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QUATRIEME CHAMBRE ------- Première section ------- Arrêt n° S 2018-0372
Audience publique du 25 janvier 2018
Prononcé du 22 février 2018 | ARRETES CONSERVATOIRES DE DEBET
CENTRE CULTUREL ET DE COOPERATION LINGUISTIQUE D’AMMAN (JORDANIE)
Exercices 2009 et 2010
Rapport n° R-2017-1700-1 |
République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire n° 2016-86 RQ-DB en date du 15 décembre 2016, par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi la quatrième chambre de la Cour des comptes de présomptions de charges, en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de MM. X et Y, agents comptables du centre culturel et de coopération linguistique (CCCL) d’Amman (Jordanie), au titre d’opérations relatives aux exercices 2009 et 2010 ;
Vu la notification dudit réquisitoire le 19 décembre 2016 à M. X qui en a accusé réception le 21 décembre 2016, à M. Y, qui en a accusé réception le 21 décembre 2016 et à Madame la Directrice du Centre culturel et de coopération linguistique (CCCL) d’Amman qui en a accusé réception le 8 janvier 2017 ;
Vu les arrêtés conservatoires de débet en date du 2 décembre 2014 transmis à la Cour le 28 juillet 2015 par lesquels le directeur spécialisé des finances publiques pour l’étranger a mis en jeu la responsabilité de M. X et de M. Y, en leur qualité d’agents comptables du centre culturel et de coopération linguistique d’Amman, au titre des exercices 2009 et 2010, ainsi que la réponse de M. Y en date du 28 février 2015 ;
Vu les bordereaux d’injonctions du directeur spécialisé des finances publiques pour l’étranger en date du 1er août 2014 sur la gestion 2009 et du 5 août 2014 sur la gestion 2010 et les accusés de réception de M. X, en date du 31 octobre 2014 sur les gestions 2009 et 2010 et de M. Y, en date du 1er octobre, sur la gestion 2010 ;
Vu les comptes des exercices 2009 et 2010 rendus en qualité de comptables du centre culturel et de coopération linguistique d’Amman, par MM. X, du 1er janvier 2009 au 31 août 2010 et Y, du 1er septembre au 31 décembre 2010 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu l’arrêté du ministre des affaires étrangères et européennes en date du 30 décembre 2010, nommant, avec effet au 15 novembre 2010, M. Y comptable commis d’office afin d’établir le compte financier 2009 du CCCL, « compte tenu de la défaillance du précédent agent comptable qui n’a pu produire ledit compte » ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963, dans sa rédaction modifiée par l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique alors en vigueur ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi de finances de 1963 modifié ;
Vu les lois et règlements applicables aux établissements de diffusion culturelle à l’étranger dotés de l’autonomie financière, notamment le décret n° 76-832 du 24 août 1976 modifié relatif à l’organisation financière de certains établissements ou organismes de diffusion culturelle et d’enseignement dépendant du ministère des affaires étrangères ;
Vu l’instruction M9-7 sur l’organisation financière et comptable des établissements ou organismes de diffusion culturelle à l’étranger ;
Vu l’instruction codificatrice n° 03-060-B du 17 novembre 2003 relative à la nomenclature des pièces justificatives de l’Etat ;
Vu les bordereaux d’observations du trésorier-payeur général pour l’étranger en date des 8 novembre 2012, sur la gestion 2009 et 27 février 2013 sur la gestion 2010, ensemble les pièces du dossier à l’appui du réquisitoire et notamment les réponses à celui-ci de M. X en date du 8 mars 2017 et de M. Y, en date du 28 février 2017 ;
Vu le rapport de M. Olivier BREUILLY, conseiller référendaire, chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du Procureur général n° 029 en date du 19 janvier 2018 ;
Entendu lors de l’audience publique du 25 janvier 2018, M. Olivier BREUILLY, en son rapport, Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du ministère public, les comptables informés de l’audience n’étant ni présents, ni représentés ;
Entendu en délibéré Mme Anne FROMENT-MEURICE, présidente de chambre maintenue en activité, réviseure, en ses observations ;
Sur le régime de responsabilité applicable
Attendu que l’article 90 de la loi du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 a défini des règles nouvelles pour la mise en jeu de la responsabilité pécuniaire des comptables publics ; que selon le II de l’article 90 précité, le nouveau régime « entre en vigueur le 1er juillet 2012 » et « les déficits ayant fait l'objet d'un premier acte de mise en jeu de la responsabilité d'un comptable public ou d'un régisseur avant cette date demeurent régis par les dispositions antérieures » ;
Attendu que le premier acte de mise en jeu de la responsabilité des agents comptables des centres culturels français à l’étranger, dont les comptes sont apurés par le directeur spécialisé des finances publiques pour l’étranger, est la date de réception par le comptable du bordereau d’injonctions notifié par le directeur ;
Attendu que MM. X et Y ont accusé réception des injonctions formulées à leur encontre au titre de leurs gestions respectives sur les exercices 2009 et 2010 en octobre 2014 ; qu’en conséquence les charges qui en résultent dans les arrêtés conservatoires de débet susvisés sont à juger selon les dispositions de la loi de finances du 28 décembre 2011 ;
Sur les charges conservatoires n° 1 à 7 pour l’exercice 2009
Attendu que, par le réquisitoire susvisé reprenant les charges énumérées dans l’arrêté conservatoire de débet portant sur l’exercice 2009, il est fait grief à M. X d’avoir procédé à des paiements d’une part, en l’absence de crédits suffisants aux comptes 613, 614, 615, 616, 618 et 641 du CCCL d’Amman à hauteur de 57 386,887 dinars jordaniens (injonction n° 1), et d’autre part, en l’absence de pièces justificatives établissant la validité des créances (injonctions 2 à 7), pour un montant de 19 253,283 dinars jordaniens (JOD), soit au total pour 76 640,170 JOD ; que les dépenses insuffisamment justifiées concernaient onze mandats pour le compte 6121 « Personnel mis à disposition par une autre personne morale » (injonction n° 2), le remboursement de frais de taxi au directeur du centre au vu d’un courriel et sans facture (injonction n° 3), le paiement de frais de réception sans attestation signée du directeur (injonction n° 4), le remboursement de location et transport de piano au directeur sans facture et au vu d’un courriel non traduit en français (injonction n° 5), le paiement de primes de caisse non prévues au contrat de travail d’un agent de droit local, ni au budget (injonction n° 6) et l’absence d’un mandat et de ses pièces justificatives figurant sur feuillet budgétaire mais non transmis à l’appui du compte financier (injonction n° 7) ;
Attendu que, dans sa réponse susvisée du 8 mars 2017 au réquisitoire, M. X, reprenant les réponses apportées aux observations et injonctions du directeur spécialisé des finances publiques pour l’étranger susvisées, souhaite indiquer à la Cour des comptes « qu’il n’a jamais été formé préalablement à sa prise de poste, qu’il a donc occupé ces fonctions sans avoir pu acquérir les compétences nécessaires et qu’il incombait à son employeur, selon un arrêt de la Cour de cassation du 5 juin 2013, d’assurer son adaptation à son poste de travail et de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi » ; qu’il demande à la Cour en conséquence de le décharger en la matière ;
Attendu que les seuls arguments présentés par M. X en réponse aux charges prononcées à son encontre sur l’exercice 2009 ne peuvent être pris en compte par la Cour, dans l’exercice de son office, mais qu’ils pourront être invoqués à l’appui d’une demande éventuelle de remise gracieuse ; qu’il y a lieu de considérer, au vu de cette réponse, que M. X ne conteste pas les charges conservatoires n° 1 à 7 retenues à son encontre sur les opérations de l’exercice 2009 ;
Attendu que M. X, en procédant au paiement de dépenses d’une part, en dépassement des crédits budgétaires ouverts et d’autre part, en l’absence de pièces justificatives suffisantes a manqué aux obligations de contrôle, pour les comptables publics, de la disponibilité des crédits prévue à l’article 12 du décret du 29 décembre 1962 susvisé et de la production des justifications prévue à l’article 13 dudit décret pour établir la validité de la créance ; que l’ensemble de ces manquements justifient la mise en jeu de sa responsabilité personnelle et pécuniaire, en application du troisième alinéa du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ;
Attendu que, pour établir les conséquences de ces manquements sur la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, en application du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précité, il y a lieu de distinguer en l’espèce l’absence de contrôle de la disponibilité des crédits (injonction n° 1) et celle de la production des justifications (injonctions n °2 à 7) ;
Attendu que si les dépenses payées par M. X en dépassement des crédits ouverts par l’autorité budgétaire compétente à hauteur de 57 386,887 JOD sont de nature à causer un préjudice financier à la personne publique qui n’en a pas décidé le principe, il y a lieu de prendre en compte l’intervention de la décision budgétaire modificative n° 1 qui a ouvert sur l’exercice 2009 des crédits supplémentaires permettant de couvrir les dépassements visés à l’injonction n° 1 ; qu’il résulte du dossier que cette décision budgétaire modificative n° 1 a été présentée par l’ordonnateur du centre culturel d’Amman à l’autorité budgétaire compétente le 10 février 2009 et qu’elle n’a été approuvée par le ministre des affaires étrangères que le 10 juin 2010 ; que le caractère anormalement tardif de cette décision budgétaire modificative au regard de la date de sa demande, au début de l’année 2009 au cours de laquelle les dépassements de crédits ont eu lieu, est au demeurant couramment constaté au sein des établissements de diffusion culturelle à l’étranger ; qu’ainsi et en dépit du retard de son intervention, cette décision modificative doit être considérée comme manifestant la volonté de l’autorité budgétaire d’ouvrir les crédits nécessaires sur l’exercice 2009 à la couverture de l’ensemble des paiements effectués ; qu’en conséquence le manquement du comptable doit être regardé en l’espèce comme n’ayant pas causé de préjudice au CCCL d’Amman ;
Attendu qu’aux termes du 2ème alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable […] n’a pas causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret en Conseil d’Etat en fonction du niveau des garanties mentionnées au II… » ;
Attendu que le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 susvisé dispose que « La somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément au 2ème alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré » ;
Attendu, compte tenu de la gravité du manquement que constitue le paiement de dépenses en l’absence de crédits budgétaires suffisants, qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce, en mettant à la charge de M. X, une somme non rémissible maximale fixée à 1,5 pour mille du montant de son cautionnement qui s’élève à 10 600 € ;
Attendu que les paiements intervenus en l’absence de pièces justificatives établissant la validité de la créance (injonctions n° 2 à 7) doivent être considérés comme indus et ont donc causé un préjudice financier au CCCL d’Amman ;
Attendu qu’aux termes du 3ème alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’il y a lieu, en conséquence, de constituer M. X débiteur de la somme de 19 253,283 JOD ;
Attendu qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 31 octobre 2014, date de réception par M. X du bordereau d’injonctions du directeur spécialisé des finances publiques pour l’étranger ;
Sur la charge conservatoire n° 1 pour l’exercice 2010
Attendu que, par le réquisitoire susvisé reprenant l’injonction n° 1 de l’arrêté conservatoire de débet portant sur l’exercice 2010, il est fait grief à M. X d’avoir procédé, au cours de l’exercice 2010 à des paiements pour un montant total de 507 282,855 JOD, en l’absence de l’attestation de service fait sur les mandats et leurs bordereaux ainsi qu’à des paiements avant mandatement, de surcroît également sans attestation de service fait par l’ordonnateur du centre culturel et de coopération linguistique d’Amman ;
Attendu que, dans sa réponse susvisée du 8 mars 2017 au réquisitoire, M. X, reprenant, comme indiqué pour la gestion 2009, les réponses apportées aux observations et injonctions du directeur spécialisé des finances publiques pour l’étranger susvisées, souhaite indiquer à la Cour des comptes « qu’il n’a jamais été formé préalablement à sa prise de poste, qu’il a donc occupé ces fonctions sans avoir pu acquérir les compétences nécessaires et qu’il incombait à son employeur, selon un arrêt de la Cour de cassation du 5 juin 2013, d’assurer son adaptation à son poste de travail et de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi » ; qu’il demande à la Cour en conséquence de le décharger en la matière ;
Attendu que les seuls arguments présentés par M. X en réponse à la charge conservatoire prononcée à son encontre sur l’exercice 2010 ne peuvent être pris en compte par la Cour, dans l’exercice de son office mais qu’ils pourront être invoqués à l’appui d’une demande éventuelle de remise gracieuse ; qu’il y a lieu de considérer, au vu de cette réponse, que M. X ne conteste pas la présomption de charge n° 1 retenue à son encontre sur les opérations de l’exercice 2010 ;
Attendu qu’il ressort des pièces au dossier que l’agent comptable a pris en charge des dépenses sur la base de mandats ou de bordereaux de mandats non assortis de l’attestation de service fait de l’autorité compétente, ainsi que des dépenses avant mandatement, également sans attestation du service fait ; qu’il a ainsi manqué à l’obligation de contrôle de la validité de la dette qui doit porter, en application de l’article 13 du décret du 29 décembre 1962 susvisé sur la justification du service fait et la production des justifications ; qu’il y a lieu dès lors de mettre en jeu sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu que les paiements en cause, dénués de fondement juridique, doivent être considérés comme indus et comme ayant causé un préjudice financier au CCCL d’Amman ;
Attendu qu’aux termes du 3ème alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’il y a lieu, en conséquence, de constituer M. X, débiteur de la somme de 507 282,855 dinars jordaniens, au titre de l’exercice 2010 ;
Attendu qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 31 octobre 2014, date de réception par M. X du bordereau d’injonctions du directeur spécialisé des finances publiques pour l’étranger ;
Sur la charge conservatoire n° 2 pour l’exercice 2010
Attendu que, par le réquisitoire susvisé reprenant l’injonction n° 2 de l’arrêté conservatoire de débet portant sur l’exercice 2010, il est reproché à M. Y des paiements, à hauteur de 13 118,043 JOD, en dépassement de crédits sur le compte 666 « pertes de change » ;
Attendu que, dans sa réponse du 28 février 2017 susvisée, l’agent comptable fait valoir les circonstances exceptionnelles, notamment le fait qu’il ait été nommé comptable d’office du centre culturel et de coopération linguistique d’Amman en novembre 2010 pour établir les comptes 2009, son prédécesseur n’ayant pas regagné son poste à la suite d’un arrêt maladie ; qu’il insiste sur les nombreux obstacles qui ont entravé son travail et notamment l’absence de comptabilité générale et de comptabilité budgétaire pour 2010, l’absence de formation du personnel local et ses difficultés pour se rendre à Amman, alors qu’il était basé à Damas ; qu’il fait valoir aussi la lourdeur de sa charge qui incluait les quatre agences comptables de quatre EAF de la région, dont certaines étaient dans le même état de délabrement que le CCCL de Jordanie ; qu’il invoque en conclusion de son courrier « un cas de force majeure, dans la mesure où l’accumulation des difficultés rendait pratiquement impossible la reddition d’un compte financier de l’exercice de 2010 dans des conditions optimales » ;
Attendu que le moyen invoqué par le comptable ne saurait être apprécié comme un cas de force majeure, les difficultés invoquées ne permettant pas de le caractériser par les trois critères d’extériorité, d’imprévisibilité et d’irrésistibilité non réunis en l’espèce ;
Attendu cependant que dans sa réponse susvisée en date du 28 février 2015 à l’arrêté conservatoire de débet du directeur spécialisé des finances publiques pour l’étranger, M. Y fait valoir que le compte 666 « Pertes de change » retrace des opérations de pertes de change qui n’impliquent aucun décaissement, ni paiement ; que ne s’agissant que d’opérations pour ordre, M. Y se demande comment rembourser une somme qui n’était jamais sortie des caisses du CCCL de Jordanie ; qu’il soutient que les écritures contestées par la décision conservatoire de charges n’ayant pour contrepartie aucun compte de caisse et n’ayant donné lieu à aucune extraction de deniers du centre, la jurisprudence est constante pour ce type d’espèces et délivre de toute responsabilité les agents comptables mis en cause ;
Attendu que l’instruction codificatrice M 9-7 susvisée prévoit que lorsque des fluctuations de change interviennent en cours d’exercice, le directeur de l’établissement émet un mandat au profit de l’agent comptable au titre du C 666, s’il s’agit d’une perte de change ; qu’elle précise qu’il appartient au directeur d’inscrire, à ce titre, des montants prévisionnels estimatifs au budget concerné ; que si des fluctuations de change dépassent les prévisions remettant en cause l’équilibre du budget, une décision modificative assortie de toutes justifications utiles s’impose ;
Attendu que les mandats 53, 54, 56, 61, 62 et 64 du 31 décembre 2010 retraçant les opérations de pertes de change incriminées sont chacun qualifiés de « mandat pour ordre » et sont accompagnés de certificats administratifs du directeur de l’établissement justifiant celles-ci en application de l’instruction précitée ;
Attendu que la responsabilité personnelle et pécuniaire d’un comptable public ne peut être engagée que dans des cas strictement limités et énoncés au quatrième alinéa de l’article 60-I de la loi de finances du 23 février 1963 susvisée, qui sont un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs, un non recouvrement de recette, un paiement irrégulier de dépense et l’indemnisation à raison du fait du comptable d’un autre organisme public ou d’un tiers ;
Attendu que le comptable, en prenant en charge le 31 décembre 2010 des mandats pour ordre enregistrant des pertes de change, n’a pas ouvert sa caisse ; qu’en conséquence ces écritures n’ayant qu’une incidence budgétaire, ne sauraient, même si le montant prévisionnel estimatif des crédits était insuffisant, être considérés comme des paiements, au sens de la comptabilité publique ; qu’il n’y a pas lieu, dans ces conditions, à retenir un manquement à ce titre à la charge de M. Y ;
Par ces motifs,
dÉcide :
Article 1er : M. X devra s’acquitter d’une somme de 15 €, en application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, en ce qui concerne la charge conservatoire n° 1 au titre de l’exercice 2009 ; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en application du IX de l’article 60 précité ;
Article 2 : M. X est constitué débiteur de la somme de 19 253,283 dinars jordaniens (soit 19 133,66 € au taux de chancellerie en vigueur au 31 décembre 2009), augmentée des intérêts de droit à compter du 31 octobre 2014, en ce qui concerne les charges conservatoires n° 2 à 7 sur l’exercice 2009 ;
Article 3 : M. X est constitué débiteur de la somme de 507 282,855 dinars jordaniens (soit 532 647 € au taux de chancellerie en vigueur au 31 décembre 2010), augmentée des intérêts de droit à compter du 31 octobre 2014, au titre de la charge conservatoire n° 1 de l’exercice 2010 ;
Article 4 : Il n’y a pas lieu à la mise en jeu de la responsabilité de M. Y, au titre de la charge conservatoire n° 2 sur l’exercice 2010.
Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section. Présents : M. Yves ROLLAND, président de section, président de la formation ; Mme Anne FROMENT-MEURICE, présidente de chambre maintenue,
MM. Jean-Yves BERTUCCI, Olivier ORTIZ, conseillers maîtres, et Mme Dominique DUJOLS, conseillère maître.
En présence de Mme Marie-Hélène PARIS-VARIN, greffière de séance.
Marie-Hélène PARIS-VARIN |
Yves ROLLAND |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.
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