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SEPTIEME CHAMBRE

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Quatrième section

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Arrêt n° S2016-0780

 

Audience publique du 10 mars 2016

 

Prononcé du 4 mai 2016

CENTRE INTERNATIONAL D’ETUDES SUPERIEURES EN SCIENCES AGRONOMIQUES (CIESSA)

 

 

Exercice 2011

 

 

Rapport n° 2015-0930-1

 

 

République Française,

 

Au nom du peuple français,

 

La Cour,

 

Vu le réquisitoire  2014-13-RQ-DB en date du 5 février 2014 par lequel le procureur général près la Cour des comptes a saisi la septième chambre d’une présomption de charge, en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, agent comptable du Centre international d’études supérieures en sciences agronomiques (CIESSA), au titre de l’exercice 2011 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu le code de l’éducation et le code rural ;

Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique, alors en vigueur ;

Vu les lois et règlements relatifs à la comptabilité des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ;

Vu le décret n° 2006-1593 du 13 décembre 2006 modifié portant création de l’Institut national d’études supérieures agronomiques de Montpellier (Montpellier Sup Agro), notamment son article 28 relatif aux biens, droits et obligations dévolus au CIESSA ci-après désigné l’établissement ;

Vu les autres pièces du dossier et notamment la correspondance de M. X en date du 17 avril 2014, reçue le 24 avril 2014 ;

Vu le rapport2015-0930-1 du 23 décembre 2015 de M. Antoine Fouilleron, auditeur ;

Vu les conclusions du Procureur général près la Cour des comptes ;

Vu les lettres du 17 février 2016 informant le comptable et l’ordonnateur de la date de l’audience publique, et leurs accusés de réception du 18 février 2016 ;

Entendu, lors de l’audience publique du 10 mars 2016, M. Antoine Fouilleron, auditeur, en son rapport, Mme Loguivy Roche, avocate générale, en ses conclusions, le comptable et l’ordonnateur n’étant ni présents ni représentés ;

Ayant délibéré hors la présence du rapporteur et du ministère public et après avoir entendu M. Olivier ORTIZ, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;

Attendu qu’un titre de recette n° 1670 d’un montant de 5 100  avait été émis le 31 décembre 2004 en vue du recouvrement du solde d’une créance née en application d’une convention de recherche conclue trois ans auparavant avec l’Université autonome de Barcelone ; qu’après de vaines tentatives de recouvrement, le titre en cause a été admis le 7 avril 2011 en non-valeur par le conseil d’administration de l’établissement, sur proposition de l’agent comptable ; que, selon le réquisitoire, la responsabilité de M. X est susceptible d’être engagée pour insuffisances des diligences dans le recouvrement de la créance susmentionnée, sur le fondement de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 et de l’article 11 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;

Attendu que le réquisitoire ayant été pris et notifié au comptable postérieurement au 1er juillet 2012, la mise en jeu de sa responsabilité est régie par les dispositions de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963 telles que résultant de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 et du décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances pour 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

Attendu qu’en application de l’article 60-IV de la loi du 23 février 1963 susvisée, le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire ne peut plus intervenir au-delà du 31 décembre de la cinquième année suivant celle au cours de laquelle le comptable a produit ses comptes au juge des comptes ; qu’en l’espèce, les comptes de l’établissement pour l’exercice 2011 ont été produits le 13 septembre 2012 ; qu’en conséquence, la responsabilité de M. X en charge des comptes de l’exercice précité n’est pas atteinte par la prescription de cinq ans susmentionnée ;

Sur l’existence d’un manquement de l’agent comptable 

Attendu que les comptables publics sont chargés du recouvrement des créances qu’ils prennent en charge ; qu’il leur appartient de mettre en œuvre des diligences adéquates, complètes et rapides ; qu’en vertu de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu’une recette n’a pas été recouvrée ; que le juge des comptes n’est pas tenu dans son appréciation de la responsabilité par les décisions administratives d’admission en non-valeur ;

Attendu quen l’espèce, l’agent comptable estime, d’une part, que ses diligences ont été suffisantes ; qu’il fait valoir, d’autre part, que la mention « aucune réponse et retour adresse insuffisante » ne résume pas les explications qu’il a données en 2011 au conseil d’administration de l’établissement sur le caractère irrécouvrable de la créance ; qu’il objecte, en outre, que les voies de recouvrement à l’étranger sont coûteuses et leurs résultats peu assurés ; qu’il argue, enfin, que l’ordonnateur ne souhaitait pas engager de démarche contentieuse afin de préserver les relations du CIESSA avec l’université autonome de Barcelone ;

Attendu, toutefois, qu’il ressort de l’instruction que les diligences de M. X, accomplies au moyen de courriers simples et correspondances électroniques, ont été limitées et peu adéquates dans la mesure où les courriers de relance ont été adressés à l’établissement universitaire catalan sans qu’un interlocuteur ait été préalablement et précisément identifié ; que le caractère irrécouvrable du solde en cause n’était pas confirmé lors de la proposition de non-valeur ; qu’aucune pièce n’a été produite à l’appui des explications données par l’agent comptable, notamment en ce qui concerne la réticence de l’ordonnateur à engager un recouvrement contentieux ; que, par suite, l’insuffisance des diligences exercées en vue du recouvrement du titre n° 1670 est établie ; qu’il en résulte un manquement de l’agent comptable, de nature à engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;

Attendu qu’aucune circonstance de force majeure n’a été alléguée par M. X ;

 

 

Sur le préjudice financier pour l’établissement 

Attendu que le 3ème alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 dispose que « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels, la somme correspondante » ;

Attendu quen l’espèce, l’agent comptable allègue que l’établissement n’a subi aucun préjudice dans la mesure où la mise en place d’une procédure de recouvrement contentieux à l’étranger aurait été coûteuse, en particulier en cas d’échec ;

Attendu, toutefois, qu’outre le fait que rien n’établit que la procédure n’aurait pas abouti, l’argument soutenu par M. X est inopérant ; qu’en effet, le préjudice financier au sens de la loi précitée s’évalue à la date du manquement établi, et non par rapport à une situation virtuelle dans laquelle il n’aurait pas été commis ; qu’en conséquence, il y a lieu de constituer M. X débiteur de l’établissement de la somme de 5 100 , au titre de l’exercice 2011 ;

Attendu qu’en application du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, les intérêts du débet courent au taux légal à compter du premier acte de mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics ; qu’en l’espèce, il convient de fixer le point de départ des intérêts de droit au 17 février 2014, date de réception par le comptable de la notification du réquisitoire du ministère public ;

 

Par ces motifs,

 

 

DÉCIDE :

 

 

 

Article 1er : M. X est constitué débiteur du Centre International d’Etudes Supérieures en Sciences Agronomiques de la somme de 5 100 € (charge unique, exercice 2011), augmentée des intérêts de droit à compter du 17 février 2014.

 

Article 2 : Il est sursis à la décharge de M. X sur l’exercice 2011 jusqu’à l’apurement de la somme fixée ci-dessus.

 

 

Fait et ju par Mme Evelyne Ratte, présidente de chambre, présidente de la formation, M. Jean-Pierre Bayle, président de chambre maintenu, MM. Jean Gautier, Damien CazÉ, Olivier Ortiz et Jacques Basset, conseillers maîtres.

 

 

En présence de Mme Valérie Guedj, greffière de séance.

 

 

 

 

 

 

 

Valérie GUEDJ

 

 

 

 

 

 

Evelyne RATTE

 


 

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

 

Conformément aux dispositions de l’article R. 142-16 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au paragraphe I de l’article R. 142-15 du même code.

 

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