S3/2170890/SH  1

 

 

1ère section

 

Jugement 2017-0028

 

Audience publique du 28 novembre 2017

 

Prononcé du 15 décembre 2017

Syndicat d’agglomération nouvelle (SAN)
du Val d’Europe (Seine-et-Marne)

 

 

Poste comptable : Trésorerie Magny-Le-Hongre (77)

 

Exercices : 2012 et 2013

 

 

République Française

Au nom du peuple français

 

La chambre,

 

 

Vu le réquisitoire en date du 19 juillet 2016, par lequel le Procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X…, comptable du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe, au titre d’opérations relatives aux exercices 2012 et 2013, notifié le 29 juillet 2016 à Mme X… ;

 

Vu les comptes rendus en qualité de comptable du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe par Mme X…, du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 ;

 

Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

Vu le rapport de M. Jean-Marc Dunoyer de Segonzac, premier conseiller, magistrat chargé de l’instruction ;

Vu les conclusions du Procureur financier ;

Vu les pièces du dossier ; 

Entendu lors de l’audience publique du 28 novembre 2017 M. Dunoyer de Segonzac en son rapport et M. Alexandre Couturier, en ses conclusions ;

Entendu en délibéré M. Hervé Beaudin, premier conseiller, en ses observations ;

 

Attendu qu’aux termes du premier alinéa du I de l’article de la loi du 23 février 1963 susvisée : « Outre la responsabilité attachée à leur qualité d'agent public, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, du paiement des dépenses, de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, désignées ci-après par le terme d'organismes publics, du maniement des fonds et des mouvements de comptes de disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. » ; que, selon le troisième alinéa : « La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu'un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu'une recette n'a pas été recouvrée, qu'une dépense a été irrégulièrement payée […] » ;

 

 

Sur la présomption de charge n° 1 relative au recouvrement de recettes, au titre de l’exercice 2013 :

 

Attendu que, selon le 3° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales susvisé : « L’action des comptables chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recettes. Le délai de quatre ans mentionné à l’alinéa précédent est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription » ;

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes Île-de-France de la responsabilité encourue par Mme X…à raison de la prescription du titre de recettes n° 31 d'un montant de 13 893,87 €, émis au nom de « agglomération de marne et », pris en charge par le comptable le 15 octobre 2009, et figurant à l'état des restes à recouvrer du compte 4116 du budget annexe d'assainissement au 31 décembre 2014 ;

Attendu que Mme X… n’a pas justifié de diligences en vue de recouvrer ou annuler le titre de recettes en cause ; que si le titre était mal libellé, il appartenait à la comptable de demander à l’ordonnateur son annulation, et sa réémission au bon débiteur ; que la comptable n’a fourni aucun élément de nature à dégager sa responsabilité personnelle et pécuniaire ; qu’elle n’a, en particulier, pas apporté la preuve d’une diligence interruptive de la prescription ; que la prescription du titre est, en conséquence, intervenue à compter du 16 octobre 2013, soit sous la gestion de Mme X… ;

Attendu que, par son inaction, Mme X… a manqué à ses obligations de recouvrement des créances du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe et a, par conséquent, engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;

Attendu qu’il n’est pas établi que débiteur ait été insolvable avant le manquement de Mme X… ; que, par suite, en ne recouvrant pas les sommes concernées, son manquement a causé un préjudice au syndicat :

6, cours des Roches – Noisiel – BP 187 – 77315 MARNE-LA-VALLEE CEDEX 2 – T + 33 1 64 80 88 88 – crcidf@idf.ccomptes.fr

 


S3/2170890/SH  1

 

Attendu que, selon le deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 : « Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné [], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer Mme X…débitrice du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe pour la somme de 13 893,87  ;

 

Attendu qu’aux termes du paragraphe VIII du même article : « Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 29 juillet 2016, date de réception du réquisitoire par Mme X… ;

 

Sur les présomptions de charge n° 2 et 3, relatives au paiement de dépenses

 

Attendu qu’en application des articles 12 et 13 du décret du 29 décembre 1962 et des articles 19 et 20 du décret du 7 novembre 2012, le comptable public est tenu d’exercer le contrôle, s’agissant des ordres de payer, de la validité de la dette ; que ce contrôle porte notamment sur l’exactitude de la liquidation et la production des pièces justificatives ;

Attendu que le comptable doit notamment exercer ces contrôles au moment du paiement du solde d’un marché ; que lorsqu’il constate que les clauses contractuelles prévoient le paiement de pénalités de retard en cas de dépassement du délai d’exécution du marché, le comptable doit disposer de l’état liquidatif des pénalités, ou, à défaut, déduire lui-même le montant des pénalités encourues ; qu’il ne peut s’y soustraire qu’à la condition de disposer d’une décision de l’organisme public de ne pas appliquer ces pénalités ;

 

En ce qui concerne les manquements de la comptable :

 

Attendu que, s’agissant de la présomption de charge n° 2, concernant l’exercice 2012, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes d'Île-de-France de la responsabilité encourue par Mme X… à raison du paiement du mandat n° 1421 du 19 avril 2012, d'un montant de 1 016,60 €, relatif au solde du marché conclu avec la société Denis Oudin pour la réalisation d'une toiture pour le parc à sel du centre technique municipal à Serris (d'un montant total de 20 696,78 € TTC), sans avoir pris soin de déduire de ce montant les pénalités pour retard dues par le titulaire en application de l'article 5.2 du cahier des clauses particulières du marché alors que ce dernier avait dépassé de 54 jours le délai d'exécution prévu ;

Attendu que, contrairement à ce que soutient la comptable, le mandat n° 1421 émis le 19 avril 2012 fait expressément référence au marché « 11.29 - réalisation toiture amovible parc à sel du centre technique municipal à Serris » et qu'il porte sur le décompte général définitif ; qu’il ne s’agit donc nullement d'un paiement effectué hors marché ;

Attendu que, s’agissant de la présomption de charge n° 3, concernant l’exercice 2013, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes Île-de-France de la responsabilité encourue par Mme X… à raison du paiement du mandat n° 355 du 2 février 2013, d'un montant de 5 639,25 , relatif au solde du marché conclu avec la société Socape pour le solde du lot  3 « Peinture et revêtement de sol » du marché de travaux de rénovation au siège du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe - Château (d'un montant total de 17 071,20 € HT ), sans avoir pris soin de déduire de ce montant les pénalités pour retard dues par le titulaire en application de l'article 6.3 du cahier des clauses particulières du marché alors que ce dernier avait dépassé de 185 jours le délai d'exécution prévu ;

Attendu que, s’agissant des deux présomptions de charge, la comptable ne pouvait ignorer les clauses des cahiers des clauses administratives particulières des marchés prévoyant des pénalités en cas de retard ; qu’elle aurait donc dû déduire elle-même ces pénalités, ou suspendre le paiement des soldes des marchés jusqu'à ce que l'ordonnateur lui produise les justifications nécessaires ; qu’elle a ainsi manqué à ses obligations de contrôle de l'exactitude des calculs de liquidation et de la production des justifications ; que, par suite, elle a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;

En ce qui concerne le préjudice financier, les intérêts et le contrôle sélectif des dépenses :

Attendu qu’en l’absence d’exécution des prestations dans les délais et de décision explicite d’exonération des pénalités, le montant des pénalités qui auraient dû être déduites par la comptable n’étaient pas dues ; qu’en outre, la collectivité a été privée de l'usage de ses équipements dans les délais impartis ; que, par suite, le manquement de la comptable causé un préjudice financier subi par le syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe ; qu’ainsi, en application du troisième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963, il y a lieu de constituer Mme X… débitrice du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe pour la somme de 1 016,60 €, au titre de la charge n° 2 et de de 5 639,25 € au titre de la charge n° 3 ;

Attendu qu’en application du VIII du même article, ces débets porteront intérêt au taux légal à compter du 29 juillet 2016, date de réception du réquisitoire par Mme X… ;

Attendu qu’aux termes du deuxième alinéa du IX du même article : « Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du même VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. Hormis le cas de décès du comptable ou de respect par celui-ci, sous l’appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée au comptable public dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu par le juge des comptes, le ministre chargé du budget étant dans l’obligation de laisser à la charge du comptable une somme au moins égale au double de la somme mentionnée au deuxième alinéa dudit VI » ; que, selon le l’article 1er du décret du 10 décembre 2012 : « La somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré. » ;

Attendu qu’en l’absence de contrôle sélectif des dépenses, le ministre chargé du budget devra laisser à la charge de la comptable une somme au moins égale à 531 €, au titre de la charge n° 2, concernant l’exercice 2012, et de 531 € au titre de la charge n° 3 concernant l’exercice 2013 ;

Par ces motifs,

 

DÉCIDE :

 

 

Article 1er : Au titre de l’exercice 2013, Mme X… est constituée débitrice du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe pour la somme de 13 893,87 euros, augmentée des intérêts de droit à compter du 29 juillet 2016.

 

Article 2 : Au titre de l’exercice 2012, Mme X… est constituée débitrice du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe pour la somme de 1 016,60 euros, augmentée des intérêts de droit à compter du 29 juillet 2016. Le ministre chargé du budget devra laisser à sa charge une somme au moins égale à 531 euros.

 

Article 3 : Au titre de l’exercice 2013, Mme X… est constituée débitrice du Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe pour la somme de 5 639,25 euros, augmentée des intérêts de droit à compter du 29 juillet 2016. Le ministre chargé du budget devra laisser à sa charge une somme au moins égale à 531 euros.

 

Article 4 : La décharge de Mme X… ne pourra être donnée qu’après apurement des débets ou des sommes à acquitter, fixés ci-dessus.

 

 

Fait et jugé par M. Alain Stephan, Président de séance, MM. Hervé Beaudin et Yves Bénichou, premiers conseillers.

 

 

En présence de Mme Marie-Claude Mimbourg, greffière de séance.

 

 

 

 

 

 

 

Marie-Claude Mimbourg

 

 

 

 

 

Alain Stéphan

 

 

 

 

 

En application des articles R. 242-14 à R. 242-16 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-17 à R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-26 du même code.

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