Vu la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948 modifiée et complétée par les lois n° 55-1069 du 6 août 1955 et 63-778 du 31 juillet 1963, tendant à sanctionner les fautes de gestion commises à l'égard de l'Etat et de diverses collectivités et portant création d'une Cour de discipline budgétaire et financière ;
Vu la décision en date du 11 mai 1964 par laquelle la Cour des comptes a saisi la Cour de discipline budgétaire et financière d'irrégularités constatées lors du jugement des comptes de l'Ecole Régionale d'Agriculture d'Ondes (Haute-Garonne), ensemble la lettre de M le Premier président de la Cour des comptes en date du 1er juillet 1964 transmettant ladite décision au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière ;
Vu le réquisitoire de M le Procureur général en date du 5 octobre 1964 transmettant le dossier au président de la Cour de discipline budgétaire et financière ;
Vu la décision du président de la Cour de discipline budgétaire et financière du 7 octobre 1964 désignant comme rapporteur M CHARRIER, conseiller référendaire à la Cour des comptes ;
Vu l'accusé de réception de la lettre recommandée adressée le 23 octobre 1965 à M FERRAN, l'informant de l'ouverture d'une instruction et l'avisant qu'il était autorisé à se faire assister, soit par un mandataire, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Vu l'avis émis le 22 mars 1967 par le ministre de l'agriculture ;
Vu l'avis émis le 14 juin 1967 par le ministre de l'économie et des finances ;
Vu l'avis émis par la commission administrative paritaire compétente dans sa séance du 4 juillet 1967, sur communication du dossier faite à ladite commission en application de l'article 19 de la loi du 25 septembre 1948 ;
Vu les conclusions du Procureur général de la République en date du 12 octobre 1967, renvoyant M FERRAN devant la Cour de discipline budgétaire et financière ;
Vu l'accusé de réception de la lettre recommandée en date du 18 octobre 1967 avisant M FERRAN qu'il pouvait, dans un délai de quinze jours, prendre connaissance du dossier de l'affaire au secrétariat de la Cour, soit par lui-même, soit par un mandataire, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Vu le mémoire présenté le 30 novembre 1967 par M FERRAN ;
Vu l'accusé de réception de la lettre recommandée en date du 16 janvier 1968 invitant M FERRAN à comparaître ;
Vu l'ensemble des autres pièces figurant au dossier et notamment les procès-verbaux d'interrogatoire ;
Ouï M CHARRIER, conseiller référendaire à la Cour des comptes, en son rapport ;
Ouï M le Procureur général de la République en ses conclusions ;
Ouï M FERRAN en ses explications ;
Ouï M FERRATGES, professeur au lycée agricole d'Ondes, cité comme témoin par M le Procureur général ;
Ouï M le Procureur général de la République en ses réquisitions ;
Ouï M FERRAN en ses observations, celui-ci ayant eu la parole le dernier ;
Considérant que, dans sa séance du 14 juin 1945, le conseil d'administration de l'école régionale d'agriculture d'Ondes avait, à la demande de M MOLIE, directeur de l'établissement, décidé d'allouer à M ROUDIER, surveillant-répétiteur chargé du secrétariat de la direction et de la régie d'avances, une indemnité mensuelle de 1000 anciens francs ; que, sur la proposition de M FERRAN, successeur de M MOLIE, cette indemnité avait été portée à 1500 anciens francs par décision du conseil d'admnistration du 22 novembre 1946 ; qu'à la suite du remplacement de M ROUDIER par M FERRAN, professeur d'enseignement général, le 15 février 1947, le conseil d'administration avait décidé, dans sa séance du 11 septembre 1947, de relever à 2500 anciens francs l'indemnité mensuelle, payable par moitié sur les crédits de la section "enseignement" et par moitié sur ceux de la section "exploitation agricole" du budget de l'école ; que cette indemnité avait par la suite été périodiquement rajustée pour rester égale à la moyenne des taux réglementaires des indemnités accordées au comptable deniers et au comptable matières de l'établissement ;Considérant que, par lettre du 17 juin 1953, rappelée le 13 décembre 1954, M le Procureur général près la Cour des comptes avait attiré l'attention du directeur de la production agricole au ministère de l'Agriculture sur le caractère irrégulier de l'avantage attribué à M FERRATGES en vertu d'une simple décision du conseil d'administration de l'école ; que, cette lettre étant restée sans réponse et la vérification des comptes de l'établissement pour 1953 et 1954 ayant montré que M FERRATGES avait continué à percevoir l'indemnité de secrétariat, la Cour des comptes est intervenue de nouveau, par référé adressé le 30 juillet 1956 au secrétaire d'Etat à l'agriculture ; qu'en réponse, celui-ci a fait connaître qu'il avait invité le directeur de l'école régionale d'agriculture d'Ondes, par lettre du 25 septembre 1956, à cesser immédiatement de rétribuer M FERRATGES pour un travail de secrétariat et à appliquer strictement les dispositions de l'arrêté interministériel du 12 septembre 1952 concernant les indemnités de responsabilité des régisseurs d'avances ;
Considérant qu'après réception de cette lettre, M FERRAN a suspendu les mandatements d'indemnités au profit de M FERRATGES ; qu'il les a repris en mars 1957, à la suite d'instructions verbales de l'administration centrale de l'agriculture, en substituant aux indemnités forfaitaires des indemnités pour heures supplémentaires ;
Considérant que, sous cette dernière forme, les indemnités ont continué à être versées à M FERRATGES jusqu'à la fin du premier semestre 1962, les mandatements n'ayant cessé qu'à la suite de nouvelles interventions de la Cour des comptes, et après la sortie de fonctions de M FERRAN ;
Considérant que l'allocation à M FERRATGES d'indemnités pour heures supplémentaires était irrégulière, les conditions auxquelles le décret n° 50-1248 du 6 octobre 1950 soumet l'octroi de ces indemnités n'étant pas remplies ; que faisait en particulier défaut la décision conjointe du ministre intéressé et du ministre des Finances autorisant le paiement d'indemnités horaires pour travaux supplémentaires aux agents de la catégorie ; qu'en outre M FERRATGES bénéficiait d'un indice de traitement supérieur à la limite fixée pour l'attribution de ces indemnités ;
Considérant qu'en mandatant au profit de M FERRATGES des indemnités non autorisées dans les formes réglementaires, M FERRAN a commis une infraction aux règles d'exécution des dépenses publiques au sens de l'article 5 de la loi du 25 septembre 1948 ; que cette infraction ne se trouve couverte par la prescription instituée par l'article 30 de ladite loi que pour les faits antérieurs au 11 mai 1960 ;
Considérant toutefois que l'insuffisance de l'organisation et des moyens en personnel de l'école régionale d'agriculture d'Ondes pouvait justifier le recours à M FERRATGES pour assurer certaines tâches administratives ; que, dans la mesure où ces tâches s'ajoutaient à un service normal d'enseignement, il pouvait sembler équitable, comme l'a d'ailleurs admis le conseil d'administration de l'école, d'accorder à M FERRATGES une rémunération supplémentaire ; qu'en versant cette rémunération sous forme d'indemnité pour heures supplémentaires, M FERRAN n'avait pas l'intention d'enfreindre les règles applicables en la matière ; qu'il résulte en effet de l'instruction et de l'avis du ministre de l'agriculture qu'après avoir reçu l'ordre écrit de cesser de rétribuer M FERRATGES pour un travail de secrétariat, M FERRAN avait pu, de bonne foi, interpréter les directives verbales de l'administration centrale de l'agriculture comme l'autorisant à allouer à M FERRATGES des indemnités pour heures supplémentaires ; que, dans l'esprit de M FERRAN, la conviction que le nouveau mode de présentation des indemnités suffisait à faire disparaître leur irrégularité a pu être corroborée par le fait qu'entre 1957 et 1962 aucune objection n'a été faite au paiement des indemnités en cause, pas plus par le comptable payeur que par l'autorité de tutelle, appelée tant à approuver le budget dans lequel apparaissait le crédit correspondant qu'à viser les mandats pour l'application des règles de cumul ; que, de façon plus générale, les errements reprochés à M FERRAN résultent pour une part des négligences et des hésitations de l'administration centrale de l'agriculture, qui ne s'était pas suffisamment attachée, pendant la période considérée, à résoudre par des voies régulières les problèmes de gestion des établissements d'enseignement agricole dotés de l'autonomie financière ;
Considérant que, dans ces circonstances, l'infraction commise par M FERRAN, si elle est constante, ne présente pas un caractère de gravité justifiant l'application d'une sanction au titre de l'article 5 de la loi du 25 septembre 1948 ;
ARRETE :
M FERRAN est relaxé des fins de la poursuite.