une vigilance suffisante dans l’exercice de la mission de contrôle qui lui incombait en sa qualité de comptable de l’établissement, en ce qui concerne le paiement des indemnités d’astreintes dites « non dérangées » à du personnel non médical de l’établissement, il a été, à ce titre, et pour l’exercice 2008, constitué débiteur envers l’AP-HM de la somme de 218 244,97 € par un jugement de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur du 5 octobre 2012 ; qu’en conséquence, et dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre en cause sa responsabilité devant la présente Cour ;
39. Considérant qu’il résulte de l’ensemble des éléments exposés ci-dessus qu’il n’y a pas lieu en définitive d’engager la responsabilité de MM. Vallet, Ségade et Babut ;
ARRÊTE :
Article unique : MM. Vallet, Ségade et Babut sont relaxés des fins de la poursuite.
Délibéré par la Cour de discipline budgétaire et financière, première section, le 26 juin deux mille quinze par M. Migaud, premier président de la Cour des comptes, président ; MM. Larzul et Bouchez, conseillers d’État ; MM. Maistre et Bertucci, conseillers maîtres à la Cour des comptes.
Notifié le 17 juillet 2015.
En conséquence, la République mande et ordonne à tous huissiers de justice sur ce requis de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le président de la Cour et la greffière.
Le président,
Didier
MIGAUD
La
greffière,
Isabelle REYT