Troisième section Jugement n° 2017-019
Audience publique du 18 octobre 2017
Prononcé du 17 novembre 2017 | Commune de Quelaines Saint-Gault (Mayenne)
Poste comptable : Trésorerie de Cossé-le-Vivien Exercice : 2014
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République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
VU l’arrêté de charge provisoire transmis par le responsable du pôle interrégional d’apurement administratif (PIAA) de Rennes à la chambre régionale des comptes des Pays de la Loire, et pris le 8 février 2017 à l’encontre de M. X…, comptable de la commune de Quelaines Saint-Gault, au titre de sa gestion du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 ;
Vu le réquisitoire en date du 21 juin 2017, par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X…, notifié le 3 juillet 2017 au comptable concerné ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la commune de Quelaines Saint-Gault, ensemble les comptes annexes, par M. X…, du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu les lois et règlements applicables aux communes ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le rapport de Mme Hélène Lemesle, conseillère, magistrat chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du procureur financier ;
Vu les pièces du dossier, notamment les observations de M. X… en date du 23 août 2017 et celles de Mme Y…, maire, en date du 25 juillet 2017 ;
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Entendu lors de l’audience publique du 18 octobre 2017, Mme Hélène LEMESLE, conseillère, en son rapport, M. Sébastien HEINTZ, procureur financier, en ses conclusions, M. X…, comptable, n’était ni présent, ni représenté ;
Entendu en délibéré M. Pierre-Jean ESPI, président de section, réviseur, en ses observations ;
Sur la présomption de charge unique, soulevée à l’encontre de M. X…, au titre de l’exercice 2014 :
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes des Pays de la Loire de la responsabilité encourue par M. X… à raison du paiement d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) pour un montant de 859,46 € ; que le comptable ne disposait au moment du paiement d’aucune décision exécutoire de l’assemblée délibérante prévoyant l’octroi de cette indemnité, soit, au cas d’espèce, la délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires telle qu’exigée à la rubrique 210224 « indemnités horaires pour travaux supplémentaires » de l’annexe I à l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales (CGCT) pour les trois agents ayant bénéficié d’IHTS ;
Attendu qu’en application de l'article 17 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des actes et contrôles qui leur incombent ; qu’en application des articles 19 et 20 du même décret , les comptables sont tenus d’exercer le contrôle de la validité de la dette, en veillant, en particulier, à la production des justifications ; qu’en application de l'article 50 du même décret, les opérations doivent être justifiées par des pièces dont la liste, pour les collectivités territoriales, est fixée par décret ; qu'en application de l'article 38 du même décret, lorsque le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il doit suspendre les paiements ;
Attendu que l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales modifié dispose que « avant de procéder au paiement d’une dépense ne faisant pas l’objet d’un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales (…) ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l’annexe I du présent code » ;
Attendu que par mandats n° 166 du 14 avril 2014, n° 501 du 20 mai 2014, n° 642 du 19 juin 2014, n° 1016 du 19 septembre 2014, n° 1156 du 21 octobre 2014, n° 1272 du 21 novembre 2014 et n° 139542 du 22 décembre 2014, M. X…, comptable de la commune de Quelaines Saint-Gault, a procédé à l’ordonnancement de la paye au cours de l’exercice 2014 ; qu’à cette occasion, des indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) ont été versées à trois agents pour un montant total de 859,46 € sur l’exercice 2014 ;
Attendu qu’au vu des éléments disponibles, aucune délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires n’ouvrait le droit au versement d’IHTS aux agents concernés ;
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Attendu qu’en réponse apportée suite au bordereau d’injonction du pôle interrégional d’apurement administratif (PIAA) de Rennes constatant cette situation et invitant à produire toute justification à décharge, M. X… a produit une délibération du 15 décembre 2016 « autorisant le paiement des heures supplémentaires, pour la durée du mandat électif » ainsi qu’une attestation de Mme Y…, maire de la commune de Quelaines Saint-Gault, en date du 21 décembre 2016 attestant « que le paiement des heures supplémentaires effectué sur le budget 2014 de la commune correspond à des heures réelles » à laquelle est joint un récapitulatif des heures supplémentaires ;
Attendu que l’arrêté de charge provisoire du chef du pôle interrégional d’apurement administratif de Rennes du 8 février 2017 a mis provisoirement à la charge de M. X…, comptable de la commune de Quelaines Saint-Gault du 1er janvier au 31 décembre 2014, la somme de 859,46 € pour avoir payé, au titre de l’année 2014, des indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) en l’absence de délibération l’y autorisant ;
Attendu qu’il est établi par la réponse de Mme Y…, maire de la commune de Quelaines Saint-Gault, en date du 25 juillet 2017, que M. X… ne disposait pas, au moment du paiement des indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS), de la délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ;
Attendu que le fait que le montant de l’anomalie constatée ne concerne que trois personnes et ne représente que 0,10 % de la masse salariale de la commune sur l’exercice 2014 ne saurait constituer un argument recevable en faveur du comptable ;
Attendu qu’à défaut de pièce justificative suffisante, le comptable n’était pas en mesure d’effectuer le contrôle de la validité de la dette auquel il était tenu ;
Attendu que la liste des pièces justificatives des dépenses publiques locales jointes en annexe I à l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales est obligatoire, d’application stricte et ne souffre aucune exception ;
Attendu qu’aux termes des dispositions du I de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée « (…) les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables (…) du paiement des dépenses (...) » ; que « la responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
Attendu que les paiements recensés au titre de la présomption de charge ont été effectués alors que M. X… ne disposait pas des pièces justificatives exigées par l’annexe du CGCT visée à son article D. 1617-19 ; qu’en s’abstenant de suspendre les paiements, le comptable a manqué à ses obligations et engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu qu’il résulte d’une jurisprudence constante que la volonté d’une collectivité ne saurait se présumer et ne doit être appréciée qu’au moment du paiement ; qu’ainsi la production de délibérations rétroactives postérieures est sans effet sur l’appréciation, tant d’un manquement que de l’existence d’un préjudice ;
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Attendu qu’aux termes du VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée, « la responsabilité personnelle et pécuniaire prévue au I est mise en jeu par le ministre dont relève le comptable, le ministre chargé du budget ou le juge des comptes dans les conditions qui suivent » ; que « lorsque le manquement du comptable […] n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce (…). Lorsque le manquement du comptable (…) a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il résulte de la jurisprudence que le caractère indu de paiements par un comptable public sans justification emporte l’existence d’un préjudice financier à l’organisme public concerné, résultant du manquement du comptable à ses obligations ;
Attendu que le comptable en question a effectué les paiements en cause sans pièce justificative ; que par suite, le manquement du comptable a causé un préjudice financier à la commune de Quelaines Saint-Gault ;
Attendu qu’il n’est ni établi, ni même allégué par le comptable, de circonstance constitutive de la force majeure, au sens du premier alinéa du V de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée ;
Attendu qu’il y a lieu de constituer M. X… débiteur de la commune de Quelaines Saint-Gault de la somme de 859,46 € au titre de l’exercice 2014 ;
Attendu qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics », qu’en l’espèce, cette date est le 3 juillet 2017, date de réception du réquisitoire par M. X… ;
Attendu qu’en application du IX de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée, les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise jeu, peuvent obtenir du ministre chargé du budget une remise gracieuse, qui peut être totale, en cas de respect des règles de contrôle sélectif des dépenses ;
Attendu qu’en application de l’article 4 de l’arrêté du 25 juillet 2013 portant application de l’article 42 du décret n °2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique et encadrant le contrôle sélectif de la dépense modifié, « le comptable assignataire détermine la durée d'application du plan de contrôle hiérarchisé. Cette durée, qui peut être pluriannuelle, doit être mentionnée dans le plan de contrôle » ;
Attendu que le comptable a produit un plan de contrôle, signé par le comptable supérieur, applicable pour l’exercice 2014 ;
Attendu que le plan de contrôle produit prévoyait un contrôle des IHTS au mois de mai et que des mandatements irréguliers ont été émis au cours du mois de mai ; qu’ainsi le comptable ne peut faire valoir qu’il était dispensé du contrôle des mandats en cause par le plan de contrôle ; qu’ainsi le plan de contrôle produit n’a pas été respecté ;
Attendu que le cautionnement du comptable en cause s’élève à la somme de 110 000 € pour l’exercice 2014 ;
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Attendu que, dans ces circonstances, le comptable ne pourra pas prétendre à une remise gracieuse intégrale du débet, et que la somme laissée à sa charge sera au moins égale à 3‰ du montant du cautionnement du poste comptable, conformément au IX de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée ; soit, en l’espèce 330 € pour l’exercice 2014.
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : en ce qui concerne M. X…, au titre de l’exercice 2014, présomption de charge unique
M. X… est constitué débiteur de la commune de Quelaines Saint-Gault pour la somme de huit cent cinquante-neuf euros et quarante-six centimes (859,46 €) augmentée des intérêts de droit à compter du 3 juillet 2017.
Les paiements entraient dans la catégorie des dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif et devaient, par conséquent, faire l’objet d’un contrôle exhaustif au mois de mai. L’éventuelle remise gracieuse du ministre ne pourra ainsi être totale et la somme laissée à charge de M. X… ne pourra être inférieure à trois cent trente euros (330 €) pour l’exercice 2014.
Article 2 : La décharge de M. X… pour l’exercice 2014, par le PIAA de Rennes, autorité compétente, ne pourra être donnée qu’après apurement du débet mis à sa charge.
Fait et jugé par M. Pierre-Jean ESPI, président de séance, MM. Etienne LE RENDU et Pierre COTTON, premiers conseillers.
En présence de Mme Marie-Andrée SUPIOT, greffière de séance.
Marie-Andrée SUPIOT
greffière de séance |
Pierre-Jean ESPI
président de séance |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
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Attendu que, dans ces circonstances, le comptable ne pourra pas prétendre à une remise gracieuse intégrale du débet, et que la somme laissée à sa charge sera au moins égale à 3‰ du montant du cautionnement du poste comptable, conformément au IX de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée ; soit, en l’espèce 330 € pour l’exercice 2014.
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : en ce qui concerne M. X…, au titre de l’exercice 2014, présomption de charge unique
M. X… est constitué débiteur de la commune de Quelaines Saint-Gault pour la somme de huit cent cinquante-neuf euros et quarante-six centimes (859,46 €) augmentée des intérêts de droit à compter du 3 juillet 2017.
Les paiements entraient dans la catégorie des dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif et devaient, par conséquent, faire l’objet d’un contrôle exhaustif au mois de mai. L’éventuelle remise gracieuse du ministre ne pourra ainsi être totale et la somme laissée à charge de M. X… ne pourra être inférieure à trois cent trente euros (330 €) pour l’exercice 2014.
Article 2 : La décharge de M. X… pour l’exercice 2014, par le PIAA de Rennes, autorité compétente, ne pourra être donnée qu’après apurement du débet mis à sa charge.
Fait et jugé par M. Pierre-Jean ESPI, président de séance, MM. Etienne LE RENDU et Pierre COTTON, premiers conseillers.
En présence de Mme Marie-Andrée SUPIOT, greffière de séance.
Signé : Marie-Andrée SUPIOT, greffière de séance
Pierre-Jean ESPI, président de séance
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Ampliation certifiée conforme à l’original
Christophe GUILBAUD secrétaire général |
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.