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TROISIEME CHAMBRE

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Quatrième section

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Arrêt n° S2018-0217

 

Audience publique du 1er décembre 2017

 

Prononcé du 1er février 2018

 

MUSEUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE

 

Exercices 2010 à 2014

 

 

Rapport n° R-2017-1400

 

 

 

République Française,

Au nom du peuple français,

 

La Cour,

 

Vu le réquisitoire n° 2016-42 RQ-DB en date du 8 juin 2016 par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi la troisième chambre de la Cour des comptes de charges soulevées à l’encontre de Monsieur X, Monsieur Y et Monsieur Z au titre des exercices 2010 à 2014, notifié le 20 octobre 2016 aux comptables concernés ;

 

Vu les comptes rendus en qualité de comptables du Muséum national d’histoire naturelle par Monsieur X, du 15 décembre 2008 au 14 juin 2012, Monsieur Y, du 15 juin 2012 au 4 septembre 2013, Monsieur A, du 5 septembre 2013 au 31 décembre 2013, et Monsieur Z, du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 ;

 

Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;

 

Vu le code des juridictions financières ;

 

Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

 

Vu les lois, décrets et règlements relatifs à la comptabilité des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ;

 

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

 

Vu le décret modifié n° 2001-916 du 3 octobre 2001 relatif au Muséum national d'histoire naturelle ;

 

Vu les pièces de mutation des comptables ;

 

Vu le rapport R-2017-1400 à fin d’arrêt de Monsieur Michel THOMAS, conseiller référendaire, magistrat chargé de l’instruction ;

 

Vu les conclusions 889 du Procureur général près la Cour des comptes du 27 novembre 2017 ;

 

Vu les pièces du dossier ; 

Entendu lors de l’audience publique du 1er décembre 2017 Monsieur Michel THOMAS, conseiller référendaire, en son rapport, Monsieur Benoît GUERIN, avocat général, en les conclusions du ministère public, MM. X, A et Z, agents comptables, présents ayant eu la parole en dernier ;

Entendu en délibéré, Monsieur Emmanuel GLIMET, conseiller maître, en ses observations ;

 

 

Sur le droit applicable aux charges n° 1 à 3

 

Attendu que l’article 60-I de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifié dispose que « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, […]. Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique. La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée, […] » ; qu’en particulier, les comptables publics sont tenus pour responsables des pertes qui résultent de l’impossibilité de recouvrer les créances du fait de diligences inadéquates, incomplètes ou insuffisamment rapides ;

 

Sur la charge n° 1, soulevée à l’encontre de Monsieur X, au titre de l’exercice 2012, ou, à défaut, de son successeur Monsieur Y, au titre de l’exercice 2013 ;

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la Cour de la présomption de responsabilité de Monsieur X ou, à défaut, de son successeur Monsieur Y, à hauteur de 11 023,56 euros, à raison du solde impayé du loyer dû par un locataire particulier du Muséum ;

 

Attendu que, dans ses conclusions, le Procureur général fait valoir que c’est l’absence de toute diligence de M. X durant sa gestion qui a provoqué la perte de cette créance ;

 

Sur les faits

 

Attendu que la créance a fait l’objet d’un titre de recettes en date du 12 juillet 2006, d’un état exécutoire en date du 6 juin 2007 et d’une lettre de relance en date du 2 juillet 2007, mais n’a fait l’objet d’aucune diligence de recouvrement entre cette date et celle de son admission en non-valeur, par délibération du conseil d’administration du 18 décembre 2013 ;

 

Sur les éléments apportés à décharge par le comptable

 

Attendu que M. X fait valoir la situation des archives, la complexité du recouvrement des créances et la faiblesse des sommes en cause au regard de l’ensemble des créances de l’établissement ;

 

Sur l’existence d’un manquement

 

Attendu que la responsabilité du comptable est susceptible d'être mise en jeu dans l'hypothèse où, ses diligences ayant été inadéquates, incomplètes ou tardives, le recouvrement des créances nées durant sa gestion apparaîtrait manifestement compromis à la date de cessation de ses fonctions ;

 

Attendu que lors de la prise de fonctions de M. X, un peu moins d’un an et demi après la dernière relance faite par son prédécesseur, le recouvrement de la créance ne pouvait être regardé comme manifestement compromis, mais qu’il l’était devenu lors de son départ, trois ans et demi plus tard, et qu’ainsi le fait générateur à l’origine de la perte de la recette doit être imputé à l’absence de diligences engagées par M. X en vue du recouvrement de cette créance 

 

Attendu que les circonstances générales invoquées par M. X ne sauraient l’exonérer de sa responsabilité en matière de recouvrement des recettes ; qu’il a en conséquence engagé sa responsabilité ;

 

Sur l’existence d’un préjudice financier

 

Attendu que le manquement du comptable, qui s’est traduit par une perte de recettes, a causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, au détriment du Muséum national d’histoire naturelle ;

 

Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi il y a lieu de constituer Monsieur X débiteur du Muséum national d’histoire naturelle, pour la somme de 11 023,56 euros ;

 

Sur la charge n° 2, soulevée à l’encontre de Monsieur X, au titre de l’exercice 2012, ou, à défaut, de son successeur Monsieur Y, au titre de l’exercice 2013

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la Cour de la présomption de responsabilité de Monsieur X, ou, à défaut, de son successeur Monsieur Y, à hauteur de 9 568 euros, à raison de l’absence de recouvrement du prix de la cession de droits pédagogiques relatifs à une exposition, auprès d’une société anonyme italienne ;

 

Attendu que, dans ses conclusions, le Procureur général fait valoir qu’il peut être estimé que l’inaction de M. X a manifestement compromis le recouvrement de cette créance ;

 

Sur les faits

 

Attendu que la créance a fait l’objet d’un titre de recettes en date du 10 mars 2009, et d’un courrier en date du 30 juin 2009 ayant donné lieu à une réponse par courrier électronique du 27 octobre 2009, dans laquelle la société faisait état d’un malentendu expliquant le retard de paiement ;

 

Attendu qu’aucune diligence de recouvrement n’a été effectuée par la suite avant juin 2014 et que la créance a été admise en non-valeur par délibération du conseil d’administration du 12 décembre 2014 ;

 

Sur les éléments apportés à décharge par le comptable

 

Attendu que M. X fait valoir la situation des archives, la complexité du recouvrement des créances et la faiblesse des sommes en cause au regard de l’ensemble des créances de l’établissement ;

 

Attendu que, si lors de l’audience, M. X a affirmé que les créances de ce type faisaient systématiquement l’objet de relances, la preuve de leur existence pour la créance en cause n’a pas été établie ;

 

Sur l’existence d’un manquement

 

Attendu que la responsabilité du comptable est susceptible d'être mise en jeu dans l'hypothèse où, ses diligences ayant été inadéquates, incomplètes ou tardives, le recouvrement des créances nées durant sa gestion apparaîtrait manifestement compromis à la date de sa cessation de fonctions ;

 

Attendu que lors du départ de M. X, plus de deux ans et demi s’étaient écoulés depuis le dernier courrier reçu de la société débitrice sans qu’aucune diligence de recouvrement ne soit entreprise, qu’en conséquence le recouvrement était donc manifestement compromis lors de la prise de fonctions de son successeur, et qu’ainsi le fait générateur à l’origine de la perte de la recette doit être imputé à l’absence de diligences engagées par M. X en vue de son recouvrement ;

 

Attendu que les circonstances générales invoquées par M. X ne sauraient l’exonérer de sa responsabilité en matière de recouvrement des recettes ; qu’il a en conséquence engagé sa responsabilité ;

 

Sur l’existence d’un préjudice financier

 

Attendu que le manquement du comptable, s’étant traduit par une perte de recettes, a causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, au détriment du Muséum national d’histoire naturelle ;

 

Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi il y a lieu de constituer Monsieur X débiteur du Muséum national d’histoire naturelle, pour la somme de 9 568 euros ;

 

Sur la charge n° 3, soulevée à l’encontre de Monsieur X, au titre de l’exercice 2012, ou, à défaut, de son successeur Monsieur Y, au titre de l’exercice 2013

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la Cour de la présomption de responsabilité encourue par Monsieur X, ou, à défaut, par son successeur Monsieur Y, à hauteur de 3 139,50 euros, à raison du solde impayé du produit de la location du foyer du cinéma du Musée de l’Homme à une société britannique ;

 

Attendu que, dans ses conclusions, le Procureur général fait valoir qu’il peut être estimé que l’inaction de M. X a manifestement compromis le recouvrement de cette créance ;

 

Sur les faits

 

Attendu que la créance a fait l’objet d’un titre de recette en date du 24 novembre 2009, qu’aucune diligence de recouvrement n’a été effectuée par la suite avant juin 2014 et qu’elle a été admise en non-valeur par délibération du conseil d’administration du 12 décembre 2014 ;

 

Sur les éléments apportés à décharge par le comptable

 

Attendu que M. X fait valoir la situation des archives, la complexité du recouvrement des créances et la faiblesse des sommes en cause au regard de l’ensemble des créances de l’établissement ;

 

Attendu que, si lors de l’audience, M. X a affirmé que les créances de ce type faisaient systématiquement l’objet de relances, la preuve de leur existence pour la créance en cause n’a pas été établie ;

 

Sur l’existence d’un manquement

 

Attendu que la responsabilité du comptable est susceptible d'être mise en jeu dans l'hypothèse où, ses diligences ayant été inadéquates, incomplètes ou tardives, le recouvrement des créances nées durant sa gestion apparaîtrait manifestement compromis à la date de sa cessation de fonctions ;

 

Attendu que lors du départ de M. X, plus de deux ans et demi s’étaient écoulés sans qu’aucune diligence de recouvrement ne soit entreprise ; que le recouvrement était donc manifestement compromis lors de la prise de fonctions de son successeur, et qu’ainsi le fait générateur à l’origine de la perte de la recette doit être imputé à l’absence de diligences engagées par M. X en vue du recouvrement de cette créance ;

 

Attendu que les circonstances générales invoquées par M. X ne sauraient l’exonérer de sa responsabilité en matière de recouvrement des recettes ; qu’il a en conséquence engagé sa responsabilité ;

 

Sur l’existence d’un préjudice financier

 

Attendu que le manquement du comptable, s’étant traduit par une perte de recettes, a causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, au Muséum national d’histoire naturelle ;

 

Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer Monsieur X débiteur du Muséum national d’histoire naturelle, pour la somme de 3 139,50 euros ;

 

Sur le droit applicable aux charges n° 4 à 7

 

Attendu qu’en application de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables [] du paiement des dépenses » ; que la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors […] qu'une dépense a été irrégulièrement payée » ;

 

Attendu, s'agissant des exercices 2010 à 2012, qu'aux termes de l'article 12-B du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 susvisé, les comptables publics sont notamment tenus d'exercer le contrôle de la validité de la créance ; qu'aux termes de l'article 13 de ce même décret, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l'exactitude des calculs de liquidation, et la production des justifications, expressément requises ou nécessaires à la vérification de l'exactitude des calculs de sa liquidation ; qu'aux termes de l'article 37 de ce même décret, « lorsque, à I 'occasion de l'exercice du contrôle prévu à I'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l’ordonnateur » ; qu'aux termes de l'article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans des nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l'accord du ministre intéressé » ;

 

Attendu, s’agissant des exercices 2013, et 2014 qu'aux termes de l’article 19 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 susvisé, les comptables publics sont notamment tenus d'exercer le contrôle de la validité de la dette ; qu'aux termes de l'article 20 de ce même décret, le contrôle de la validité de la dette porte notamment sur la justification du service fait, l'exactitude de la liquidation et la production des pièces justificatives, expressément requises ou nécessaires à la vérification de l'exactitude des calculs de sa liquidation ; qu'aux termes de l'article 38 de ce même décret, lorsque « le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe l'ordonnateur » ; qu'aux termes de l'article 50 de ce même décret, « les opérations de recettes, de dépenses et de trésorerie doivent être justifiées par des pièces prévues dans des nomenclatures établies, pour chaque catégorie de personnes morales mentionnées à l'article 1er, par arrêté du ministre chargé du budget. (…) Lorsqu'une opération de dépense n'a pas été prévue par une nomenclature mentionnée ci-dessus, doivent être produites des pièces justificatives permettant au comptable d'opérer les contrôles mentionnés aux articles 19 et 20 » ;

 

Sur la charge n° 4, soulevée à l’encontre de Monsieur Y, au titre de l’exercice 2013

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la Cour de la présomption de responsabilité de Monsieur Y, à raison du paiement à hauteur de 6072,76 euros d’une facture datée du 31 octobre 2012, reçue le 22 novembre 2012 par le Muséum, au bénéfice de la société MFP Services, demandant le remboursement du solde restant dû en application de la convention de gestion des chèques vacances, conclue entre cette société et l’établissement public, alors que ladite facture présentait des références erronées par rapport à la convention à laquelle elle se référait et était accompagnée d’attestations n’émanant pas de l’ordonnateur, de nature à mettre en doute la validité du paiement et notamment l’exactitude des calculs de liquidation ;

 

Sur les faits

 

Attendu que la facture reçue par l’établissement, dépourvue de justificatifs, faisait référence à un article 6.2. de la convention de gestion des chèques vacances conclue entre la société émettrice de la facture et l’établissement, article qui n’existe pas ; que, si l’agent comptable disposait par ailleurs d’une attestation de service fait, délivrée par l’adjoint au directeur des finances de l’établissement, en date du 6 mai 2013, aucune autre justification n’accompagnait cette attestation ;

 

Attendu que le 17 mai 2013, l’agent comptable, après avoir suspendu le paiement pour demander des informations complémentaires sur les termes de la liquidation de la somme à payer, a procédé au versement ordonné sur le fondement d’un simple certificat administratif, daté du 21 novembre 2012, soit à une date précédant d’une journée celle de la réception officielle de la facture (cachet de réception daté du 22 novembre), certificat établi par une personne n’ayant pas la qualité d’ordonnateur ou de son délégué, se bornant à indiquer que la somme à verser correspondait à des prestations en contrepartie de chèques vacances délivrés à 25 agents du Muséum depuis 2006 ;

 

Sur les éléments apportés à décharge par le comptable

 

Attendu qu’en réponse au réquisitoire, l’agent comptable se limite à rappeler que l’ordonnateur a certifié le service fait et que la société était fondée à réclamer une dette ;

 

Sur l’existence d’un manquement

 

Attendu cependant que c’est à bon droit que le comptable avait initialement suspendu le paiement, puisque ni la facture, qui au demeurant mentionnait une référence erronée, ni l’attestation de service fait, n’étaient accompagnées de pièces justificatives lui permettant de s’assurer de l’exactitude des calculs de liquidation ; 

 

Attendu qu'il apparaît qu’en procédant par la suite au paiement de la facture produite, en présence de justifications insuffisantes, d'une attestation n'émanant pas de l'ordonnateur ou de son délégué, établie un jour avant la réception officielle de ladite facture - la référence aux dispositions de la convention qui en justifieraient le paiement s'avérant douteuse- le comptable ne disposait toujours pas d’éléments lui permettant de s’assurer de l’exactitude des calculs de liquidation ; qu’ainsi, M. Y a engagé sa responsabilité en procédant à une dépense sans en contrôler la validité, et notamment les justifications garantissant l’exactitude de sa liquidation ; qu'il a en conséquence engagé sa responsabilité;

 

Attendu, en outre, que l’argument selon laquelle la société aurait de toute façon été fondée à réclamer le paiement d’une prestation, ne saurait exonérer l’agent comptable de ses obligations en matière de contrôle ;

 

Sur l’existence d’un préjudice financier

 

Attendu que le manquement du comptable, s’étant traduit par le versement d’une somme dont les éléments de liquidation se sont révélés impossibles à justifier, a causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, au détriment du Muséum national d’histoire naturelle ;

 

Attendu notamment que l’existence d’un service fait par un prestataire constitue une condition nécessaire mais non suffisante pour conférer aux dépenses publiques effectuées par les comptables, le caractère d’une somme due ; qu’enfin l’argument selon laquelle la société aurait de toute façon été fondée à réclamer le paiement d’une prestation ne dispensait pas le comptable de s’assurer, avant d’ouvrir sa caisse, qu’il disposait bien des éléments probants lui permettant de s’assurer de la correcte liquidation de la dépense qu’l prenait en charge ;

 

Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer Monsieur Y débiteur du Muséum national d’histoire naturelle, pour la somme de 6 072,76 euros ;

 

Sur la charge n° 5, soulevée à l’encontre de Monsieur X, au titre des exercices 2010, 2011 et 2012 et de Monsieur Y, au titre des exercices 2012 et 2013

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la Cour de la présomption de responsabilité de Monsieur X et de Monsieur Y, à raison du versement par les agents comptables, à eux-mêmes ainsi qu’au directeur général des services et à son adjoint, de primes mensuelles d’intéressement aux travaux de recherche, sur le fondement des dispositions du décret n° 85-618 du 13 juin 1985, modifié par le décret n° 98-65 du 4 février 1998, fixant les modalités de rétribution des personnels des établissements d'enseignement supérieur pour services rendus à des opérations de recherche encadrées par des conventions avec des partenaires, puis par celles du décret n° 2010-619 du 7 juin 2010 qui a abrogé pour partie les dispositions précédentes, sans avoir procédé au contrôle de la validité de ces paiements ;

 

Attendu que le ministère public, après avoir rappelé les conditions restrictives de versement des primes d’intéressement aux travaux de recherche, faisait particulièrement valoir que les versements étaient mensualisés, donc ne portaient pas nécessairement sur des opérations achevées, conformément à l’article 1er du décret de 2010, que la preuve n'était pas rapportée que les plafonds d'enveloppes réglementaires, prévus à son article 2, avaient été respectés, alors qu'il incombait à l'agent comptable d'attester la quotité disponible et qu’enfin, la liste des bénéficiaires et le montant des sommes attribuées devaient faire l'objet de décisions, sur proposition des directeurs ou responsables des services compétents, conformément à l’article 3 ;

 

Attendu que le ministère public signalait ne pas être en mesure d’attribuer avec certitude, à l’un ou l’autre des deux comptables, les paiements faits au mois de juin 2012, au cours duquel la remise de service est intervenue et que ce point devait être éclairci lors de l’instruction ;

 

 

 

 

Sur la réglementation applicable et sur les faits

 

Attendu que l’article 1er du décret du 13 juin 1985 modifié dispose qu’outre les personnels « ayant participé directement [aux] opérations » de recherche encadrées par des conventions avec des partenaires, « peuvent également bénéficier de cette rémunération les personnels permanents des établissements relevant du ministre chargé de l'enseignement supérieur autres que ceux qui en bénéficient au titre de l'alinéa précédent, lorsqu'ils remplissent l'une des conditions suivantes :

 

1° Participer au-delà de leurs obligations statutaires de services à la conclusion et à la réalisation des contrats et conventions mentionnés à l'alinéa précédent ;

 

2° Être chargé, en dehors de leur activité principale, soit de l'organisation des opérations effectuées dans le cadre de ces contrats ou conventions, soit de leur gestion financière et comptable » ; que l’article 2 du même décret précise que « la rémunération mentionnée à l'article précédent est fixée par le chef d'établissement en fonction des services rendus, sur proposition du responsable de ces opérations […] » ;

 

Attendu que le décret modifié du 13 juin 1985 a été abrogé par le décret n° 2010-619 du 7 juin 2010, mais que son article 5 précise que « ses dispositions demeurent applicables à l’intéressement accordé au titre des contrats et conventions conclus avant la date de publication du présent décret et en cours d’exécution à cette date » en ajoutant toutefois notamment que « l'intéressement ne peut être versé que pour une opération achevée », que « le montant total de l'intéressement réparti entre les agents ayant participé de manière individuelle ou collective à une opération ne peut excéder 50 % du montant disponible au titre de celle-ci », selon des modalités précises, attestées en partie par lagent comptable et qu’enfin « la liste des bénéficiaires et les attributions individuelles de l'intéressement prévu par le présent décret sont arrêtées par le président ou directeur de l'établissement sur proposition du directeur de la composante, de l'unité de recherche ou du responsable du service dans lesquels exercent les bénéficiaires » ;

 

Attendu que les attributions de primes, qui ne sont pas contestées, ont fait l’objet de décisions annuelles d’attribution, signées par le directeur général et visées par le contrôleur financier, mentionnant la référence au décret du 13 juin 1985 modifié (mais non au décret du 7 juin 2010) et comportant toutes un article 1er ainsi rédigé :

 

« Les personnels permanents des établissements relevant du ministre de l’enseignement supérieur pouvant être chargés, soit de l’organisation des opérations effectuées dans le cadre de contrats ou conventions, soit de leur gestion financière et comptable peuvent bénéficier d’une rémunération pour services rendus au titre de leur participation [sic] à des opérations de recherche scientifique prévues dans des contrats ou conventions » ;

 

Sur les éléments apportés à décharge par les comptables

 

Attendu que M. X fait état du caractère habituel du versement mensualisé de telles primes aux directeurs et agents comptables des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, qu’il cite des exemples de travaux auxquels il a participé lui occasionnant des tâches supplémentaires, souligne la modestie de la dépense au regard des recettes tirées de l’activité de recherche et rappelle, enfin, que l’attribution de ces primes a fait l’objet de décisions annuelles d’attribution, visées par le contrôleur financier ;

 

Attendu que M. Y, qui fait également référence au visa du contrôleur financier, soutient, que les indemnités « étaient bien versées pour des opérations achevées et dans l'exercice le plus régulier des textes », c’est-à-dire conformément aux exigences du décret de 2010 prolongeant sous condition le dispositif de 1985 ; qu’il mentionne d’une manière générale, sans fournir d’éléments plus précis tirés de celle-ci, qu’il aurait été aisé de fournir à la Cour des comptes « la comptabilité analytique de l’activité recherche et de ces conventions », dont il avait durant sa gestion mis en place quelques-uns des premiers éléments ;

 

Sur l’existence d’un manquement

 

Attendu, en premier lieu, que les versements ont été opérés au bénéfice de personnes dont les agents comptables n’ignoraient pas qu’elles ne remplissaient pas les conditions leur permettant d’y prétendre ;

 

Attendu en effet que, contrairement aux dispositions réglementaires réservant le bénéfice de cette rémunération exceptionnelle aux personnes chargées, « en dehors de leur activité principale, soit de l'organisation des opérations effectuées dans le cadre de ces contrats ou conventions, soit de leur gestion financière et comptable », il ne peut être soutenu que MM. X et Y, en qualité d’agents comptables respectivement en 2010-2011 et en 2013, M. Y en qualité de secrétaire général adjoint ou d’adjoint au directeur général des services et de directeur des finances et du budget en 2010, 2011 et 2012, et M. B, en qualité de secrétaire général puis directeur général des services, pouvaient prétendre au bénéfice d’une telle prime puisque leur activité principale incluait nécessairement les opérations de recettes ou de dépenses du Muséum, pour les premiers, les actes de gestion générale du même établissement, pour les seconds, c’est-à-dire des activités liées à la mise en place ou à l’exécution de ces contrats ou de ces conventions ;

 

Attendu, au demeurant, que les versements en cause ont été fondés sur une décision mentionnant de façon tronquée la référence à l’article 1er du décret modifié du 13 juin 1985, omettant le membre de phrase réservant le bénéfice de cette rémunération accessoire aux agents chargés de l'organisation ou de la gestion de ces activités « en dehors de leur activité principale » ;

 

Attendu qu’en l’absence d’une nomenclature directement applicable à ce type d’opérations, il appartient bien au comptable, après avoir examiné la nature et l’objet de la dépense, de se faire produire l’ensemble des justifications lui permettant de procéder intégralement au contrôle de sa validité au sens des articles 12-B et 13 du Règlement général sur la comptabilité publique, applicable jusqu’en 2012, ou des articles 19 et 20 du décret du 7 novembre 2012, applicable en 2013 ;

 

Attendu que si un comptable ne peut se faire juge de la légalité des actes qui lui sont produits par l’ordonnateur, il se trouve dans l’obligation, avant d’ouvrir sa caisse, d’exiger la production des pièces qui lui permettent d’exercer l’intégralité des contrôles dont la loi l’a chargé, a fortiori en l’absence d’une nomenclature applicable à la catégorie et à la nature de la dépense qu’il prend en charge ;

 

Attendu que les décisions, dont les agents comptables se sont satisfaits, ne font pas état de la « proposition du responsable [des] opérations », pourtant exigée par l’article 2 du décret de 1985 et expressément reprise par l’article 3 du décret du 7 juin 2010 ;

 

Attendu que la preuve n’est pas rapportée non plus que les attributions de primes dintéressement, relatives aux exercices 2011 et suivants, qui  se réfèrent au décret abrogé de 1985, correspondent bien à des contrats ou à des conventions conclus avant la date de publication du décret du 7 juin 2010, ou en cours d’exécution à cette même date, et se rapportant en outre à des opérations achevées ; qu’au contraire, le caractère forfaitaire des versements présente les caractéristiques d’un complément de rémunération déconnecté des justifications exigibles, notamment des décisions d’attributions sur proposition, décrites par la réglementation ;

 

 

Attendu, au surplus, que ni la circonstance d’une attribution généralisée de cette prime dans des établissements comparables, ni la présence du visa du contrôleur financier, ni le caractère prétendument modeste du montant des primes versées, ne sauraient exonérer les agents comptables de leur responsabilité en matière de contrôle de la validité de la créance ou de la dette ;

 

Attendu que les comptables ont ainsi engagé leur responsabilité au sens de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ;

 

Sur l’existence d’un préjudice financier

 

Attendu que le manquement des comptables, s’étant traduit par le versement de primes indues, dépourvues de fondement juridique à l’égard de leurs bénéficiaires désignés, ces paiements ont causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, au détriment du Muséum national d’histoire naturelle ;

 

Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;

 

Attendu, s’agissant des paiements du mois de juin 2012, que le versement des primes de ce mois a été pris en charge par M. Y, qui a succédé à M. X à compter du 15 juin 2012 ;

 

Attendu qu’en conséquence il y a lieu de constituer débiteurs du Muséum national d’histoire naturelle : Monsieur X pour la somme de 37 716 euros au titre de l’exercice 2010, 37 716 euros au titre de l’exercice 2011 et 10 850 euros au titre de l’exercice 2012, ainsi que Monsieur Y pour la somme de 15 190 euros au titre de l’exercice 2012 et de 6 510 euros au titre de l’exercice 2013 ;

 

Sur la charge n° 6, soulevée à l’encontre de Monsieur Z, au titre de l’exercice 2014

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la Cour de la présomption de responsabilité de Monsieur Z à raison du versement effectué à lui-même, pour un total de 9 100 euros en 2014, d’une indemnité assise sur le fondement du décret n°88-132 du 4 février 1988 relatif à l'indemnité pour rémunération de services, allouée aux agents comptables d'établissements publics nationaux, de comptes spéciaux du Trésor, de budgets annexes, d'établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles et d'écoles de formation maritime et aquacole, en l’absence des pièces justificatives précisément requises au regard des exigences de ce décret, relatives à une adjonction de service dont M. Z aurait été chargé ;

 

Sur la réglementation applicable et sur les faits

 

Attendu que l’article 1er du décret n° 88-132 du 4 février 1988 relatif à l'indemnité pour rémunération de services allouée aux agents comptables d'établissements publics nationaux, de comptes spéciaux du Trésor, de budgets annexes, d'établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles et d'écoles de formation maritime et aquacole édicte que « une indemnité pour rémunération de services est allouée aux agents comptables d'établissements publics nationaux, (…) dès lors que ces fonctions ne constituent pas l'activité principale des intéressés » ;

 

Attendu que M. Z était agent comptable du seul Muséum sans adjonction de service ;

 

Sur les éléments apportés à décharge par le comptable

 

Attendu que M. Z reconnaît lui-même qu’il n’était pas en adjonction de service et que ce support juridique n’a été choisi, en toute connaissance de cause, que pour lui assurer un complément de rémunération ;

 

Attendu qu’il fait état, afin de le justifier, de la lourdeur des fonctions exercées par l’agent comptable, de la satisfaction exprimée par la direction de l’établissement quant à sa manière de les exercer, du fait que les agents comptables d’établissements comparables se seraient trouvés dans une situation défavorable en termes de rémunération, et des activités d’auditeur ou de contrôleur, qu’il a exercé pour le compte de l’établissement ;

 

Sur l’existence d’un manquement

 

Attendu que le versement de cette indemnité était manifestement dépourvu de fondement juridique, que l’agent comptable aurait dû en suspendre le paiement et qu’ainsi le manquement n’est pas contesté ;

 

Attendu que les circonstances invoquées par M. Z ne sauraient exonérer l’agent comptable de sa responsabilité quant au contrôle de la validité de la dette ; que les activités dont il fait état ne correspondent nullement au régime de l’indemnité complémentaire perçue et ne pouvaient en justifier le versement ; qu’ainsi, le comptable a engagé sa responsabilité ;

 

Sur l’existence d’un préjudice financier

 

Attendu que le manquement du comptable, qui s’est traduit par le versement d’indemnités indues, dépourvues de tout fondement juridique, a causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, au détriment du Muséum national d’histoire naturelle ;

 

Attendu qu’en conséquence, il y a lieu de constituer débiteur du Muséum national d’histoire naturelle Monsieur Z pour la somme de 9 100 euros au titre de l’exercice 2014 ;

 

Sur la charge n° 7, soulevée à l’encontre de Monsieur Z, au titre de l’exercice 2014 

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la Cour de la présomption de responsabilité de Monsieur Z à raison du versement à son fondé de pouvoir d’une somme de 17 902,70 euros en 2014 au titre d’un complément de rémunération destiné à prendre en compte la promotion de l’intéressé au grade d’inspecteur des finances publiques de 10e échelon ;

 

Sur la réglementation applicable et sur les faits

 

Attendu que le décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 organisant les conditions d'exercice des fonctions, en position d'activité, dans les administrations de l'État prévoit en son article 2 que « les actes relatifs à la situation individuelle des fonctionnaires exerçant leurs fonctions dans une autre administration de l'État que celle dont ils relèvent peuvent être pris par l'autorité compétente de l'administration d'accueil, à l'exception de ceux qui sont soumis à l'avis préalable de la commission administrative paritaire compétente » ; qu’il est admis, ainsi que le mentionne une circulaire du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique n° 2179 du 28 janvier 2009, précisant les modalités de mise en œuvre du décret du 18 avril 2008, que l’administration d’accueil prend toute disposition permettant de verser à un agent dans cette situation, outre le montant de son traitement principal, « les indemnités auxquelles il peut prétendre » ;

 

Attendu que le renouvellement du contrat de détachement du fondé de pouvoir de l’agent comptable, prenant en compte sa promotion, a été refusé par le contrôleur budgétaire et comptable ministériel, qui a demandé le placement de l’intéressé sous le régime de la position normale d’activité, ce qui a été formalisé par un arrêté du 6 novembre 2013 avec effet au 1er octobre 2013 ;

 

Attendu que dès lors l’intéressé a été rémunéré par le Muséum sur le seul fondement d’une fiche financière, en date du 25 octobre 2013, transmise « pour information » par son administration d’origine, mentionnant un montant de 20 523,31 euros sous l’appellation « autre indemnité à caractère permanent », engendrant, en 2014, la perception d’une somme de 17 902,70 euros sous l’intitulé « complément rémunération » ;

 

Sur les éléments apportés à décharge par le comptable

 

Attendu que l’agent comptable soutient que l’absence de décision explicite, dans son administration d’accueil, portant attribution de ce complément de rémunération résulte d’une erreur d’interprétation quant à la situation de l’agent en « position normale d'activité », position, selon lui, mal connue et très peu utilisée dans les établissements comparables ;

 

Attendu que, toujours d’après l’agent comptable, le fait que le bénéficiaire « conserve le régime indemnitaire lié à son corps d'appartenance a été compris comme autorisant, de fait, la perception par l'agent des indemnités liées à ce régime sans qu'il soit besoin d'en transposer la matérialité dans une décision de l'établissement », cette interprétation ayant reçu, selon l’agent comptable, le renfort d’une fiche financière suffisamment précise pour permettre la liquidation de la rémunération de l’intéressé ;

 

Attendu que l’attestation du directeur général délégué aux ressources du Muséum, en date du 8 décembre 2016, fournie par l’agent comptable à l’appui de sa réponse, confirme « le manque de pratique dans la gestion de cette position administrative » qui a conduit à « omettre de formaliser, par une décision opposable, la rémunération complémentaire allouée » ;

 

Attendu que l’agent comptable estime cependant avoir été en mesure de contrôler les éléments de liquidation de la prime perçue ;

 

Attendu, sur le préjudice financier qui en résulterait, que l’agent comptable, en se fondant sur une attestation signée par le directeur général délégué aux ressources, soutient que la rémunération versée au bénéficiaire aurait été la même si l’intéressé était resté en position de détachement, la direction de l’établissement lui ayant garanti une rémunération tenant compte de sa promotion, et que le préjudice financier de l'établissement n'est donc pas avéré ;

 

Sur l’existence d’un manquement

 

Attendu que la fiche financière qui a servi de fondement au paiement de l’indemnité ne constitue pas une décision d’attribution, qui aurait permis d’exonérer le comptable de sa responsabilité ; qu’il ressort au contraire de sa rédaction qu’elle ne faisait pas référence au placement de l’intéressé en position normale d’activité (qui n’est intervenu que par un arrêté de novembre 2013) mais explicitement à une situation de détachement ;

 

Attendu, en outre, que cette fiche présentait des montants annuels correspondant au « régime réseau » et au « régime services centraux » sans qu’il soit explicitement précisé s’il s’agissait de montants uniformes, moyens ou plafonds ; que ces montants étaient présentés comme « la rémunération brute annuelle afférente au dernier poste occupé par l’agent dans les services de la direction générale des finances publiques », ce qui ne pouvait correspondre à la situation personnelle du bénéficiaire, détaché au Muséum depuis le 1er octobre 2010 et promu inspecteur des finances publiques par arrêté du 16 juillet 2013 ;

 

Attendu que ce document ne pouvait donc, en l’absence de décision d’attribution établie par l’administration d’accueil, constituer une référence suffisante pour justifier la liquidation de la rémunération de l’intéressé ;

 

Attendu que la circonstance selon laquelle le placement d’un agent de l’État en position normale d’activité dans un établissement tel que le Muséum serait peu courant, ne saurait exonérer l’agent comptable de sa responsabilité en matière de contrôle de la validité de la dette ; que l’agent comptable peut d’autant moins s’en prévaloir que le contrôleur budgétaire et comptable ministériel, en annexe de sa lettre de refus du détachement de l’intéressé, avait transmis à l’établissement la circulaire précitée, qui prévoit explicitement l’intervention d’un acte de l’administration d’accueil afin de fixer lesdites indemnités ;

 

Attendu qu’en l’absence d’une nomenclature directement applicable à ce type d’opérations, il appartient au comptable, après avoir examiné la nature et l’objet de la dépense, de se faire produire l’ensemble des justifications lui permettant de procéder au contrôle de sa validité au sens de la réglementation ;

 

Attendu qu’il en résulte que l’agent comptable ne disposait ni d’une décision d’attribution, ni d’un état liquidatif lui permettant de s’assurer de la validité de la dette, notamment de l’exactitude des calculs de liquidation du complément de rémunération versé à son fondé de pouvoir ; qu’il a ainsi engagé sa responsabilité ;

 

Sur l’existence d’un préjudice financier

 

Attendu que l’argument avancé par l’agent comptable pour contester l’existence d’un préjudice financier, qui prend pour référence une situation virtuelle, n’est pas recevable en l’espèce puisque, en l’absence de décision d’attribution établie par l’administration d’accueil, le paiement, privé de tout fondement en droit, était indu et qu’en outre le montant attribué ne pouvait faire l’objet d’un contrôle de l’exactitude de sa liquidation ;

 

Attendu qu’en conséquence, le manquement a bien causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée, au détriment du Muséum national d’histoire naturelle ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer débiteur du Muséum national d’histoire naturelle Monsieur Z pour la somme de 17 902,70 au titre de l’exercice 2014 ;

 

Sur la détermination du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité des comptables

 

Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics », soit respectivement, à compter du 24 octobre 2016, pour Monsieur X, et du 21 octobre 2016, pour Messieurs Y et Z, dates de réception du réquisitoire par chacun des différents comptables ;

 

Sur l’inexistence d’un plan de contrôle sélectif

 

Attendu qu’aucun des paiements mis à la charge d’un comptable, en l’espèce, n’entrait dans le champ d’un plan de contrôle sélectif de la dépense ; 

 

Par ces motifs,

 

 

DÉCIDE :

 

 

 

En ce qui concerne Monsieur X

 

Au titre de l’exercice 2012 (charge n° 1) :

 

Article 1er. – Monsieur X est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2012, pour la somme de 11 023,56 augmentée des intérêts de droit à compter du 24 octobre 2016, date de réception du réquisitoire.

 

 

Au titre de l’exercice 2012 (charge n° 2) :

 

Article 2. – Monsieur X est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2012, pour la somme de 9 568 augmentée des intérêts de droit à compter du 24 octobre 2016.

 

Au titre de l’exercice 2012 (charge n° 3) :

 

Article 3. – Monsieur X est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2012, pour la somme de 3 139,50 augmentée des intérêts de droit à compter du 24 octobre 2016.

 

Au titre de l’exercice 2010 (charge n° 5) :

 

Article 4. – Monsieur X est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2010, pour la somme de 37 716 , augmentée des intérêts de droit à compter du 24 octobre 2016.  Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

Au titre de l’exercice 2011 (charge n° 5) :

 

Article 5. – Monsieur X est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2011, pour la somme de 37 716 , augmentée des intérêts de droit à compter du 24 octobre 2016.  Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

Au titre de l’exercice 2012 (charge n° 5) :

 

Article 6. – Monsieur X est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2012, pour la somme de 10 850 augmentée des intérêts de droit à compter du 24 octobre 2016. Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

En ce qui concerne Monsieur Y

 

Au titre de l’exercice 2013 (charge n° 4) :

 

Article 7. – Monsieur Y est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2013, pour la somme de 6 072,76 , augmentée des intérêts de droit à compter du 21 octobre 2016, date de réception du réquisitoire. Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

Au titre de l’exercice 2012 (charge n° 5) :

 

Article 8. – Monsieur Y est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2012, pour la somme de 15 190 , augmentée des intérêts de droit à compter du 21 octobre 2016.  Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

Au titre de l’exercice 2013 (charge n° 5) :

 

Article 9. – Monsieur Y est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2013, pour la somme de 6 510 , augmentée des intérêts de droit à compter du 21 octobre 2016.  Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

En ce qui concerne Monsieur Z

 

Au titre de l’exercice 2014 (charge n° 6) :

 

Article 10. – Monsieur Z est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2014, pour la somme de 9 100 , augmentée des intérêts de droit à compter du 21 octobre 2016, date de réception du réquisitoire.  Les paiements n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

Au titre de l’exercice 2014 (charge n° 7) :

 

Article 11. – Monsieur Z est constitué débiteur du Muséum national d’histoire naturelle au titre de l’exercice 2014, pour la somme de 17 902,70 , augmentée des intérêts de droit à compter du 21 octobre 2016. Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

Article 12. – Monsieur A est déchargé de sa gestion pour la période du 5 septembre 2013 au 31 décembre 2013.

 

Article 13. – La décharge de Monsieur X, Monsieur Y et Monsieur Z ne pourra être donnée qu’après apurement des débets fixés ci-dessus.

 

 

Fait et jugé par Madame Annie PODEUR, présidente de section, présidente de la formation ; Monsieur Emmanuel GLIMET, Monsieur Jacques BASSET, Madame Michèle COUDURIER, Madame Mireille RIOU-CANALS, conseillers maîtres.

 

En présence de Monsieur Aurélien LEFEBVRE, greffier de séance.

 

 

 

 

 

 

 

 

Aurélien LEFEBVRE

 

 

 

 

 

Annie PODEUR

 

 

 

 

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

 

Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.

 

 

 

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