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SEPTIEME CHAMBRE

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Quatrième section

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Arrêt n° S 2016-3316

 

Audience publique du 28 septembre 2016

 

Prononcé du 28 octobre 2016

 

INSTITUT NATIONAL D’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE RECHERCHE AGRONOMIQUE ET AGROALIMENTAIRE DE RENNES (AGROCAMPUS RENNES)

ILLE-ET-VILAINE

 

Exercice 2008

 

Rapport n° R-2016-0986-1

 

 

République Française,

Au nom du peuple français,

 

La Cour,

 

Vu le réquisitoire en date du 6 février 2014, par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi la septième  chambre de la Cour des comptes de présomptions de charge, en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de
M. X, agent comptable de l’Institut national d’enseignement supérieur et de recherche agronomique et agroalimentaire de Rennes Agrocampus Rennes »), au titre d’opérations relatives à l’exercice 2008, notifié le 17 février 2014 au comptable concerné ;

 

Vu les comptes rendus en qualité de comptable de l’Institut national d’enseignement supérieur et de recherche agronomique et agroalimentaire de Rennes, par
M. X, du 1er janvier au 30 juin 2008 ;

 

Vu les justifications produites au soutien du compte en jugement ;

 

Vu le code des juridictions financières ;

 

Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

 

Vu le code rural et de la pêche maritime ainsi que les lois et règlements applicables à l’Institut national d’enseignement supérieur et de recherche agronomique et agroalimentaire de Rennes (« Agrocampus Rennes ») ;

 

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique alors en vigueur ;

 

Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifiée dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 ;

 

Vu le rapport de M. Stéphane GAILLARD, conseiller référendaire, magistrat chargé de l’instruction ;

 

Vu les conclusions du Procureur général ;

 

Vu les pièces du dossier ; 

Entendu lors de l’audience publique du 28 septembre 2016, M. Stéphane GAILLARD, conseiller référendaire, en son rapport, et Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du ministère public, les parties n’étant ni présentes ni représentées ;

Entendu en délibéré Mme Sylvie VERGNET, conseillère maître, en ses observations ;

 

 

Sur toutes les présomptions de charge soulevées à l’encontre de M. X, au titre de l’exercice 2008

 

Attendu qu’aucune circonstance de force majeure, au sens du premier alinéa du V de l’article 60 de la loi n° 63-156 susvisée, n’a été établie ni même alléguée ;

 

Attendu que, faute d’avoir émis des réserves sur les comptes de son prédécesseur, la responsabilité pécuniaire de M. X s’étend à toutes les opérations du poste comptable qu’il dirige depuis la date de son installation ;

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la 7ème  chambre de la Cour des comptes de la responsabilité encourue par M. X, à raison de l’insuffisance de justification des soldes au 30 juin 2008 du compte 261 « titres de participation » pour un montant de 1 479 , du compte 266 « autres formes de participation dont participation à la constitution de patrimoine commun » au 30 juin 2008 pour un montant de 170 101,38 €, justifié en partie seulement par l’état de l’actif pour 53 500 , du compte 271 « titres immobilisés : titres de propriété-actions» pour un montant de 3 284,66 €, et du compte 275 «dépôts et cautionnements versés » pour un montant de 823,23  ;

 

 

Sur la présomption de charge  1 : défaut de justification du solde du                 compte 261 « titres de participation »

 

 

Attendu que le comptable expose que le solde du compte 261 correspond à la détention de titres de participation au capital social de Coopagri Bretagne pour un montant de 703 € et du Crédit agricole pour un montant de 776  ; qu’à l’appui de ses explications, il a produit des arrêtés de comptes en date du 5 septembre 2006 pour les parts détenues sur Coopagri Bretagne et du 6 juillet 2007 pour les parts détenues au capital du Crédit agricole ;

 

Attendu qu’aucun des documents produits n’établit avec certitude le montant du solde du compte 261 au moment de l’arrêt des comptes d’Agrocampus Rennes ;

 

Attendu que le défaut de justification de ce solde constitue un manquement à l’obligation de conservation des valeurs qui incombait à M. X en vertu de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 ;

 

Attendu qu’il résulte de l’absence de justificatif du solde du compte 261 au 30 juin 2008 un manquant en valeur qui a causé un préjudice financier à l’organisme ; qu’en conséquence, il y a lieu de constituer M. X débiteur d’Agrocampus Rennes de la somme de 1 479 €, au titre de l’exercice 2008, et de fixer le point de départ des intérêts de droit au 17 février 2014, date de réception de la notification du réquisitoire ;

 

Sur la présomption de charge  2 : défaut de justification du solde du                 compte 266 « autres formes de participation dont participation à la constitution de patrimoine commun »

 

Attendu que le solde du compte 266 correspond à des participations de l’INSFA à des opérations de l’ENSAR constatées en février 2003 pour l’une (53 500 €) et antérieurement à 2002 pour l’autre (116 601,38 €) ; que la fusion de l’INSFA et de lENSAR a permis de constituer Agrocampus Rennes à compter du 14 janvier 2004 ;

 

Attendu que le comptable avait apporté des justificatifs pour 53 500 € ;

 

Attendu que le comptable fait valoir que le solde non justifié de 116 601,38  du compte 266 correspond à des écritures antérieures à 2002 ; que ces opérations relevaient de comptes déjà jugés dont les pièces justificatives ont été détruites ;

 

Attendu que cette circonstance n’exonère pas le comptable de l’obligation de conserver les pièces justificatives des documents comptables qui justifient les soldes du bilan en vertu du premier alinéa du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 suscitée ;

 

Attendu que selon le comptable, lors de la fusion de l’INSFA et de l’ENSAR pour constituer Agrocampus Rennes, les écritures de régularisation, portant sur le compte 138 en contrepartie du compte 266, auraient évité une double comptabilisation des immobilisations réalisées ou acquises en commun par les deux établissements ; qu’elles n’ont pas été effectuées car l’agent comptable ne disposait pas des pièces justificatives relatives au solde du compte 138 et les méthodes de comptabilisation en pratique antérieurement à 2004 ne lui permettaient pas d’avoir l’assurance que les écritures avaient été correctement passées ; que l’établissement n’a pas réalisé l’inventaire permettant de connaître la composition du compte 138 ;

 

Attendu qu’aucune pièce ne permet d’établir avec certitude que le solde du compte 266 traduit une erreur de comptabilisation au moment de la création d’Agrocampus Rennes ; que le défaut de justification de ce solde constitue un manquement à l’obligation de conservation des valeurs qui incombait à M X en vertu de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 ;

 

Attendu qu’il résulte de l’absence de justification du solde du compte 261 au 30 juin 2008 un manquant en valeur qui a causé un préjudice financier à l’organisme ; qu’en conséquence, il y a lieu de constituer M. X débiteur d’Agrocampus Rennes de la somme de 116 601,38 €, au titre de l’exercice 2008, et de fixer le point de départ des intérêts de droit au 17 février 2014, date de réception de la notification du réquisitoire ;

 

 

Sur la présomption de charge  3 : défaut de justification du solde du                 compte 271 « titres immobilisés - titres de propriété-actions »

 

Attendu que le solde du compte 271 n’est justifié que par un état détaillé ;

Attendu que le comptable fait valoir que cet état détaillé comporte une ligne mentionnant un mandat du 20 novembre 1979, ce qui montre que les faits générateurs des écritures sont très antérieurs à la création d’Agrocampus Rennes ; que ces opérations relèveraient de comptes déjà jugés dont les pièces justificatives ont été détruites et ne peuvent donc plus être produites ;

Attendu que cette circonstance n’exonère pas le comptable de l’obligation de conserver les pièces justificatives des documents comptables qui justifient les soldes du bilan en vertu du premier alinéa du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 suscitée ;

Attendu que le comptable fait également valoir que ces titres sont tous en relation avec une activité agricole ; que l’activité d’exploitant agricole de l’ENSAR ayant été transférée à un centre INRA, les titres auraient dû être sortis de l’actif de l’ENSAR mais que les écritures afférentes n’ont sans doute pas été passées ;

Attendu que l’hypothèse émise par l’agent comptable n’est étayée d’aucune pièce ; qu’en tout état de cause, M. X n’a pas émis de réserve sur la gestion de ses prédécesseurs ;

Attendu qu’aucune pièce ne permet de justifier le solde du compte 271 ; que le défaut de justification de ce solde constitue un manquement à l’obligation de conservation des valeurs qui incombait à M. X en vertu de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 ;

Attendu qu’il résulte de l’absence de justification de ce solde au 30 juin 2008 un manquant en valeur qui a causé un préjudice financier à l’organisme ; qu’en conséquence, il y a lieu de constituer M. X débiteur d’Agrocampus Rennes de la somme de 3 284,66  au titre de l’exercice 2008, et de fixer le point de départ des intérêts de droit au 17 février 2014, date de réception de la notification du réquisitoire ;

 

Sur la présomption de charge  4 : défaut de justification du solde du compte 275 « dépôts et cautionnements versés»

 

 

Attendu que le solde du compte 275 correspond à deux avances sur consommation d’électricité effectuées en 1978 et 1983 à EDF et de montants respectifs de 762,25 € et de 60,98  ; que ces avances sur consommations s’apparentent à des valeurs en dépôt ;

Attendu que le comptable expose que le recouvrement de ces créances anciennes était compromis lors de sa prise de poste en 2004 ; que les pièces justificatives ont été détruites en raison du jugement définitif intervenu sur les comptes antérieurs à 2004 ; que, cependant, le solde du compte 275 est justifié par l’état de développement des soldes ;

Attendu, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur le recouvrement des créances, que d’une part le comptable reste dans l’obligation de conserver les pièces justificatives des documents comptables qui justifient les soldes du bilan en vertu du premier alinéa du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 suscitée ; que d’autre part, il n’a produit aucune pièce permettant de justifier le solde du compte 275 ;

 

Attendu que le défaut de justification du solde du compte 275 constitue un manquement à l’obligation de conservation des valeurs qui incombait à M. X en vertu de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 ;

 

Attendu qu’il résulte de l’absence de justification de ce solde, au 30 juin 2008, un manquant en valeur qui a causé un préjudice financier à l’organisme ; qu’en conséquence, il y a lieu de constituer M. X débiteur d’Agrocampus Rennes de la somme de 823,23  au titre de l’exercice 2008, et de fixer le point de départ des intérêts de droit au 17 février 2014, date de réception de la notification du réquisitoire ;

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Par ces motifs,

 

DÉCIDE :

 

Article 1er : Au titre de l’exercice 2008, (présomption de charge n° 1), M. X est constitué débiteur de l’Institut national d’enseignement supérieur et de recherche agronomique et agroalimentaire de Rennes (Agrocampus Rennes) pour la somme de 1 479 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 17 février 2014.

 

 

Article 2 : Au titre de l’exercice 2008, (présomption de charge n° 2), M. X est constitué débiteur de l’Institut national d’enseignement supérieur et de recherche agronomique et agroalimentaire de Rennes (Agrocampus Rennes) pour la somme de 116 601,38 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 17 février 2014.

 

Article 3 : Au titre de l’exercice 2008, (présomption de charge n° 3), M. X est constitué débiteur de l’Institut national d’enseignement supérieur et de recherche agronomique et agroalimentaire de Rennes (Agrocampus Rennes) pour la somme de 3 284,66 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 17 février 2014.

 

Article 4 : Au titre de l’exercice 2008, (présomption de charge n° 4), M. X est constitué débiteur de l’Institut national d’enseignement supérieur et de recherche agronomique et agroalimentaire de Rennes (Agrocampus Rennes) pour la somme de 823,23 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 17 février 2014.

 

Article 5 : Il est sursis à décharge de M. X sur l’exercice 2008, au 30 juin,  jusqu’à l’apurement des débets fixés ci-dessus.

 

 

Fait et jugé par Mme Annie PODEUR, présidente de section, présidente de la formation ; M. Jean GAUTIER, Mme Sylvie VERGNET, M. Omar SENHAJI, et M. Jacques BASSET, conseillers maîtres.

 

En présence de Mme Marie-Noëlle TOTH, greffière de séance.

 

 

 

 

 

 

 

Marie Noëlle TOTH

 

 

 

 

 

 

Annie PODEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

 

Conformément aux dispositions de l’article R. 142-16 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-15 du même code.

 

 

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