Jugement n° 2017-0021  
Audience publique du 2 octobre 2017  
Prononcé du 6 novembre 2017  
COMMUNE DE VILLENEUVE-SUR-LOT  
047036323)  
Département de Lot-et-Garonne  
(
Poste comptable : Centre des finances publiques  
de Villeneuve-sur-Lot municipale  
Exercices 2010 et 2011  
République Française  
Au nom du peuple français  
La Chambre,  
Vu le réquisitoire n° 2016-0056 en date du 30 novembre 2016 par lequel le procureur  
financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et  
pécuniaire de M. Patrick X..., comptable de la commune de Villeneuve-sur-Lot, au titre  
d’opérations relatives aux exercices 2010 et 2011, notifié au comptable concerné le 23  
décembre 2016 et au maire de Villeneuve-sur-Lot le 22 décembre 2016 ;  
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la commune de Villeneuve-sur-Lot par  
er  
M. Patrick X... du 1 janvier 2010 au 31 décembre 2011 ;  
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;  
Vu le code des juridictions financières ;  
Vu le code général des collectivités territoriales ;  
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité  
publique ;  
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du  
VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifiée ;  
Vu le décret n°2015-1199 du 30 septembre 2015 modifiant les dispositions relatives au siège  
et au ressort des chambres régionales des comptes aux articles R. 212-1 et 2 du code des  
juridictions financières ;  
Vu l’arrêté du Premier président de la Cour des comptes en date du 24 novembre 2015  
modifié le 22 décembre 2015 portant délégation des procédures mentionnées à l’article  
L. 212-1 du code des juridictions financières ;  
Vu la décision du président de la formation de jugement, en date du 14 décembre 2016,  
désignant M. Philippe HONOR, président de section, comme rapporteur chargé d’instruire le  
réquisitoire susvisé ;  
Vu les lettres du 26 janvier 2017 par lesquelles le rapporteur a demandé au comptable et à  
l’ordonnateur dadresser à la chambre dans un délai de six semaines à compter de la  
réception de ce courrier leurs observations sur la charge soulevée par le réquisitoire  
n° 2016-0056 susvisé ;  
3, place des Grands Hommes CS 30059 33064 BORDEAUX CEDEX - www.ccomptes.fr  
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/ 5  
Vu le courrier du 10 mars 2017, enregistré au greffe le 13 mars, par lequel M. Patrick X... a  
transmis ses réponses à la chambre, et l’absence de réponse de l’ordonnateur, à qui la  
réponse de M. X... avait été transmise le 15 mars 2017 ;  
Vu le rapport n° 2017-0308 déposé au greffe le 28 août 2017 par M. Philippe HONOR ;  
Vu la notification aux parties de la date de tenue de l’audience publique par courriers du  
6
septembre 2017, dont M. X... a accusé réception le 9 septembre 2017 et le maire de  
Villeneuve-sur-Lot le 8 septembre 2017 ;  
Vu les conclusions n° 2017-0308 du procureur financier en date du 29 septembre 2017 ;  
Vu les pièces du dossier ;  
Entendus lors de l’audience publique du 2 octobre 2017 M. Philippe HONOR, président de  
section, en son rapport, M. Benoit BOUTIN, procureur financier, en ses conclusions, M. Patrick  
X..., comptable et le maire de Villeneuve-sur-Lot n’étant ni présents, ni représentés à  
l’audience ;  
Après en avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier ;  
Sur la charge unique soulevée par le réquisitoire  
CONSIDÉRANT que par la charge unique soulevée par le réquisitoire n° 2016-0056 susvisé,  
le procureur financier a requis la chambre de statuer sur la responsabilité personnelle et  
pécuniaire de M. Patrick X..., comptable de la commune de Villeneuve-sur-Lot pour la période  
er  
du 1 janvier 2010 au 31 décembre 2011, pour avoir pris en charge deux mandats d’annulation  
de titres n° 2010-8436 du 26 janvier 2011 et n° 2010-8441 du 31 mars 2011 d’un montant  
respectivement de 195 324 € et de 390 647,23 €, mandats imputés tous deux sur l’exercice  
2010 ;  
Sur le manquement du comptable à ses obligations de contrôle  
CONSIDÉRANT qu’en application des dispositions de l’article 12 B du décret du 29 décembre  
1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, alors en application, les  
comptables publics sont tenus, en matière de dépenses, d’exercer le contrôle : « De la qualité  
de l'ordonnateur ou de son délégué ; de la disponibilité des crédits ; de l'exacte imputation des  
dépenses aux chapitres qu'elles concernent selon leur nature ou leur objet ; de la validité de  
la créance dans les conditions prévues à l'article 13 ci-après ; du caractère libératoire du  
règlement. (…) » ;  
CONSIDÉRANT qu’en application de l’article 13 du décret précité alors en application, « en ce  
qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur : la justification du service fait et  
l'exactitude des calculs de liquidation ; l'intervention préalable des contrôles réglementaires et  
la production des justifications. (…) » ;  
CONSIDÉRANT qu’aux termes de l’article 37 du même décret, alors en application, « lorsqu’à  
l’occasion de l’exercice du contrôle prévu à l’article 12B des irrégularités sont constatées, les  
comptables publics suspendent les paiements et en informent l’ordonnateur et lui demandent  
la production de justifications nécessaires » ;  
CONSIDÉRANT qu’en application de l’annexe I à l’article D. 1617-19 du code général des  
collectivités territoriales (CGCT), alors en vigueur et relatif aux pièces justificatives des  
dépenses, les mandats d’annulation de titres doivent être justifiés par un état précisant, pour  
chaque titre, l’erreur commise ; qu’aux termes de l’instruction n° 05-050-M0 du 13 décembre  
2005 (titre 7 - chap. 1) « l'annulation ou la réduction d'un titre de recettes ne peut avoir pour  
seul objet que de rectifier une erreur matérielle commise par les services liquidateurs lors de  
la constatation de la créance (désignation inexacte du débiteur, décompte de la créance erroné  
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par exemple) ou de constater la décharge de l’obligation de payer prononcée par décision de  
justice ayant force de chose jugée.» ;  
CONSIDÉRANT que le mandat n° 8436 émis le 26 janvier 2011, d’un montant de 195 324 €,  
porte en objet « annulation titres abattoir titre 7/1993, titre 1/1991, partie titre 8/1992 » ; que le  
mandat n° 2010-8441 du 31 mars 2011, d’un montant de 390 647,23 €, porte en objet  
«
régularisation créance abattoir » ; que les délibérations des 29 mai 2008 et 7 mai 2009  
produites à l’appui, visant les titres de recettes émis à l’encontre des exploitants de l’abattoir  
de Villeneuve-sur-Lot de 1988 à 1998 pour un montant total de 1 029 381,27 €, et considérant  
d’une part le caractère irrécouvrable des créances depuis la clôture du plan de cession  
prononcée par le tribunal de commerce de Villeneuve-sur-Lot le 21 mars 2003 et d’autre part  
la nécessité « d’annuler ces titres en trois (délibération du 29 mai 2008) ou quatre ans  
(
délibération du 7 mai 2009) », autorisent le maire à annuler certains de ces titres pour des  
montants totaux de 297 769,60  (délibération du 29 mai 2008) et de 145 640,44 €  
délibération du 7 mai 2009), en précisant que cette dépense sera imputée sur le chapitre 67 ;  
(
CONSIDERANT que ces délibérations, qui ne font pas état d’une erreur commise dans  
l’émission des titres, ne peuvent constituer la pièce justificative d’une annulation de titre,  
comme l’exigeait l’imputation budgétaire des deux mandats et l’objet porté sur le mandat  
n° 2010-8436 ; que la nature de la dépense, telle qu’elle ressort de l’objet porté sur le mandat  
n° 2010-8441 et des motifs exposés dans les deux délibérations jointes, était manifestement  
celle d’une admission en non-valeur ; que le comptable, placé devant cette insuffisance de  
pièces justificatives et cette erreur d’imputation, que ne sauraient couvrir les délibérations  
produites, devait suspendre le paiement des deux mandats ;  
CONSIDERANT que la nomenclature des pièces justificatives applicables en matière  
d’admission en non-valeur impose la production des pièces suivantes : « 143. Admission en  
non-valeur (4) : 1. décision. 2. état précisant pour chaque titre le montant admis », précision  
étant apportée que « Les pièces 1 et 2 peuvent, soit faire l'objet d'une délibération spécifique,  
soit être remplacées par une liste de créances admises en non-valeurs annexée au compte  
administratif» ;  
CONSIDERANT que les délibérations produites n’auraient pu elles-mêmes, si l’imputation des  
mandats avait été corrigée, constituer la délibération requise pour justifier une admission en  
non-valeur des titres concernés par le réquisitoire, dès lors que leur dispositif n’autorise le  
maire qu’à annuler certains titres, qui ne sont pas ceux annulés par les mandats objet du  
réquisitoire, et qui ont été, conformément aux délibérations, déjà annulés par des mandats  
antérieurs n° 3413 du 4 juin 2008 et n° 2553 du 13 mai 2009 ;  
CONSIDERANT que le comptable ne disposait ainsi à l’appui des mandats ni des pièces  
justificatives requises en regard de leur imputation comptable, ni de celles qu’il aurait dû se  
faire produire en regard de la nature réelle de la dépense ; qu’il a ainsi manqué à ses  
obligations tant en regard du contrôle de l’imputation budgétaire que de la production des  
pièces justificatives ;  
CONSIDÉRANT qu’ainsi M. Patrick X... a pris en charge irrégulièrement les mandats n° 2010-  
8436 du 26 janvier 2011 et n° 2010-8441 du 31 mars 2011, pour un montant total de  
585 971,23 €, ce qui fonde l’engagement de sa responsabilité personnelle et pécuniaire, en  
application du paragraphe I de l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963  
modifiée, qui dispose que « les comptables sont personnellement et pécuniairement  
responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière (…) de dépenses » ; « que  
la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable se trouve engagée dès lors,  
notamment, qu’une dépense a été irrégulièrement payée (…) » ;  
CONSIDERANT au surplus que le rattachement à l’exercice 2010 de mandats d’annulation  
émis le 26 janvier 2011 et le 31 mars 2011 ne répond pas à une application régulière des  
règles de rattachement des charges et produits à l’exercice, sans que ce défaut conduise  
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toutefois à considérer que pourrait être engagée la responsabilité du comptable sur l’exercice  
011 ;  
2
CONSIDÉRANT que par ailleurs le comptable n’invoque pas l’existence de circonstances  
constitutives de la force majeure, au sens du premier alinéa du V de l’article 60 de la loi  
n° 63-156 susvisée, de nature à l’exonérer de sa responsabilité ;  
Sur l’existence d’un préjudice financier  
CONSIDÉRANT que les conditions de mise en jeu de la responsabilité personnelle et  
pécuniaire du comptable sont différentes selon que le manquement du comptable a causé ou  
non un préjudice à l’organisme public ; qu’aux termes du paragraphe VI de l’article 60 de la loi  
du 23 février 1963 précitée, « Lorsque le manquement du comptable aux obligations  
mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné ou que, par le  
fait du comptable public, l’organisme public a dû procéder à l’indemnisation d’un autre  
organisme public ou d’un tiers ou a dû rétribuer un commis d’office pour produire les comptes,  
le comptable a l’obligation de verser immédiatement sur ses deniers personnels la somme  
correspondante » ;  
CONSIDÉRANT qu’un préjudice financier résulte d’un appauvrissement patrimonial de la  
personne publique indu ou non recherché par elle, et non de la gravité ou de la multiplicité des  
manquements ;  
CONSIDERANT que les mandats d’annulation n° 2010-8436 du 26 janvier 2011 et  
n° 2010-8441 du 31 mars 2011 ont causé un appauvrissement patrimonial de la commune à  
hauteur des titres annulés, soit 585 971,23 € ;  
CONSIDERANT toutefois que pour obliger le comptable à verser de ses deniers personnels  
la somme correspondante, le préjudice financier doit avoir été causé par le manquement du  
comptable ; qu’en l’occurrence, la volonté d’appauvrissement a été exprimée par l’assemblée  
délibérante dans les considérants des délibérations des 29 mai 2008 et 7 mai 2009, qui  
couvrent l’ensemble des créances détenues à l’encontre des exploitants de l’abattoir, y  
compris les titres objet du réquisitoire qui ne sont pas cités dans leur dispositif ;  
CONSIDERANT surtout que l’irrécouvrabilité des titres annulés par les mandats litigieux, émis  
entre 1991 et 1998, est établie par le constat de l’insolvabilité du débiteur résultant du jugement  
du tribunal de commerce de Villeneuve-sur-Lot du 21 mars 2003 ; que cette irrécouvrabilité  
est antérieure de plus de cinq ans à la prise de fonctions de M. Patrick X... en tant que  
comptable de la commune, le 2 juillet 2008, et de près de huit ans à l’émission des mandats  
d’annulation fondant l’engagement de sa responsabilité ; que dès lors les manquements du  
comptable ne peuvent être considérés comme ayant causé à la collectivité un préjudice au  
sens de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée ;  
CONSIDÉRANT qu’aux termes de l’article 60 VI de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée  
«
lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n'a pas causé de  
préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à  
s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances  
de l'espèce… » ;  
er  
CONSIDÉRANT qu’en application de l’article 1 du décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012  
portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 « La  
somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément aux dispositions  
du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un  
millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré. »  
CONSIDÉRANT que le montant du cautionnement du poste comptable était à la date du  
manquement de 149 000 ;  
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CONSIDÉRANT qu’aucun plan de contrôle hiérarchisé de la dépense n’étant en vigueur  
durant les exercices 2010 et 2011, M. Patrick X... a manqué à deux reprises à ses obligations  
de contrôle des mandats objet du réquisitoire ; qu’en les prenant en charge, il a manqué à ses  
obligations fondamentales de contrôle à la fois de l’imputation de la dépense et de production  
des justificatifs ; que l’ancienneté des titres annulés ou leur irrécouvrabilité à la date du  
manquement, comme l’acquiescement de l’assemblée délibérante à leur annulation, pour  
établir l’absence de lien de causalité entre le préjudice et le manquement, ne constituent pas  
une circonstance de nature à atténuer les manquements constatés dans l’exécution des  
contrôles ;  
CONSIDERANT qu’il sera fait une juste appréciation des manquements, similaires sur les  
deux mandats et imputés sur le même exercice 2010, en obligeant M. Patrick X... à s’acquitter  
er  
d’une somme unique égale au plafond fixé par l’article 1 du décret n° 2012-1386 du 10  
décembre 2012, soit 223,50 € ;  
Par ces motifs,  
DÉCIDE :  
er  
Article 1 : M. Patrick X... est obligé à s’acquitter de la somme de 223,50 € à raison des deux  
manquements constatés sur l’exercice 2010 ;  
Article 2 : En raison de la charge ainsi prononcée à son encontre, il est sursis à la décharge  
er  
de M. Patrick X... pour sa gestion du 1 janvier au 31 décembre 2010 ;  
er  
Article 3 : M. Patrick X... est déchargé de sa gestion du 1 janvier au 31 décembre 2011 ;  
Fait et jugé par M. Jean-Noël GOUT, vice-président de la chambre régionale des comptes  
Nouvelle-Aquitaine, président de séance, M. Gilles KOVARCIK, président de section et  
M. Damien GEORG, premier conseiller ;  
En présence de M. Manuel DAVIAUD, greffier de séance.  
M. Manuel DAVIAUD  
Greffier de séance  
M. Jean-Noël GOUT  
Président de séance  
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur  
ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs  
de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants  
et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.  
Certifié conforme à l’original  
le secrétaire général  
Olivier JULIEN  
En application des articles R. 242-14 à R. 242-16 du code des juridictions financières, les jugements  
prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des  
comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux  
articles R. 242-17 à R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes  
domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais  
d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-26 du même code.mois