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Première section

 

Jugement 2017-0004 J

 

Audience publique du 26 janvier 2017

 

Prononcé du 16 février 2017

Commune de La Hauteville

(département des Yvelines)

 

Poste comptable : Centre des finances publiques de Rambouillet

 

Exercice : 2012

 

 

 

 

République Française

Au nom du peuple français

 

La chambre,

 

 

Vu le réquisitoire en date du 19 octobre 2015, par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de                 M. X... et de M. Y..., comptables successifs de la commune de La Hauteville, respectivement du 1er janvier 2012 au 23 juillet 2012, et du 24 juillet 2012 au 31 décembre 2012, au titre d’opérations relatives à l’exercice 2012, notifié le 29 octobre 2015 à M. Y... et le 30 octobre 2015 à M. X... ;

Vus les arrêtés de charge provisoire du chef du pôle interrégional d’apurement administratif de Rennes en date du 9 décembre 2014, pris à l’encontre de M. X... et de M. Y..., comptables successifs de la commune de La Hauteville, au titre de l’exercice 2012 ;

Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la commune de La Hauteville, par MM. X... et Y..., au titre de l’exercice 2012 ;

Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;

Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; 

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

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Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

Vu les pièces du dossier ; 

Vu le rapport de M. Hervé Beaudin, magistrat, chargé de l’instruction ;

Vu les conclusions de M. Luc Héritier, procureur financier en ses conclusions,

Entendu lors de l’audience publique du 26 février 2017, M. Y..., comptable de la commune, qui a eu la parole en dernier, M. X... et l’ordonnateur de la commune n’étant ni présents, ni représentés ;

Entendu en délibéré M. Yves Bénichou, premier conseiller en ses observations ;

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, pris à la suite d’arrêtés de charges provisoires du chef du pôle interrégional d’apurement administratif (PIAA) de Rennes, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes dIle-de-France de la responsabilité encourue par M. X... et M. Y..., à raison du paiement en 2012 d’heures supplémentaires à deux agents de la commune, sans disposer des pièces justificatives requises ;

Attendu qu’aux termes du deuxième alinéa du I de l’article 60 de la loi de finances du 23 février 1963 : « Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière […] de dépenses […] dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique. » ; que, selon le troisième alinéa : « La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors [] qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ; qu’aux termes de l’article 12 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique : « Les comptables sont tenus d'exercer [...] : B. En matière de dépenses, le contrôle […] de la validité de la créance dans les conditions prévues à l'article 13 ci-après » ; que selon l’article 13 du même décret : « En ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur la justification du service fait et l'exactitude des calculs de liquidation ; l’intervention préalable des contrôles règlementaires et la production des justifications […] » ;

Attendu que selon l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales : « Avant de procéder au paiement d’une dépense ne faisant pas l’objet d’un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des associations syndicales de propriétaires ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l’annexe I du présent code. » ; que selon la rubrique 210224 de ladite liste, pour procéder au paiement des « indemnités horaires pour travaux supplémentaires », les comptables publics doivent être en possession d’une : « 1. Délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires […] » ; qu’en effet, l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 dispose que : « L’assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale […] fixe les régimes indemnitaires […] » ;

Attendu que M. X... a réglé de février à juin 2012 à deux agents de la commune des indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) pour des montants respectifs de 589,30 € et de 304,40 €, soit au total 893,70 € ; que M. Y... a réglé d’août à novembre 2012, aux mêmes agents, des IHTS pour des montants respectivement de 225,01 € et de 281,57 €, soit au total 506,58 € ;

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Attendu que si l’ordonnateur indique que le choix de recourir à des IHTS plutôt qu’à l’embauche d’un agent avait été décidé en conseil municipal, ce choix n’a pas donné lieu à une délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ; qu’à la suite de la demande de production et à l’injonction formulées par le PIAA de Rennes, seule une délibération du conseil municipal du 8 novembre 2014, postérieure aux paiements effectués en 2012, a été produite ; que dans ces conditions, il apparaît que les comptables ne disposaient pas au moment du paiement desdites indemnités, d’aucune délibération du conseil municipal de la commune en autorisant le versement ;

Attendu que la circonstance invoquée par M. Y... que deux mandats (n° 231 et n° 232) ont été émis le 27 juillet 2012, soit trois jours après sa prise de fonction intervenue le 24 juillet 2012, si elle a pu rendre plus difficiles les contrôles qu’il devait effectuer, ne saurait l’exonérer de sa responsabilité ;

Attendu qu’ainsi, en payant les dépenses susvisées en l’absence de la délibération du conseil municipal instituant le versement des IHTS, qui serait applicable au moment des faits, MM. X... et Y... ont manqué aux obligations mentionnées au I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et engagé leur responsabilité personnelle et pécuniaire ; que les comptables indiquent, au surplus, que les paiements litigieux ne résultaient pas de circonstances constitutives de la force majeure ;

Attendu que, s’agissant de l’existence d’un préjudice financier, si les heures payées aux agents concernés correspondent à un surcroît de travail effectué à l’occasion de l’organisation des élections présidentielles et législatives de 2012, le service fait par les agents ne suffit pas, à lui seul, à faire que les dépenses irrégulièrement payées étaient dues ; que la chambre n’est pas liée par la délibération du 28 novembre 2015 par laquelle le conseil municipal a estimé que le manquement du comptable n’a pas causé de préjudice financier à la commune ; qu’en l’absence de la délibération requise, les sommes irrégulièrement versées n’étaient pas dues ; qu’ainsi, les manquements des comptables ont causé un préjudice financier à la commune ; que la délibération du 8 novembre 2014, dépourvue d’effet rétroactif, n’a pas fait disparaitre le préjudice financier que le manquement a causé à la commune ;

Attendu qu’aux termes du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé : « Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné [], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; que lorsque le juge des comptes estime que le manquement du comptable a causé un préjudice financier, il n’y pas lieu pour lui de tenir compte des circonstances de l’espèce mentionnées au deuxième alinéa du VI, telles que le sous-effectif du poste comptable ; que, par suite, il y a lieu de constituer MM. X... et Y..., débiteurs de la commune de La Hauteville pour les sommes respectives de 893,70 € et de 506,58 € ;

Attendu qu’aux termes du VIII du même article : « Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 29 octobre 2015, date de réception du réquisitoire par M. Y... et le 30 octobre 2015, date de la réception du réquisitoire par M. X... ;

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Attendu que selon le deuxième alinéa du IX du même article : « Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du même VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. Hormis le cas du décès du comptable ou du respect par celui-ci, sous l’appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée au comptable public dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu par le juge des comptes, le ministre chargé du budget étant dans l’obligation de laisser à la charge du comptable une somme au moins égale au double de la somme mentionnée au deuxième alinéa dudit VI. » ; qu’aux termes de l’article 1er du décret du 10 décembre 2012 susvisé : « La somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré. » ;

Attendu qu’aucun plan de contrôle sélectif de la dépense n’avait été mis en œuvre pour l’exercice 2012 ; que le cautionnement imposé à M. X... pour l’exercice 2012 s’élevant à 234 000 , le ministre chargé du budget devra laisser à sa charge une somme au moins égale à trois millièmes de ces montants, soit 702 ; que le cautionnement imposé à M. Y... pour l’exercice 2012 s’élevant à 176 000 €, le plafond susmentionné s’élève à 528  ; que ce montant étant supérieur au montant du débet, le ministre chargé du budget ne pourra lui accorder aucune remise gracieuse.

Par ces motifs,

 

DÉCIDE :

 

Article 1er : M. X... est constitué débiteur de la commune de La Hauteville     au titre de l’exercice 2012, pour la somme de 893,70 , augmentée des intérêts de droit à compter du 30 octobre 2015. Le montant que le ministre chargé du budget laissera à sa charge ne pourra être inférieur à 702 .

 

Article 2 : M. Y... est constitué débiteur de la commune de La Hauteville     au titre de l’exercice 2012, pour la somme de 506,58 , augmentée des intérêts de droit à compter du 29 octobre 2015. Le ministre chargé du budget ne pourra pas lui accorder de remise gracieuse.

 

Article 3 : Il est sursis à la décharge de M. X... et de M. Y... pour leur gestion du 1er janvier 2012 au 23 juillet 2012 et du 24 juillet 2012 au 31 décembre 2012 jusqu’à la constatation de l’apurement des sommes laissées à leur charge ci-dessus.

 

Fait et jugé par Alain Stéphan, président de séance ; Jean-Marc Dunoyer de Ségonzac et Yves Bénichou, premiers conseillers.

 

 

En présence de Marie-Christine Bernier-Liparo, greffière de séance.

 

 

 

 

 

 

Marie-Christine Bernier-Liparo

 

 

 

 

Alain Stéphan

 

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En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

 

En application des articles R. 242-14 à R. 242-16 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-17 à R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-26 du même code.

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