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S2018-0495
QUATRIÈME CHAMBRE ------- Première section ------- Arrêt n° S2018-0495
Audience publique du 22 février 2018
Prononcé du 22 mars 2018
| CENTRE HOSPITALIER DE CANNES (ALPES-MARITIMES)
Appel d’un jugement de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur
Rapport n° R 2017-1285
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République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu la requête enregistrée le 7 octobre 2016 au greffe de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur, par laquelle le procureur financier près ladite chambre, a élevé appel du jugement n° 2016-0033 du 9 août 2016 par lequel ladite chambre régionale a mis à la charge du comptable du centre hospitalier de Cannes, M. X, une somme non rémissible de 265,50 € notamment pour avoir payé, au cours de l’exercice 2013, une prime d’activité à un attaché principal d’administration hospitalière contractuel en l’absence de pièces justificatives suffisantes (charge n° 5) ;
Vu les pièces de la procédure suivie en première instance ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l'article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le mémoire du directeur du centre hospitalier de Cannes en date du 10 novembre 2016, parvenu au greffe de la chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d'Azur
le 14 novembre ;
Vu le rapport de M. Patrick BONNAUD, conseiller référendaire, chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du Procureur général n° 088 du 16 février 2018 ;
Entendu lors de l’audience publique du 22 février 2018, M. BONNAUD, conseiller référendaire en son rapport, M. Benoît GUERIN, avocat général, en les conclusions du ministère public ; les parties informées de l’audience n’étant ni présentes, ni représentées ;
Entendu en délibéré M. Yves ROLLAND, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;
Attendu que, par le jugement entrepris susvisé, la chambre régionale a mis en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable du centre hospitalier de Cannes pour avoir réglé à un attaché principal contractuel une prime d’activité sans disposer des justifications prévues par la réglementation ; qu’elle a cependant considéré que le manquement du comptable n’avait pas causé de préjudice financier à l’établissement
(charge n° 5) ;
Attendu que l’appelant demande à la Cour d’infirmer le jugement n° 2016-0033 du 9 août 2016 de la chambre régionale des comptes en ce qu’il a estimé, pour la charge n° 5, que le manquement du comptable n’avait pas causé de préjudice financier au centre hospitalier de Cannes et en ce qu’il a condamné ledit comptable au paiement d’une somme non rémissible commune pour les charges n° 4, 5 et 6 alors qu’il aurait dû le condamner, pour la charge n° 5, à un débet à hauteur du paiement en cause, d’un montant de 3 775,17 €, débet augmenté des intérêts de droit à compter du 11 février 2016 ;
Attendu que l’appelant soutient que, en l’absence de contrat et de décision, la prime d’activité était indue et que donc son paiement a nécessairement causé un préjudice financier au centre hospitalier ; qu’il relève que le contrat ne prévoyait pas le paiement de ladite prime ; que la décision qui attribue la prime n’a aucune valeur puisqu’elle vise une disposition du contrat inexistante ; qu’au moment du paiement, il n’existait donc ni disposition contractuelle, ni décision de l’ordonnateur ; que, de plus, la décision était partiellement rétroactive, puisqu’elle attribuait, en novembre, une prime mensuelle au titre des mois de janvier à décembre 2013 ;
Attendu qu’il est établi que le contrat liant le centre hospitalier de Cannes à l’attaché principal ne comportait pas, dans sa rédaction en vigueur à la date du paiement, de disposition spécifique relative à une prime d’activité ; que cette circonstance fonde le manquement retenu par la chambre régionale des comptes et non contesté par l’appelant ;
Attendu que pour déterminer si la dépense est ou non indue, il convient de rechercher, outre la réalité du service fait, la volonté expresse et préalable de l'ordonnateur ;
Attendu qu'au cas d'espèce, la réalité du service fait n'est pas contestée ;
Attendu que le parquet général, dans ses conclusions, considère qu’il est de jurisprudence constante qu’en matière de rémunérations la dépense est regardée comme indue lorsque les primes et indemnités en cause ont été versées sans texte législatif ou réglementaire ou, s’agissant de personnels contractuels, en l’absence de contrat ; qu’au cas d’espèce il considère que la décision d’attribution signée du directeur ne pouvait constituer un fondement juridique valable du versement de cette prime, en l’absence de base contractuelle ; que, selon lui, le fait que la décision d’attribution ait visé le contrat de travail mais dans une version caduque atteste que l’ordonnateur considérait bien le contrat comme le fondement juridique nécessaire au versement de cette prime ; qu’il invite la Cour à accueillir le moyen de l’appelant ;
Attendu que l’article L.6143-7 du code de la santé publique donne compétence au directeur d’un centre hospitalier pour régler les affaires de l’établissement autres que celles énumérées aux 1° à 15 ° dudit article et autres que celles qui relèvent de la compétence du conseil de direction énumérées à l’article L.6143-1 ; que le recrutement et la rémunération du personnel contractuel ne comptent pas parmi ces exceptions ; qu’il relevait donc de la seule autorité du directeur de signer le contrat de travail de l’attaché principal concerné comme les divers avenants qui se sont succédés jusqu’en décembre 2012 et d’attribuer ou non la prime d’activité à l’attaché principal ;
Attendu que, si le fondement juridique de l’octroi de la prime est le contrat de travail comme le souligne le ministère public, la décision d’accorder une prime pour l’année 2013 aurait dû être précédée de la signature d’un nouvel avenant prévoyant cet octroi et se substituant à l’avenant n° 5 en date du 9 janvier 2012 ; que ce nouvel avenant aurait été signé pour la partie employeur par le directeur du centre hospitalier comme l’a été la décision d’attribution de la prime ; qu’il est patent que la volonté de l’ordonnateur matérialisée dans la décision individuelle était, sans ambiguïté, d’accorder cette prime ; que cette dépense, bien qu’irrégulière n’en était ainsi pas moins due ; qu’en conséquence le manquement du comptable n’a pas causé de préjudice au centre hospitalier ;
Attendu enfin que, contrairement à ce que soutient le requérant, cette décision n’emporte pas d’effet rétroactif, en ce que la prime est annuelle et non mensuelle et qu’elle a été versée en une fois, postérieurement à la prise de la décision en décembre 2013 ; que ce moyen manque donc en fait ;
Attendu qu’il résulte de ce qui précède que c’est donc à bon droit que la chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d'Azur a mis à la charge du comptable la somme prévue par le deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963, liquidée conformément au décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 ; qu’il convient donc de rejeter la requête de l’appelant ;
Par ces motifs,
DECIDE :
Article unique. – La requête du procureur financier près la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur est rejetée.
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Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section. Présents :
M. Jean-Philippe VACHIA, président de chambre, président de séance, M. Yves ROLLAND, président de section, Mme Anne FROMENT-MEURICE, présidente de chambre maintenue en activité, M. Jean-Yves BERTUCCI, conseiller maître et Mme Dominique DUJOLS, conseillère maître.
En présence de Mme Stéphanie MARION, greffière de séance.
Stéphanie MARION
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Jean-Philippe VACHIA
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En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.
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