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QUATRIEME CHAMBRE ------- Première section ------- Arrêt n° S 2016-3153
Audience publique du 8 septembre 2016
Prononcé du 13 octobre 2016
| Commune de Montesquieu-Lauragais (Haute-Garonne)
Appel d’un jugement de la chambre régionale des comptes de Midi-Pyrénées
Exercice 2009
Rapport n° 2016-0794
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République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu la requête en date du 20 octobre 2015, enregistrée au greffe de la chambre régionale des comptes de Midi-Pyrénées, par laquelle M. X, comptable de la commune de Montesquieu-Lauragais (Haute-Garonne), a élevé appel du jugement n° 2015-0008 du 19 mai 2015 par lequel ladite chambre régionale a mis à sa charge la somme non rémissible de 216 €, au titre de l'exercice 2009, pour avoir payé 178 042,61 €, imputés sur la chapitre 012 « charges de personnel et frais assimilés », alors que les crédits n’étaient ouverts sur ce chapitre qu’à hauteur de 175 810 € ;
Vu la lettre du 21 octobre 2015 par laquelle le greffe de la chambre régionale des comptes de Midi-Pyrénées a transmis au Parquet général de la Cour le dossier complet de l'appel, mis en état d’examen ;
Vu la notification de la désignation du rapporteur effectuée le 4 mars 2016 au requérant qui en a accusé réception le 3 avril 2016 ainsi qu’au maire de la commune de Montesquieu-Lauragais qui en en a accusé réception le 7 mars 2016 ;
Vu les pièces de la procédure suivie en première instance ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifié ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le rapport de M. Olivier BREUILLY, auditeur ;
Vu les conclusions du Procureur général n° 547 du 2 septembre 2016 ;
Entendu, lors de l’audience publique du 8 septembre 2016, M. Olivier BREUILLY, en son rapport, M. Hervé ROBERT, substitut général, en les conclusions du ministère public ;
Entendu en délibéré M. Jean-Pierre LAFAURE, conseiller maître, en ses observations ;
Attendu que, par le jugement entrepris, la chambre régionale, sur conclusions conformes du ministère public, a mis à la charge de M. X une somme non rémissible de 216 €, au titre de l’exercice 2009, pour avoir payé 178 042,61 €, imputés sur le chapitre 012 « charges de personnel et frais assimilés », alors que les crédits n’y étaient ouverts qu’à hauteur de 175 810 €, soit un paiement de 2 232,61 € en excès des crédits disponibles ;
Attendu que M. X reconnaît que c’est en connaissance de cause qu’il a accepté de payer des dépenses en dépassement des crédits budgétaires disponibles : qu’ainsi, il ne conteste pas son manquement à son obligation de contrôler la disponibilité des crédits ; qu’en l’absence de crédits disponibles, il aurait dû suspendre le paiement, conformément aux articles 12 et 37 du décret du 29 décembre 1962 susvisé ;
Attendu que, dans sa requête, il fait valoir que les dépassements de crédits s’expliquent par les conditions difficiles d’exercice de ses fonctions dans les deux postes comptables qui lui étaient confiés, notamment à cause de l’implantation d’un nouveau logiciel informatique, les « contraintes de personnel » récurrentes ainsi que l’impossibilité matérielle de prendre une décision budgétaire modificative au-delà du 23 décembre ; qu’il demande par conséquent à être exonéré de sa responsabilité ; qu’à défaut, la somme non rémissible mise à sa charge soit minorée ;
Attendu qu’aux termes du V de l’article 60 de la loi de 1963 susvisée, « Lorsque [ ] le juge des comptes constate l’existence de circonstances constitutives de la force majeure, il ne met pas en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public » ;
Attendu que les circonstances mises en avant par l’appelant ne sauraient être qualifiées comme étant de force majeure ; qu’il n’y a donc pas lieu d’infirmer, pour ce motif, la mise en jeu de sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu que M. X, sollicite, à titre subsidiaire, une minoration de la somme non rémissible mise à sa charge en vertu du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de 1963 susvisée, aux termes duquel « Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ;
Attendu qu’il conteste donc que le premier juge ait dûment tenu compte des circonstances de l’espèce ;
Attendu que ces circonstances, détaillées dans sa requête, sont en particulier ses états de service, les appréciations favorables de ses supérieurs hiérarchiques, les difficultés de la situation du poste comptable ; que toutefois, au regard de la gravité du manquement constitué par des paiements en dépassement des crédits disponibles, il n’apparaît pas que la chambre régionale n’ait pas tenu compte de ces circonstances et qu’elle aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en fixant le montant de la somme irrémissible à 216 €, soit au montant maximal autorisé par le décret 10 décembre 2012 susvisé ; que le moyen de l’appelant manque donc en fait ;
Attendu que le Procureur général, dans ses conclusions du 2 septembre 2016 susvisées, estime que la chambre régionale a commis une erreur de droit en jugeant que le manquement du comptable n’avait pas causé de préjudice financier à la commune ; qu’il invite par conséquent la Cour à examiner cette question ;
Attendu que la Cour n’a été saisie, ni par la requête en appel, ni par un appel incident qui aurait pu être formé par l’ordonnateur ou le ministère public, ni d’aucune contestation de l’absence de préjudice financier résultant du manquement et visant à l’infirmation du jugement entrepris sur ce point ; qu’elle n’a relevé aucun moyen d’ordre public susceptible de motiver l’annulation de ce jugement ; qu’elle ne peut se prononcer en appel que sur la contestation dont elle a été saisie par le requérant ; que ce dernier n’a pas soulevé la question de l’existence ou non d’un préjudice financier causé par son manquement ; que par conséquent la Cour ne peut donner suite à l’invitation du Procureur général ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
La requête de M. X est rejetée.
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Fait et jugé par M. Yves Rolland, président de section, président de la formation ;
Mme Anne Froment-Meurice, présidente de chambre maintenue en activité, MM. Gérard Ganser, Jean-Pierre Lafaure, Franc-Gilbert Banquey, Jean-Yves Bertucci, Noël Diricq, conseillers maîtres et Mme Isabelle Latournarie-Willems, conseillère maître.
En présence de Mme Marie-Hélène PARIS-VARIN, greffière de séance.
Marie-Hélène PARIS-VARIN
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Yves ROLLAND
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