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QUATRIÈME CHAMBRE

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Première section

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Arrêt n° S2017-4177

 

Audience publique du 21 décembre 2017

 

Prononcé du 25 janvier 2018

 

 

 

 

SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE RIVIERE CALAVON-COULON (SIRCC) (VAUCLUSE)

 

Appel d’un jugement de la chambre régionale des comptes régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur

 

Rapport n° R2017-1194

République Française,

Au nom du peuple français,

La Cour,

Vu la requête enregistrée le 14 octobre 2016 au greffe de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur, par laquelle le procureur financier près ladite chambre a élevé appel du jugement n° 2016-0039 du 12 août 2016, à lui notifié le 17 août, de la chambre régionale de Provence-Alpes-Côte d'Azur en ce que ce jugement a dit que le manquement commis par M. X, comptable du syndicat intercommunal de rivière Calavon-Coulon (SIRCC), constaté au titre de la présomption de charge unique, n’avait pas causé de préjudice financier à cet établissement ;

Vu les pièces de la procédure suivie en première instance et notamment le réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale de Provence-Alpes-Côte d'Azur n° 2016-0038 du 21 avril 2016 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

Vu le rapport de M. Patrick BONNAUD, conseiller référendaire, magistrat chargé de l’instruction ;

Vu les conclusions du Procureur général n° 976 du 14 décembre 2017 ;

Entendu lors de l’audience publique du 21 décembre 2017 M. BONNAUD, conseiller référendaire, en son rapport, Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du ministère public, les parties informées de l’audience n’étant ni présentes, ni représentées ;

Entendu en délibéré M. Yves ROLLAND, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;

 

Attendu que par le jugement entrepris, la Chambre régionale des comptes de                    Provence-Alpes-Côte d'Azur a engagé la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pour avoir procédé au paiement d’indemnités de fonction à des vice-présidents du SIRCC sans disposer d’arrêtés de délégation de fonction du président ; que, toutefois, elle a jugé que le manquement du comptable n’avait pas causé de préjudice financier pour le syndicat ; qu’en conséquence, sans relever de circonstances particulières, elle a mis à la charge de M. X, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, une somme non rémissible, à son montant maximal, soit 165 €, au titre de la charge unique ;

Attendu que l’appelant conteste le raisonnement suivi par la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur, pour écarter le préjudice financier ; qu’il demande à la Cour d’infirmer ces dispositions du jugement ;

Attendu que l’appelant fait valoir que le paiement de l’indemnité de fonction à des vice-présidents d’un syndicat intercommunal est subordonné à l’exercice effectif des fonctions ; que cette effectivité ne se peut s’établir que par l’existence d’un arrêté de délégation de fonction du président aux vice-présidents ; qu’en jugeant que, en l’absence d’un tel arrêté, cette effectivité était suffisamment établie par des déclarations du président du syndicat ou du comptable, en l’absence de toute preuve écrite, la chambre a méconnu les faits et commis une erreur de droit ;

Attendu qu’aux termes de l’article L.5211-12 du code général des collectivités territoriales, les vice-présidents d’un syndicat intercommunal peuvent bénéficier d’une indemnité pour l’exercice effectif de leurs fonctions ;

Attendu qu’aux termes de l’article L.5211-9 du code général des collectivités territoriales, le président du syndicat est seul chargé de l’administration de l’établissement public, mais peut déléguer par arrêté l’exercice d’une partie de ses fonctions aux vice-présidents ; que le vice-président qui n’a pas reçu délégation ou dont la délégation a pris fin ne peut, sauf cas de suppléance, justifier de l’exercice effectif des fonctions ; que par suite, il ne peut prétendre au versement des indemnités ;

Attendu que la rubrique 311 « Indemnités de fonction d’un élu local » de l’annexe I de l’article D.1617-19 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit la production à l’occasion du premier paiement de telles indemnités d’une « 1° délibération fixant les conditions d’octroi de l’indemnité et son montant [et], 2° le cas échéant, un arrêté de délégation de fonctions » ;

Attendu que les syndicats intercommunaux sont soumis à la nomenclature des pièces justificatives prévue à l’article D.1617-19 du CGCT précité ;

Attendu que pour déterminer si le paiement irrégulier d’une dépense par un comptable public a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné, il appartient au juge des comptes d’apprécier si la dépense était effectivement due et, à ce titre, de vérifier, notamment, qu’elle n’était pas dépourvue de fondement juridique ;

Attendu que le paiement d’indemnités de fonction à des élus est conditionné par l’exercice effectif de ces fonctions ; que l’arrêté de délégation desdites fonctions est un acte indispensable pour prouver cet exercice effectif ; que, en ce qui concerne les paiements de l’espèce, l’arrêté de délégation de fonction constitue le fondement juridique nécessaire nonobstant l’existence de délibérations du conseil syndical décidant l’affectation de telles indemnités aux vice-présidents qui en ont bénéficié et en en fixant le taux ;

Attendu que l’absence de l’arrêté mentionné à l’article L.5211-9 du CGCT n’est pas contestée ; qu’en l’absence d’un tel arrêté, la dépense est indue et son acquittement cause nécessairement un préjudice financier au syndicat ;

Attendu que les déclarations de l’ordonnateur et du comptable sur la réalité de l’exercice par les vice-présidents de leur fonction, au surplus, non appuyées d’éléments probants, ne sauraient suppléer l’absence de ces arrêtés ;

Attendu qu’il résulte de ce qui précède et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, qu’il y a lieu d’infirmer le jugement en ce qu’il a dit que le manquement commis par M. X n’avait pas causé de préjudice au SIRCC ;

Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963 que « lorsque le manquement du comptable à ses obligations a causé un préjudice financier à l'organisme public concernéle comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante ; qu’à défaut, il peut être constitué débiteur des sommes en cause » ; que les paiements indus s’élèvent à 4 992,36 € ; qu’aucun versement de M. X n’a été justifié ; qu’il y a donc lieu de le constituer débiteur de la somme de 4 992,36 € ;

Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, la date de réception du réquisitoire est le 2 mai 2016 ;

Attendu qu’il n’existait pas de plan de contrôle sélectif de la dépense pour l’exercice 2014 ;

Par ces motifs,

 

DECIDE :

Article 1er. – Le jugement est infirmé en ce qu’il a dit que le manquement de M. X, constaté au titre de la présomption de charge unique du réquisitoire susvisé, n’avait pas causé de préjudice financier au syndicat intercommunal de rivière Calavon-Coulon et mis à la charge de M. X une somme non rémissible de 165 €.

Article 2. – Monsieur X est constitué débiteur envers le syndicat intercommunal de rivière Calavon-Coulon au titre de l’exercice 2014, de la somme de 4 992,36 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 2 mai 2016.

 

Les paiements n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.

 

Article 3. - La décharge de M. X pour l’exercice 2014 ne pourra être prononcée qu’après l’apurement du débet prononcé à son encontre.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section. Présents : M. Jean-Philippe VACHIA, président de chambre, président de la formation,
M. Yves ROLLAND, président de section, Mme Anne FROMENT-MEURICE, présidente de chambre maintenue en activité, M. Jean-Yves BERTUCCI, conseiller maître et Mme Isabelle LATOURNARIE-WILLEMS, conseillère maître.

En présence de M. Aurélien LEFEBVRE, greffier de séance.

 

 

 

 

 

 

Aurélien LEFEBVRE

 

 

 

 

 

 

 

 

Jean-Philippe VACHIA

 

 

 

 

 

 

 

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.

 

 

 

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