RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS,

LA COUR DE DISCIPLINE BUDGETAIRE ET FINANCIERE,

Siégeant à la Cour des comptes, en audience publique, a rendu l'arrêt suivant :

Vu le code des juridictions financières, notamment le titre 1er du livre III, relatif à la Cour de discipline budgétaire et financière ;

Vu la lettre du 22 juillet 2004, enregistrée au Parquet le 23 juillet 2004, par laquelle le président de la deuxième chambre de la Cour des comptes a informé le Procureur général que cette formation avait décidé, dans sa séance du 18 juin 2004, de déférer à la Cour de discipline budgétaire et financière des faits laissant supposer l'existence d'irrégularités affectant la gestion de la chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP), ensemble les pièces à l'appui ;

Vu le réquisitoire du 11 mai 2005 par lequel le Procureur général près la Cour des comptes, ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière, a saisi desdites irrégularités le Premier président de la Cour des comptes, président de la Cour de discipline budgétaire et financière, conformément à l'article L. 314-1 du code des juridictions financières ;

Vu la décision du 29 juillet 2005 par laquelle le Président de la Cour de discipline budgétaire et financière a nommé en qualité de rapporteur Mme Latournarie-Willems, conseillère référendaire à la Cour des comptes ;

Vu les lettres recommandées des 6 juin et 19 septembre 2007 par lesquelles le Procureur général a informé MM. Michel Franck, président de la CCIP de 1998 à 2004, Jean-Daniel Marzolf, directeur général de la CCIP de 1995 à 2004, Pierre Simon, vice-président trésorier de cet établissement de 1998 à 2004 et Jean-Baptiste Tivolle, directeur des ressources humaines de la CCIP de 1999 à 2002, de l'ouverture d'une instruction dans les conditions prévues à l'article L. 314-4 du code susvisé, ensemble les avis de réception de ces lettres ;

Vu la lettre du Président de la Cour de discipline budgétaire et financière en date du 19 mai 2008, transmettant au Procureur général le dossier de l'affaire après dépôt du rapport d'instruction, conformément à l'article L. 314-4 du code des juridictions financières ;

Vu la lettre du Procureur général en date du 13 janvier 2009 informant le Président de la Cour de discipline budgétaire et financière de sa décision de poursuivre la procédure, en application de l'article L. 314-4 du code des juridictions financières ;

Vu l'avis du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi en date du 3 mars 2009 ;

Vu la lettre du Président de la Cour de discipline budgétaire et financière en date du 26 février 2009 transmettant au Procureur général le dossier de l'affaire, conformément à l'article L. 314-6 du code des juridictions financières ;

Vu la décision du Procureur général en date du 29 juin 2009 renvoyant MM. Franck, Simon, Marzolf et Tivolle devant la Cour de discipline budgétaire et financière, en application de l'article L. 314-6 du code des juridictions financières ;

Vu les lettres recommandées en date du 8 juillet 2009 avisant respectivement MM. Franck, Simon, Marzolf et Tivolle de la possibilité de prendre connaissance du dossier, dans les conditions prévues par l'article L. 314-8 du code des juridictions financières et les citant à comparaître devant la Cour le 23 octobre 2009, ensemble les avis de réception de ces lettres ;

Vu le mémoire en défense déposé et enregistré au greffe le 14 septembre 2009 présenté pour MM. Franck, Simon, Marzolf et Tivolle par Maître Richard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, ensemble les productions annexées ;

Vu l'ensemble des pièces qui figurent au dossier, notamment les procès-verbaux d'audition ainsi que le rapport d'instruction de Mme Latournarie-Willems ;

Entendu le rapporteur, Mme Latournarie-Willems, résumant le rapport écrit, en application des articles L. 314-12 et R. 314-1 du code des juridictions financières ;

Entendu le Procureur général, résumant la décision de renvoi, en application des articles L. 314-12 et R. 314-1 du code des juridictions financières ;

Entendu en leurs observations MM. Franck, Simon, Marzolf et Tivolle et Maître Richard, leur conseil, en application de l'article L. 314-12 du code des juridictions financières ;

Entendu le Procureur général en ses conclusions et en ses réquisitions ;

Entendu en sa plaidoirie Maître Richard pour MM. Franck, Simon, Marzolf et Tivolle, et en leurs explications les intéressés, la défense ayant eu la parole en dernier ;

Sur la compétence

Considérant que le contrôle des chambres de commerce et d'industrie, établissements publics placés sous la tutelle de l'Etat, relève, sur le fondement de l'article L. 111-3 du code des juridictions financières, de la compétence de la Cour des comptes, laquelle a délégué cette compétence, par les arrêtés du Premier président des 17 janvier 2003 et 13 octobre 2006, aux chambres régionales des comptes en application des articles L. 111-9 et R. 111-1 du même code ; que dès lors, en application des dispositions du c) du I de l'article L. 312-1 du code des juridictions financières, les représentants, administrateurs ou agents des chambres de commerce et d'industrie sont justiciables de la Cour de discipline budgétaire et financière ;

Sur la prescription

Considérant que les irrégularités postérieures au 23 juillet 1999 ne sont pas couvertes par la prescription édictée par l'article L. 314-2 du code des juridictions financières ;

Sur le fond

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-4 du code des juridictions financières : « Toute personne visée à l'article L. 312-1 qui, en dehors des cas prévus aux articles précédents, aura enfreint les règles relatives à l'exécution des recettes et des dépenses de l'Etat ou des collectivités, établissements et organismes mentionnés à ce même article ou à la gestion des biens leur appartenant ou qui, chargée de la tutelle desdites collectivités, desdits établissements ou organismes, aura donné son approbation aux décisions incriminées sera passible de l'amende prévue à l'article L. 313-1 » ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-6 du même code : « Toute personne visée à l'article L. 312-1 qui, dans l'exercice de ses fonctions ou attributions, aura, en méconnaissance de ses obligations, procuré à autrui un avantage injustifié, pécuniaire ou en nature, entraînant un préjudice pour le Trésor, la collectivité ou l'organisme intéressé, ou aura tenté de procurer un tel avantage sera passible d'une amende dont le minimum ne pourra être inférieur à 300 euros et dont le maximum pourra atteindre le double du montant du traitement ou salaire brut annuel qui lui était alloué à la date de l'infraction » ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n°52-1311 du 10 décembre 1952 : « La situation des personnels administratifs des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers de France est déterminée par un statut établi par des commissions paritaires nommées, pour chacune de ces institutions, par le ministre de tutelle » ;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées de l'article 1er et du titre III du statut du personnel des compagnies consulaires applicable aux chambres de commerce et d'industrie établi sur le fondement des dispositions législatives précitées, seuls les agents des chambres de commerce et d'industrie ayant la qualité d'agent de droit public qui occupent un emploi permanent sont régis par les dispositions de ce statut relatives aux rémunérations ; qu'en revanche, lesdites dispositions ne sont pas applicables aux agents occupant un emploi non permanent ;

Considérant qu'aux termes de l'article 14 du statut du personnel des compagnies consulaires : « Le classement du personnel est fixé par une grille nationale établie par la commission paritaire nationale. Cette grille est obligatoire. Les commissions paritaires locales peuvent, selon les besoins, compléter cette grille nationale, soit en créant des échelons intermédiaires dans chaque emploi, soit en prévoyant des emplois non prévus par la grille nationale et existant dans les services de la compagnie consulaire concernée » ;

Considérant qu'en vertu de l'article 15, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits : « La rémunération mensuelle indiciaire des agents titulaires et stagiaires des compagnies consulaires est calculée en multipliant la somme des trois indices suivants par la valeur du point national : l'indice de qualification déterminé par le classement de l'emploi dans la classification nationale des emplois définie à l'article 14, l'indice des résultats professionnels individuels déterminé en application des articles 16-2, 19 et 50, l'indice d'expérience déterminé en application des articles 19 et 50. La rémunération mensuelle brute des agents titulaires et stagiaires des compagnies consulaires est constituée de la rémunération mensuelle indiciaire, augmentée, le cas échéant, des majorations pour heures supplémentaires, des accessoires de rémunération fixes ou variables et du supplément familial défini à l'article 21 » ;

Considérant qu'aux termes de l'article 20 du statut du personnel des compagnies consulaires, dans sa rédaction applicable en 1999 : « Aucune gratification ne peut être attribuée aux agents » ; qu'à la suite de la décision de la commission paritaire nationale du 11 mai 2000 instituant un treizième mois de rémunération, les dispositions suivantes ont été introduites à l'article 20 sous la forme d'un premier alinéa : « Tous les agents titulaires ou stagiaires bénéficient d'un treizième mois de rémunération. Ce treizième mois, payable en fin d'année, sera égal, pour chaque agent, au douzième des rémunérations qu'il aura effectivement perçues au cours de l'année écoulée » ;

Considérant que le 11 mars 2003, la commission paritaire nationale des chambres de commerce et d'industrie, après en avoir approuvé le principe lors de sa précédente réunion du 5 décembre 2002, a annulé le second alinéa de l'article 20 prohibant l'octroi de gratifications aux agents pour le remplacer par les dispositions suivantes : « Chaque compagnie consulaire peut prévoir le principe d'une enveloppe globale de primes individuelles autres que celles réservées aux augmentations et promotions au choix et primes collectives déjà en place. Ces primes exceptionnelles peuvent être attribuées en reconnaissance d'actions particulières qui ne peuvent faire l'objet ni d'une rémunération horaire, ni d'une augmentation ou promotion (…) » ;

Sur les faits

Considérant qu'entre le 22 juillet 1999 et le 31 décembre 2002, la chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP) a versé à certains de ses agents des compléments de rémunération, sous la forme d'indemnités temporaires de fonction, indemnités permanentes de fonction et primes exceptionnelles ; que les indemnités temporaires de fonction, destinées notamment à rémunérer un surcroît de travail ou la réalisation d'objectifs divers, étaient attribuées aux collaborateurs exerçant, pendant une durée déterminée, des fonctions impliquant un accroissement de leurs responsabilités ; que les indemnités permanentes de fonction, visant à revaloriser les salaires des collaborateurs dont la rémunération était plafonnée parce qu'ils avaient atteint le maximum de la grille, revêtaient en revanche un caractère pérenne ; que le versement des primes exceptionnelles était motivé par la recherche d'une plus grande souplesse dans la progression des carrières et d'un alignement des rémunérations sur celles du secteur privé ;

Considérant qu'en mai 1999, une enquête de l'inspection générale des finances a mis en cause notamment le placement « hors grille » des cadres dirigeants et supérieurs et l'allocation de primes non autorisées par le statut national du personnel des compagnies consulaires ; qu'à la suite de cette enquête, M. Marzolf, alors directeur général de la CCIP, a, par une note du 22 septembre 1999, prescrit aux directeurs des différents services de « surseoir à tout nouveau versement de primes et indemnités » dans l'attente de l'adaptation des règles statutaires ; que néanmoins, d'une part, le versement de primes exceptionnelles n'a cessé qu'en 2000 et, d'autre part, le versement d'indemnités temporaires de fonction et d'indemnités permanentes de fonction s'est poursuivi au-delà de l'année 2002 ; que le nombre d'agents bénéficiaires de l'indemnité temporaire de fonction s'est même accru entre 2000 et 2002 ; que toutefois, lors de ses séances des 21 mars et 27 juin 2001, la commission paritaire locale de la CCIP, faisant usage de la faculté offerte par les dispositions précitées de l'article 14 du statut, a remplacé les dispositions du règlement intérieur du personnel prévoyant le placement « hors grille » de certains cadres par des dispositions nouvelles instaurant des échelons supplémentaires ; qu'il en est résulté une diminution notable du nombre des bénéficiaires des indemnités permanentes de fonction ;

Considérant que le montant des indemnités temporaires de fonction, indemnités permanentes de fonction et primes exceptionnelles ainsi versées aux agents de la CCIP régis par les dispositions du statut national du personnel des chambres de commerce et d'industrie relatives aux rémunérations a atteint un total de 295 046 € entre le 22 juillet et le 31 décembre 1999, soit 171 113 € pour les indemnités temporaires de fonction, 104 835 € pour les indemnités permanentes de fonction et 19 098 € pour les primes exceptionnelles, un total de 542 168 € en 2000, soit 328 388 € pour les indemnités temporaires de fonction, 199 656 € pour les indemnités permanentes de fonction et 14 124 € pour les primes exceptionnelles, un total de 497 675 € en 2001, soit 402 614 € pour les indemnités temporaires de fonction et 95 061 € pour les indemnités permanentes de fonction, et un total de 538 448 € en 2002, soit 493 095 € pour les indemnités temporaires de fonction et 45 353 € pour les indemnités permanentes de fonction, soit un total cumulé de 1 873 337 € en trois ans et demi ;

Sur la qualification juridique

Considérant que les indemnités permanentes de fonction avaient pour objet et pour effet de permettre à la CCIP de s'affranchir, pour la rémunération de certains de ses agents, des limites fixées par la grille nationale des rémunérations ; qu'ainsi, le versement d'indemnités permanentes de fonction aux agents de la CCIP régis par les dispositions du statut relatives aux rémunérations est intervenu en violation des dispositions précitées des articles 14 et 15 du statut du personnel des compagnies consulaires ;

Considérant que le statut du personnel ne prévoit pas l'attribution de primes exceptionnelles  ou d'indemnités temporaires de fonction ; que son article 20, qui institue le bénéfice d'un treizième mois de rémunération, interdit toute gratification ; que, par ailleurs, l'indemnité temporaire de fonction ne correspond pas, dans la généralité des cas, aux prévisions de l'article 26-2 du règlement intérieur qui ne vise que des indemnités différentielles allouées à certaines conditions à des agents assurant des remplacements ; qu'ainsi, les primes et indemnités en cause sont dépourvues de base légale ;

Considérant que le paiement de primes et d'indemnités dépourvues de fondement juridique ou contraires au statut du personnel est constitutif d'une violation des règles relatives à l'exécution des dépenses applicables à la CCIP ; que l'infraction définie à l'article L. 313-4 du code des juridictions financières se trouve dès lors constituée ;

Considérant que le respect des dispositions statutaires par les dirigeants d'un organisme constitue une obligation au sens de l'article L. 313-6 du code des juridictions financières ; que cette obligation a été en l'espèce méconnue ; qu'il ressort de l'instruction que le versement d'indemnités permanentes de fonctions ne correspondait pas à la contrepartie d'un surcroît de travail ou d'une sujétion particulière ; qu'en l'absence de telles contreparties, ces indemnités constituent un avantage injustifié procuré à leurs bénéficiaires ayant entraîné pour la CCIP un préjudice à hauteur de leur montant, soit 444 905 € ; qu'ainsi, l'infraction définie à l'article L. 313-6 du code des juridictions financières se trouve constituée ;

Sur les responsabilités au titre de l'article L. 313-4 du code des juridictions financières

Considérant qu'aux termes de l'article 56 du décret n° 91-739 du 18 juillet 1991 relatif aux chambres de commerce et d'industrie, aux chambres régionales de commerce et d'industrie, à l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie et aux groupements interconsulaires, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits : «… 2° Le président de la compagnie consulaire est chargé de l'exécution du budget. Il émet, à destination du trésorier, les titres de perception des recettes et des produits, ainsi que les mandats des dépenses et des charges, préalablement à leur encaissement ou à leur paiement ; 3° Le trésorier est chargé de la tenue de la comptabilité, de l'exécution des opérations de dépenses et de recettes, ainsi que de la gestion de la trésorerie ; il a autorité sur les services comptables et les régies » ;

Considérant que l'article 49 du même décret renvoie au règlement intérieur des compagnies consulaires la fixation des conditions dans lesquelles le président et le trésorier peuvent déléguer leur signature au directeur général ou, sur sa proposition, à d'autres agents permanents de la chambre ; que sur le fondement de ces dispositions, l'article 70 du règlement intérieur de la CCIP prévoyait l'existence de « délégations de signature générale ou spéciales, en particulier celle relative à la gestion du personnel, que le directeur général reçoit du président » ;

Considérant que M. Franck a été élu président de la CCIP en janvier 1998, puis réélu en janvier 2001 ; qu'en vertu des dispositions précitées du décret du 18 juillet 1991 comme du règlement intérieur de la chambre, il avait la qualité d'ordonnateur principal de l'établissement ; qu'il a consenti de larges délégations de signature à ses collaborateurs, sans contrôler ultérieurement l'usage qui en était fait ; qu'ayant été rendu destinataire, en mai 1999, du rapport susmentionné de l'inspection générale des finances, M. Franck était informé de la nature irrégulière des primes et indemnités en cause ; qu'au cours de l'instruction, il a par ailleurs reconnu avoir eu connaissance de la note précitée du directeur général de la CCIP en date du 22 septembre 1999, prescrivant aux directeurs de surseoir à tout nouveau versement de primes et indemnités à la suite de ce rapport, mais ne pas s'être préoccupé de sa mise en application ; qu'ainsi, M. Franck a personnellement fait preuve d'un défaut de surveillance dans le contrôle des dépenses de la CCIP ; que dès lors, sa responsabilité se trouve engagée pour ces faits au titre des dispositions de l'article L. 313-4 du code des juridictions financières ;

Considérant que M. Simon a été élu vice-président trésorier de la CCIP en janvier 1998, puis réélu à cette fonction en janvier 2001 ; qu'en vertu des dispositions précitées du décret du 18 juillet 1991, il était chargé de la tenue de la comptabilité et de l'exécution des opérations de dépenses de la chambre ; qu'ayant eu connaissance du rapport susmentionné de l'inspection générale des finances, il était informé de la nature irrégulière des primes et indemnités en cause ; que s'il a indiqué au cours de l'instruction n'avoir pas personnellement visé les mandatements des primes et indemnités litigieuses, mais avoir délégué ce visa à un trésorier délégué, il demeure qu'en vertu des dispositions précitées de l'article 56 du décret du 18 juillet 1991, l'ensemble des paiements des dépenses de la CCIP était effectué sous sa responsabilité ; que dès lors, sa responsabilité se trouve engagée pour ces faits au titre des dispositions de l'article L. 313-4 du code des juridictions financières ;

Considérant que M. Marzolf a exercé les fonctions de directeur général de la CCIP de février 1995 à mars 2004 ; qu'il était titulaire d'une large délégation de signature du président dans le domaine de la gestion des ressources humaines ; qu'à la suite de la mise en cause par l'inspection générale des finances de la régularité du régime indemnitaire de la CCIP, il a signé le 22 septembre 1999 une note prescrivant de « surseoir à tout nouveau versement de primes ou indemnités et ce, dans la perspective de l'adaptation de nos règles statutaires aux besoins de gestion » ; que cependant ces directives sont restées inappliquées, M. Marzolf continuant à signer des décisions d'attribution de primes irrégulières ; qu'au cours de l'instruction, M. Marzolf a reconnu que cette note correspondait « à une décision de principe », mais que « pour autant, des décisions d'attribution d'indemnités temporaires de fonctions et d'indemnités permanentes de fonctions ont continué d'être prises » pour des raisons tenant à l'impossibilité de diminuer brusquement les rémunérations des agents et à la nécessité d'inciter les agents à la recherche de ressources de financement nouvelles pour la chambre ; qu'en maintenant un dispositif irrégulier de rémunérations complémentaires et en signant des décisions attribuant de telles primes et indemnités, M. Marzolf a engagé sa responsabilité au titre des dispositions de l'article L. 313-4 du code des juridictions financières ;

Considérant que M. Tivolle a exercé les fonctions de directeur des ressources humaines de la CCIP de janvier 1999 à septembre 2002 ; qu'il résulte de l'instruction qu'il bénéficiait d'une délégation de signature du président pour toutes les décisions ayant trait à la gestion des ressources humaines des agents autres que les cadres supérieurs ; qu'il ressort de son audition que « toutes les propositions d'attribution d'indemnités temporaires de fonctions appuyées par les directeurs étaient argumentées par une note et instruites par la direction des ressources humaines qui en vérifiait le bien-fondé » ; que M. Tivolle assistait à la commission paritaire locale du 15 novembre 1999, destinée à présenter la synthèse des conclusions du rapport susmentionné de l'inspection générale des finances et des réponses apportées ; que, postérieurement à cette réunion et à la signature par M. Marzolf de la note précitée du 22 septembre 1999, M. Tivolle a signé des décisions d'octroi d'indemnités temporaires de fonction, d'indemnités permanentes de fonction et de primes exceptionnelles ; qu'en conséquence, dirigeant le service chargé d'analyser toutes les propositions de décisions d'octroi de primes et indemnités, et ayant lui-même signé certaines des décisions en cause, M. Tivolle a concouru au maintien d'indemnités irrégulières, engageant ainsi sa responsabilité au titre des dispositions de l'article L. 313-4 du code des juridictions financières ;

Sur les responsabilités au titre de l'article L. 313-6 du code des juridictions financières

Considérant qu'il résulte de l'instruction que MM. Marzolf et Tivolle ont, en toute connaissance de cause, assuré le versement d'indemnités permanentes de fonction au moins jusqu'en 2002, nonobstant la note précitée signée par M. Marzolf le 22 septembre 1999 ; qu'ainsi ils ont méconnu leurs obligations et engagé leur responsabilité dans l'infraction commise au titre des dispositions de l'article L. 313-6 du code des juridictions financières ;

Sur l'existence de circonstances atténuantes

Considérant toutefois que les primes irrégulières existaient de longue date lors de l'entrée en fonction de MM. Franck, Simon, Marzolf et Tivolle, sans qu'il y ait eu d'opposition de la part des autorités de tutelle ; que ces primes présentaient un intérêt pour la gestion des ressources humaines de la CCIP, notamment dans la recherche de sources de financement nouvelles (collecte de la taxe d'apprentissage) ; que la régularisation des pratiques concernées exigeait l'intervention de la commission paritaire nationale et nécessitait un délai dont n'étaient pas maîtres les dirigeants de la CCIP ; que les primes irrégulières étaient attribuées à un nombre réduit des salariés de la CCIP et représentaient une part limitée de la masse salariale hors charges ; qu'il y a lieu de retenir ce contexte comme une circonstance atténuante ;

Sur l'amende

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des irrégularités commises et des circonstances de l'espèce en infligeant à M. Franck une amende de 300 €, à M. Simon une amende de 300 €, à M. Marzolf une amende de 600 € et à M. Tivolle une amende de 600 € ;

Sur la publication

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 314-20 du code des juridictions financières, de publier le présent arrêt au Journal officiel de la République française.

ARRÊTE :

Article 1er : M. Michel FRANCK est condamné à une amende de trois cents euros (300 euros).

Article 2 : M. Pierre SIMON est condamné à une amende de trois cents euros (300 euros).

Article 3 : M. Jean-Daniel MARZOLF est condamné à une amende de six cents euros (600 euros).

Article 4 : M. Jean-Baptiste TIVOLLE est condamné à une amende de six cents euros (600 euros).

Article 5 : Le présent arrêt sera publié au Journal officiel de la République française.

Délibéré par la Cour de discipline budgétaire et financière, première section, le vingt-trois octobre deux mil neuf par M. Martin, Conseiller d'État, remplaçant en application de l'article R. 311-1-IV du code des juridictions financières le président de la première section, empêché ; M. Loloum, conseiller d'État ; MM. Vachia et Duchadeuil conseillers maîtres à la Cour des comptes.

Lu en séance publique le vingt-sept novembre deux mille neuf.

En conséquence, la République mande et ordonne à tous huissiers de justice sur ce requis de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d'y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu'ils en seront légalement requis.

En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le président de la Cour et la greffière.

Le Président, la greffière,

Philippe MARTIN Maryse LE GALL