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Troisième chambre ------- Quatrième section ------- Arrêt n° S 2016-2943
Audience publique du 27 juin 2016
Prononcé du 27 septembre 2016
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| Agence française de lutte contre le dopage (Afld) Exercice 2012 Rapport n° 2016-0298
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République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire n° 2015-42 RQ-DB en date du 1er juin 2015, par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi la troisième chambre de la Cour des comptes d’une présomption de charge, en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, agent comptable de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), au titre d’une opération relative à l’exercice 2012, notifié à l’intéressé le 17 juin 2015 ;
Vu les comptes rendus par M. X en qualité d’agent comptable de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 ;
Vu les justifications produites au soutien du compte en jugement ;
Vu le code du commerce ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le code des sports et notamment les articles R. 232-10 et suivants ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique alors en vigueur et le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifiée dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 ;
Vu le cautionnement de M. X (101 900 € du 1er septembre 2012 au 31 août 2013) ;
Vu le rapport n° 2016-0298 de Mme Muriel SOLIGNAC, auditrice, magistrate chargée de l’instruction ;
Vu les conclusions du Procureur général près la Cour des comptes ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendu lors de l’audience publique du 27 juin 2016 Mme Muriel SOLIGNAC, auditrice en son rapport, M. Gilles MILLER, avocat général, en les conclusions du ministère public ;
Entendu en délibéré M. Omar SENHAJI, conseiller maître, en ses observations ;
Sur la présomption de charge unique, soulevée à l’encontre de M X, au titre de l’exercice 2012 :
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la troisième chambre de la Cour des comptes de la responsabilité encourue par M. X à raison du non‑recouvrement d’une créance de 2 424 € émise à l’encontre de l’EURL EVENTS le 30 septembre 2009, admise en non-valeur par décision du 22 novembre 2012 et mandatée le 31 décembre de la même année ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que le premier alinéa de l’article L. 622-24 du code du commerce précise « à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d'État. Lorsque le créancier a été relevé de forclusion conformément à l'article L. 622-26, les délais ne courent qu'à compter de la notification de cette décision […] » ;
Attendu que selon le deuxième alinéa du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique » ;
Attendu que selon le troisième alinéa du I de ce même article, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée, qu’une dépense a été irrégulièrement payée […] » ;
Sur les faits
Attendu qu’une créance de 2 424 € émise à l’encontre de l’EURL EVENTS le 30 septembre 2009 n’a pas été recouvrée ; qu’une procédure de mise en liquidation judiciaire ayant été engagée, le comptable n’a pas consulté le BODDAC, n’a pas produit la créance dans les délais impartis et n’a demandé aucun relevé de forclusion ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable et l’ordonnateur
Attendu que M. X invoque « l’effet de surprise » de la procédure de mise en liquidation judiciaire ; qu’il reconnaît ne pas avoir consulté le BODDAC lors de la mise en liquidation judiciaire de la société le 23 juillet 2010, ne pas avoir adressé une déclaration de créance au liquidateur judiciaire et ne pas avoir demandé un relevé de forclusion ;
Attendu que l’ordonnateur fait valoir que seule la mise en liquidation judiciaire de la société EVENTS a mis en défaut les diligences du comptable pour recouvrer cette créance ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu que dans ses conclusions, le Procureur général, fait valoir que, après deux courriers de relance n’ayant jamais été retirés, le comptable ne s’est pas inquiété de savoir si le débiteur faisait ou non l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire, ce qui peut constituer un manquement ;
Attendu que l’instruction montre que le comptable n’a pas consulté le BODDAC, n’a pas produit la créance dans les délais impartis et n’a demandé aucun relevé de forclusion ;
Attendu qu’ainsi le comptable n’a pas fait les diligences adéquates, complètes et rapides ; qu’il a manqué à ses obligations application de l’article précité du code de commerce ; que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X est engagée au titre de sa gestion 2012 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier causé par le manquement
Attendu que le non-recouvrement d’une créance cause par principe un préjudice financier à la collectivité publique créancière ; que toutefois le manquement est sans préjudice s'il résulte, des pièces du dossier, qu'à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l'insolvabilité de la personne qui en était redevable ; que cette circonstance peut être établie par tous documents, y compris postérieurs au manquement ;
Attendu que le comptable fait valoir qu’aucun créancier déclaré n’a pu recouvrer sa créance en l’absence d’actif ; que cela est confirmé par l’état de reddition des comptes de la société transmis par le liquidateur judiciaire ;
Attendu que l’ordonnateur soutient que le cadencement de la procédure judiciaire simplifiée de mise en liquidation de la société EVENTS démontre que la créance ne pouvait être recouvrée du fait d’une insuffisance d’actif ;
Attendu que, dans ses conclusions, le Procureur général fait valoir que les informations communiquées, postérieurement au manquement, par le liquidateur, fournissent un indice suffisant de l’impécuniosité de la procédure de liquidation ;
Attendu que l’instruction fait apparaître qu’aucun créancier déclaré n’a pu recouvrer sa créance ; que le Tribunal de commerce de Poitiers a prononcé la clôture de la liquidation pour insuffisance d’actif de la société par jugement en date du 11 février 2014 ;
Attendu qu’en fonction de l’analyse qui précède, il peut être considéré que le manquement du comptable n’a pas causé de préjudice financier à l’État ;
Attendu qu’aux termes des dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable […] n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice de l’espèce » ; que le décret du
10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à
un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ;
Attendu que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré pour l’exercice 2012 est fixé à 101 900 € ; qu’ainsi le montant maximum de la somme susceptible d’être mise à la charge de M. X s’élève à 152,85 € ;
Attendu que, eu égard aux circonstances de l’espèce, il y a lieu d’arrêter cette somme à 152 €.
Par ces motifs,
DÉCIDE :
En ce qui concerne M. X
Présomption de charge unique - exercice 2012
Article 1er. - M. X devra s’acquitter d’une somme de 152 €, en application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ; cette somme ne pouvant faire l’objet d’une remise gracieuse en vertu du IX de l’article 60 de la loi précitée.
Article 2. - La décharge de M. X au titre de l’exercice 2012 ne pourra être donnée qu’après apurement de la somme à acquitter, fixée ci-dessus.
Fait et jugé par Mme Sophie MOATI, présidente de chambre ; M. Omar SENHAJI, président de section, Mme Annie PODEUR, conseillère maître, MM. Michel CLEMENT, Olivier ORTIZ, conseillers maîtres.
En présence de Mme Marie Noëlle TOTH, greffière de séance.
Marie Noëlle TOTH Greffière de séance |
Sophie MOATI Présidente de séance |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-16 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-15 du même code.
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