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S2018-0496

$BANDEAU$ 

 

 

 

QUATRIÈME CHAMBRE

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Première section

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Arrêt n° S2018-0496

 

Audience publique du 22 février 2018

 

Prononcé du 22 mars 2018

 

COMMUNE DE MORZINE

(HAUTE-SAVOIE)

 

 

Appel d’un jugement de la chambre régionale des comptes d’Auvergne,
Rhône-Alpes

 

Rapport n° R 2017-1718-1

 

 

 

République Française,

Au nom du peuple français,

La Cour,

 

 

Vu les requêtes, enregistrées les 4 et 18 novembre 2016 au greffe de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes, par lesquelles MM. X et Y, comptables successifs de la commune de Morzine, ont interjeté appel, chacun pour ce qui le concerne, des articles 2, 5-6, 15 à 19 du jugement 2016-0042 du 10 août 2016 par lequel ladite chambre, statuant sur les comptes de la commune pour les exercices 2009 à 2012, les a constitués débiteurs des deniers de la commune de Morzine à raison de manquements tenant au défaut de diligences dans le recouvrement de titres de recettes et au paiement de mandats en l’absence de pièces justificatives suffisantes ;

Vu les pièces de la procédure suivie en première instance et notamment le réquisitoire n° 25-GP/2015 du 17 avril 2015 du procureur financier près la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits ;

Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

Vu le rapport de Mme Sylvie TORAILLE, conseillère maître, magistrat chargé de l’instruction ;

Vu les conclusions du Procureur général n° 060 du 6 février 2018 ;

Entendu, lors de l’audience publique du 22 février 2018, Mme TORAILLE, conseillère-maître, en son rapport, M. Christophe LUPRICH, substitut général, en les conclusions du ministère public, les parties informées de l’audience n’étant ni présentes ni représentées ;

Après avoir entendu en délibéré M. Yves ROLLAND, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;

Attendu que, par jugement 2016-0042 du 10 août 2016, la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes a constitué MM. X et Y débiteurs envers la commune de Morzine, respectivement de la somme totale de 68 982,29 € et de la somme totale de 15 297,23 €, sommes augmentées des intérêts de droit calculés à compter du 11 juin 2015, pour défaut de diligences dans le recouvrement de titres de recettes et paiement de mandats en l’absence de pièces justificatives suffisantes ;

Attendu que par les requêtes susvisées, MM. X et Y ont interjeté appel des dispositions relatives aux charges 1 et 3 (M. X), n° 1, 2, 4, 7 et 8 (M. Y) ;

Sur la jonction des requêtes

Attendu que les requêtes sont dirigées contre différents articles d’un même jugement et présentent à juger des questions suffisamment proches pour qu'elles soient jointes et pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;

S’agissant de la requête de M. X

Sur les moyens invoqués à l’encontre de la charge n° 1 (exercice 2010) et de l’article 2 du dispositif du jugement entrepris

Sur les moyens de forme

Attendu que l’appelant invoque une illégalité externe qui entacherait l’article 2 du jugement en ce qu’il existerait une contradiction entre les motifs invoqués dans les attendus et le dispositif ainsi que dans le dispositif lui-même ; qu’en effet, selon lui, « les motifs font apparaître clairement que l’insolvabilité du redevable est la cause du préjudice de la commune de Morzine et que, partant, ce n’est pas le manquement du comptable qui est la cause dudit préjudice » ; que la dernière phrase du deuxième attendu de la page 4 du jugement entrepris précise : « il n’y a pas lieu de mettre une somme à charge de M. X » ; qu’il souligne qu’à l’inverse l’article 2 du même jugement est ainsi rédigé : « M. X est constitué débiteur de la commune de Morzine au titre de l’exercice 2010 pour la somme de 295 € (…) / Ces paiements n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif. » ; que l’appelant estime que ce n’est pas l’attendu mais le dispositif qui est erroné dans la mesure où, selon lui, l’insolvabilité du redevable cause du préjudice a été démontrée par les pièces qu’il a transmises au juge de premier ressort qui s’est placé sur le terrain d’un manquement sans préjudice ; qu’il indique que « cette proposition est accréditée par le fait qu’au sein même du dispositif il y a une contradiction. En effet, alors qu’il s’agit d’une opération de recettes, il est fait référence à des paiements qui n’entreraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet d’un contrôle sélectif » ; qu’il sollicite la réformation du jugement sur ce point ;

Attendu qu’il ressort des attendus portant sur la charge n° 1 soulevée à l’encontre de M. X au titre de l’exercice 2010, la chambre régionale des comptes a considéré que le manquement commis par l’appelant n’était pas la cause directe du préjudice financier subi par la commune de Morzine ;

Attendu que pour constituer un comptable débiteur d’un organisme public, le juge des comptes doit établir l’existence d’un lien de causalité entre le manquement éventuel reproché au dit comptable et le préjudice subi par l’organisme ; qu’en application du 2e alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, dès lors que la CRC a considéré que le manquement du comptable n’avait pas causé de préjudice financier à la commune de Morzine, elle ne pouvait pas constituer M. X débiteur de cette commune mais aurait dû, le cas échéant, mettre à la charge du comptable une somme non rémissible ; que le moyen doit être accueilli ;

Attendu par ailleurs que la charge n° 1 à l’encontre de M. X portant sur des recettes non recouvrées, le second alinéa de l’article 2 se référant au dispositif relatif au contrôle sélectif n’a pas lieu d’être ; qu’il y a donc lieu d’accueillir le moyen de l’appelant ;

Attendu qu’il résulte de ce qui précède que le jugement doit être annulé pour ce qui concerne son article 2 ;

Attendu que l’affaire est en état d’être jugée ; qu’il y a donc lieu de l’évoquer ;

Sur le fond

Attendu que le réquisitoire du procureur financier relève que le recouvrement du titre n° 1365 pris en charge le 17 mai 2006 pour un montant de 295 € a pu être compromis entre 2010 et 2012 faute de diligences adéquates des comptables ; qu’il relève que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X a pu être engagée au titre de l’absence de diligences de recouvrement sur ladite créance ;

Attendu que la prescription de la créance est intervenue le 17 mai 2010, soit quatre mois et treize jours après l’entrée en fonctions de M. X le 4 janvier 2010, toutefois sans que celui-ci n’émette de réserves sur ce titre lors de son entrée en fonctions ;

Attendu que l’instruction de première instance a fait apparaître l’absence de tout acte interruptif de la prescription de l’action en recouvrement qui aurait pu retarder la prescription du titre ; que s’agissant d’une somme modique dont le créancier est une personne physique, le recouvrement de ladite créance était définitivement compromis à la date de prise de fonctions de M. X ; que malgré l’absence de réserves formulées par M. X sur la gestion de son prédécesseur, il convient de décharger M. X de toute responsabilité en ce qui concerne l’absence de recouvrement du titre de recettes n° 1365 ; qu’il y a donc lieu de prononcer un non-lieu à charge au profit de M. X au titre de la présente charge ;

Sur les moyens invoqués à l’encontre de la charge n° 3 (exercices 2010 et 2011)

Attendu que la chambre régionale a déclaré M. X débiteur de la commune de Morzine à raison du paiement, en l’absence de mention à l’appui de deux mandats de référence à une décision de l’assemblée délibérante autorisant la puissance publique à passer le marché, d’un montant de 25 037,06 € au bénéfice de la société Laquet (exercice 2010) et d’un montant de 24 415,86 € au bénéfice de la société Sassi BTP (exercice 2011) ;

Attendu que l’appelant précise qu’il pensait qu’il lui revenait, lors de la phase contentieuse devant la chambre régionale, de produire seulement les contrats écrits et non les délibérations du conseil municipal fondant la dépense qui ne lui auraient pas été demandées par le magistrat instructeur ; qu’il ne conteste pas que les mandats qu’il a payés ne faisaient pas référence à une délibération ; qu’il fournit à l’appui de sa requête en appel deux délibérations du conseil municipal prises antérieurement à l’engagement des dépenses incriminées et à leurs paiements prouvant ainsi, selon lui, que le manquement qui lui est reproché n’a pas créé de préjudice financier ; qu’il sollicite donc de la Cour qu’elle réforme le jugement de la CRC en ce qu’elle a émis un débet à son encontre et non une somme non rémissible ;

Attendu que la délibération du conseil municipal datée du 15 avril 2008 produite devant le juge d’appel autorisait le maire à « prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l’exécution et le règlement des marchés inférieurs à un seuil défini par décret lorsque les crédits sont inscrits au budget » ; que les deux autres délibérations produites datées des 20 janvier 2011 et 23 septembre 2011 sont rédigées dans les mêmes termes ; qu’il résulte de ces délibérations que le conseil municipal avait donné au maire son accord à l’engagement des dépenses incriminées ; que les mandats étant par ailleurs accompagnés d’un devis signé par le maire dûment compétent pour exprimer la volonté de l’organisme public en vertu des délibérations précitées, le manquement du comptable qui résulte du fait qu’il n’a pas suspendu le paiement des deux mandats avant d’obtenir lesdites délibérations n’a cependant pas créé de préjudice financier pour la commune ; qu’il convient donc d’infirmer le jugement en ce qu’il a, à tort, constitué M. X débiteur de la somme de 25 037,06 € au titre de l’exercice 2010 (article 5) et de la somme de 24 415,86 € au titre de l’exercice 2011 (article 6) ;

Attendu que par l’effet dévolutif de l’appel il appartient à la Cour de se prononcer en application du 2e alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée sur l’opportunité de mettre à la charge de M. X une somme non rémissible ;

Attendu que le paiement de dépenses sans vérifier la volonté de l’autorité délibérante d’engager lesdites dépenses est un manquement particulièrement grave ; qu’’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en mettant à la charge de M. X une somme non rémissible, au titre de chacun des exercices 2010 et 2011, d’un montant de 223  ;

S’agissant de la requête de M. Y

Sur les moyens invoqués à l’encontre de la charge n° 1 (exercice 2012) et de l’article 15 du dispositif du jugement entrepris

Attendu que la chambre régionale des comptes a constitué M. X débiteur de la somme de 607 € au titre de l’exercice 2012 pour défaut de diligences complètes, rapides et adéquates dans le recouvrement d’un titre de recettes n° 683 pris en charge le 17 mars 2008 pour un montant de 427 € et d’un titre de recettes n° 1437 pris en charge le 27 mai 2008 pour un montant de 180 € ;

Attendu que l’appelant conteste l’affirmation de la chambre régionale des comptes selon laquelle aucun élément ne permettait de démontrer l’insolvabilité des débiteurs des deux titres ; que s’agissant du titre n° 683, il indique qu’un avis d’opposition à tiers détenteur positif mais sans provision a été réceptionné par la caisse d’épargne le 8 octobre 2013 et retourné au comptable ; que, selon lui, cet avis vaut à la fois interruption de la prescription de l’action en recouvrement et reconnaissance par la banque de l’insolvabilité du débiteur ; que, s’agissant du titre n° 1437, il invoque le fait que cette créance était déjà compromise au moment de sa prise de fonctions le 1er mars 2012 car il s’agissait d’un frais de secours sur piste à l’encontre d’un débiteur de nationalité australienne qui avait changé d’adresse à quatre occasions et dont la dernière mise à jour de son dossier fiscal en France datait de 2011 ; qu’il conteste tout manquement de sa part dans le recouvrement dudit titre qui fait l’objet d’une admission en non-valeur par le conseil municipal le 18 décembre 2014 ; qu’enfin il relève une contradiction au sein de l’article 15 du jugement entrepris puisqu’alors que le débet porte sur une opération de recettes, le second alinéa dudit article indique : « ces dépenses n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif » ; qu’il sollicite l’infirmation dudit jugement ;

S’agissant du titre 683

Attendu que le moyen invoqué devant le juge d’appel ne porte que sur la partie du jugement entrepris par laquelle la chambre régionale des comptes a admis l’existence d’un lien de causalité entre le préjudice subi par la commune de Morzine et le manquement, qui n’est pas contesté ;

Attendu que l’indication fournie en octobre 2013 par la caisse d’épargne que le débiteur du titre n° 683 disposait de comptes insuffisants, ne constitue pas une preuve irréfutable de l’absence de solvabilité de ce débiteur au moment de l’émission du titre ou avant la prescription de son recouvrement ni ne préjuge de l’existence d’autres comptes dans d’autres organismes bancaires ; que la chambre régionale n’a pas commis une erreur de fait en considérant qu’aucun élément du dossier ne permet de démontrer l’insolvabilité du débiteur ; que le moyen doit donc être écarté ;

S’agissant du titre 1437

Attendu que la prescription de la créance est intervenue le 27 mai 2012, soit deux mois et vingt-sept jours après l’entrée en fonctions de M. Y le 1er mars 2012, toutefois sans que celui-ci n’émette de réserves sur ce titre lors de son entrée en fonctions ;

Attendu que l’instruction de première instance a fait apparaître l’absence de tout acte interruptif de la prescription de l’action en recouvrement qui aurait pu retarder la prescription du titre ; que s’agissant d’une somme modique dont le créancier est une personne physique, le recouvrement de ladite créance était définitivement compromis à la date de prise de fonctions de M. Y; que malgré l’absence de réserves formulées par M. Y sur la gestion de son prédécesseur, il convient d’accueillir le moyen de l’appelant et de décharger M. Y de toute responsabilité en ce qui concerne l’absence de recouvrement du titre de recettes n° 1437 ;

Attendu qu’il résulte de ce qui précède que le jugement doit être infirmé en ce qu’il a constitué M. Y débiteur de la somme de 607 € au titre de la charge n° 1 (exercice 2012) et par l’effet dévolutif de l’appel de le constituer débiteur de la somme de 427 € au titre de la même charge ;

Attendu que les conclusions du parquet général invitent le juge d’appel à engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, également visé par cette charge dans le réquisitoire du procureur financier dès lors qu’aucun élément du dossier n’atteste qu’il ait engagé la moindre diligence interruptive de l’action en recouvrement du titre n° 1437 ;

Attendu que le juge d’appel ne saurait mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X faute d’avoir été saisi d’un recours en ce sens d’une partie ayant intérêt à agir et M. X ayant été appelé à la contradiction ;

Attendu, par ailleurs, que la charge n° 1 à l’encontre de M. Y portant sur des recettes non recouvrées, le second alinéa de l’article 15 du jugement entrepris se référant au dispositif relatif au contrôle sélectif n’a pas lieu d’être ; qu’il y a donc lieu d’accueillir le moyen de l’appelant et d’infirmer ledit jugement en ce qu’il a, à tort, fait mention d’une disposition ne s’appliquant pas à un manquement en recettes ;

Sur les moyens invoqués à l’encontre de la charge n° 2 (exercice 2012) et de l’article 16 du dispositif du jugement entrepris

Attendu que la chambre régionale des comptes a déclaré M. Y débiteur de 720,63 € au titre de l’exercice 2012 pour défaut de diligences complètes, rapides et adéquates dans le recouvrement de deux titres de recettes pris en charge le 18 juillet 2008, n° 483 pour un montant de 111,83 € et A-257 pour un montant de 608,80 € et dont l’action en recouvrement aurait été prescrit le 17 juillet 2012 ;

Attendu que l’appelant a produit une copie d’écran Hélios attestant l’encaissement d’un chèque de 111,83 € le 10 décembre 2013 correspondant au titre de recettes n° 483 ; que s’agissant du titre A-257, il indique qu’un procès-verbal de carence du 27 juin 2012 a été produit à l’instruction et qu’une demande de non-valeur a été refusée par le conseil municipal en considération du patrimoine conséquent du débiteur ; que le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains a été saisi en vue de l’adjudication de son patrimoine mais que le jugement est toujours en attente ; qu’il considère donc que les diligences ont été complètes et adéquates ; qu’enfin il relève une contradiction au sein de l’article 16 du jugement entrepris puisqu’alors que le débet porte sur une opération de recettes, le second alinéa dudit article indique : « ces dépenses n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif » ; qu’il sollicite l’infirmation dudit jugement ;

 

 

Attendu que s’agissant du titre n° 483, M. Y a fourni la preuve du règlement de la créance enregistrée dans les écritures de la commune le 10 décembre 2013 soit avant la date du jugement entrepris ; que la preuve du recouvrement, même tardif, de la recette est de nature à dégager entièrement la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable ;

Attendu que s’agissant du titre A-257, M. Y n’apporte pas la preuve d’un acte valablement interruptif de la prescription puisque le procès-verbal de carence du 27 juin 2012 qu’il produit à l’appui de sa requête ne cite pas le débiteur, ne fait pas référence au titre en question et affiche un total dû de 19 012,59 € ; que le courrier de l’avocat daté du 19 septembre 2016, également fourni par M. Y n’est pas plus probant puisque, s’il atteste d’une affaire dont l’intitulé fait référence à un litige entre le Trésor et le débiteur, il ne comporte aucune référence au titre A-257, dont rien ne dit que son règlement soit inclus dans l’affaire en question ; que le moyen doit donc être écarté ;

Attendu que le parquet général, dans ses conclusions, invite le juge d’appel à prononcer un non-lieu au bénéfice de M. Y au motif que l’action en recouvrement du titre
A-257 a été prescrite le 17 juillet 2012 soit un peu plus de quatre mois après la prise de fonctions de M. Y le 1er mars 2012 et que la Cour pourra en déduire que le recouvrement du titre était déjà définitivement compromis ;

Attendu toutefois que le juge d’appel est tenu par les moyens de la requête ; qu’en ce qui concerne le titre A-257, M. Y n’invoque aucunement le caractère fortement compromis de cette créance au moment de sa prise de fonctions mais indique seulement que les diligences complètes ont été accomplies pour interrompre le délai de prescription ;

Attendu qu’il résulte de ce qui précède que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu’il a constitué M. Y débiteur de la somme de 720,63 € au titre de la charge n° 2 (exercice 2012) ; que par l’effet dévolutif de l’appel, il convient de constituer M. Y débiteur de la somme de 608,80 € au titre de la même charge ;

Attendu par ailleurs que la charge n° 2 à l’encontre de M. Y portant sur des recettes non recouvrées, le second alinéa de l’article 16 du jugement entrepris se référant au dispositif relatif au contrôle sélectif n’a pas lieu d’être ; qu’il y a donc lieu d’accueillir le moyen de l’appelant et d’infirmer ledit jugement en ce qu’il a, à tort, fait mention d’une disposition ne s’appliquant pas à un manquement en recettes ;

Sur le moyen invoqué relatif au respect des règles de contrôle sélectif des dépenses au titre de la charge n° 4 (exercice 2012)

Attendu que la chambre régionale a déclaré M. Y débiteur de 1 200 € au titre de l’exercice 2012 à raison du paiement d’indemnités d’exercice des missions de préfecture (IEMP) en l’absence de délibération du conseil municipal et a indiqué dans l’article 17 de son jugement qu’aucun élément probant ne permet de s’assurer du respect du contrôle sélectif de la dépense ;

Attendu que M. Y ne conteste ni le manquement ni le préjudice mais relève qu’un contrôle sélectif de la dépense était effectivement en place et appliqué ; qu’il demande l’infirmation du jugement en ce qui concerne la mention relative au contrôle sélectif qui lui interdirait de bénéficier des dispositions du 2e alinéa du IX de la loi du 23 février 1963 susvisées ;

Attendu que le comptable a produit un plan de contrôle sélectif de la dépense applicable pour l’exercice 2012 validé par le directeur départemental des finances publiques le 28 juin 2012 ; que le manquement du comptable constaté par la chambre régionale se fonde sur quatre bulletins de paie du mois de décembre 2012 mentionnant chacun une IEMP de 30  ; que le plan de contrôle sélectif de la dépense ne prévoyait pas de contrôle exhaustif des IEMP en décembre 2012 ; que c’est donc à tort que le juge de premier ressort a considéré qu’aucun élément probant ne permettait de s’assurer du respect du contrôle sélectif de la dépense ; que le moyen doit donc être accueilli ; qu’il convient dès lors d’infirmer le jugement sur ce point ;

Sur le moyen invoqué relatif au respect des règles de contrôle sélectif des dépenses au titre de la charge n° 7 (exercice 2012)

Attendu que la chambre régionale a déclaré M. Y débiteur de 1 756,28 € au titre de l’exercice 2012 à raison du paiement d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) au-delà des plafonds autorisés et a indiqué dans l’article 18 de son jugement qu’aucun élément probant ne permet de s’assurer du respect du contrôle sélectif de la dépense ;

Attendu que M. Y ne conteste ni le manquement ni le préjudice mais relève qu’un contrôle sélectif de la dépense était effectivement en place et appliqué ; qu’il demande l’infirmation du jugement en ce qui concerne la mention relative au contrôle sélectif qui lui interdirait de bénéficier des dispositions du 2e alinéa du IX de la loi du 23 février 1963 susvisées ;

Attendu que le plan de contrôle sélectif de la dépense produit prévoit notamment que le contrôle exhaustif du paiement des IHTS devait se faire au mois de juillet 2012 alors que le manquement du comptable constaté par la chambre régionale se fonde sur deux bulletins de paie du mois d’avril 2012 et un bulletin du mois de septembre 2012 ; que les deux bulletins de paie du mois d’avril 2012 portent sur une dépense effectuée à une date à laquelle le plan de contrôle sélectif n’était pas encore entré en vigueur et qu’un contrôle exhaustif des IHTS aurait donc dû être effectué ; qu’en revanche, s’agissant des paiements effectués en septembre 2012, c’est à tort que la chambre régionale a considéré qu’aucun élément probant ne permettait d’assurer du respect du contrôle sélectif de la dépense ; que le moyen doit donc être accueilli ; qu’il convient dès lors d’infirmer partiellement le jugement sur ce point ;

Sur le moyen invoqué relatif au respect des règles de contrôle sélectif des dépenses au titre de la charge n° 8 (exercice 2012)

Attendu que la chambre régionale a déclaré M. Y débiteur de 11 013,32 € au titre de l’exercice 2012 à raison du paiement d’indemnités forfaitaires pour travaux supplémentaires (IFTS) en l’absence de délibération du conseil municipal et a indiqué dans l’article 19 de son jugement qu’aucun élément probant ne permet d’assurer du respect du contrôle sélectif de la dépense ;

 

Attendu que M. Y ne conteste ni le manquement ni le préjudice mais relève qu’un contrôle sélectif de la dépense était effectivement en place et appliqué ; qu’il demande l’infirmation du jugement en ce qui concerne la mention relative au contrôle sélectif qui lui interdirait de bénéficier des dispositions du 2e alinéa du IX de la loi du 23 février 1963 susvisées ;

 

Attendu que le plan de contrôle sélectif de la dépense produit prévoit notamment que le contrôle exhaustif du paiement des IFTS devait se faire au mois de novembre 2012 alors que le manquement du comptable constaté par la chambre régionale se fonde sur quatre bulletins de paie du mois de décembre 2012 ; qu’il ressort de ces éléments que la chambre régionale n’était pas en mesure d’affirmer que le comptable n’avait pas respecté le plan de contrôle sélectif ; que le moyen doit donc être accueilli ; qu’il convient dès lors d’infirmer le jugement sur ce point ;

 

Par ces motifs,

DÉCIDE :

Article 1  Les requêtes de M. X et Y contre le jugement n° 2016-0042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes sont jointes.


En ce qui concerne M. X

Charge n° 1 – Exercice 2010

Article 2 - Le jugement 2016-0042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes est annulé en ce qu’il a, à tort, constitué M. X débiteur de la commune de Morzine à hauteur de 295 €.

Article 3 – Il n’y a pas lieu à charge à l’encontre de M. X.

Charge n° 3 – Exercice 2010

Article 4 Le jugement n° 2016-042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes est infirmé en ce qu’il a, à tort, constitué M. X débiteur de la commune de Morzine à hauteur de 25 037,06 €.

Article 5Il est mis à la charge de M. X une somme non rémissible de 223 €.

Charge n° 3 – Exercice 2011

Article 6 – Le jugement n° 2016-0042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes est infirmé en ce qu’il a, à tort, constitué M. X débiteur de la commune de Morzine à hauteur de 24 415,86 €.

Article 7 – Il est mis à la charge de M. X une somme non rémissible de 223 €.

En ce qui concerne M. Y :

Charge n° 1 – Exercice 2012

Article 8Le jugement 2016-0042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes est infirmé en ce qu’il a constitué M. Y débiteur de la commune de Morzine à hauteur de 607 €. 

Article 9 Monsieur Y est constitué débiteur de la commune de Morzine de la somme de 427 € augmentée des intérêts de droit à compter du 11 juin 2015.

Charge n° 2 – Exercice 2012

Article 10 Le jugement n° 2016-0042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes est infirmé en ce qu’il a constitué M. Y débiteur de la commune de Morzine à hauteur de 720,63 €.

Article 11 - Monsieur Y est constitué débiteur de la commune de Morzine de la somme de 608,80 € augmentée des intérêts de droit à compter du 11 juin 2015.

Charge n° 4 – Exercice 2012

Article 12 - Le jugement n° 2016-0042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes est infirmé en ce qu’il a considéré que ces paiements n’entraient pas dans une catégorie faisant l’objet de règles de contrôle sélectif de la dépense.

Les paiements entraient dans une catégorie de dépenses faisant l’objet d’un contrôle sélectif de la dépense qui a été respecté.


Charge n° 7 – Exercice 2012

Article 13 - Le jugement n° 2016-0042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes est partiellement infirmé en ce qu’il a considéré que l’ensemble des paiements n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif de la dépense.

Les paiements effectués en avril 2012 n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif de la dépense. Les paiements effectués en septembre 2012 entraient dans une catégorie de dépenses faisant l’objet d’un contrôle sélectif qui a été respecté.

Charge n° 8 – Exercice 2012

Article 14 - Le jugement n° 2016-0042 du 10 août 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes est infirmé en ce qu’il a considéré que ces paiements n’entraient pas dans une catégorie faisant l’objet de règles de contrôle sélectif de la dépense.

Les paiements entraient dans une catégorie de dépenses faisant l’objet d’un contrôle sélectif de la dépense qui a été respecté.

Fait et jugé par M. Jean-Philippe VACHIA, président de chambre, président de séance, M. Yves ROLLAND, président de section, Mme Anne FROMENT-MEURICE, présidente de chambre maintenue en activité, M. Jean-Yves BERTUCCI, conseiller maître, Mme Dominique DUJOLS, conseillère maître et M. Jean-Luc GIRARDI, conseiller maître.

En présence de Mme Stéphanie MARION, greffière de séance.

 

 

 

 

 

 

Stéphanie MARION

 

 

 

 

 

 

 

Jean-Philippe VACHIA

 

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.

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