S2018-0513 | 1 / 5 |
PREMIERE CHAMBRE ------- Première section ------- Arrêt n° S 2018-0513
Audience publique du 29 janvier 2018
Prononcé du 8 mars 2018
| CONTROLEUR BUDGETAIRE ET COMPTABLE MINISTERIEL PLACE AUPRES DES MINISTERES ECONOMIQUES ET FINANCIERS
Exercices 2010 et 2011
Rapport n° R-2017-1699-1
|
République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire en date du 24 mars 2016, par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi ladite Cour en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de MM. X et Y, contrôleurs budgétaires et comptables ministériels placés auprès des ministères économiques et financiers, au titre d’opérations relatives aux exercices 2010 et 2011, notifié le 7 avril 2016 aux comptables concernés ;
Vu les comptes rendus par M. X, au 1er novembre 2011, et M. Y, du 2 novembre 2011 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu l’arrêt de la Cour des comptes n° 62773 du 24 janvier 2012 ;
Vu la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ;
Vu le code civil, notamment son article 1134 dans sa rédaction alors en vigueur ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code des marchés publics, alors en vigueur ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
Vu la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, notamment son article 37 ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, alors en vigueur ;
Vu le décret n° 2004-1085 du 14 octobre 2004 relatif à la délégation de gestion dans les services de l'Etat ;
Vu le décret n° 2004-1144 du 26 octobre 2004 relatif à l’exécution des marchés publics par carte d’achat ;
Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement ;
Vu le décret n° 2005-1429 du 18 novembre 2005 relatif aux missions, à l’organisation et aux emplois de direction des services de contrôle budgétaire et comptable ministériel, dans sa rédaction alors en vigueur ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifiée, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 ;
Vu les arrêtés des 18 décembre 2007, 17 février 2009, 5 mai 2010 et 15 février 2011 relatifs aux assignations comptables de dépenses et de recettes sur le contrôleur budgétaire et comptable des ministères économiques et financiers ;
Vu l’arrêté du 8 janvier 2008 confiant le recouvrement des ordres de recettes assignés sur divers contrôleurs budgétaires et comptables ministériels à d’autres comptables publics ;
Vu l’arrêté du 19 avril 2010 relatif à la fixation du cautionnement des contrôleurs budgétaires et comptables ministériels, des comptables directs du Trésor, des huissiers du Trésor public, du comptable de la direction des grandes entreprises, de l’agent comptable des impôts de Paris, des comptables des services des impôts des entreprises et des conservateurs des hypothèques ;
Vu les instructions codificatrices n° 03-060-B du 17 novembre 2003, n° 10-014-B du 2 avril 2010 et n° 11-017-B du 22 août 2011 relatives à la nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’État ;
Vu l’instruction n° 05-025-M0-M9 du 21 avril 2005 portant diffusion et modalités d'application du décret n° 2004-1144 du 26 octobre 2004, relatif à l'exécution des marchés publics par carte d'achat ;
Vu les courriers adressés aux comptables le 28 juillet 2016, les informant de la nomination d’un nouveau rapporteur ;
Vu les réponses et les pièces produites le 16 juin 2016 par le comptable en fonction, ainsi que les courriers des 24 et 28 juin 2016 par lesquels MM. X et Y précisent que ces réponses ont été élaborées avec leurs accords et qu’ils ne souhaitent rien retrancher ni y rajouter ; les pièces complémentaires produites les 18 octobre 2016, le 21 décembre 2016 et le 5 janvier 2017 par le comptable en fonction ;
Vu les documents complémentaires remis lors de l’audience par MM. X et Y ;
Vu le rapport n° R 2017-1699-1 de M. Vincent FELLER, conseiller maître, magistrat chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du Procureur général n° 030 du 19 janvier 2018 ;
Entendu lors de l’audience publique du 29 janvier 2018, M. Vincent FELLER, conseiller maître, en son rapport, M. Bertrand DIRINGER, avocat général, en les conclusions du ministère public, MM. X et Y, comptables, informés de l’audience, étant présents et ayant eu la parole en dernier ;
Entendu en délibéré M. Daniel-Georges COURTOIS, conseiller maître, en ses observations ;
Sur la charge n° 1 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 3 048 980,34 €, au titre de l’exercice 2011, pour n’avoir pas justifié des écritures maintenues au bilan de l’État depuis plusieurs années au compte 267-128 « Créances rattachées à des participations – non opérateurs bénéficiaires d’autres prêts et avances » ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’en vertu du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, (…) de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, (…) de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent » et que leur responsabilité personnelle et pécuniaire « se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée (…) » ;
Attendu que les premier et troisième alinéas du III du même article prévoient : « La responsabilité pécuniaire des comptables publics s’étend à toutes les opérations du poste comptable qu’ils dirigent depuis la date de leur installation jusqu’à la date de cessation des fonctions. (…) Elle ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de leurs prédécesseurs que pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable entrant, dans un délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII ci-après » ;
Attendu que l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, alors applicable, prévoyait : « Les comptables publics sont seuls chargés : De la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs, des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou autre titre dont ils assurent la conservation ainsi que de l'encaissement des droits au comptant et des recettes de toute nature que les organismes publics sont habilités à recevoir ; (…) De la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux organismes publics ; (…)
De la conservation des pièces justificatives des opérations et des documents de comptabilité ; De la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. » ;
Sur les faits
Attendu que le compte 267-128 « Créances rattachées à des participations – non opérateurs bénéficiaires d’autres prêts et avances » présentait une créance de 3 048 980,34 € au 31 décembre 2011 qui n’avait pas été justifiée par la production d’une convention autorisant son versement et précisant les modalités de son remboursement ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. X rappelle que cette créance fait partie des opérations de reprise de l’ex-Paierie générale du Trésor (PGT) ; qu’il souligne que la reprise des soldes de l’ex-PGT collectivement par les différents contrôleurs budgétaires et comptables ministériels (CBCM) constitue une situation exceptionnelle qui a déjà été traitée par le juge des comptes dans l’arrêt du 24 janvier 2012 ; qu’il expose qu’il n’avait ni la possibilité de s’opposer au transfert des opérations, ni le moyen de rejeter les opérations non justifiées sur un comptable qui n’existait plus ; que les comptables successeurs n’avaient pas la faculté d’émettre des réserves concernant des créances anciennes et inconnues ; qu’en outre cette situation constitue un seul et même motif qui ne saurait être reproché à tous les comptables successifs et donner lieu à des charges de nature identique et répétées pour une cause unique, sauf à méconnaître le principe du non bis in idem ; que, plus généralement, M. X soutient qu’il conviendrait de tenir compte à décharge des circonstances de l’espèce, eu égard au caractère atypique du dossier ;
Attendu que M. X soutient qu’il n’est établi aucun lien entre le manquement présumé et le préjudice ; qu’il ajoute que du fait de la dépréciation des créances au compte 2011 certifié par la Cour en 2012, il ne saurait en tout état de cause y avoir de préjudice ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les opérations concernées soient les mêmes que celles ayant entraîné la constitution du débet prononcé par l’arrêt n° 62773 susvisé, et qui n’auraient pas été apurées ;
Attendu que le comptable n’apporte pas d’élément permettant de justifier la somme de 3 048 980,34 € comptabilisée au compte 267-128 ; qu’en l’absence de contrat permettant à l’Etat de faire valoir ses droits à l’égard des tiers, cette situation constitue un manquant en monnaie ou en valeurs ; que l’apparition ou la persistance d’un tel manquant dans le compte engage la responsabilité du comptable ;
Attendu qu’il résulte des dispositions législatives précitées que les opérations prises en charge sans réserve par un comptable relèvent de sa responsabilité ; qu’il ne peut être dérogé à cette règle au motif de l’ampleur de l’opération comptable d’éclatement des responsabilités de la PGT, de la Recette générale des finances (RGF) et de l’Agence comptable centrale du Trésor (ACCT) entre les CBCM et le comptable centralisateur des comptes de l’État ; qu’il est constant que M. X n’a pas émis de réserve à cet égard sur la gestion de son prédécesseur, alors qu’il en avait la faculté ; que l’ancienneté et le caractère douteux de ces créances, loin de s’opposer à des réserves, paraissaient au contraire les justifier tout particulièrement ;
Attendu que la possibilité d’apprécier les circonstances de l’espèce n’est ouverte au juge que postérieurement au constat d’un manquement, et seulement lorsque ce manquement n’a pas causé préjudice ;
Attendu qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2011 au titre de la charge n° 1, à raison d’un manquant en monnaie ou en valeurs ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Attendu que le manquement du comptable est constitué par l’apparition ou la persistance du manquant en monnaie ou en valeurs dans ses comptes ; qu’un tel manquant est constitutif par principe d’un préjudice financier ; que le lien de causalité entre manquement et préjudice est ainsi établi ; que la dépréciation comptable invoquée par M. X, conséquence directe du constat que la valeur de l’actif a diminué, qui n’a pas eu pour effet d’apurer l’écriture, ne fait que confirmer l’existence du préjudice ; qu’ainsi le manquement du comptable a causé un préjudice pour le Trésor, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ;
Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné (…), le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il y a lieu de constituer M. X débiteur de l’État pour la somme de 3 048 980,34 € au titre de sa gestion 2011 terminée le 1er novembre ;
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, « les débets portent intérêts au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 11 avril 2016, date de réception du réquisitoire par M. X ;
Sur la charge n° 2 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 13 971 826,18 €, au titre de l’exercice 2011, pour n’avoir pas justifié une écriture maintenue au bilan de l’État depuis plusieurs années au compte 274-58 « Autres prêts et avances à des organismes divers » ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’en vertu du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, (…) de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, (…) de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent »
et que leur responsabilité personnelle et pécuniaire « se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée (…) » ;
Attendu que les premier et troisième alinéas du III du même article prévoient : « La responsabilité pécuniaire des comptables publics s’étend à toutes les opérations du poste comptable qu’ils dirigent depuis la date de leur installation jusqu’à la date de cessation des fonctions. (…) Elle ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de leurs prédécesseurs que pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable entrant, dans un délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII ci-après » ;
Attendu que l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, alors applicable, prévoyait : « Les comptables publics sont seuls chargés : De la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs, des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou autre titre dont ils assurent la conservation ainsi que de l'encaissement des droits au comptant et des recettes de toute nature que les organismes publics sont habilités à recevoir ; (…) De la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux organismes publics ; (…) De la conservation des pièces justificatives des opérations et des documents de comptabilité ; De la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. » ;
Sur les faits
Attendu que le compte 274-58 « Autres prêts et avances à des organismes divers » présentait une écriture de 13 971 826,18 € qui n’avait pas été justifiée par la production d’une convention ou d’un document ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. X rappelle que cette créance fait partie des opérations de reprise de l’ex-Paierie générale du Trésor (PGT) ; qu’il souligne que la reprise des soldes de l’ex-PGT collectivement par les différents contrôleurs budgétaires et comptables ministériels (CBCM) constitue une situation exceptionnelle qui a déjà été traitée par le juge des comptes dans l’arrêt du 24 janvier 2012 susvisé lors du jugement des comptes rendus par le CBCM au titre de l’exercice 2007 ; qu’il expose qu’il n’avait ni la possibilité de s’opposer au transfert des opérations, ni le moyen de rejeter les opérations non justifiées sur un comptable qui n’existait plus ; que les comptables successeurs n’avaient pas la faculté d’émettre des réserves concernant des créances anciennes et inconnues ; qu’en outre cette situation constitue un seul et même motif qui ne saurait être reproché à tous les comptables successifs et donner lieu à des charges de nature identique et répétées pour une cause unique, sauf à méconnaître le principe du non bis in idem ; que, plus généralement, M. X soutient qu’il conviendrait de tenir compte à décharge des circonstances de l’espèce, eu égard au caractère atypique du dossier ;
Attendu que M. X soutient qu’il n’est établi aucun lien entre le manquement présumé et le préjudice ; qu’il ajoute que du fait de la dépréciation des créances au compte 2011 certifié par la Cour en 2012, il ne saurait en tout état de cause y avoir de préjudice ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les opérations concernées soient les mêmes que celles ayant entraîné la constitution du débet prononcé par l’arrêt n° 62773 susvisé, et qui n’auraient pas été apurées ;
Attendu que le comptable n’apporte pas d’élément permettant de justifier la somme de 3 048 980,34 € comptabilisée au compte 267-128 ; qu’en l’absence de contrat permettant à l’Etat de faire valoir ses droits à l’égard des tiers, cette situation constitue un manquant en monnaie ou en valeurs ; que l’apparition ou la persistance d’un tel manquant dans le compte engage la responsabilité du comptable ;
Attendu qu’il résulte des dispositions législatives précitées que les opérations prises en charge sans réserve par un comptable relèvent de son entière responsabilité ; qu’il ne peut être dérogé à cette règle au motif de l’ampleur de l’opération comptable d’éclatement des responsabilités de la PGT, de la Recette générale des finances (RGF) et de l’Agence comptable centrale du Trésor (ACCT) entre les CBCM et le comptable centralisateur des comptes de l’État ; qu’il est constant que M. X n’a pas émis de réserve à cet égard sur la gestion de son prédécesseur, alors qu’il en avait la faculté ; que l’ancienneté et le caractère douteux de ces créances, loin de s’opposer à des réserves, paraissaient au contraire les justifier tout particulièrement ;
Attendu que la possibilité d’apprécier les circonstances de l’espèce n’est ouverte au juge que postérieurement au constat d’un manquement, et seulement lorsque ce manquement n’a pas causé préjudice ;
Attendu qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2011 au titre de la charge n° 2, à raison d’un manquant en monnaie ou en valeurs ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Attendu que le manquement du comptable est constitué par l’apparition ou la persistance du manquant en monnaie ou en valeurs dans ses comptes ; qu’un tel manquant est constitutif par principe d’un préjudice financier ; que le lien de causalité entre manquement et préjudice est ainsi établi ; que la dépréciation comptable invoquée par M. X, conséquence directe du constat que la valeur de l’actif a diminué, qui n’a pas eu pour effet d’apurer l’écriture, ne fait que confirmer l’existence du préjudice ; qu’ainsi le manquement du comptable a causé un préjudice pour le Trésor, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ;
Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné (…), le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il y a lieu de constituer M. X débiteur de l’État pour la somme de 13 971 826,18 € au titre de sa gestion 2011 terminée le 1er novembre ;
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, « les débets portent intérêts au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 11 avril 2016, date de réception du réquisitoire par M. X ;
Sur la charge n° 3 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 9 291 005,57 €, au titre de l’exercice 2011, pour n’avoir pas justifié des écritures maintenues au bilan de l’État de plusieurs années au compte 274-7 « Prêts et avances remboursables sous condition » ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’en vertu du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, (…) de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, (…) de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent » et que leur responsabilité personnelle et pécuniaire « se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée (…) » ;
Attendu que les premier et troisième alinéas du III du même article prévoient : « La responsabilité pécuniaire des comptables publics s’étend à toutes les opérations du poste comptable qu’ils dirigent depuis la date de leur installation jusqu’à la date de cessation des fonctions. (…) Elle ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de leurs prédécesseurs que pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable entrant, dans un délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII ci-après » ;
Attendu que l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, alors applicable, prévoyait : « Les comptables publics sont seuls chargés : De la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs, des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou autre titre dont ils assurent la conservation ainsi que de l'encaissement des droits au comptant et des recettes de toute nature que les organismes publics sont habilités à recevoir ; (…) De la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux organismes publics ; (…) De la conservation des pièces justificatives des opérations et des documents de comptabilité ; De la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. » ;
Sur les faits
Attendu que le compte 274-7 « Prêts et avances remboursables sous condition » présentait des créances de 9 291 005,57 € au 31 décembre 2011 qui n’avaient pas été individuellement justifiées par la production d’une convention ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. X produit six conventions de prêts et leurs avenants, établis de 1969 à 1983, obtenus auprès d’une banque et la direction générale du Trésor pour chacune des six créances, dont les montants des restes à recouvrer s’élèvent respectivement à 606 389,26 €, 391 184,18 €, 152 449,02 €, 18 871,18 €, 7 759 654,98 €, 164 273,23 € ; que le montant des soldes inscrit dans les comptes du CBCM a été confirmé par la banque concernée le 1er février 2016 ;
Attendu que pour une créance de 198 183,72 € le comptable produit une lettre d’un établissement de crédit du 22 juin 1983 mentionnant l’existence de la créance, et l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société bénéficiaire ;
Attendu que M. X rappelle que cette créance fait partie des opérations de reprise de l’ex-Paierie générale du Trésor (PGT) ; qu’il souligne que la reprise des soldes de l’ex-PGT collectivement par les différents contrôleurs budgétaires et comptables ministériels (CBCM) constitue une situation exceptionnelle qui a déjà été traitée par le juge des comptes dans l’arrêt du 24 janvier 2012 susvisé lors du jugement des comptes rendus par le CBCM au titre de l’exercice 2007 ; qu’il expose qu’il n’avait ni la possibilité de s’opposer au transfert des opérations, ni le moyen de rejeter les opérations non justifiées sur un comptable qui n’existait plus ; que les comptables successeurs n’avaient pas la faculté d’émettre des réserves concernant des créances anciennes et inconnues ; qu’en outre cette situation constitue un seul et même motif qui ne saurait être reproché à tous les comptables successifs et donner lieu à des charges de nature identique et répétées pour une cause unique, sauf à méconnaître le principe du non bis in idem ;
Attendu qu’ayant pu satisfaire à l’essentiel des demandes de justification, il sollicite l’indulgence de la Cour pour la partie non justifiée, d’autant que la pièce produite constituerait un commencement de preuve de l’existence de la convention manquante ; que, plus généralement, M. X soutient qu’il conviendrait de tenir compte à décharge des circonstances de l’espèce, eu égard au caractère atypique du dossier ;
Attendu que M. X soutient qu’il n’est établi aucun lien entre le manquement présumé et le préjudice ;
Sur l’application au cas d’espèce
Sur les justifications à hauteur de 9 092 821,85 €
Attendu que le comptable a produit six conventions de prêts qui justifient une partie des écritures pour un montant total de 9 092 821,85 € ; qu’il n’y a donc pas lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2011 au titre de la charge n° 3, à concurrence de ce montant ;
Sur les 198 183,72 € restant à justifier
Attendu que M. X ne justifie pas par une convention le prêt octroyé à une société, d’un montant de 198 183,72 € ;
Attendu qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les opérations concernées soient les mêmes que celles ayant entraîné la constitution du débet prononcé par l’arrêt n° 62773 susvisé, et qui n’auraient pas été apurées ;
Attendu que si figure au dossier le document du 22 juin 1983 précité, qui évoque une créance de l’Etat à déclarer dans le cadre d’une procédure collective intéressant le bénéficiaire du prêt, la convention elle-même n’est pas produite ; que dès lors le comptable n’apporte pas d’élément permettant de justifier la somme de 198 183,72 € comptabilisée au compte 274-7 ; qu’en l’absence de contrat permettant à l’Etat de faire valoir ses droits à l’égard des tiers, cette situation constitue un manquant en monnaie ou en valeurs ; que l’apparition ou la persistance d’un tel manquant dans le compte engage la responsabilité du comptable ;
Attendu qu’il résulte des dispositions législatives précitées que les opérations prises en charge sans réserve par un comptable relèvent de sa responsabilité ; qu’il ne peut être dérogé à cette règle au motif de l’ampleur de l’opération comptable d’éclatement des responsabilités de la PGT, de la Recette générale des finances (RGF) et de l’Agence comptable centrale du Trésor (ACCT) entre les CBCM et le comptable centralisateur des comptes de l’État ; qu’il est constant que M. X n’a pas émis de réserve à cet égard sur la gestion de son prédécesseur, alors qu’il en avait la faculté ; que l’ancienneté de cette créance, loin de s’opposer à une réserve, paraissait au contraire la justifier tout particulièrement ;
Attendu que la possibilité d’apprécier les circonstances de l’espèce n’est ouverte au juge que postérieurement au constat d’un manquement, et seulement lorsque ce manquement n’a pas causé préjudice ; qu’il revient notamment à la Cour de statuer en droit sur toutes les opérations dont elle est saisie par le procureur général, même lorsque la majorité de celles-ci ont pu trouver justification ;
Attendu qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2011 au titre de la charge n° 3, à hauteur de l’opération précitée de 198 183,72 €, à raison d’un manquant en monnaie ou en valeurs ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Attendu que le manquement du comptable est constitué par l’apparition ou la persistance du manquant en monnaie ou en valeurs dans ses comptes ; qu’un tel manquant est constitutif par principe d’un préjudice financier ; que le lien de causalité entre manquement et préjudice est ainsi établi ; qu’ainsi le manquement du comptable a causé un préjudice pour le Trésor, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ;
Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné (…), le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il y a lieu de constituer M. X débiteur de l’État pour la somme de 198 183,72 € au titre de sa gestion 2011 terminée le 1er novembre ;
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, « les débets portent intérêts au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 11 avril 2016, date de réception du réquisitoire par M. X ;
Sur la charge n° 4 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 4 517 299,63 €, au titre de l’exercice 2011, pour n’avoir pas justifié une écriture maintenue au bilan de l’État depuis plusieurs années au compte 274-8 « Autres prêts et avances » ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’en vertu du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, (…) de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, (…) de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent » et que leur responsabilité personnelle et pécuniaire « se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée (…) » ;
Attendu que les premier et troisième alinéas du III du même article prévoient : « La responsabilité pécuniaire des comptables publics s’étend à toutes les opérations du poste comptable qu’ils dirigent depuis la date de leur installation jusqu’à la date de cessation des fonctions. (…) Elle ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de leurs prédécesseurs que pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable entrant, dans un délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII ci-après » ;
Attendu que l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, alors applicable, prévoyait : « Les comptables publics sont seuls chargés : De la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs, des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou autre titre dont ils assurent la conservation ainsi que de l'encaissement des droits au comptant et des recettes de toute nature que les organismes publics sont habilités à recevoir ; (…) De la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux organismes publics ; (…) De la conservation des pièces justificatives des opérations et des documents de comptabilité ; De la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. » ;
Sur les faits
Attendu que le compte 274-8 « Autres prêts et avances » présentait une écriture de 4 517 299,63 € qui n’avait pas été individuellement justifiée par la production d’une convention ou d’un document ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. X précise que l’écriture de 4 517 299,63 € ne serait pas la traduction comptable d’une ou plusieurs conventions, mais résulterait de l’opération technique issue de la disparition, avec la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 susvisée, des anciens comptes de classe 8 de suivi des prêts ; qu’il considère dès lors qu’aucune convention n’était à produire ;
Attendu que M. X rappelle que cette créance fait partie des opérations de reprise de l’ex-Paierie générale du Trésor (PGT) ; qu’il souligne que la reprise des soldes de l’ex-PGT collectivement par les différents contrôleurs budgétaires et comptables ministériels (CBCM) constitue une situation exceptionnelle qui a déjà été traitée par le juge des comptes dans l’arrêt du 24 janvier 2012 susvisé lors du jugement des comptes rendus par le CBCM au titre de l’exercice 2007 ; qu’il expose qu’il n’avait ni la possibilité de s’opposer au transfert des opérations, ni le moyen de rejeter les opérations non justifiées sur un comptable qui n’existait plus ; que les comptables successeurs n’avaient pas la faculté d’émettre des réserves concernant des créances anciennes et inconnues ; qu’en outre cette situation constitue un seul et même motif qui ne saurait être reproché à tous les comptables successifs et donner lieu à des charges de nature identique et répétées pour une cause unique, sauf à méconnaître le principe du non bis in idem ; que, plus généralement, M. X soutient qu’il conviendrait de tenir compte à décharge des circonstances de l’espèce, eu égard au caractère atypique du dossier ; qu’en tout état de cause, il aurait convenu d’attribuer la responsabilité de ces opérations techniques à la direction générale de la comptabilité publique de l’époque, et non au comptable ;
Attendu que M. X soutient qu’il n’est établi aucun lien entre le manquement présumé et le préjudice ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les opérations concernées soient les mêmes que celles ayant entraîné la constitution du débet prononcé par l’arrêt n° 62773 susvisé, et qui n’auraient pas été apurées ;
Attendu qu’un solde débiteur figurant sur le compte 274-8 est réputé traduire l’existence d’un prêt ou d’une avance ; qu’il est constant que M. X ne justifie pas par la production d’une convention de prêt ou d’avance le montant de 4 517 299,63 € ; que par ailleurs, il ne détaille ni ne documente sa réponse relative à une opération technique liée à la disparition des comptes de classe 8 ; qu’ainsi, le solde de 4 517 299,63 € se trouve toujours injustifié au moment où la Cour juge ; que cette situation constitue un manquant en monnaie ou en valeurs ; que l’apparition ou la persistance d’un tel manquant dans le compte engage la responsabilité du comptable ;
Attendu qu’il résulte des dispositions législatives précitées que les opérations prises en charge sans réserve par un comptable relèvent de sa responsabilité ; qu’il ne peut être dérogé à cette règle au motif de l’ampleur de l’opération comptable d’éclatement des responsabilités de la PGT, de la Recette générale des finances (RGF) et de l’Agence comptable centrale du Trésor (ACCT) entre les CBCM et le comptable centralisateur des comptes de l’État ; qu’il est constant que M. X n’a pas émis de réserve à cet égard sur la gestion de son prédécesseur, alors qu’il en avait la faculté ; que l’ancienneté et le caractère douteux de ces créances, loin de s’opposer à des réserves, paraissaient au contraire les justifier tout particulièrement ;
Attendu que la possibilité d’apprécier les circonstances de l’espèce n’est ouverte au juge que postérieurement au constat d’un manquement, et seulement lorsque ce manquement n’a pas causé préjudice ;
Attendu qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2011 au titre de la charge n° 4, à raison d’un manquant en monnaie ou en valeurs ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Attendu que le manquement du comptable est constitué par l’apparition ou la persistance du manquant en monnaie ou en valeurs dans ses comptes ; qu’un tel manquant est constitutif par principe d’un préjudice financier ; que le lien de causalité entre manquement et préjudice est ainsi établi ; qu’ainsi le manquement du comptable a causé un préjudice pour le Trésor, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ;
Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné (…), le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il y a lieu de constituer M. X débiteur de l’État pour la somme de 4 517 299,63 € au titre de sa gestion 2011 terminée au 1er novembre ;
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, « les débets portent intérêts au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 11 avril 2016, date de réception du réquisitoire par M. X ;
Sur les charges n° 2, n° 3 et n° 4 soulevées à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que les charges n° 2, n° 3 et n° 4 portent sur une même catégorie de manquements, et qu’elles concernent un seul comptable et un seul exercice ; qu’il y a lieu de joindre les sommes concernées en un débet unique de 18 687 309,53 € (13 971 826,18 € + 198 183,72 € + 4 517 299,63 €), assorti des intérêts de droit ;
Sur la charge n° 5 soulevée à l’encontre de MM. X et Y au titre des exercices 2010 et 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de MM. X et Y pouvait être mise en jeu à hauteur de 2 550 762,35 €, au titre des exercices 2010 et 2011, en ce que n’auraient pas été recouvrés au 31 décembre 2011 dix titres de perception qu’ils avaient pris en charge et dont le recouvrement aurait été confié au comptable du département du domicile du débiteur ; que la responsabilité du comptable du fait du recouvrement des recettes s’appréciant au regard de l’étendue de ses diligences qui doivent être adéquates, complètes et rapides, l’insuffisance des diligences en vue du recouvrement des dix titres pouvait être présomptive d’irrégularités ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’en application de l’article L. 111-1 du code des juridictions financières, « La Cour des comptes juge les comptes des comptables publics, sous réserve de la compétence que les dispositions du présent code attribuent, en premier ressort, aux chambres régionales et territoriales des comptes (…) » ;
Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes et des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de recettes, dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique susvisé ; que leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu'une recette n'a pas été recouvrée ; que la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics en matière de recouvrement des recettes s’apprécie au regard de leurs diligences, celles-ci devant être adéquates, complètes et rapides ;
Attendu que selon le III du même texte, « III - La responsabilité pécuniaire des comptables publics s'étend à toutes les opérations du poste comptable qu'ils dirigent depuis la date de leur installation jusqu'à la date de cessation des fonctions / Cette responsabilité s'étend aux opérations des comptables publics placés sous leur autorité et à celles des régisseurs et dans la limite des contrôles qu'ils sont tenus d'exercer, aux opérations des comptables publics et des correspondants centralisées dans leur comptabilité ainsi qu'aux actes des comptables de fait, s'ils ont eu connaissance de ces actes et ne les ont pas signalés à leurs supérieurs hiérarchiques » ;
Attendu que selon l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, alors applicable, « Les comptables publics sont seuls chargés : De la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs, des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou autre titre dont ils assurent la conservation ainsi que de l'encaissement des droits au comptant et des recettes de toute nature que les organismes publics sont habilités à recevoir (…) » ; qu’en application de l’article 12 du même texte « Les comptables sont tenus d'exercer : A. - En matière de recettes, le contrôle : / Dans les conditions prévues pour chaque catégorie d'organisme public par les lois et règlements, de l'autorisation de percevoir la recette ; / Dans la limite des éléments dont ils disposent, de la mise en recouvrement des créances de l'organisme public et de la régularité des réductions et des annulations des ordres de recettes. » ; que selon l’article 86 du même texte, « Les ordres de recettes sont pris en charge : 1° Lorsqu'il s'agit de recettes du budget général ou de comptes spéciaux non dotés d'un comptable spécial, par le comptable principal du domicile ou de la résidence du débiteur. Toutefois lorsque l'ordre de recettes peut être recouvré par voie de retenue sur une créance du débiteur, il doit être assigné sur la caisse du comptable payeur assignataire de la dépense correspondante. Le ministre du budget peut confier à un comptable, autre que ceux mentionnés à l'alinéa précédent, le recouvrement de certaines catégories de créances qui figurent sur une liste établie par arrêté du même ministre » ;
Attendu que selon l’article 5, alors en vigueur, du décret du 18 novembre 2005 susvisé, le contrôleur budgétaire et comptable ministériel « est comptable assignataire des ordres de dépenses et de recettes de l'ordonnateur principal dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé du budget » ;
Attendu que selon l’arrêté du 8 janvier 2008 susvisé, « les ordres de recettes assignés dans les conditions fixées par les arrêtés susvisés sont recouvrés par les comptables publics compétents du lieu de domicile des débiteurs » ;
Sur les faits
Attendu que n’ont pas été recouvrés dix titres de perception, n° 2569 de 2009 d’un montant de 458 400 €, n° 594 de 2009 d’un montant de 125 346,60 €, n° 699 de 2009 d’un montant de 10 000 €, n° 809 de 2009 d’un montant de 42 598,90 €, n° 3114 de 2009 d’un montant de 10 000 €, n° 274 de 2010 d’un montant de 9 002,85 €, n° 5726 de 2008 d’un montant de 8 414 €, n° 9228 de 2007 d’un montant de 1 800 000 €, n° 2040 de 2007 d’un montant de 57 000 € et n° 991 de 2007 d’un montant de 30 000 € ;
Sur les éléments apportés à décharge par les comptables
Attendu que MM. X et Y apportent des éléments, obtenus auprès des comptables en charge du recouvrement, en ce qui concerne les titres n° 594 de 2009, n° 699, n° 809, n° 3114 de 2009 et n° 274 de 2010, n° 9228 de 2007, n° 991 de 2007 et n° 2569 de 2009 ;
Attendu que MM. X et Y soulignent que ces dix titres de perception ont été pris en charge comptablement dans les écritures du CBCM des ministères économique et financier dans le cadre du dispositif dit « CC/CR » ; que les comptables en charge du recouvrement sont les comptables du domicile de chaque débiteur ; que le CBCM ne disposant pas de l’application informatique « REP » pour ces titres pris en charge dans ses écritures mais dont le recouvrement est confié à d’autres comptables, il lui serait difficile de suivre les actions diligentées par ceux-ci ;
Attendu que, selon les comptables, l’appréhension de leur responsabilité par le réquisitoire susvisé, au motif de l’insuffisance supposée ou établie des diligences effectuées par les comptables chargés du recouvrement, suppose soit de sanctionner la défaillance d’un comptable en mettant en jeu la responsabilité du CBCM alors même qu’aucun lien hiérarchique ou de subordination fonctionnelle n’existe entre lui et le comptable chargé du recouvrement ; soit d’estimer que le dispositif mis en place est irrégulier car contraire aux règles édictées par le décret susvisé portant règlement général sur la comptabilité publique, selon lesquelles le comptable qui a pris en charge une opération dans ses écritures est seul responsable de sa correcte et complète exécution ;
Attendu que les comptables précisent que le CBCM ne pouvait en toute hypothèse se soustraire aux instructions expresses données par délégation du ministre, ni aux dispositions d’un arrêté ministériel, même si elles le privaient des moyens d’action propres à la sauvegarde de la responsabilité qui lui était imposée ; que n’étant pas juge de la légalité des actes réglementaires, le CBCM n’a pas eu d’autre choix que de transférer la charge du recouvrement aux comptables du domicile des débiteurs ; qu’au surplus le décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique a validé le principe du dispositif mis en place en le faisant entrer dans le droit normatif ;
Attendu que MM. X et Y concluent que si la Cour devait analyser le dispositif comme irrégulier, ce ne serait pas au CBCM d’en supporter les conséquences devant le juge financier, mais éventuellement aux promoteurs de ce dispositif ;
Attendu que lors de l’audience M. Y soutient qu’il résulte des termes du III de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée que les comptables chargés du recouvrement n’étant aucunement placés sous leur autorité et qu’au demeurant l’arrêté du 8 janvier 2008, limitant les contrôles du CBCM à l’émission et à la prise en charge des titres de recettes, il ne saurait y avoir de lien de causalité entre le non recouvrement de certaines recettes et un quelconque manquement du CBCM ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu qu’en application des dispositions précitées du III de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, la responsabilité des comptables ne peut s’étendre au-delà des opérations du poste comptable qu’ils dirigent, de celles des comptables publics placés sous leur autorité ou des régisseurs, ainsi que de celles effectuées sous leur contrôle par des correspondants ou d’autres comptables publics, en ce cas dans la limite des contrôles prévus par les textes qui définissent l’organisation des postes comptables concernés ;
Attendu qu’il résulte des dispositions précitées du décret du 29 décembre 1962, alors en vigueur, que, sauf dérogation prévue par arrêté du ministre chargé du budget, les comptables assignataires de créances sont également chargés du recouvrement de celles-ci ; qu’en application de l’article 5, alors en vigueur, du décret précité du 18 novembre 2005 et des arrêtés d’assignation susvisés, les CBCM des ministères économiques et financiers étaient assignataires des ordres de recettes émis par les ordonnateurs principaux desdits ministères ; que l’arrêté précité du 8 janvier 2008 a, par dérogation, confié au comptable du lieu de résidence le recouvrement des titres de produits divers assignés sur la caisse du CBCM ; que ce texte ne statue pas explicitement sur la répartition des responsabilités personnelles et pécuniaires entre les comptables en un tel cas ;
Attendu que, quelque appréciation que l’on puisse porter sur la convenance du dispositif mis en place par l’arrêté précité, il résulte des textes législatifs qui précèdent, notamment de l’article L. 111-1 du code des juridictions financières, qu’aucune organisation administrative du recouvrement ne peut avoir pour effet de soustraire à la compétence du juge des comptes l’examen des créances en cause ; qu’il y a lieu pour le juge de déterminer quel est le comptable concerné par une éventuelle mise en jeu de responsabilité personnelle et pécuniaire pour défaut de recouvrement ;
Attendu à cet égard, en premier lieu, que l’arrêté du 8 janvier 2008 précité faisait partie du droit positif au moment des faits ; qu’en application de ce texte les CBCM ont été expressément dessaisis de leur compétence pour recouvrer les créances en cause ; qu’ainsi ces créances, bien que toujours retracées dans les comptes des CBCM, ne constituaient pas pour ces derniers, en ce qui concerne leur recouvrement, des opérations du poste comptable qu’ils dirigeaient ;
Attendu, en second lieu, que les comptables chargés du recouvrement n’étaient pas placés sous l’autorité des CBCM ; que par ailleurs aucun texte ne prévoyait que ces derniers, en l’absence d’un lien hiérarchique, exercent un contrôle sur les opérations de recouvrement confiées à d’autres comptables, afin de s’assurer de leurs diligences ; qu’a fortiori, le contenu de tels contrôles n’était pas précisé ;
Attendu qu’il résulte des deux points précédents qu’en application de la loi du 23 février 1963 précitée, la responsabilité des CBCM à raison de recettes non recouvrées faute de diligences adéquates, complètes et rapides, ne pouvait s’étendre aux créances en cause ;
Attendu, en troisième lieu et en tout état de cause, qu’en raison des dispositions du même arrêté, les CBCM n’auraient pas été en capacité juridique d’effectuer eux-mêmes, auprès des débiteurs ou de tiers, des diligences valides visant à préserver ou à recouvrer les créances concernées ; qu’à supposer que les CBCM aient, de leur propre chef, suivi ou contrôlé l’action des comptables du lieu de résidence, aucune conséquence des résultats de ce suivi ou de ce contrôle n’aurait pu être tirée en termes d’apurement des opérations, faute d’un cadre juridique permettant aux CBCM de donner instruction d’agir aux comptables du lieu de résidence, ou, en cas de manquement de ces derniers, de mettre la somme non recouvrée à leur charge ;
Attendu, en quatrième lieu, que les comptables expressément chargés du recouvrement en application de l’arrêté précité étaient les trésoriers-payeurs généraux, puis les directeurs régionaux ou départementaux des finances publiques ; que les créances en question relevaient ainsi, en ce qui concerne leur recouvrement, des opérations du poste comptable qu’ils dirigeaient ; qu’ils disposaient des moyens juridiques d’agir en vue de ce recouvrement ; qu’au surplus, en leur qualité de comptables principaux, leurs comptes sont de droit soumis à l’examen juridictionnel du juge des comptes ; que les créances en question sont retracées dans les états de restes à recouvrer de l’application « REP » qui viennent à l’appui des comptes des trésoriers-payeurs généraux, puis des directeurs régionaux ou départementaux des finances publiques ; que dès lors, même en l’absence d’un texte qui énoncerait littéralement que la responsabilité personnelle et pécuniaire liée aux actes de recouvrement est celle du comptable du lieu de résidence, il revient nécessairement à la Cour des comptes, à défaut de pouvoir rechercher la responsabilité personnelle et pécuniaire du CBCM à raison de créances non recouvrées qui figurent dans son compte, d’engager celle des comptables qui étaient chargés du recouvrement, à l’occasion de l’examen des états de restes précités ;
Attendu qu’ainsi, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres éléments invoqués à décharge, il convient de dire n’y avoir lieu d’engager la responsabilité de MM. X et Y à raison de la charge n° 5 ;
Sur la charge n° 6 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2010 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur d’un montant d’au moins 71 700,19 €, au titre de l’exercice 2010, pour avoir payé une dépense en l’absence du contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, d’une part, et en l’absence de contrôle de la validité de la créance, portant notamment sur la justification du service fait, d’autre part ; que les numéros de référence de service fait comporteraient en outre des anomalies ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 de la loi de finances du 23 février 1963 susvisée, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu qu’aux termes de l’article 6 du décret du 29 décembre 1962 susvisé « les ordonnateurs ainsi que leurs délégués et suppléants doivent être accrédités auprès des comptables assignataires des recettes et des dépenses dont ils prescrivent l'exécution » ;
Attendu qu’aux termes de l’article 11 du même texte, les comptables publics sont seuls chargés « du paiement des dépenses soit sur ordres émanant des ordonnateurs accrédités, soit au vu des titres présentés par les créanciers, soit de leur propre initiative, ainsi que de la suite à donner aux oppositions et autres significations » ; que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…) et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu que, selon les dispositions de l’article 37 du même décret, « lorsque, à l'occasion de l'exercice du contrôle prévu à l'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l'ordonnateur » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l’accord du ministre intéressé » ;
Attendu que les deux derniers alinéas de l’article 3 du décret du 27 juillet 2005 susvisé disposent que les délégataires de la signature des ministres peuvent « donner délégation aux fonctionnaires de catégorie B et C, aux agents contractuels, chargés de missions d’un niveau équivalent et aux sous-officiers placés sous leur autorité, pour signer, dans les mêmes affaires, toutes pièces justificatives aux dépenses, aux opérations de régularisation, notamment tous documents comptables relatifs à l’engagement, à la liquidation et à l’ordonnancement de la dépense et tous ordres de recettes. La délégation prévue au présent article entre en vigueur le lendemain de la publication au Journal Officiel de la République Française de l’arrêté désignant le ou les titulaires de la délégation et précisant les matières qui en font l’objet. (…) » ;
Attendu que la rubrique 4.14 de l’instruction codificatrice du 2 avril 2010 susvisée prévoyait, en matière de service fait pour des paiements sur factures et paiements sur des marchés autres que les premiers paiements : « Certificat de service fait établi par l’ordonnateur ou son représentant habilité à cet effet » ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que M. X a payé le 22 octobre 2010 une dépense de 71 700,19 € pour une prestation de gardiennage ; que le service fait, valant ordre de payer, a été certifié le 23 août 2010 ; qu’à cette date, d’une part la délégation de la personne signataire n’avait pas été publiée, d’autre part la prestation, à courir tout le mois d’août 2010, n’était alors pas totalement réalisée ; qu’en outre, le numéro de service fait a fait l’objet d’une permutation avec celui d’une autre demande de paiement ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. X souligne que, le paiement ayant été comptabilisé le 22 octobre 2010, l’ordonnateur avait eu le délai nécessaire pour revenir le cas échéant sur son attestation de service fait, s’il y avait lieu ; que le comptable n’étant pas juge de la conformité des actes qui lui sont produits, il doit s’assurer de la certification du service fait par l’ordonnateur mais n’a pas à en apprécier le bien-fondé ; que conformément à l’article 7 du décret du 29 décembre 1962, « les ordonnateurs sont responsables des certifications qu’ils délivrent » ; qu’en outre les habilitations décidées par l’ordonnateur avaient été produites ; que, bien que la liste n’ait pas été publiée au moment des paiements, la vérification de l’habilitation a été faite par le comptable ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu, d’une part, qu’en application des dispositions précitées du décret du 27 juillet 2005, la publication au Journal Officiel des arrêtés déléguant la signature des ministres est une condition nécessaire pour que des agents de catégorie B et C soient habilités à signer des pièces comptables ; que la vérification qu’une telle publication a eu lieu fait partie du contrôle de la qualité de l’ordonnateur et de la certification du service fait, au sens des dispositions précitées du décret du 29 décembre 1962 ;
Attendu que, pour un montant de 71 700,19 €, la validation du service fait a été réalisée le 23 août 2010 par un agent dont la délégation de signature n’était pas encore publiée ; que concernant le montant résiduel de 1 075,50 €, la constatation du service fait a été validée par défaut dans l’application informatique le 23 septembre 2010 ;
Attendu, d’autre part, que le comptable ne conteste pas qu’il a été procédé à la certification du service le 23 août 2010, soit avant que la prestation de gardiennage du mois d’août 2010 ait été entièrement achevée ; que s’il ne revient pas au comptable de vérifier la réalité du service fait attesté par un ordonnateur, ni plus généralement de contrôler la légalité des actes de ce dernier, il doit suspendre le paiement lorsque les mentions sur les pièces fournies sont, comme en l’espèce s’agissant des dates, contradictoires ;
Attendu enfin que la pratique consistant à régler des ordres de payer en permutant des numéros de services faits traduit un risque susceptible de conduire, dans certains cas, à l’engagement de la responsabilité du comptable ; que toutefois, en l’espèce, malgré cette permutation, il ressort des pièces que la décision de service fait visait bien la dépense concernée ; que l’anomalie était ainsi formelle ; que la certification du service fait n’est donc pas entachée d’une irrégularité supplémentaire à ce titre ;
Attendu qu’en payant la dépense en l’absence de publication d’une délégation et en présence d’un certificat de service fait prématuré, le comptable a manqué à ses obligations de contrôle de la qualité de l’ordonnateur et de la validité de la créance ; qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2010 au titre de la charge n° 6 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Attendu que la délégation précitée, bien que non publiée, a été dûment signée par l’autorité compétente ; qu’ainsi son intention de consentir ladite délégation est établie ; que dès lors, il n’y a pas préjudice à raison de ce premier manquement ; que s’agissant d’une prestation récurrente et continue de gardiennage, la réalité du service fait pour le mois d’août 2010, quoique prématurément attestée, n’apparaît pas en cause en l’espèce ; que ce second manquement n’a pas non plus causé préjudice à l’Etat ;
Attendu qu’aux termes des dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable (…) n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ; que le décret du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ;
Attendu que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré pour l’exercice 2011 est fixé à 803 000 € ; qu’il s’ensuit que le montant maximum de la somme non rémissible susceptible d’être mise à la charge de M. X s’élève à 1 204,50 € ;
Attendu qu’il sera fait une exacte appréciation des circonstances de l’espèce en arrêtant cette somme à 1 000 € au titre de l’exercice 2010 de M. X ;
Sur la charge n° 7 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 4 425,20 €, au titre de l’exercice 2011, pour avoir payé une dépense en l’absence de toute pièce justificative ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…) et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu que, selon les dispositions de l’article 37 du décret précité, « lorsque, à l'occasion de l'exercice du contrôle prévu à l'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l'ordonnateur » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l’accord du ministre intéressé » ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que M. X a payé en 2011 une dépense de 4 425,20 € qui n’apparaît pas dans l’outil XéMéLios qui permet la consultation des pièces justificatives des dépenses ; qu’aucune pièce justificative à l’appui de ce paiement n’avait été produite lors de la phase non contentieuse du jugement des comptes ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. X souligne qu’il n’y avait pas lieu de rechercher les pièces justificatives dans l’application XéMéLios ; que ces pièces justifiant la dépense de 4 425,20 € avaient fait l’objet d’un envoi à l’appui de la liasse manuelle dite « 8888 » du troisième trimestre 2011 ; qu’il transmet, en réponse au réquisitoire, une copie de la facture et du devis correspondant, retrouvés par le service prescripteur, le service de la communication du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi (SIRCOM) ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu qu’en l’espèce la liasse manuelle précitée, fournie à l’appui du compte, a été adirée par la juridiction ; qu’il n’est par conséquent pas établi que le comptable ait payé en l’absence des pièces requises ;
Attendu, en conséquence, qu’il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, sur sa gestion 2011 terminée au 1er novembre, au titre de la charge n° 7 ;
Sur la charge n° 8 soulevée à l’encontre de M. Y au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Y pouvait être mise en jeu à hauteur de 62 923,72 €, au titre de l’exercice 2011, pour avoir payé une dépense sur un programme pour lequel il n’était pas comptable assignataire ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…) et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu qu’en application de l’article 1er du décret du 14 octobre 2004 susvisé « La délégation de gestion est l'acte par lequel un ou plusieurs services de l'Etat confient à un autre service de l'Etat, pour une durée limitée éventuellement reconductible, la réalisation, pour leur compte, d'actes juridiques, de prestations ou d'activités déterminées concourant à l'accomplissement de leurs missions » ; qu’en vertu de l’article 2 du même texte, « La délégation de gestion fait l'objet d'un document écrit qui précise la mission confiée au délégataire, les modalités d'exécution financière de la mission ainsi que les obligations respectives des services intéressés. / Ce document fixe les conditions dans lesquelles il est rendu compte de l'exécution de la délégation. / La délégation de gestion est publiée. » ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que M. Y a payé le 7 décembre 2011 une dépense de 62 923,72 € imputée sur le programme 102 « Accès et retour à l’emploi » de la mission « Travail et emploi » du ministère du travail de l’emploi et de la santé ; qu’il n’apparaissait pas comptable assignataire des ordres de dépenses et recettes de ce programme conformément aux termes de l’arrêté du 15 février 2011 susvisé qui fixait l’assignation comptable de dépenses et de recettes sur le contrôleur budgétaire et comptable ministériel placé auprès du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. Y indique que le marché support est un marché du SIRCOM, pour lequel le CBCM des ministères financiers est bien assignataire ; qu’il a utilisé des crédits régulièrement ouverts qui lui étaient accessibles dans Chorus, sur la base d’un engagement juridique et d’une certification de service fait effectifs ;
Attendu que M. Y a produit lors de l’audience une convention ministérielle de gestion et délégation de gestion, signée le 12 avril 2011 par laquelle, en son article 4, le ministre du travail, de l’emploi et de la santé, déléguant, en son nom et pour son compte, confie au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, la réalisation de l’ordonnancement des dépenses et des recettes relevant des programmes 102 et 103 ainsi que de l’action 7 du programme 155 ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu que la convention de délégation de gestion produite à l’audience, dûment publiée au Bulletin Officiel du ministère du travail, de l’emploi et de la santé du 30 juin 2011, était en vigueur au moment du paiement ; que la dépense en question entre dans son champ d’application ; qu’ainsi la preuve est apportée qu’au moment du paiement de la dépense, le CBCM en était bien comptable assignataire ;
Attendu, en conséquence, qu’il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Y, sur sa gestion 2011 du 2 novembre, au titre de la charge n° 8 ;
Sur la charge n° 9 soulevée à l’encontre de M. Y au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Y pouvait être mise en jeu à hauteur d’un montant de 42 540,83 €, au titre de l’exercice 2011, pour avoir payé des dépenses de frais de déplacement temporaires réglés par carte d’achat sans que soient fournis les ordres de mission et états de frais prévus par l’instruction codificatrice du 22 août 2011 susvisée ; qu’ainsi le comptable aurait manqué à ses contrôles de validité de la créance au regard de la production des justificatifs ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…) et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu que, selon les dispositions de l’article 37 du décret précité, « lorsque, à l'occasion de l'exercice du contrôle prévu à l'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l'ordonnateur » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l’accord du ministre intéressé » ;
Attendu que le règlement de dépenses par carte d’achat sur marchés publics a été autorisé par le décret du 26 octobre 2004 susvisé ; que le dernier alinéa de son article 5 disposait dans sa rédaction applicable à l’époque des faits : « Avant de créditer le compte technique, le comptable public assignataire effectue les contrôles réglementaires prévus au décret du 29 décembre 1962 susvisé. Il procède au paiement de l’émetteur. » ; que l’instruction du 21 avril 2005 susvisée précise les modalités d’exécution du décret du 26 octobre 2004 précité ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que M. Y a payé le 29 novembre 2011 des frais de déplacement réglés par carte d’achat d’un montant total de 42 540,83 €, sans que l’ordonnateur lui ait produit des ordres de mission et des états de frais ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. Y souligne qu’en application des directives contenues dans les lettres de la direction générale des finances publiques (DGFiP) des 21 janvier et 22 juillet 2011, les relevés d’opérations bancaires ont été admis comme pièces justificatives pour ces dépenses réglées par carte d’achat ; qu’il allègue que le relevé d’opérations bancaires est la seule pièce justificative à fournir ; qu’il invoque notamment à l’appui le caractère explicite, à cet égard, de l’instruction du 21 avril 2005 susvisée ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu que la réglementation des frais de déplacement impose que soient établis des ordres de mission dans tous les cas de figure ; qu’en application de la nomenclature des pièces justificatives du 22 août 2011 susvisée, les ordres de mission et les états de frais faisaient partie des pièces justificatives à fournir à l’appui des remboursements aux agents de frais qu’ils avaient avancés ;
Attendu toutefois que les paiements en cause ne sont pas des remboursements de frais aux agents ; que la nomenclature précitée ne prévoit pas que les ordres de mission et les états de frais soient fournis au comptable lorsque les paiements sont effectués aux prestataires et non aux agents ; que s’agissant spécifiquement des paiements par carte d’achat, ni la nomenclature précitée, ni l’instruction du 21 avril 2005 susvisée ne prévoient d’autres pièces à l’appui des paiements que les relevés d’opérations bancaires assortis, en cas de présentation non conforme à l’article 7 du décret précité, de factures ou mémoires et, s’agissant du premier paiement, la copie du marché exécuté par carte d’achat ; que l’obtention de ces pièces n’était pas nécessaire à l’exercice des contrôles du comptable ;
Attendu que le réquisitoire susvisé circonscrit la charge au seul grief pour le comptable d’avoir ouvert sa caisse sans qu’un état de frais et un ordre de mission viennent à l’appui des paiements ; qu’en l’espèce il n’y a donc pas lieu d’engager la responsabilité de M. Y au titre de la charge n° 9 ;
Sur la charge n° 10 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2010 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 28 847,52 €, au titre de l’exercice 2010, pour avoir payé une dépense en l’absence du contrôle de la validité de la créance, portant notamment sur l’exactitude des calculs de liquidation et la production des justifications ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…) et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu que, selon les dispositions de l’article 37 du décret précité, « lorsque, à l'occasion de l'exercice du contrôle prévu à l'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l'ordonnateur » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l’accord du ministre intéressé » ;
Attendu qu’en application de l’article 1er du décret du 14 octobre 2004 susvisé « La délégation de gestion est l'acte par lequel un ou plusieurs services de l'Etat confient à un autre service de l'Etat, pour une durée limitée éventuellement reconductible, la réalisation, pour leur compte, d'actes juridiques, de prestations ou d'activités déterminées concourant à l'accomplissement de leurs missions » ; qu’en vertu de l’article 2 du même texte, « La délégation de gestion fait l'objet d'un document écrit qui précise la mission confiée au délégataire, les modalités d'exécution financière de la mission ainsi que les obligations respectives des services intéressés. / Ce document fixe les conditions dans lesquelles il est rendu compte de l'exécution de la délégation. / La délégation de gestion est publiée. » ;
Attendu que le régime administratif et financier de l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) est fixé par le III de l’article 37 de la loi du 12 mai 2010 susvisée qui dispose : « III. ― L'Autorité de régulation des jeux en ligne propose au ministre chargé du budget les crédits nécessaires à l'accomplissement de ses missions. Ces crédits sont inscrits au budget général de l'État. La loi du 10 août 1922 relative à l'organisation du contrôle des dépenses engagées n'est pas applicable à leur gestion. Le président de l'Autorité est ordonnateur des recettes et des dépenses (…) » ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que M. X a payé le 29 novembre 2010 une dépense sur marché n° 090 4158 de 28 847,52 €, en l’absence d’une convention de délégation de gestion ; que la facture ne fait pas référence aux prix unitaires tels qu’ils figurent à l’annexe financière du contrat ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que, selon M. X, le certificat administratif du 24 novembre 2010 joint à l’appui des paiements vaudrait, selon lui, autorisation expresse de l’ordonnateur donnée à l’ARJEL pour utiliser un marché du SIRCOM dans l‘attente d’une convention de délégation de gestion ; qu’il ajoute en outre, à l’audience, qu’une telle convention n’était nécessaire qu’entre services de l’Etat ; que l’ARJEL est pas pas un service de l’Etat au sens strict, et qu’il relève de la même mission budgétaire que le SIRCOM ; qu’ainsi le certificat précité suffisait ; qu’il n’y aurait pas de problème de rapprochement entre la facture et l’annexe financière ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu que la facture produite à l’appui du dossier de paiement ne comportait pas les éléments permettant de rattacher les sommes facturées à des prix unitaires prévus par l’annexe financière aux pièces contractuelles ; que le comptable, au moment des paiements, faute de déterminer quels éléments ont été facturés, et à quel prix, n’a pu vérifier la validité de la créance, s’agissant de l’exactitude des calculs de liquidation ;
Attendu en outre que l’ARJEL, autorité administrative indépendante, est une institution de l’Etat ; que ses crédits émargeaient au programme 218 ; que la dépense a été imputée sur le programme 221 en paiement d’un marché passé par une autre autorité que l’ARJEL ; qu’en application des dispositions précitées du décret du 14 octobre 2004, un tel paiement nécessitait une convention de délégation de gestion, signée et préalablement publiée ; que le « certificat administratif » produit est, quant à son contenu, une simple lettre émanant d’un cadre du secrétariat général du ministère et sollicitant du comptable la faveur d’un paiement malgré l‘absence de la délégation requise ; qu’a fortiori, il n’a pas été publié ; qu’il ne constitue ni la convention nécessaire, ni une réquisition du comptable prise en la forme ;
Attendu que le comptable a payé une demande de paiement de 28 847,52 € sans vérifier si l’ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature avait été fourni ni si ces pièces étaient complètes, précises et cohérentes au regard de la nature de la dépense telle qu’elle a été ordonnancée ; que le comptable a manqué à ses obligations de contrôle de la validité de la créance, portant notamment sur l’exactitude des calculs de liquidation et la production des justifications ; qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2010 au titre de la charge n° 10 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Attendu que n’a pu être produit, durant l’instruction, ni décompte détaillé mentionnant quelles sont les prestations facturées au regard des prix unitaires de l’annexe financière de l’acte d’engagement, ni devis détaillé, ni aucune autre pièce permettant d’attester de l’exactitude des calculs de liquidation ; que la dépense revêt dès lors un caractère indu ; qu’une dépense indue est constitutive d’un préjudice financier au détriment de l’Etat ;
Attendu ainsi que le manquement du comptable a causé un préjudice pour le Trésor, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ;
Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné (…), le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il y a lieu de constituer M. X débiteur de l’État pour la somme de 28 847,52 € au titre de l’exercice 2010 ;
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, « les débets portent intérêts au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 11 avril 2016, date de réception du réquisitoire par M. X ;
Sur le contrôle sélectif des dépenses
Attendu que ce paiement entrait dans une catégorie de dépenses faisant l’objet du plan de contrôle sélectif du référentiel national obligatoire ; que ce plan prévoyait que cette dépense devait être contrôlée ;
Sur la charge n° 11, soulevée à l’encontre de MM. X et Y, au titre des exercices 2010 et 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 46 644 € au titre de l’exercice 2010 et 15 548 € au titre de l’exercice 2011, d’une part, et la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Y à hauteur de 7 774 € au titre de l’exercice 2011, d’autre part, pour avoir payé une dépense en l’absence du contrôle de la validité de la créance, portant notamment sur la production des justifications ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…) et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu que, selon les dispositions de l’article 37 du décret précité, « lorsque, à l'occasion de l'exercice du contrôle prévu à l'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l'ordonnateur » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l’accord du ministre intéressé » ;
Attendu que le code des marchés publics, dans sa version en vigueur du 21 décembre 2008 au 11 décembre 2011, disposait en son article 11 : « Les marchés et accords-cadres d'un montant égal ou supérieur à 20 000 € HT sont passés sous forme écrite » ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que M. X a payé sur l’exercice 2010 six demandes de paiement et sur l’exercice 2011 deux demandes de paiement, toutes d’un montant unitaire de 7 774 € ; que M. Y a payé en 2011 une demande de paiement de 7 774 € ; que ces neufs paiements ont été effectués à la même société sur présentation de simples factures, en l’absence de pièces contractuelles écrites, en règlement de prestations de même nature, correspondant à des parutions dans un journal quotidien ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que MM. X et Y rappellent que ces demandes de paiement correspondent à de simples factures, d’un montant unitaire inférieur au seuil des marchés formalisés défini à l’article 28 du code des marchés publics et sont les seules pièces exigées par la nomenclature des pièces justificatives ; que les comptables ont fait une stricte application des directives données dans l’instruction ministérielle du 26 mars 2004, selon lesquelles le comptable n’a pas à intervenir dans le contrôle de la légalité interne des marchés ou du choix de la procédure utilisée par l’acheteur public, ni à assurer un suivi du seuil des marchés ; que de manière générale, il n’incombe pas au comptable public de juger la légalité des actes de l’ordonnateur, ni des contrats passés par lui, ainsi que l’a confirmé à plusieurs reprises le Conseil d’État ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu qu’au cas d’espèce le montant unitaire de chacune des factures, soit 7 774, € était inférieur au seuil de 20 000 € au-delà duquel, en application des dispositions combinées de la nomenclature des pièces justificatives susvisée et du code des marchés publics dans leurs versions alors en vigueur, le comptable devait exiger la production d’un contrat écrit ; qu’il ne revient pas au comptable de vérifier la régularité des marchés au-delà des contrôles prévus par les dispositions précitées du décret du 29 décembre 1962 ; qu’il ne peut donc être reproché aux comptables de n’avoir pas exigé la production d’un marché écrit au motif que le cumul de ces paiements excéderait le seuil précité ;
Attendu, en conséquence, qu’il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de MM. X et Y, sur leurs gestions respectives de 2010 et 2011, au titre de la charge n° 11 ;
Sur la charge n° 12 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2010 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 96 314,48 €, au titre de l’exercice 2010, pour avoir payé trois demandes de paiement en l’absence de pièce permettant le contrôle de la validité de la créance, portant notamment sur l’exactitude des calculs de liquidation ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…) et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu que, selon les dispositions de l’article 37 du décret précité, « lorsque, à l'occasion de l'exercice du contrôle prévu à l'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l'ordonnateur » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l’accord du ministre intéressé » ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que M. X a payé en 2010 trois demandes de paiement de montants respectifs 20 547,88 €, 41 381,30 € et 34 385 € dans le cadre d’un marché d’études grand public et d’enquêtes de satisfaction auprès des usagers ; que chaque facture ne mentionnait qu’une somme globale, sans préciser son mode de calcul ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. X souligne que l’examen des factures n’a pas révélé d’anomalie par rapport à l’annexe financière de l’acte d’engagement du marché, produite avec les pièces de la dépense ; qu’il fournit en réponse au réquisitoire trois devis transmis par le SIRCOM, du 20 avril 2010 pour 20 547,88 € TTC, du 26 novembre 2010 pour 34 585 € TTC et 41 381,60 € TTC ;
Attendu qu’à l’audience M. X indique que l’instruction n’a pas permis d’établir l’absence de ces trois devis au moment du paiement ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu qu’il est constant que ni les trois devis précités, ni aucune autre pièce permettant de vérifier le décompte des prestations facturées au regard des prix unitaires de l’annexe financière jointe à l’acte d’engagement, n’avait été produits parmi les pièces venant à l’appui du compte déposé à la Cour ; que la Cour statue à partir des éléments matériels du compte ; que dans ces conditions, le comptable est réputé ne pas avoir eu les justificatifs en sa possession au moment où il a ouvert sa caisse ;
Attendu que le comptable a ainsi payé les trois demandes de paiement de montants respectifs 20 547,88 €, 41 381,60 € et 34 385 € sans pouvoir contrôler l’exactitude des calculs de liquidation ; que le comptable a manqué à ses obligations de contrôle de la validité de la créance ; qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2010 au titre de la charge n° 12 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Attendu qu’une dépense payée en l’absence de pièce justificative permettant d’exercer le contrôle de la validité de la créance revêt en principe un caractère indu ; que toutefois, les trois devis que le comptable a produit en réponse au réquisitoire permettent de rapprocher les sommes facturées des prix unitaires de l’annexe financière au marché ; qu’il résulte de ce rapprochement qu’il n’y a pas eu de trop-payé ; que le manquement du comptable n’est donc pas constitutif d’un préjudice financier au détriment de l’Etat ;
Attendu qu’aux termes des dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable (…) n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ; que le décret du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ;
Attendu que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré pour l’exercice 2011 est fixé à 803 000 € ; qu’il s’ensuit que le montant maximum de la somme non rémissible susceptible d’être mise à la charge de M. X s’élève à 1 204,50 € ; qu’il est renvoyé, pour la fixation de ladite somme non rémissible, à l’examen de la charge n° 14 ;
Sur la charge n° 13 soulevée à l’encontre de MM. X et Y au titre de l’exercice 2011 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire respective de MM. X et Y pouvait être mise en jeu chacun à hauteur de 35 820,20 € au titre de l’exercice 2011, pour avoir payé deux demandes de paiement en l’absence de contrôle de la validité de la créance, portant notamment sur l’exactitude des calculs de liquidation et la production des justifications ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…)
et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu que, selon les dispositions de l’article 37 du décret précité, « lorsque, à l'occasion de l'exercice du contrôle prévu à l'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l'ordonnateur » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l’accord du ministre intéressé » ;
Attendu que le code des marchés publics, dans sa version en vigueur du 21 décembre 2008 au 11 décembre 2011, disposait en son article 11 : « Les marchés et accords-cadres d'un montant égal ou supérieur à 20 000 € HT sont passés sous forme écrite » ; que ce montant a été ramené à 15 000 € HT dans la version en vigueur du 12 décembre 2011 au_20 septembre 2015 ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que MM. X et Y ont payé chacun en 2011 une demande de paiement de 35 820,20 €, soit au total 71 640,40 € ; qu’étaient fournis à l’appui du compte des factures à une société, un bordereau de prix daté du 9 mai 2011, mais pas le marché lui-même ; que la lettre de notification du marché était jointe à l’appui du premier de ces paiements ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que les comptables ont produit le dossier de consultation du marché en réponse au réquisitoire ; que M. X allègue que les pièces justificatives étaient bien en sa possession au moment du paiement ; qu’il invoque sa bonne foi ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu que le marché n’avait pas été produit à l’appui du compte ; que l’ordonnateur n’avait pas non plus produit un certificat administratif par lequel il aurait déclaré avoir passé un contrat oral et aurait pris la responsabilité de l'absence de contrat écrit ; que, le juge statuant à partir des éléments matériels du compte, les considérations de bonne foi ne peuvent être utilement invoquées à décharge ; que le comptable est ainsi réputé ne pas avoir eu les justificatifs nécessaires en sa possession au moment où il a ouvert sa caisse ; qu’en payant ces deux demandes de paiement en l’absence du marché écrit requis par la nomenclature des dépenses de l’État en référence au code des marchés publics, s’agissant de montants supérieurs à celui prévu par l’article 11 de ce code, les comptables ont manqué à leurs obligations de contrôle de la validité de la créance, portant notamment sur l’exactitude des calculs de liquidation et la production des justifications ; qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de MM. X et Y sur leurs gestions respectives de 2011 au titre de la charge n° 13 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Attendu que les comptables, s’ils n’ont pas produit le marché lui-même en réponse au réquisitoire, ont toutefois transmis le dossier de consultation ; que ce dossier, rapproché de la lettre de notification du marché et du bordereau de prix, atteste a posteriori de l’existence d’un marché et de la volonté des parties de contracter aux conditions évoquées dans les factures précitées ; que la dépense n’est donc pas indue ; qu’ainsi les manquements des comptables ne sont pas constitutifs d’un préjudice financier au détriment de l’Etat ;
Attendu qu’aux termes des dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable (…) n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ; que le décret du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ;
Attendu que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré pour l’exercice 2011 est fixé à 803 000 € ; qu’il s’ensuit que le montant maximum de la somme non rémissible susceptible d’être mise à la charge de MM. X et Y s’élève à 1 204,50 € pour chacun ;
Attendu qu’il sera fait une exacte appréciation des circonstances de l’espèce en arrêtant cette somme à 400 € au titre de l’exercice 2011 pour chacun des deux comptables ;
Sur la charge n° 14, soulevée à l’encontre de M. X, au titre de l’exercice 2010 :
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pouvait être mise en jeu à hauteur de 280 547,95 €, au titre de l’exercice 2010, pour avoir payé trois demandes de paiement en l’absence de contrôle de la validité de la créance, portant notamment sur l’exactitude des calculs de liquidation et la production des justifications ; que notamment les factures relatives aux paiements d’acomptes trimestriels sur ce marché ne mentionneraient pas les livrables remis, en méconnaissance des prescriptions du cahier des clauses administratives particulières et du cahier des clauses techniques particulières ; que les paiements auraient été effectués sans que le marché soit joint à l’appui de ceux-ci ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu que conformément au troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics « se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que, selon les dispositions du B de l’article 12 du même décret, les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses « le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l’exacte imputation des dépenses aux chapitres qu’elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance (…)
et du caractère libératoire du règlement » ; qu’aux termes de l’article 13, le contrôle de la validité de la créance porte notamment sur la justification du service fait, l’exactitude des calculs de liquidation, l’intervention préalable des contrôles réglementaires, la production des justifications ;
Attendu que, selon les dispositions de l’article 37 du décret précité, « lorsque, à l'occasion de l'exercice du contrôle prévu à l'article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l'ordonnateur » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même décret, les opérations « doivent être appuyées des pièces justificatives prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des finances avec, le cas échéant, l’accord du ministre intéressé » ;
Attendu que la nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’État applicable est celle diffusée par l’instruction codificatrice du 2 avril 2010 susvisée ;
Sur les faits
Attendu qu’il est constant que M. X a payé en 2010 à la même société trois demandes de paiement de montants unitaires respectifs 55 463,26 €, 188 109,19 € et 36 975,50 € sur présentation de factures, sans qu’une pièce contractuelle écrite soit jointe aux justificatifs remis à la Cour à l’appui du compte déposé ;
Attendu que le comptable a produit, lors de la phase non contentieuse de l’instruction, l’acte d’engagement, le cahier des clauses administratives particulières et le cahier des clauses techniques particulières du marché concerné : que ces pièces définissent notamment les indications devant être portées sur les factures, dont les modalités de paiement d’acomptes trimestriels et la désignation des livrables à remettre et la période correspondante ;
Attendu que les trois factures ne mentionnaient pas les livrables remis ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que M. X a produit des procès-verbaux d’avancement sur service fait datés du 5 juillet 2010 pour 46 373,96 € HT, du 5 novembre 2010 pour 157 281,93 € HT et du 26 novembre 2010 pour 30 915,97 € HT, ainsi que l’accusé de réception de livrables pour la période du 19 mai au 30 juin 2010 ;
Attendu que le comptable souligne que conformément à l’article 14-2 du cahier des clauses techniques particulières, les acomptes devaient être versés au fur et à mesure des livraisons, mais qu’il était précisé dans la tranche ferme que tout devait être fourni dans le trimestre ; qu’en certifiant le service fait, l’ordonnateur a attesté que les livrables attendus lui ont bien été fournis, et que le comptable n’a pas à juger du bien-fondé de cette certification ;
Sur l’application au cas d’espèce
Attendu, en premier lieu, qu’il est constant que le comptable a payé trois demandes de paiement de montants respectifs de 55 463,26 €,188 109,19 € et 36 975,50 € sur la seule présentation de factures ;
Attendu, en second lieu, qu’en application de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur, « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » ; que dès lors, lorsqu'un marché stipule qu'un paiement est précédé de la présentation d'une pièce portant des mentions déterminées, la somme ne devient exigible pour le prestataire qu'après qu'il a adressé au débiteur ladite pièce dans la forme requise ; qu'ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, il revient au comptable de s'assurer de la présence des mentions contractuelles sur les factures, sauf à manquer au contrôle de la validité de la créance ;
Attendu qu’en l’espèce la production du marché et des factures était requise par la nomenclature ; que les trois factures ne mentionnaient pas la désignation des livrables remis et les échéances correspondantes, contrairement à ce que prévoyait le marché, en application des dispositions combinées de l’article 14.3 du cahier des clauses administratives particulières et du paragraphe 3.6 du cahier des clauses techniques particulières ;
Attendu qu’en payant ces trois dépenses, d’une part sans que le contrat soit fourni à l’appui du paiement, d’autre part en présence de factures incomplètes au regard des énonciations du marché, le comptable n’a pas exercé son contrôle de la production des justifications et a manqué à ses obligations de contrôle de la validité de la créance ; qu’il y a donc lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X sur sa gestion 2010 au titre de l’ensemble de la charge n° 14 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier pour le Trésor
Sur les paiements de 188 109,19 € et 36 975,50 €
Attendu que le comptable ne produit aucune pièce complémentaire relative aux deux demandes de paiement de 188 109,19 € et 36 975,50 € ; qu’ainsi la fourniture des livrables, qui conditionnait le paiement de l’acompte, n’est ni attestée par l’ordonnateur, ni, à défaut, prouvée par d’autres documents ; que la dépense doit donc être considérée comme indue ; que cette situation est constitutive d’un préjudice pour le Trésor, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ;
Attendu qu’aux termes du même article, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné (…), le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il y a donc lieu de constituer M. X débiteur de l’État pour la somme de 225 084,69 € au titre de l’exercice 2010 ;
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, « les débets portent intérêts au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 11 avril 2016, date de réception du réquisitoire par M. X ;
Sur le paiement de 55 463,26 €
Attendu en revanche que, s’agissant de la dépense de 55 463,26 €, le comptable a produit l’accusé de réception de quatre livrables pour la période du 19 mai au 30 juin 2010 ; qu’ainsi la preuve que la créance était exigible a été apportée ; que de la sorte, la dépense n’était pas indue ; qu’elle n’est donc pas constitutive d’un préjudice financier au détriment de l’Etat ;
Attendu qu’aux termes des dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable (…) n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ; que le décret du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ;
Attendu que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré pour l’exercice 2011 est fixé à 803 000 € ; qu’il s’ensuit que le montant maximum de la somme non rémissible susceptible d’être mise à la charge de M. X s’élève à 1 204,50 € ;
Sur le contrôle sélectif des dépenses
Attendu que les trois demandes de paiement entraient dans une catégorie de dépenses faisant l’objet du plan de contrôle sélectif du référentiel national obligatoire ; que ce plan prévoyait que ces dépenses devaient être contrôlées ;
Sur les charges n° 12 et n° 14 :
Attendu que les charges n° 12 et, pour une part, n° 14, portent sur une même catégorie de manquements, et qu’elles concernent un seul comptable et un seul exercice ; qu’en conséquence, il y a lieu de mettre à la charge du comptable une somme non rémissible unique ;
Attendu qu’il sera fait une exacte appréciation des circonstances de l’espèce en arrêtant la somme due par M. X à 600 € au titre de l’exercice 2010 ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
En ce qui concerne M. X
Charge n° 1 – exercice 2011
Article 1er. – M. X est constitué débiteur de l’État au titre de l’exercice 2011, au 1er novembre, pour la somme de 3 048 980,34 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 11 avril 2016.
Charges n° 2, n° 3 et n° 4 – exercice 2011
Article 2. – M. X est constitué débiteur de l’État au titre de l’exercice 2011, au 1er novembre, pour la somme unique de 18 687 309,53 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 11 avril 2016.
Il n’y a pas lieu à charge pour le surplus.
Charge n° 5 – exercice 2010
Article 3. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de M. X au titre de la charge n° 5 sur les exercices 2010 et 2011, au 1er novembre.
Charge n° 6 – exercice 2010
Article 4. – M. X devra s’acquitter d’une somme de 1 000 €, en application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en vertu du IX de l’article 60 de la loi précitée.
Charge n° 7 – exercice 2011
Article 5. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de M. X au titre de la charge n° 7 sur l’exercice 2011, au 1er novembre.
Charge n° 10 – exercice 2010
Article 6. – M. X est constitué débiteur de l’État au titre de l’exercice 2010 pour la somme de 28 847,52 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 11 avril 2016.
Le paiement entrait dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif. Les règles prévoyaient que ce paiement devait être contrôlé.
Charge n° 11
Exercice 2010
Article 7. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de M. X au titre de la charge n° 11 sur l’exercice 2010.
Exercice 2011
Article 8. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de M. X au titre de la charge n° 11 sur l’exercice 2011, au 1er novembre.
Charge n° 13 – exercice 2011
Article 9. – M. X devra s’acquitter d’une somme de 400 €, en application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en vertu du IX de l’article 60 de la même loi.
Charge n° 14 – exercice 2010
Article 10. – M. X est constitué débiteur de l’État au titre de l’exercice 2010 pour la somme de 225 084,69 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 11 avril 2016.
Les paiements entraient dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif. Les règles prévoyaient que ces paiements devaient être contrôlés.
Charges n° 12 et n° 14 – exercice 2010
Article 11. – M. X devra s’acquitter d’une somme unique de 600 €, en application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en vertu du IX de l’article 60 de la même loi.
En ce qui concerne M. Y
Charge n° 5 – exercice 2011
Article 12. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de M. Y au titre de la charge n° 5 sur l’exercice 2011, du 2 novembre.
Charge n° 8 – exercice 2011
Article 13. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de M. Y au titre de la charge n° 8 sur l’exercice 2011, du 2 novembre.
Charge n° 9 – exercice 2011
Article 14. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de M. Y au titre de la charge n° 9 sur l’exercice 2011, du 2 novembre.
Charge n° 11 – exercice 2011
Article 15. – Il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de M. Y au titre de la charge n° 11 sur l’exercice 2011, du 2 novembre.
Charge n° 13 – exercice 2011
Article 16. – M. Y devra s’acquitter d’une somme de 400 €, en application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en vertu du IX de l’article 60 de la même loi.
En ce qui concerne MM. X et Y
Article 17. – La décharge de MM. X et Y, pour les gestions qui les concernent, ne pourra être donnée qu’après apurement des débets et des sommes à acquitter, fixés ci-dessus.
Fait et jugé par M. Philippe GEOFFROY, président de section, présidant la séance ; MM. Daniel-Georges COURTOIS, Noël DIRICQ, et Mme Sophie THIBAULT, conseillers maîtres.
En présence de M. Aurélien LEFEBVRE, greffier de séance.
Aurélien LEFEBVRE
| Philippe GEOFFROY
|
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.
13 rue Cambon - 75100 PARIS CEDEX 01 - T +33 1 42 98 95 00 - www.ccomptes.fr |
. |