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PREMIERE CHAMBRE ------- Première section ------- Arrêt n° S2018-0037
Audience publique du 20 décembre 2017
Prononcé du 1er février 2018 | DIRECTION DES FINANCES PUBLIQUES DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON
Exercice 2014
Rapport n° R-2017-1407 |
République Française,
Au nom du Peuple Français,
La Cour,
Vu le réquisitoire n° 2017-24 RQ-DB du 12 mai 2017, par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi ladite Cour en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, directeur des finances publiques de Saint‑Pierre-et-Miquelon, à raison d’opérations relatives à l’exercice 2014, ensemble la preuve de sa notification audit comptable, le 2 juin 2017, ainsi qu’au directeur des finances publiques de Saint-Pierre-et-Miquelon, le 2 juin 2017, et au directeur général des finances publiques, le 5 septembre 2017 ;
Vu les comptes rendus, en qualité de directeur des finances publiques de Saint- Pierre-et-Miquelon, pour l’exercice 2014, par M. X ;
Vu les justifications produites au soutien du compte susvisé, ensemble les pièces recueillies au cours de l’instruction ;
Vu les observations écrites présentées par M. X, le 29 juin 2017 et le 11 juillet 2017, sur le réquisitoire susvisé, le 11 décembre 2017, sur le rapport du magistrat chargé de l’instruction, et le 14 décembre 2017, sur les conclusions prises par le ministère public ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code des marchés publics dans sa version applicable au moment des faits ;
Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu l’arrêté du ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, du 9 septembre 2013 relatif aux modalités d'établissement, de conservation et de transmission sous forme dématérialisée des pièces justificatives et des documents de comptabilité des opérations de l'Etat pris en application des articles 51, 52, 150 et 164 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
Vu l’arrêté du 20 décembre 2013 du ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, portant nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l'Etat ;
Vu la décision fixant le cautionnement de M. X à 183 000 € ;
Vu le rapport de M. Florian Bosser, auditeur, magistrat, chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du Procureur général n° 957 du 12 décembre 2017 ;
Entendu, lors de l’audience publique du 20 décembre 2017, M. Florian BOSSER, auditeur, en son rapport, M. Bertrand DIRINGER, avocat général, en les conclusions du ministère public, les parties, informées de l’audience, n’étant ni présentes, ni représentées ;
Entendu en délibéré M. Guy Fialon, conseiller maître, en ses observations ;
Sur la charge n° 1 soulevée à l’encontre de M. X sur l’exercice 2014
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pourrait être mise en jeu, sur l’exercice 2014, au motif qu’une somme de 28 485 € aurait été payée dans des conditions irrégulières, les irrégularités commises consistant en ce que le règlement de ladite somme, eu égard à son montant, nécessitait la production d’un contrat écrit ou de tout document en tenant lieu, et en ce que la preuve n’aurait pas été rapportée que la personne ayant certifié le service fait était habilitée à le faire ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisé, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du paiement des dépenses et leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu’une dépense a été irrégulièrement payée ;
Attendu qu’aux termes des articles 17 et 18 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des actes et contrôles qui leur incombent et qu’ils sont seuls chargés de la prise en charge des ordres de payer qui leur sont remis par les ordonnateurs, du paiement des dépenses, soit sur ordre émanant des ordonnateurs, soit au vu des titres présentés par les créanciers, soit de leur propre initiative, ainsi que de la suite à donner aux oppositions à paiement et autres significations ;
Attendu qu’aux termes du 2° de l’article 19 du même décret, le comptable public est tenu d’exercer le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la dette et du caractère libératoire du règlement ;
Attendu qu’aux termes de l’article 20 du même décret, le contrôle de la validité de la dette porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles règlementaires, la production des justifications, l’existence du visa des membres du corps du contrôle général économique et financier sur les engagements et les ordonnancements émis par les ordonnateurs principaux ;
Attendu qu’aux termes de l’article 38 du même décret, lorsqu'à l'occasion de l'exercice des contrôles prévus au 2° de l'article 19 susmentionné le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe l'ordonnateur ;
Attendu qu’il résulte des dispositions combinées des articles 1 et 11 du code des marchés publics, dans sa version applicable à compter du 12 décembre 2011, que les marchés et accords-cadres d’un montant égal ou supérieur à 15 000 HT sont passés sous forme écrite ;
Attendu que, conformément à l’arrêté du 20 décembre 2013 portant nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’Etat, en ce qui concerne les marchés publics qui peuvent être passés selon une procédure adaptée à raison de leur montant (rubrique 4.1.3), les pièces nécessaires au comptable sont le contrat, dont les caractéristiques formelles sont définies au paragraphe A de l’annexe E à ladite nomenclature, ainsi que toute pièce référencée dans un document produit au comptable, nécessaire à son contrôle ;
Attendu qu’en vertu des dispositions de l’article 6 de l’arrêté du 9 septembre 2013 susvisé, l’ordonnateur certifie le service fait dans l’application Chorus par la validation de la transaction dédiée à cet effet ou, à défaut, par la validation de la demande de paiement et que la certification du service fait par voie dématérialisée dispense l’ordonnateur de toute attestation manuscrite à cette fin sur la pièce justificative de dépense prévue par la nomenclature des opérations de dépenses mentionnée par l’article 50 du décret du 7 novembre 2012 susvisé ;
Sur les faits
Attendu qu’au vu de la demande de paiement n° 5121980639, une somme de 28 485 € a été payée, le 2 décembre 2014, à une entreprise ayant réalisé des travaux de pontage de fissures sur la piste de l’aéroport de Saint-Pierre-et-Miquelon ; qu’à l’appui du paiement ont été joints, à titre de justifications, la facture de ladite entreprise, datée du 21 novembre 2014, le bon de commande relatif à l’opération et une lettre du 28 juillet 2014, adressée à ladite entreprise par le chef de service par intérim, par laquelle il a été passé commande des travaux ; qu’il est constant que le signataire de ladite lettre ne disposait pas d’une délégation l’habilitant à signer les actes, décisions et pièces liés à l’exécution des dépenses du budget dont relevait l’opération ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que dans ses observations susvisées M. X fait valoir, en premier lieu, que le contexte dans lequel il avait exercé ses fonctions en 2014, caractérisé par le sous-effectif important et le climat social dégradé du poste comptable, pouvait expliquer les manquements dont il lui était fait grief ;
Attendu qu’il soutient, en deuxième lieu, que la lettre du 28 juillet 2014 par laquelle il avait été passé commande valait acceptation du devis ou contrat de vente ; que les bons de commande et devis constituaient des documents susceptibles de tenir lieu de contrats ; que, dès lors, le paiement était appuyé de la pièce justificative requise ; que, si le comptable était tenu de contrôler la qualité de l’ordonnateur au stade de l’ordonnancement de la dépense, il n’avait pas à contrôler la qualité du signataire de la lettre de commande ;
Attendu qu’il explique, en troisième lieu, que, conformément aux stipulations de trois conventions, localement conclues en 2012, la première entre le service de l’aviation civile, la préfecture et la trésorerie générale, la deuxième, entre la préfecture, le centre des services partagés interministériels (CSPI) Chorus et la trésorerie générale, la troisième, entre le service de l’aviation civile et la préfecture, ainsi qu’aux dispositions des décisions de délégation et de subdélégation de signatures applicables, la certification du service fait résultait de la validation des demandes de paiement dans l’application informatique partagée dite Chorus par un agent du centre de services partagés interministériels Chorus habilité à cette fin ;
Attendu qu’il estime, en quatrième lieu, que le devis en vue de la réalisation des travaux sur la piste de l’aéroport a été nécessairement établi sur demande du chef de service, compétent pour engager la dépense ; que la certification du service fait a été faite par la personne habilitée à cet effet, sous la responsabilité dudit chef de service ; que, de ce fait, la volonté dudit chef de service d’assumer la contrepartie de l’exécution des travaux, en l’occurrence le paiement de leur prix, était démontrée, ce qui emportait pour conséquence que ledit paiement n’avait été la cause d’aucun préjudice financier pour l’Etat ;
Sur l’application au cas d’espèce
Sur l’absence de contrat écrit ou de document en tenant lieu
Attendu que, eu égard au montant de la dépense, le code des marchés publics susvisé, en vigueur au moment des faits, imposait la conclusion d’un contrat écrit ; qu’en application de la rubrique 4.1.3 de la nomenclature des pièces justificatives des dépenses susvisées, le comptable devait exiger ledit contrat écrit à l’appui du paiement ou, à défaut, un certificat de l’ordonnateur endossant la responsabilité de l’absence de cette pièce ; que le contrôle de la production des justifications comprend, contrairement à ce que soutient le comptable, celui de l’habilitation des agents signataires des contrats et marchés, qui conditionne leur validité ;
Attendu que les pièces produites à l’appui du paiement sont une facture, un bon de commande non signé et une lettre de commande ; que le devis évoqué par le comptable, porté en référence dans la facture et cité dans la lettre de commande, n’était pas joint à l’appui du paiement et, au surplus, n’a pas été fourni lors de l’instruction ; qu’en tout état de cause, la lettre de commande a été signée par un agent qui, faute d’une délégation ou d’une subdélégation de signature, n’avait pas compétence pour ce faire ; que, dès lors, la susdite lettre ne pouvait tenir lieu du contrat écrit prévu par le code des marchés publics et la nomenclature ;
Attendu qu’aucun certificat par lequel l’ordonnateur endosserait l’absence de marché écrit n’était joint à l’appui du paiement ;
Attendu ainsi que le comptable a manqué à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la dette ; qu’il y a lieu, par voie de conséquence, et sans qu’y fassent obstacle les éléments de contexte invoqués à décharge, d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X à ce motif ;
Sur la certification du service fait
Attendu que la transaction a été effectuée dans les conditions prévues par l’arrêté du 9 septembre 2013 susvisé ; que le service fait, valant ordre de payer, a été certifié par une personne habilitée ; que, dès lors, le grief tenant à la qualité de la personne ayant certifié le service fait doit être écarté ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
Attendu que la réalité du service fait et celle du service rendu ne sont pas en cause ; que figurent au dossier une lettre de commande et un bon de commande relatifs à la prestation ; que ladite lettre a été signée par le cadre qui assurait alors un bref intérim de la personne compétente pour engager les dépenses ; que la décision avait été préparée par la demande et l’obtention d’un devis dès avant la période d’intérim ; qu’ainsi, si les pièces produites à l’appui du paiement ne constituent pas, ainsi qu’il a été dit, un contrat écrit au sens du code des marchés publics et de la nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’Etat, l’intention de la personne régulièrement habilitée à engager la dépense peut, au cas d’espèce, être considérée comme établie ; que, de ce fait, le manquement du comptable n’a pas causé de préjudice financier à l’Etat ;
Attendu qu’aux termes du deuxième alinéa du VI de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I du même texte n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce ; que le décret du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ;
Attendu que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré pour l’exercice 2014 est fixé à 183 000 € ; qu’ainsi le montant maximum de la somme susceptible d’être mise à la charge de M. X s’élève à 274,50 € ;
Attendu qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en arrêtant à 100 € la somme à acquitter par M. X ;
Sur la charge n° 2 soulevée à l’encontre de M. X sur l’exercice 2014
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pourrait être mise en jeu, sur l’exercice 2014, au motif qu’une somme de 20 950,04 € aurait été payée dans des conditions irrégulières, les irrégularités commises consistant en ce que le règlement de ladite somme, eu égard à son montant, nécessitait la production d’un contrat écrit ou de tout document en tenant lieu, et en ce que la preuve n’aurait pas été rapportée que la personne ayant certifié le service fait était habilitée à le faire ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du paiement des dépenses et leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu’une dépense a été irrégulièrement payée ;
Attendu qu’aux termes des articles 17 et 18 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des actes et contrôles qui leur incombent et qu’ils sont seuls chargés de la prise en charge des ordres de payer qui leur sont remis par les ordonnateurs, du paiement des dépenses, soit sur ordre émanant des ordonnateurs, soit au vu des titres présentés par les créanciers, soit de leur propre initiative, ainsi que de la suite à donner aux oppositions à paiement et autres significations ;
Attendu qu’aux termes du 2° de l’article 19 du même décret, le comptable public est tenu d’exercer le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la dette et du caractère libératoire du règlement ;
Attendu qu’aux termes de l’article 20 du même décret, le contrôle de la validité de la dette porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles règlementaires, la production des justifications, l’existence du visa des membres du corps du contrôle général économique et financier sur les engagements et les ordonnancements émis par les ordonnateurs principaux ;
Attendu qu’aux termes de l’article 38 du même décret, lorsqu'à l'occasion de l'exercice des contrôles prévus au 2° de l'article 19 susmentionné le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe l'ordonnateur ;
Attendu qu’il résulte des dispositions combinées des articles 1 et 11 du code des marchés publics, dans sa version applicable à compter du 12 décembre 2011, que les marchés et accords-cadres d’un montant égal ou supérieur à 15 000 HT sont passés sous forme écrite ;
Attendu que, conformément à l’arrêté du 20 décembre 2013 portant nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’Etat, en ce qui concerne les marchés publics qui peuvent être passés selon une procédure adaptée à raison de leur montant (rubrique 4.1.3), les pièces nécessaires au comptable sont le contrat, dont les caractéristiques formelles sont définies au paragraphe A de l’annexe E à ladite nomenclature, ainsi que toute pièce référencée dans un document produit au comptable, nécessaire à son contrôle ;
Attendu qu’en vertu des dispositions de l’article 6 de l’arrêté du 9 septembre 2013 susvisé, l’ordonnateur certifie le service fait dans l’application Chorus par la validation de la transaction dédiée à cet effet ou, à défaut, par la validation de la demande de paiement et que la certification du service fait par voie dématérialisée dispense l’ordonnateur de toute attestation manuscrite à cette fin sur la pièce justificative de dépense prévue par la nomenclature des opérations de dépenses mentionnée par l’article 50 du décret du 7 novembre 2012 susvisé ;
Sur les faits
Attendu qu’au vu de la demande de paiement n° 5119832320, une somme de 20 950,04 € a été payée, le 14 avril 2014, à une entreprise ayant fourni des pièces de rechange de véhicules anti-incendie et de secours au service de l’aviation civile de Saint-Pierre-et-Miquelon ; qu’à l’appui du paiement ont été jointes, à titre de justifications, la facture de ladite entreprise, datée du 25 mars 2014, et une facture pro forma du 20 février 2014, revêtue de la mention manuscrite « bon pour accord » apposée par le chef de service, suivie de sa signature ; que le signataire de ladite facture pro forma disposait d’une délégation l’habilitant à signer les actes, décisions et pièces liés à l’exécution des dépenses du budget dont relevait l’opération ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que, dans ses observations susvisées, M. X a fait valoir, en premier lieu, que le contexte dans lequel il avait exercé ses fonctions en 2014, caractérisé par le sous-effectif important et le climat social dégradé du poste comptable, pouvait expliquer les manquements dont il lui était fait grief ;
Attendu qu’il soutient, en deuxième lieu, que la facture pro forma du 20 février 2014 revêtue de la mention « bon pour accord » et de la signature du chef de service valait devis ou contrat de vente ; que ledit document traduisait l’accord de volontés entre le prestataire et l’administration ; que, dès lors, le paiement était appuyé de la pièce justificative requise ;
Attendu qu’il explique, en troisième lieu, que, conformément aux stipulations de trois conventions, localement conclues en 2012, la première entre le service de l’aviation civile, la préfecture et la trésorerie générale, la deuxième, entre la préfecture, le centre des services partagés interministériels (CSPI) Chorus et la trésorerie générale, la troisième, entre le service de l’aviation civile et la préfecture, ainsi qu’aux dispositions des décisions de délégation et de subdélégation de signatures applicables, la certification du service fait résultait de la validation des demandes de paiement dans l’application informatique partagée dite Chorus par un agent du centre de services partagés interministériels Chorus habilité à cette fin ;
Attendu qu’il estime, en quatrième lieu, que le paiement avait fait l’objet d’une contrepartie réelle attestée par la certification du service fait ; que la facture pro forma produite démontrait, plus que l’intention des parties de contracter, la matérialité même du contrat ; que, de ce fait, ledit paiement n’avait été la cause d’aucun préjudice financier pour l’Etat ;
Sur l’application au cas d’espèce
Sur l’absence de contrat écrit ou de document en tenant lieu
Attendu que, eu égard au montant de la dépense, le code des marchés publics susvisé, en vigueur au moment des faits, imposait la conclusion d’un contrat écrit ; qu’en application de la rubrique 4.1.3 de la nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’Etat susvisée, ledit contrat écrit devait être produit à l’appui du paiement ; qu’aux termes du paragraphe A de l’annexe E à la susdite nomenclature, les mentions nécessaires à un marché public passé selon une procédure adaptée étaient l’identification des parties contractantes, la définition de l’objet du marché, le prix ou les modalités de sa détermination et les conditions de règlement ;
Attendu que lesdites mentions figuraient sur la facture pro forma du 20 février 2014 revêtue, pour acceptation, de la signature, au nom de l’Etat, de la personne compétente ; que, dès lors, ladite facture pro forma avait la nature d’un marché public écrit au sens de la susdite nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’Etat ; qu’ainsi, comme le soutient M. X, le paiement était appuyé de pièces suffisantes ;
Sur la certification du service fait
Attendu que la transaction a été effectuée dans les conditions prévues par l’arrêté du 9 septembre 2013 susvisé ; que le service fait, valant ordre de payer, a été certifié par une personne habilitée ; que, dès lors, le grief tenant à la qualité de la personne ayant certifié le service fait doit également être écarté ;
Attendu qu’il résulte de ce qui précède que le comptable n’a pas manqué à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la dette ; que, dès lors, il n’y a pas lieu d’engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire à raison du paiement effectué ;
Sur la charge n° 3 soulevée à l’encontre de M. X sur l’exercice 2014
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pourrait être mise en jeu, sur l’exercice 2014, au motif qu’une somme de 20 000 € aurait été payée dans des conditions irrégulières, les irrégularités commises consistant en ce que le règlement de ladite somme, eu égard à son montant, nécessitait la production d’un contrat écrit ou de tout document en tenant lieu et en ce que la preuve n’aurait pas été rapportée que la personne ayant certifié le service fait était habilitée à le faire ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du paiement des dépenses et leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu’une dépense a été irrégulièrement payée ;
Attendu qu’aux termes des articles 17 et 18 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des actes et contrôles qui leur incombent et qu’ils sont seuls chargés de la prise en charge des ordres de payer qui leur sont remis par les ordonnateurs, du paiement des dépenses, soit sur ordre émanant des ordonnateurs, soit au vu des titres présentés par les créanciers, soit de leur propre initiative, ainsi que de la suite à donner aux oppositions à paiement et autres significations ;
Attendu qu’aux termes du 2° de l’article 19 du même décret, le comptable public est tenu d’exercer le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la dette et du caractère libératoire du règlement ;
Attendu qu’aux termes de l’article 20 du même décret, le contrôle de la validité de la dette porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles règlementaires, la production des justifications, l’existence du visa des membres du corps du contrôle général économique et financier sur les engagements et les ordonnancements émis par les ordonnateurs principaux ;
Attendu qu’aux termes de l’article 38 du même décret, lorsqu'à l'occasion de l'exercice des contrôles prévus au 2° de l'article 19 susmentionné le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe l'ordonnateur ;
Attendu qu’il résulte des dispositions des articles 1 et 11 du code des marchés publics, dans sa version applicable à compter du 12 décembre 2011, que les marchés et accords-cadres d’un montant égal ou supérieur à 15 000 HT sont passés sous forme écrite ;
Attendu que, conformément à l’arrêté du 20 décembre 2013 portant nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’Etat, en ce qui concerne les marchés publics qui peuvent être passés selon une procédure adaptée à raison de leur montant (rubrique 4.1.3), les pièces nécessaires au comptable sont le contrat, dont les caractéristiques formelles sont définies au paragraphe A de l’annexe E à ladite nomenclature, ainsi que toute pièce référencée dans un document produit au comptable, nécessaire à son contrôle ;
Sur les faits
Attendu qu’au vu de la demande de paiement n° 500049594, une somme de 20 000 € a été payée, le 15 octobre 2014, à un laboratoire ayant réalisé des analyses pour une étude de santé environnementale liée à la gestion des déchets à Saint-Pierre-et-Miquelon ; qu’à l’appui du paiement a été jointe, à titre de justification, la facture dudit laboratoire, datée du 3 septembre 2014, revêtue de la mention manuscrite « service fait », d’une signature illisible et de l’empreinte du cachet de la direction territoriale de santé de l’archipel ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que, dans ses observations susvisées, M. X fait valoir, en premier lieu, que le contexte dans lequel il avait exercé ses fonctions en 2014, caractérisé par le sous-effectif important et le climat social dégradé du poste comptable, pouvait expliquer les manquements dont il lui était fait grief ;
Attendu qu’il relève, en deuxième lieu, que la facture faisait référence à un bon de commande établi le 23 mai 2014 par l’adjoint au chef de service de l’administration territoriale de santé ; qu’il était dans l’incapacité de produire ledit bon de commande ; que, toutefois, on pouvait déduire de la référence à cette pièce faite dans la facture l’existence d’un document susceptible de tenir lieu de contrat écrit ;
Attendu qu’il explique, en troisième lieu, que, conformément aux stipulations de trois conventions, localement conclues en 2012, la première entre le service de l’aviation civile, la préfecture et la trésorerie générale, la deuxième, entre la préfecture, le centre des services partagés interministériels (CSPI) Chorus et la trésorerie générale, la troisième, entre le service de l’aviation civile et la préfecture, ainsi qu’aux dispositions des décisions de délégation et de subdélégation de signatures applicables, la certification du service fait résultait de la validation des demandes de paiement dans l’application informatique partagée dite Chorus par un agent du centre de services partagés interministériels Chorus habilité à cette fin ;
Attendu qu’il estime, en quatrième lieu, que les références faites sur la susdite facture à un bon de commande et à la personne de l’adjoint au chef de service constituaient un commencement de preuve de l’existence d’une relation contractuelle fondant la dépense ; que, de ce fait, le paiement n’avait été la cause d’aucun préjudice financier pour l’Etat ;
Sur l’application au cas d’espèce
Sur l’absence de contrat écrit ou de document en tenant lieu
Attendu que, eu égard au montant de la dépense, le code des marchés publics susvisé, en vigueur au moment des faits, imposait la conclusion d’un contrat écrit ; qu’en application de la rubrique 4.1.3 de la nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’Etat annexée à l’arrêté du 20 décembre 2013 susvisé, le comptable devait exiger un contrat écrit à l’appui du paiement ou, à défaut, un certificat de l’ordonnateur endossant la responsabilité de l’absence de cette pièce ;
Attendu qu’il n’est pas contesté que seule une facture figurait à l’appui du paiement ; qu’une simple référence, sur cette facture, à un bon de commande non fourni, ne pouvait tenir lieu de contrat écrit ;
Attendu qu’aucun certificat par lequel l’ordonnateur endosserait l’absence de marché écrit n’était joint à l’appui du paiement ;
Attendu ainsi que le comptable a manqué à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la dette ; qu’il y a lieu, par voie de conséquence, et sans qu’y fassent obstacle les éléments de contexte invoqués à décharge, d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X à ce motif ;
Sur la certification du service fait
Attendu que la transaction a été effectuée dans les conditions prévues par l’arrêté du 9 septembre 2013 susvisé ; que le service fait, valant ordre de payer, a été certifié par une personne habilitée ; que, dès lors, le grief tenant à la qualité de la personne ayant certifié le service fait doit être écarté ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
Attendu que, si la réalité du service fait et celle du service rendu ne sont pas en cause, le comptable n’a pas pu produire, à l’appui de la dépense, d’autres pièces que la facture établie par le prestataire ; que les simples mentions sur ladite facture, par le prestataire, du nom d’un fonctionnaire et du numéro et de la date d’un bon de commande ne peuvent, à elles seules, attester de l’intention de l’ordonnateur compétent d’engager la dépense ; que l'engagement, acte par lequel une personne morale crée ou constate à son encontre une obligation de laquelle il résultera une dépense, est distinct de la liquidation et de l’ordonnancement ; que, dès lors, la certification du service fait, qui vaut en l’espèce ordre de payer, même effectuée par une personne habilitée à cet effet, ne peut davantage manifester l’intention de contracter de la part de la personne régulièrement habilitée à engager la dépense ; que la dépense doit donc être considérée comme indue ; que, dans ces conditions, le manquement du comptable a causé un préjudice financier à l’Etat ;
Attendu qu’aux termes des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il y a lieu, ainsi, de constituer M. X débiteur envers l’Etat, au titre de l’exercice 2014, de la somme de 20 000 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 2 juin 2017, date de sa réception du réquisitoire susvisé ;
Attendu que le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif, au sens du IX de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée ;
Par ces motifs,
DÉcide :
Charge n° 1. Exercice 2014.
Article 1er. – M. X devra s’acquitter d’une somme de 100 €, en application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 modifié de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en vertu du IX de l’article 60 modifié de la loi précitée.
Charge n° 2. Exercice 2014.
Article 2. – Il n’y a pas lieu d‘engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X à raison de la charge n° 2.
Charge n° 3. Exercice 2014.
Article 3. – M. X est constitué débiteur envers l’Etat de la somme de 20 000 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 2 juin 2017.
Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.
Article 4. – M. X ne pourra être déchargé de sa gestion pendant l’année 2014 qu’après apurement de la somme non rémissible et du débet ci-dessus fixés.
Fait et jugé par M. Philippe Geoffroy, président de section, présidant la formation ; M. Olivier Mousson, Mme Dominique Dujols, MM. Guy Fialon, Alain Levionnois et Mme Sophie Thibault, conseillers maîtres.
En présence de M. Aurélien Lefebvre, greffier de séance.
Aurélien Lefebvre |
Philippe Geoffroy |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.
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