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SEPTIEME CHAMBRE ------- Quatrième section ------- Arrêt n° S 2016-3337 rectifié
Audience publique du 28 septembre 2016
Prononcé du 28 octobre 2016
| CHAMBRE DEPARTEMENTALE D’AGRICULTURE DU PAS-DE-CALAIS
Exercices 2009 et 2010
Rapport n° 2016-1052
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République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire en date du 24 novembre 2015, par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi la 7ème chambre de la Cour des comptes de présomptions de charge, en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de MM. X et Y, comptables de la chambre départementale d’agriculture du Pas-de-Calais, au titre d’opérations relatives aux exercices 2009 et 2010, notifié le 11 décembre 2015 aux comptables concernés ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptables de la chambre départementale d’agriculture du Pas-de-Calais, par M. X, du 1er janvier 2009 au 27 août 2009 et M. Y, du 28 août 2009 au 31 décembre 2010 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu les lois et règlements applicables aux chambres d’agriculture et notamment le code rural et de la pêche maritime ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique alors en vigueur ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifiée dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 ;
Vu le rapport de M. Stéphane GAILLARD, conseiller référendaire, magistrat chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du Procureur général ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendu lors de l’audience publique du 28 septembre 2016, M. Stéphane GAILLARD, conseiller référendaire, en son rapport, Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du ministère public ;
Entendu en délibéré M. Jacques BASSET, conseiller maître, en ses observations ;
Sur la présomption de charge n° 1, soulevée à l’encontre de M. X, au titre de l’exercice 2009, et M. Y, au titre des exercices 2009 et 2010
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la 7ème chambre de la Cour des comptes de la responsabilité encourue par MM. X et Y à raison de l’insuffisance des diligences accomplies en vue du recouvrement de diverses recettes, d’un montant total de 15 835,04 €, dont restait à recouvrer une somme de 14 774,49 € au 31 décembre 2010 :
- Ordre de recettes n° 2005-BU-0000487 du 17/11/2005 d’un montant de 3 432,52 € (reste à recouvrer de 2 371,97 €) ;
- Ordre de recettes n° 2006-12-0000049 du 17/02/2006, d’un montant de 3 432,52 € restant à recouvrer en totalité ;
- Ordre de recettes n° 2006-12-0000396 du 3/08/2006 d’un montant de 2 104,96 € restant à recouvrer en totalité ;
- Ordre de recettes n° 2006-12-0000589 du 22/12/2006 d’un montant de 3 432,52 € restant à recouvrer en totalité ;
- Ordre de recettes n° 2006-12-0000738 du 29 décembre 2006 d’un montant de 3 432,52 € restant à recouvrer en totalité ;
Attendu que, dans leurs réponses, les comptables font valoir que, nonobstant l’absence de formule exécutoire, dont l’apposition était alors refusée par l’ordonnateur, ces ordres de recettes ont fait l’objet de relances au moyen du logiciel de comptabilité « MUSE » ; que certains dossiers ont évolué depuis les actions de recouvrement contentieux engagées par le successeur de M. Y ; que les ordres de recettes n° 2005-BU-0000487 et n° 2006-12-0000738 notamment, ont donné lieu à un recouvrement partiel postérieurement à l’exercice 2010 ;
Attendu que les comptables n’apportent aucune preuve des diligences qu’ils auraient accomplies au cours des exercices 2009 et 2010, ni de ce que le recouvrement des créances aurait été irrémédiablement compromis avant leur prise de fonctions ;
Attendu cependant que, dans ses conclusions, le Procureur général admet que la plupart des créances visées sont toujours actives et ont fait l’objet d’un début de remboursement ou d’un échéancier de paiement, postérieurement à l’exercice 2010 ; que seule la créance n° 2006-12-0000049 n’a fait l’objet d’aucun mouvement et reste à ce jour non recouvrée ; qu’en ce qui concerne cette créance, M. Y, qui n’a pas fait de réserve sur la gestion de son prédécesseur, serait susceptible de voir sa responsabilité engagée ;
Attendu toutefois qu’il n’est pas établi que les recettes en cause, y compris celle ayant fait l’objet de l’ordre de recettes n° 2006-12-0000049, étaient manifestement irrécouvrables, ni a fortiori prescrites, au 31 décembre 2010, avant d’être reprises à l’actif de la chambre d’agriculture de région du Nord-Pas-de-Calais, lors de sa création, à compter du 1er janvier 2011 ;
Attendu que la responsabilité de MM. Y et X ne paraît pouvoir être engagée, à ce stade, au titre des exercices 2009 et 2010 ;
Attendu qu’il convient de décharger M. X de sa gestion au titre de l’exercice 2009 et de le déclarer quitte et libéré de sa gestion terminée le 27 août 2009 ;
Attendu qu’il y a lieu également de décharger M. Y de sa gestion au titre de l’exercice 2010 ;
Sur la présomption de charge n° 2, soulevée à l’encontre de M. Y, au titre de l’exercice 2009
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la 7ème chambre de la Cour des comptes de la responsabilité encourue par M. Y à raison du paiement d’une indemnité de caisse et de responsabilité versée à son prédécesseur, sans avoir exercé le contrôle de la validité de la créance, lequel consiste notamment en un contrôle de l’exactitude des calculs de liquidation ; qu’en effet, les indemnités de M. Xpour les mois de janvier à août 2009 ont été payées par M. Y sur la base de 8/12ème de la somme de 2 500 € soit 1 666,67 €, correspondant à 100 % du taux maximum prévu par l’arrêté du 23 novembre 2005, alors que l’arrêté du 12 février 1973 disposait que le montant annuel de l’indemnité de caisse des agents comptables des chambres d’agriculture était fixé « à 80 % du taux maximum prévu pour les agents comptables de 3ème catégorie » ; que, dès lors, l’indemnité aurait dû être payée sur la base de 8/12ème de 80 % de 2 500 €, soit 1 333,33 € et non 1 666,67 €, d’où un trop-payé de 333,34 € ;
Attendu que M. Y ne conteste pas avoir payé ladite indemnité par le mandat n° 1944 du 31 décembre 2009 ;
Attendu que l’agent comptable fait valoir dans sa réponse que l’arrêté auquel il s’est référé pour le calcul de l’indemnité n’était pas celui de 1973, mais celui du 16 novembre 1984 portant fixation de l’indemnité de caisse et de responsabilité allouée aux agents comptables des chambres d’agriculture, qui fait varier le taux de l’indemnité en fonction du budget de l’établissement ; que l’agent comptable n’en tire toutefois aucune conséquence chiffrée permettant d’établir que les calculs de liquidation étaient exacts ;
Attendu que l’arrêté produit en réponse établit une progression du niveau de l’indemnité en fonction du budget de l’établissement avec un taux maximum fixé à 100 % de celui prévu pour les agents comptables de 4ème catégorie ; que l’arrêté du 23 septembre 2005 fixant les taux maxima des indemnités de caisse et de responsabilité allouées aux agents comptables des établissements publics nationaux dispose que le taux maximal annuel pour les agents de 4ème catégorie est de 1 720 € ; qu’ainsi, en supposant même que le budget de la chambre départementale du Pas-de-Calais permettait une liquidation à 100 % de ce montant, le montant versé n’aurait pas dû être supérieur à 8/12ème de 1 720 €, soit 1 147 €, au lieu de 1 666,67 € ; que la responsabilité de M. Y ne peut toutefois être engagée au-delà du montant indiqué dans le réquisitoire susvisé, à savoir 333,34 € ;
Attendu que le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, alors applicable, dispose en son article 12 que les comptables sont tenus d’exercer … en matière de dépenses, le contrôle de la validité de la créance, dans les conditions prévues à l’article 13 qui dispose qu’en ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte notamment sur l’exactitude des calculs de liquidation ;
Attendu que le défaut de contrôle de la liquidation de la dépense par M. Y a eu pour conséquence un trop-versé s’analysant comme un manquant dans la caisse de l’établissement public, au sens des dispositions du troisième alinéa du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 ; qu’ainsi, le manquement du comptable a causé un préjudice à la chambre d’agriculture, au sens des dispositions du troisième alinéa du IV de l’article 60 précité ;
Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné, le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer M. Y débiteur de la chambre départementale d’agriculture du Pas-de-Calais pour la somme de 333,34 € ;
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 11 décembre 2015, date de réception du réquisitoire par M. Y ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1 : Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de M. X au titre de la présomption de charge n° 1.
Article 2 : M. X est déchargé de sa gestion pour la période du 1er janvier 2009 au 27 août 2009.
M. X est déclaré quitte et libéré de sa gestion terminée à la date ci-avant indiquée.
Mainlevée peut être donnée et radiation peut être faite de toutes oppositions et inscriptions mises ou prises sur ses biens meubles ou immeubles ou sur ceux de ses ayants cause pour sûreté de ladite gestion et son cautionnement peut être restitué ou ses cautions dégagées.
Article 3 : Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de M. Y au titre de la présomption de charge n° 1.
Article 4 : M. Y est déchargé de sa gestion pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2010.
Article 5 : Au titre de l’exercice 2009, M. Y est constitué débiteur de la chambre d’agriculture du Pas-de-Calais, pour la somme de 333,34 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 11 décembre 2015.
Ces paiements n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.
Article 6 : La décharge de M. Y ne pourra être donnée au titre de l’exercice 2009 qu’après apurement du débet fixé ci-dessus.
Fait et jugé par Mme Annie PODEUR, présidente de section, présidente de la formation ; M. Jean GAUTIER, Mme Sylvie VERGNET, MM. Omar SENHAJI et Jacques BASSET, conseillers maîtres.
En présence de Mme Marie-Noëlle TOTH, greffière de séance.
Rectifié le 9 novembre 2016
Marie-Noëlle TOTH |
Annie PODEUR |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-16 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-15 du même code.
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