Sections réunies
Jugement n° 2017-0046
Audience publique du 28 novembre 2017
Prononcé du 13 décembre 2017
| COMMUNE DE VAUVERT
Poste comptable : CFP de Vauvert
N° codique : 030037 341
Exercice 2013
|
La République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
VU les comptes, rendus en qualité de comptable de la commune de Vauvert par M. X, du 1er janvier au 31 décembre 2013 ;
VU le réquisitoire, pris le 10 août 2017 et notifié le 29 août 2017, par lequel le procureur financier près la chambre régionale des comptes a saisi la juridiction de charges présomptives à l’encontre dudit comptable au titre d’opérations relatives à l’exercice 2013 ;
VU les justifications produites au soutien du compte ;
VU l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
VU le code des juridictions financières ;
VU les lois et règlements applicables aux communes ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
VU le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
VU le rapport de Mme Hélène MOTUEL-FABRE, présidente de section, magistrate chargée de l’instruction ;
VU les conclusions de M. Denys ECHENE, procureur financier près la chambre ;
VU les pièces du dossier ;
ENTENDU, lors de l’audience publique du 28 novembre 2017, Mme Hélène MOTUEL-FABRE, présidente de section, en son rapport et M. Denys ECHENE, en ses conclusions ;
ENTENDU, lors de l’audience publique du 28 novembre 2017, M. X, comptable de la commune de Vauvert ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier près la chambre, le maire de la commune de Vauvert n’étant ni présent ni représenté à l’audience publique ;
Sur la présomption de charge n° 1, soulevée à l’encontre de M. X, au titre de l’exercice 2013 pour le paiement d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires au-delà du contingent règlementaire sans pièce justificative :
1 - Sur le réquisitoire
ATTENDU qu’en application de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général de la comptabilité publique » ;
ATTENDU qu’en application de l’article 12 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 susvisé, les comptables sont notamment tenus d’exercer, en matière de dépenses, le contrôle de la validité de la créance ;
ATTENDU qu’en application de l’article 13 du même décret, ce contrôle doit être exercé au regard, en particulier, de la production des justifications requises à l’appui de la dépense ;
ATTENDU que la production desdites justifications participe de façon substantielle de la régularité de la dépense ;
ATTENDU que les dispositions combinées de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales et de son annexe 1 fixent la liste des pièces justificatives devant figurer à l’appui des dépenses ;
ATTENDU qu’il y a lieu d’appliquer aux dépenses relatives aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) allouées au personnel d’une collectivité territoriale telle que la commune de Vauvert la nomenclature des pièces justificatives de la rubrique 2102, et plus particulièrement de la sous-rubrique 210224, de ladite annexe 1 ;
ATTENDU que cette nomenclature prévoit que le comptable doit disposer, pour pouvoir prendre en charge à bon droit les mandats portant paiement d’IHTS :
- de la délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ;
- du décompte indiquant, par agent et par taux d’indemnisation, le nombre d’heures effectuées ;
- le cas échéant, de la décision justifiant le dépassement du contingent mensuel autorisé ;
ATTENDU que la délibération du conseil municipal de la commune de Vauvert du 26 novembre 2012 fixe les conditions de versement des IHTS en conformité avec les dispositions de l’article 6 du décret n° 200260 du 14 janvier 2002 et précise que le contingent de 25 heures « ne peut être dépassé que sur décision du maire qui en informe les représentants du personnel au comité technique paritaire » ;
ATTENDU que la décision du maire justifiant le dépassement du contingent mensuel autorisé ne figure pas à l’appui des mandats ;
ATTENDU que, sur ce fondement et par réquisitoire susvisé du 10 août 2017, le procureur financier près la chambre régionale des comptes a requis la juridiction, au motif que le comptable en cause a pris en charge, au cours de l’exercice 2013, plusieurs mandats portant sur le paiement d’IHTS à des agents dépassant le contingent de 25 heures supplémentaires ;
Exercice : Mois/Année | Nom | Statut | Indice | Heures Sup. | Mandats | Bordereau | Heures dépassant le contingent de 25 heures | Taux horaire | Total | ||
07/2013 | Y | Non titulaire | 309 | 31,61 | 002240 du 18/07/2013 | 0167 | 6,61 | 9,43 | 62,33 | ||
07/2013 | Z | Non titulaire | 309 | 31,00 | 002240 du 18/07/2013 | 0167 | 6,00 | 9,43 | 56,58 | ||
08/2013 | A | Non titulaire | 309 | 47,00 | 002613 du 09/08/2013 | 0193 | 12,00 | 19,65 | 235,80 | ||
08/2013 | A | Non titulaire | 309 | 002613 du 09/08/2013 | 0193 | 10,00 | 12,00 | 120,00 | |||
Total non titulaires | 474,71 | ||||||||||
08/2013 | B | Titulaire | 313 | 26,75 | 002612 du 09/08/2013 | 0193 | 1,75 | 23,88 | 41,79 | ||
08/2013 | C | Titulaire | 316 | 29,74 | 002612 du 09/08/2013 | 0193 | 4,74 | 24,10 | 114,23 | ||
09/2013 | D | Titulaire | 314 | 30,50 | 002916 du 17/09/2013 | 0216 | 5,50 | 19,96 | 109,78 | ||
10/2013 | E | Titulaire | 356 | 26,00 | 03233 du 18/10/2013 | 0240 | 1,00 | 27,16 | 27,16 | ||
11/2013 | B | Titulaire | 314 | 26,35 | 03536 du 19/11/2013 | 0263 | 1,35 | 23,96 | 32,35 | ||
11/2013 | G | Titulaire | 328 | 31,99 | 03536 du 19/11/2013 | 0263 | 6,99 | 25,02 | 174,89 | ||
11/2013 | H | Titulaire | 430 | 31,10 | 03536 du 19/11/2013 | 0263 | 6,10 | 32,80 | 200,08 | ||
11/2013 | I | Titulaire | 325 | 29,39 | 03536 du 19/11/2013 | 0263 | 4,39 | 24,80 | 108,87 | ||
11/2013 | J | Titulaire | 350 | 31,49 | 03536 du 19/11/2013 | 0263 | 6,49 | 26,70 | 173,28 | ||
Total titulaires | 982,43 | ||||||||||
TOTAL titulaires + non titulaires : | 1457,15 | ||||||||||
2 - Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que, concernant les payes de Mme Y et de Mme Z, le comptable fait état d’une réponse ministérielle (question écrite n° 23716 de M. Aubert GARCIA publiée dans le JO Sénat du 26 novembre 1992 page 2606 et réponse du ministre publiée le 28 janvier 1993 page 141) précisant qu’« un fonctionnaire à temps non complet amené à effectuer des heures au-delà de la durée normale définie lors de la création de l’emploi qu’il occupe peut percevoir des indemnités pour travaux supplémentaires. Lorsque celui-ci devrait relever du régime des indemnités horaires (IHTS), les heures effectuées au-delà de la durée de travail de l’agent sont rémunérées sur la base de la proratisation du traitement tant que le total des heures effectuées ne dépasse pas le seuil de 39 heures. Au-delà de ce seuil peuvent alors être perçues des heures supplémentaires calculées sur la base du décret n° 50-1248 du 6 octobre 1950 relatif à l’attribution d’IHTS » ;
ATTENDU qu’il fait valoir que pour les deux agents concernés, le total des heures n’excède pas le seuil de l’horaire hebdomadaire des agents à temps complet (151,67 heures mensuelles) et qu’elles doivent donc être considérées comme des heures complémentaires et non comme des heures supplémentaires ; que les montants réglés au regard d’une ligne « IHTS heures normales » sur la fiche de paye sont d’ailleurs calculés au même taux horaire que les heures normales ;
ATTENDU que Mmes Y et Z sont des agents à temps non complet occupant des emplois correspondant à un besoin permanent inférieur à la durée légale du travail ; que ces agents sont régis par les dispositions des articles 104 à 108 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée relative à la fonction publique territoriale ; qu’en l’absence de dispositions particulières, les fonctionnaires occupant un emploi à temps non complet peuvent prétendre aux mêmes éléments de rémunération que les agents à temps complet ;
ATTENDU que l’article 2 du décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002 relatif aux IHTS précise que « les indemnités horaires pour travaux supplémentaires peuvent être versées, dès lors qu’ils exercent des fonctions ou appartiennent à des corps, grades ou emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires, aux fonctionnaires de catégorie C et aux fonctionnaires de catégorie B » ; que l’article 4 rappelle que « pour l’application du présent décret et conformément aux dispositions du décret du 25 août 2000 susvisé, sont considérées comme heures supplémentaires les heures effectuées à la demande du chef de service dès qu’il y a dépassement des bornes horaires définies par le cycle de travail. Le travail supplémentaire, tel que défini ci-dessus, accompli entre 22 heures et 7 heures est considéré comme travail supplémentaire de nuit » ; que la notion de cycle de travail est précisée par l’article 4 du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 : « Le travail est organisé selon des périodes de référence dénommées cycles de travail. Les horaires de travail sont définis à l’intérieur du cycle, qui peut varier entre le cycle hebdomadaire et le cycle annuel de manière que la durée du travail soit conforme sur l’année au décompte prévu à l’article 1er (1 607 heures) » ; que ces deux décrets sont transposables à la fonction publique territoriale en application du principe de parité défini à l’article 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
ATTENDU que la teneur de la réponse ministérielle de 1992 citée par le comptable a été confirmée par une réponse du ministère de la fonction publique, de la réforme de l’État et de l’aménagement du territoire publiée dans le JO Sénat du 6 février 2003, page 456, question écrite n° 01635 de M. JeanPierre DEMERLIAT publiée dans le JO Sénat du 1er août 2002, page 1773 ;
ATTENDU que les heures réglées aux deux agents concernés correspondent à des heures réalisées dans le cadre du cycle de travail et qu’elles ont été rémunérées au taux normal même si la mention « IHTS heures normales » portée sur les bulletins de paye peut prêter à confusion ;
ATTENDU qu’en ce qui concerne la paye de M. A, les pièces du dossier à l’appui font apparaître une différence d’avec les montants retenus aux poursuites ; que, dans ces conditions, il existe un doute quant à la matérialité du préjudice éventuel au regard de l’arrêté précis de son montant ; que ce doute doit profiter au comptable ;
ATTENDU que, concernant la paye de M. C, le comptable indique que la mention « IHTS de dimanche » et « IHTS de nuit » est erronée ; qu’il s’agit non d’heures supplémentaires au sens de l’article 6 du décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002 mais d’heures effectuées la nuit et le dimanche relevant, pour les premières, des prescriptions du décret n° 10-1489 du 6 décembre 2010 et, pour les secondes, de celles du décret n° 2010-685 du 23 juin 2010 ; que les heures concernées constituent la seule rémunération versée à M. C en août 2013 et étaient donc des heures normales ;
ATTENDU que le décret n° 10-1489 du 6 décembre 2010 relatif à l’attribution d’une indemnité horaire pour travail du dimanche et des jours fériés en faveur des personnels du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie et du ministère du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État exerçant des fonctions d’entretien, de gardiennage et de restauration, applicable à la fonction publique territoriale, prévoit en effet que les personnels titulaires et agents non titulaires de droit public « exerçant tout ou partie de leurs fonctions le dimanche ou un jour férié pendant la durée normale de la journée de travail peuvent bénéficier d’une indemnité horaire pour travail du dimanche et des jours fériés » ; que l’article 1 du décret n° 2010-685 du 23 juin 2010 relatif à l’attribution de l’indemnité horaire pour travail normal de nuit en faveur des personnels des ministères économique et financier exerçant des fonctions d’entretien, de gardiennage et de restauration, applicable à la fonction publique territoriale, prévoit également que « les personnels titulaires et agents non titulaires de droit public des ministères économique et financier, exerçant tout ou partie de leurs fonctions entre 22 heures et 5 heures, ou au cours d’une autre période de sept heures consécutives comprise entre 22 heures et 7 heures, pendant la durée normale de la journée de travail, peuvent bénéficier de l’indemnité horaire pour travail normal de nuit dans les conditions fixées par les décrets du 10 mai 1961 et du 24 février 1976 susvisés » ;
ATTENDU que M. C, qui occupe un emploi de gardien, peut prétendre au bénéfice de ces indemnités dès lors qu’elles ont été prévues dans le régime indemnitaire de la commune de Vauvert ; qu’elles ne peuvent être assimilées à des heures supplémentaires accomplies en dehors du cycle de travail ;
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de retirer du périmètre des poursuites les paiements consentis au profit de Mmes Y et Z et de MM. A et C ;
ATTENDU que, concernant les autres payes, le comptable ne conteste pas la qualification d’heures supplémentaires et l’absence de décision autorisant le dépassement du contingent mensuel de 25 heures ; qu’il fait néanmoins état d’un courrier du 12 novembre 2012 par lequel il demandait au maire de prendre une délibération complémentaire fixant le plafond des heures supplémentaires (ce que ne prévoyait pas la délibération en vigueur du 7 septembre 2004 en se référant à l’arrêt 35 586 du 25 février 2003 de la Cour des comptes qui en rappelle la nécessité) ; qu’une délibération en ce sens a été prise le 26 novembre 2012 ;
ATTENDU que, dans ses conclusions, le procureur financier près la chambre fait valoir notamment que le comptable aurait dû vérifier que les mandats qui lui ont été présentés étaient appuyés des pièces requises et que, constatant que ce n’était pas le cas, suspendre leur prise en charge dans l’attente de la réception desdites pièces ;
ATTENDU qu’il ressort du rapport susvisé et des pièces du dossier que des IHTS ont été payées par le comptable en cause à l’appui des mandats nos 2612 et 2613 du 9 août 2013, n° 2916 du 17 septembre 2013, n° 3233 du 18 octobre 2013, n° 3536 du 19 novembre 2013, sans que le comptable dispose d’une décision du maire autorisant le dépassement d’un contingent mensuel de 25 heures conformément aux exigences de la nomenclature des pèces justificatives ;
ATTENDU qu’il est de jurisprudence constante que la responsabilité du comptable s’apprécie au moment du paiement et que le fait qu’il ait alerté l’ordonnateur sur l’incomplétude de la délibération traitant des IHTS et ait obtenu sa modification ne peut pas l’exonérer ;
3 - Sur l’existence d’un préjudice financier du fait du manquement du comptable
ATTENDU que le comptable indique que le système de décompte des heures supplémentaires en mairie faisait l’objet d’un suivi adapté ; qu’il considère dès lors que les heures supplémentaires ont bien été réalisées et que la collectivité n’a subi aucun préjudice financier ;
ATTENDU que le maire de la commune de Vauvert, sollicité, n’a pas répondu ;
ATTENDU que le préjudice financier de la collectivité résulte d’un appauvrissement définitif de la collectivité non recherché par celle-ci ; que l’existence d’un service fait ne suffit pas à lui seul à faire disparaître le dommage, et en particulier l’absence de volonté clairement exprimée par l’autorité compétente d’autoriser la dépense est constitutive d’un préjudice financier ;
ATTENDU que, par conséquent, le manquement du comptable a causé un préjudice financier au sens des dispositions du troisième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée à la commune de Vauvert ;
4 - Sur la mise en œuvre de la responsabilité du comptable
ATTENDU qu’aux termes du troisième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi il y a lieu de constituter M. X débiteur de la commune de Vauvert pour la somme de huit cent soixante-huit euros vingt-et-un centimes (868,21 €) ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée : « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 29 août 2017, date de l’accusé de réception du réquisitoire par le comptable ;
ATTENDU qu’aucun contrôle allégé partenarial n’a été mis en place ; qu’en revanche un plan de contrôle hiérarchisé de la dépense, concernant notamment la paye a été mis en œuvre ; que M. X a fourni les documents attestant des vérifications opérées notamment en 2012 et 2013 ; que celles opérées en 2012 montrent que pour trois des agents concernés le versement des IHTS apparait déjà comme non justifié ;
Sur la présomption de charge n° 2, soulevée à l’encontre de M. X, au titre de l’exercice 2013 pour le paiement d’une nouvelle bonification indiciaire sans justification suffisante :
1 - Sur le réquisitoire
ATTENDU qu’en application de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général de la comptabilité publique » ;
ATTENDU qu’en application de l’article 12 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 susvisé, les comptables sont notamment tenus d’exercer, en matière de dépenses, le contrôle de la validité de la créance ;
ATTENDU qu’en application de l’article 13 du même décret, ce contrôle doit être exercé au regard, en particulier, de la production des justifications requises à l’appui de la dépense ;
ATTENDU dès lors que la production desdites justifications participe de façon substantielle de la régularité de la dépense ;
ATTENDU que les dispositions combinées de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales et de l’annexe 1 du même code, fixent la liste des pièces justificatives qui doivent figurer à l’appui des dépenses ;
ATTENDU que pour le versement de la nouvelle bonification indiciaire, l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, en son annexe I, rubrique 210222, précise que la pièce justificative exigible à l’appui de ladite dépense prend la forme d’une décision de l’autorité disposant du pouvoir de nomination fixant le nombre de points attribués à l’agent ;
ATTENDU que cette pièce ne figure pas à l’appui des mandats suivants :
Année | Mois | Nom | Mandat | Date | Bordereau | Total | |
2013 | Janvier | K | 000042 | 18/01/2013 | 0005 | 115,76 | |
2013 | Février | K | 000537 | 21/02/2013 | 0040 | 115,76 | |
2013 | Mars | K | 000814 | 22/03/2013 | 0058 | 115,76 | |
2013 | Avril | K | 001096 | 16/04/2013 | 0082 | 115,76 | |
2013 | Mai | K | 001438 | 21/05/2013 | 0108 | 115,76 | |
2013 | Juin | K | 001806 | 18/06/2013 | 0135 | 115,76 | |
2013 | Juillet | K | 002239 | 18/07/2013 | 0167 | 115,76 | |
2013 | Août | K | 002612 | 09/08/2013 | 0193 | 115,76 | |
2013 | Septembre | K | 002916 | 17/09/2013 | 0216 | 115,76 | |
2013 | Octobre | K | 003233 | 18/10/2013 | 0240 | 115,76 | |
2013 | Novembre | K | 003535 | 19/11/2013 | 0263 | 115,76 | |
2013 | Décembre | K | 003882 | 11/12/2013 | 0288 | 115,76 | |
1 389,12 | |||||||
ATTENDU que, sur ce fondement et par réquisitoire du 10 août 2017, le procureur financier près la chambre régionale des comptes a requis la juridiction, au motif que le comptable en cause a pris en charge, au cours de l’exercice 2013, les mandats susvisés portant paiement d’une nouvelle bonification indiciaire (NBI) sans disposer de justificatifs suffisants ;
2 - Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que le comptable ne conteste pas l’absence de justification de la NBI accordée à M. K, attaché territorial ; qu’il fait valoir toutefois que l’attestation de l’autorité territoriale n’a pas d’incidence sur le grade et sur l’échelon détenu par l’agent ; qu’il précise qu’en application du décret du 24 juillet 1991 portant attribution de la NBI à certains personnels de la fonction publique territoriale, la NBI peut être considérée comme due aux agents des collectivités territoriales dès lors que les conditions de grade et de fonction fixées par décret sont satisfaites ; qu’il relève que le décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 portant attribution de la NBI à certains personnels de la fonction publique territoriale établit une liste donnée en son annexe qui précise, en particulier, l’ouverture de droits en son point 11 « encadrement d’un service administratif requérant une technicité en matière (...) de gestion financière » et le nombre de points attribués correspondant soit 25 (document 7) ; que M. K était chargé de l’encadrement d’un service requérant une technicité en matière de gestion financière ; que l’intéressé a, d’ailleurs, été recruté en qualité d’attaché territorial titulaire, le 1er décembre 2006, pour exercer en qualité de directeur financier, et gérer à ce titre la confection et le suivi des budgets, la comptabilité des recettes et des dépenses, et la rédaction d’analyses financières ; que le comptable considère donc que M. K remplissait, dès sa nomination, les conditions de l’alinéa 11 du décret du 3 juillet 2006 ;
ATTENDU que la responsabilité du comptable s’apprécie au moment du paiement et que le fait que l’agent concerné remplissait les conditions pour bénéficier de la NBI ne saurait l’exonérer ;
ATTENDU que, dans ses conclusions, le procureur financier près la chambre fait valoir notamment que la pièce prévue à l’article D. 1617-19 du code des juridictions financières et à son annexe 1 en sa rubrique 210222, ne figure pas à l’appui des mandats en cause en tant que pièce justificative ;
ATTENDU qu’il ressort du rapport susvisé et des pièces du dossier qu’une nouvelle bonification indiciare a été payée par le comptable à l’appui des mandats n° 42 du 18 janvier 2013, n° 537 du 21 février 2013, n° 814 du 22 mars 2013, n° 1096 du 16 avril 2013, n° 1438 du 21 mai 2013, n° 1806 du 18 juin 2013, n° 2239 du 18 juillet 2013, n° 2612 du 9 août 2013, n° 2916 du 17 septembre 2013, n° 3233 du 18 octobre 2013, n° 3535 du 19 novembre 2013, n° 3882 du 11 décembre 2013, sans que le comptable dispose d’une décision de l’autorité du pouvoir de nomination fixant le nombre de points attribués à l’agent conformément aux exigences de la nomenclature des pèces justificatives ;
ATTENDU qu’il est de jurisprudence constante que la responsabilité du comptable s’apprécie au moment du paiement et que le fait que l’agent concerné remplissait les conditions pour bénéficier de la NBI ne saurait l’exonérer ;
3 - Sur l’existence d’un préjudice financier du fait du manquement du comptable
ATTENDU que le comptable fait valoir qu’en qualité d’attaché territorial, directeur financier, M. K pouvait prétendre à une NBI de 25 points pour la technicité requise pour la gestion financière d’une commune de 12 500 habitants ; que l’attribution d’une NBI aux attachés territoriaux est classique étant donnée leur technicité généralement dans un domaine particulier ; que dans ces conditions, son analyse le conduit à penser que la collectivité n’a subi aucun préjudice ;
ATTENDU que le maire de la commune de Vauvert, sollicité, n’a pas répondu ;
ATTENDU que, dans ses conclusions, le procureur financier près la chambre fait valoir qu’un manquement avéré à son obligation de contrôle est susceptible d’engager sa responsabilité personnelle et pécunaire conformément au I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée ;
ATTENDU que le préjudice financier de la collectivité résulte d’un appauvrissement définitif de la collectivité non recherché par celle-ci ; que le décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale précise que la nouvelle bonification indiciaire est versée aux fonctionnaires territoriaux exerçant une des fonctions figurant en annexe dudit décret. Quatre catégories de fonctions sont énumérées : 1. Les fonctions de direction, d’encadrement, assorties de responsabilités particulières. 2. Les fonctions impliquant une technicité particulière. 3. Les fonctions d’accueil exercées à titre principal. 4. Les fonctions impliquant une technicité et une polyvalence particulières liées à l’exercice dans certaines collectivités ou dans leur établissements publics assimilés ; que l’autorité territoriale dispose d’une compétence liée puisqu’il lui appartient d’apprécier la nature des fonctions exercées avant d’attribuer la nouvelle bonification indiciaire à un fonctionnaire ; qu’aucune délibération n’est nécessaire ; que dès lors qu’un agent remplit les conditions requises, l’autorité territoriale doit obligatoirement lui verser la NBI ; que son versement fait l’objet d’un arrêté ;
ATTENDU toutefois que le fait que l’agent en cause était susceptible de remplir les conditions pour bénéficier d’une NBI ne suffit pas, à lui seul, à faire disparaître le dommage, et en particulier l’absence de volonté clairement exprimée par l’autorité compétente de fixer le nombre de points dont il pouvait bénéficier au titre de ses fonctions est constitutive d’un préjudice financier ;
ATTENDU que, par conséquent, le manquement du comptable a causé un préjudice financier au sens des dispositions du troisième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée à la commune de Vauvert ;
4 - Sur la mise en œuvre de la responsabilité du comptable
ATTENDU qu’aux termes du troisième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : « lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de reverser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi il y a lieu de constituter M. X débiteur de la commune de Vauvert pour la somme de mille trois cent quatre-vingt-neuf euros et douze centimes (1 389,12 €) ;
ATTENDU que, aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée : « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce cette date est le 29 août 2017, date de l’accusé de réception du réquisitoire par le comptable ;
ATTENDU qu’aucun contrôle allégé partenarial n’a été mis en place ; qu’en revanche un plan de contrôle hiérarchisé de la dépense, concernant notamment la paye, a été mis en œuvre ; que le comptable a fourni les documents attestant des vérifications opérées notamment en 2012 et 2013 ; que celles réalisées en 2012 montrent que le versement d’une NBI non justifiée pour l’agent avait déjà été détecté alors ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1 : Sur la présomption de charge n° 1 au titre de l’exercice 2013 ;
M. X est constitué débiteur de la commune de Vauvert pour la somme de huit cent soixante-huit euros vingt-et-un centimes (868,21 €) augmentée des intérêts de droit à compter du 29 août 2017.
Article 2 : Sur la présomption de charge n° 2 au titre de l’exercice 2013 ;
M. X est constitué débiteur de la commune de Vauvert pour la somme de mille trois cent quatre-vingt-neuf euros et douze centimes (1 389,12 €) augmentée des intérêts de droit à compter du 29 août 2017.
Article final : La décharge de M. X ne pourra être donnée qu’après apurement des débets fixés ci-dessus.
Délibéré le 28 novembre 2017 par M. André PEZZIARDI, président de la chambre, président de séance ; Mmes Brigitte ROMAN et Vanina DUWOYE, premières conseillères, MM. Laurent LE NY et Adrien GAUBERT, premiers conseillers.
En présence de Mme Clarisse GOUILLOUX, greffière de séance.
Clarisse GOUILLOUX, greffière de séance |
André PEZZIARDI, président de séance |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre les dispositions dudit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Jugement n° 2017-0046 page 1 sur 9
500, avenue des États du Languedoc CS 70755 34064 MONTPELLIER CEDEX 2 T +33 4 67 20 73 00 occitanie@crtc.ccomptes.fr
Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la chambre régionale des comptes Occitanie, et délivré par moi, secrétaire générale,
Brigitte VIOLETTE, secrétaire générale |
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans un délai de deux mois à compter de leur notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code.
Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger.
La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
Jugement n° 2017-0046 page 1 sur 9
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