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QUATRIEME CHAMBRE ------- Première section ------- Arrêt n° S 2016-3736
Audience publique du 17 novembre 2016
Prononcé du 1er décembre 2016
| ARRÊTÉ CONSERVATOIRE DE DÉBET
INSTITUT FRANÇAIS D’ISRAEL
Exercice 2012
Rapport n° R-2016-1130
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République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire n° 2015-62 RQ-DB du 8 septembre 2015 par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi la Cour d’une présomption de charge, en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, agent comptable de l’Institut français d’Israël, au titre d’une opération relative à l’exercice 2012 ;
Vu la notification dudit réquisitoire, le 27 octobre 2015, à M. X qui en a accusé réception le 30 octobre 2015, à la directrice de l’Institut français d’Israël qui en a accusé réception le 4 décembre 2015 et au trésorier-général pour l’étranger pour information ;
Vu l’arrêté conservatoire de débet en date du 4 mars 2015, transmis à la Cour le 28 avril 2015, par lequel le trésorier-payeur général pour l’étranger a mis en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X en sa qualité d’agent comptable de l’Institut français d’Israël au titre de sa gestion du 1er janvier au 31 août 2012 ;
Vu le bordereau d’observations et celui d’injonctions du trésorier-payeur général pour l’étranger chargé de l’apurement des comptes des établissements de diffusion culturelle à l’étranger, ensemble les réponses du comptable et les pièces justificatives visées au réquisitoire du 8 septembre 2015 ;
Vu les pièces du dossier ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 susvisé de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu les lois et règlements applicables aux établissements de diffusion culturelle à l’étranger dotés de l’autonomie financière, notamment le décret modifié n° 76-832 du 24 août 1976 relatif à l’organisation financière de certains établissements ou organismes de diffusion culturelle dépendant du ministère des affaires étrangères ou du ministère de la coopération ;
Vu l’instruction M 9-7 sur l’organisation financière et comptable des établissements ou organismes de diffusion culturelle à l’étranger ;
Vu le rapport de Mme Sylvie TORAILLE, conseillère maître ;
Vu les conclusions du Procureur général n° 664 du 10 octobre 2016 ;
Entendu, lors de l’audience publique de ce jour, Mme Sylvie TORAILLE, conseillère maître, en son rapport, M. Christian MICHAUT, avocat général, en les conclusions du ministère public ;
Entendu, en délibéré, M. Jean-Yves BERTUCCI, conseiller maître, en ses observations ;
Sur la présomption de charge unique
Attendu que par l’arrêté conservatoire de débet susvisé, il est fait grief à M. X d’avoir payé un mandat (n° 1406) d’un montant de 24 271,84 shekels (soit 4 854,37 €) imputé sur le compte 6138 (« Autres rémunérations d’intermédiaires et honoraires ») alors qu’au regard de la nature de la dépense (dépense de transfert en faveur de tiers), il aurait dû être imputé au compte 651 (« Transferts directs aux ménages »), compte qui n’était pas doté de crédits suffisants pour supporter une dépense de ce montant ;
Attendu que le comptable ne conteste pas l’irrégularité de l’imputation du mandat litigieux ;
Attendu qu’il fait valoir, outre un contexte de surcharge de travail et une insuffisante coordination entre les services de l’ambassade et ceux de l’Institut qui aurait empêché la prise en charge de la dépense par le service commun de gestion de l’ambassade, qu’un refus de paiement d’une dépense dont le principe avait été accepté par le conseiller culturel, également ordonnateur de l’Institut, aurait nui au prestige et à la crédibilité de l’établissement ;
Attendu que ces éléments d’explication ne sont pas de nature à exonérer le comptable de sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu qu’aux termes de l’article 12 du décret susvisé du 29 décembre 1962, les comptables publics sont tenus d’exercer le contrôle de « l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet » ; qu’il n’est pas contesté que M. X a, en l’espèce, manqué à cette obligation ; qu’il y a lieu dès lors de mettre en jeu sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu que le comptable conteste que ce manquement ait causé un préjudice financier à l’établissement, au motif que la dépense n’était pas injustifiée, qu’elle aurait été effectuée de toute façon et que son paiement aurait accru la notoriété et la crédibilité de l’Institut ;
Attendu que, dans ses conclusions, le Procureur général rappelle qu’une dépense payée en dépassement de crédits est, selon la jurisprudence, dommageable à la collectivité ;
Attendu que la disponibilité des crédits est à apprécier au niveau de la rubrique comptable où ils sont ouverts de façon limitative ; que, selon l’instruction M 9-7 susvisée, dans les établissements de diffusion culturelle à l’étranger, « les crédits ouverts sont limitatifs au niveau du chapitre » et « le chapitre budgétaire correspond au compte divisionnaire (à 3 chiffres) » ;
Attendu qu’en l’espèce, faute de crédits suffisants sur le chapitre correspondant au compte 651, la dépense n’aurait pu être réglée si le comptable avait veillé à son exacte imputation ;
Attendu que l’imputation sur un compte inapproprié a eu pour conséquence de rendre possible la prise en charge d’une dépense que l’autorité compétente, pour arrêter le budget de l’Institut n’avait pas autorisée, faute d’avoir ouvert des crédits suffisants pour permettre sa correcte imputation sur le chapitre adéquat ; qu’en l’absence de cette autorisation, la dépense réalisée du fait du manquement du comptable présente un caractère indu ; que le manquement reproché à M. X a donc causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, à l’Institut français d’Israël ;
Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi il y a lieu de constituer M. X débiteur envers l’Institut français d’Israël de la somme de 24 271,84 shekels, soit, aux termes du réquisitoire, 4 854,37 € au 31 décembre 2012 ;
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, dans le cadre de l’apurement administratif des comptes, le premier acte de mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public s’entend de l’injonction adressée au comptable par le trésorier-payeur général pour l’étranger de justifier l’imputation irrégulière ;
Attendu qu’en l’espèce, la date de la réception du bordereau d’injonction par M. X n’étant pas connue, la date à partir de laquelle seront calculés les intérêts est le 18 février 2015, date de la réponse de M. X au bordereau d’injonction du trésorier‑payeur général pour l’étranger ;
Attendu que M. X a confirmé qu’il n’existait pas de contrôle sélectif de la dépense au sein de son poste comptable ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article unique : M. X est constitué débiteur envers l’Institut français d’Israël au titre de la somme de 24 271,84 shekels (soit 4 854,37 €), augmentée des intérêts de droit à compter du 18 février 2015.
Aucun dispositif de contrôle sélectif de la dépense n’était applicable en l’espèce.
Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section. Présents : M. Jean-Philippe VACHIA, président de chambre, président de la formation ; M. Yves ROLLAND, conseiller maître, président de section, Mme Anne FROMENT‑MEURICE, présidente de chambre maintenue en activité, MM. Jean-Pierre LAFAURE, Franc-Gilbert BANQUEY, Jean-Yves BERTUCCI, conseillers maîtres, et Mme Isabelle LATOURNARIE-WILLEMS, conseillère maître.
En présence de Mme Marie-Noëlle TOTH, greffière de séance.
Marie-Noëlle TOTH
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Jean-Philippe VACHIA
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En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-16 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-15 du même code.
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