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PREMIERE CHAMBRE

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Première section

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Arrêt n° S 2016-2377

 

Audience publique du 23 juin 2016

 

Prononcé du 28 juillet 2016

DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DES YVELINES

 

SERVICE DES IMPOTS DES ENTREPRISES DE VERSAILLESNORD (SIEC et PRF)

 

Exercices 2006 à 2010

 

Rapport n° R-2016-0124

 

 

 

 

République Française,

 

Au nom du peuple français,

 

La Cour,

 

Vu le réquisitoire en date du 28 juillet 2015, par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi la première chambre de la Cour des comptes de présomptions de charges, en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X, comptable du SIE de Versailles Nord au titre de l’exercice 2008, ensemble la preuve de sa notification aux parties le 8 octobre 2015 ;

Vu les comptes de la direction départementale des finances publiques (DDFiP) des Yvelines rendus pour les exercices 2006 à 2010, y annexés les états de restes à recouvrer établis, en sa qualité de receveur des administrations financières, par Mme X à compter du 28 septembre 2007 ;

Vu les justifications produites au soutien des susdits états annexes, ensemble les pièces recueillies au cours de l’instruction ;

Vu les observations écrites présentées par Mme X le 2 décembre 2015 en réponse au réquisitoire susvisé ;

Vu le code de commerce, notamment ses articles L. 622-24, R. 622-24, L. 622-26 et L. 631-14 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits;

Vu le décret n° 77-1017 du 1er septembre 1977 relatif à la responsabilité des receveurs des administrations financières ;

Vu le rapport à fin d’arrêt n°2016-0124 de M. Jean-Christophe Chouvet, conseiller maître, chargé de l’instruction ;

Vu les conclusions du Procureur général ;

Entendu lors de l’audience publique du 23 juin 2016, M. Chouvet, en son rapport, et M. Bertrand Diringer, avocat général, en ses conclusions du ministère public, Mme X, informée de l’audience n’étant ni présente, ni représentée ;

Entendu en délibéré, M. Vincent Feller, conseiller maître, en ses observations ;

 

 

Sur la présomption de charge4 (SARL FOKUS PRODUCTIONS) soulevée à l’encontre de Mme X au titre de l’exercice 2008

 

Attendu que le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X, comptable du SIE de Versailles Nord, pouvait être mise en jeu à hauteur de 312 602 € au titre de l’exercice 2008, en raison de l’insuffisance de diligences, notamment du défaut de déclaration dans les délais de la totalité des créances fiscales prises en charge en 2008, au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société Fokus Productions ;

 

 

Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations

Sur la règle de droit

Attendu qu’aux termes de l'article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes et des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en cette matière dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique ; que leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu’une recette n’a pas été recouvrée ; que la responsabilité du comptable public en matière de recettes s’apprécie au regard de ses diligences, celles-ci devant être adéquates, complètes et rapides ;

 

Sur les faits

Attendu que la société Fokus Productions était redevable d’un montant total de 563 662 €, de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et d’impôt sur les sociétés (IS), mis en recouvrement en 2007 et en 2008 ;

Attendu que la société a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire le 13 novembre 2007 par jugement publié le 16 janvier 2008, convertie en liquidation judiciaire le 8 janvier 2008 par jugement publié le 1er février 2008 ; que la clôture pour insuffisance d’actif est intervenue le 20 janvier 2009 ;

Attendu que la déclaration de créances au passif du redressement judiciaire a été établie le 14 janvier 2008, à titre définitif pour 39 260 , et à titre provisionnel pour un montant de 211 800   de TVA, d’IS, et de taxes diverses évaluées au titre des années 2005 à 2007 ;

Attendu que des rappels d’impôts définitifs ont été mis en recouvrement par deux avis du 18 avril 2008, notifiés au mandataire judiciaire le 22 avril 2008, pour un montant total de 524 402  ; que ces rappels résultaient d’une proposition de rectification de la 3ème brigade départementale de vérification des Yvelines en date du 20 février 2008, notifiée au mandataire judiciaire le 21 février 2008, ainsi que d’une taxation d’office établie par le SIE de Houilles le 10 mars 2008 ;

Attendu que le pôle de recouvrement forcé de Versailles a formulé le 29 avril 2008 une demande en relevé de forclusion auprès du juge-commissaire visant faire à admettre une somme totale de 524 402 €, au lieu de 211 800  ; que cette requête a été rejetée par ordonnance du 4 septembre 2008, au motif que la DSF des Yvelines n’apportait pas la preuve que la défaillance n’était pas de son fait ;

Attendu que l’admission définitive des créances s’est donc élevée à 211 800 €, montant de la production provisoire initiale, au lieu de 524 402  ; que l’admission en non-valeur de la créance de l’Etat a été prononcée le 25 février 2010 ;

Sur les moyens invoqués à décharge

Attendu que la comptable fait valoir qu’elle ne pouvait déclarer à la procédure que les montants communiqués par les services d’assiette, et qu’il ne lui appartenait pas d’anticiper le montant de la créance à déclarer ; que la société a fait l’objet d’un contrôle fiscal externe du 8 octobre 2007 au 20 février 2008, date de la proposition de rectification, et que le pôle de recouvrement a déclaré, dans les délais, la créance détenue sur la société à titre définitif, ainsi que les montants provisionnels estimés par le service vérificateur et le SIE de Houilles ;

Attendu qu’elle explique que le montant des rappels mis en recouvrement le 18 avril 2008 excédait de 312 602 € le montant des droits déclarés à titre provisionnel ; que la brigade et le SIE auraient dû limiter les montants mis en recouvrement aux montants provisionnés ; qu’ainsi la somme de 313 602 € n’aurait jamais dû figurer dans les restes à recouvrer ;

Attendu que la comptable considère qu’elle a fait toutes les diligences possibles pour la préservation des intérêts du Trésor en diligentant une action en relevé de forclusion ;

Attendu enfin que Mme X précise quen toute hypothèse les intérêts du Trésor n’ont pas été lésés, car il n’a bénéficié d’aucune répartition à l’issue de la clôture pour insuffisance d’actif prononcée le 20 janvier 2009 ;

 

Sur l’application au cas d’espèce

Attendu que l’estimation des créances déclarées à titre provisionnel a été effectuée par les services d’assiette auxquels il incombait, dès l’envoi de leurs propositions de rectifications, le délai de production n’ayant pas expiré, d’informer le comptable du fait que les montants à recouvrer étaient supérieurs à ceux produits initialement ;

Attendu qu’il ne ressort pas des éléments du dossier que le service comptable aurait eu connaissance des futurs montants à recouvrer avant le 16 mars 2008, date après laquelle il ne lui était plus possible de produire au liquidateur un complément de créances provisionnelles ; que le comptable ne pouvait refuser une prise en charge qui lui était transmise par les services d’assiette, postérieurement au délai de déclaration ;

Attendu que la responsabilité du comptable ne peut être engagée pour la production trop tardive de créances dont il n’avait pas connaissance ;

Attendu qu’il résulte de ce qui précède qu’il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X au titre de l’exercice 2008 ;

 

 

Par ces motifs,

 

DÉCIDE :

 

Présomption de charge 4, exercice 2008.

Article unique. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de Mme X au titre de la présomption de charge n° 4.

 

 


 

Fait et jugé en la Cour des comptes, première chambre, première section, par M. Philippe GEOFFROY, président de section, présidant la séance, MM. Daniel-Georges COURTOIS, Olivier MOUSSON, Vincent FELLER, Mme Dominique DUJOLS et M. Alain LEVIONNOIS, conseillers maîtres.

 

En présence de Mme Marie-Hélène Paris-Varin, greffière de séance.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Marie-Hélène PARIS-VARIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Philippe GEOFFROY

 

 


 

 

Conformément aux dispositions de l’article R. 142-16 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-15 du même code.

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