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2ème section

 

Jugement 2017-0006

 

Audience publique du 28 mars 2017

 

Prononcé du 28 avril 2017

 

Centre communal d’action sociale de Briec de l’Odet - budget annexe Etablissement d’hébergement de personnes âgées dépendantes Ti-Bras Ar Re Gozh (Département du Finistère)

 

 

Poste comptable : Trésorerie de Quimper

 

Exercice : 2014

 

 

République Française

Au nom du peuple français

 

La Chambre,

 

 

Vu le réquisitoire du 17 novembre 2016, par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X, comptable du centre communal d’action sociale de Briec de l’Odet au titre d’opérations relatives à l’exercice 2014, notifié le 23 novembre 2016 au comptable concerné ;

 

Vu les comptes rendus en qualité de comptable du centre communal d’action sociale de Briec de l’Odet, par Mme X, du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014, ensemble le compte annexe ;

 

Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

Vu le rapport de M. François GUEGUEN, premier conseiller, magistrat chargé de l’instruction ;

Vu les conclusions du procureur financier ;

Vu les pièces du dossier ; 

Entendu lors de l’audience publique du M. François GUEGUEN, premier conseiller en son rapport, M. Patrick PRIOLEAUD procureur financier, en ses conclusions ;

 

 

 

 

 

 

Sur la présomption de charge unique, soulevée à l’encontre de Mme X, au titre de l’exercice 2014 :

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes de Bretagne de la responsabilité encourue par Mme X pour avoir manqué, en sa qualité de comptable du centre communal d’action sociale de Briec de l’Odet, à l’obligation de contrôle à laquelle elle était tenue en vertu des dispositions du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 et, par son inaction et en l’absence de diligences adéquates, complètes et rapides, avoir laissé intervenir la prescription de l’action en recouvrement des comptables publics pour les titres de recettes listés en annexe au présent jugement et figurant à l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 du budget annexe « EHPAD Ti-Bras Ar Re Gozh » du CCAS de Briec de l’Odet ;

 

Sur les circonstances constitutives de la force majeure

 

Attendu qu’aux termes du V de l’article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963 : « Lorsque (…) le juge des comptes constate l'existence de circonstances constitutives de la force majeure, il ne met pas en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public (…) » ;

 

Attendu que Mme X ne se prévaut d’aucune circonstance constitutive de la force majeure, au sens des dispositions précitées du premier alinéa du V de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 ; que, par suite, sa responsabilité personnelle et pécuniaire est susceptible d’être mise en jeu ;

 

 

Sur l’existence d’un manquement

 

Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963 : « Outre la responsabilité attachée à leur qualité d'agent public, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes (…). La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue        ci-dessus se trouve engagée dès lors (…) qu'une recette n'a pas été recouvrée (…) ». 

 

Attendu qu’en application des articles 18 et 19-1 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 en vigueur au moment des faits, le comptable est notamment tenu d’exercer, en matière de recettes, des diligences en vue du recouvrement des titres de recettes qu’il prend en charge ;

 

Attendu par ailleurs qu’aux termes des dispositions de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, l’action des comptables publics en vue du recouvrement des créances des collectivités et établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge effective des titres de recette ;

 

Attendu qu’il résulte de ces dispositions que les comptables publics sont tenus de faire en temps utile toutes les diligences nécessaires au recouvrement des titres de recettes qu’ils ont pris en charge ; que ces diligences se doivent d’être à la fois adéquates, complètes et rapides ; qu’à défaut et dès lors qu’une recette n’a pas été recouvrée, la responsabilité du comptable peut être engagée par le juge des comptes ;

 

 

Titres n° T-291, T-288, T-289 et T-272

 

Attendu qu’une lettre de relance aurait été adressée le 8 juillet 2014 pour les titres n° T-291, T-289 et T-272 , ainsi qu’une lettre de mise en demeure le 17 janvier 2013 pour le titre T-288 ; que ces relances et cette mise en demeure, faites par l’application informatique Hélios via une chaîne informatisée par courriers simples non signés, ne peuvent être considérées comme des actes interruptifs de prescription, l’instruction codificatrice n° 99-026-AM du 16 février 1999 mentionnant notamment que « ne sont pas interruptifs de prescription l’envoi de la lettre de rappel et les commandement envoyés sous pli simple » ;

 

 

 

 

Attendu que Mme X, à défaut d’acte avéré interruptif de prescription, ne justifie pas de l’accomplissement de diligences adéquates, complètes et rapides en vue du recouvrement des titres
 T-291, T-288, T-289 et T-272 qui ont respectivement été atteints par la prescription de l’action en recouvrement le 9 décembre 2014, le 4 décembre 2014, le 4 décembre 2014 et le 9 décembre 2014, au cours de sa gestion, pour un montant total de 17 794,71  ;

 

Attendu que Mme X indique en réponse que ces restes à recouvrer sont à rapprocher des sommes figurant sur l'état de solde du compte 4718 « autres recettes à classer », qu’il s'agit de versements effectués par le conseil départemental au titre de l'aide sociale, pour un montant de 16 246,33  ; qu’il n’a pas été possible d'imputer les titres de recettes susmentionnés sur les dossiers correspondants des hébergés à l’aide sociale ;

 

Attendu qu’à la date du 29 décembre 2016, ces montants figuraient toujours sur le compte 4718, qui est un compte d’imputation provisoire devant être régularisé dans le mois suivant l’encaissement ;

 

Attendu que les comptables publics sont tenus de faire, sous leur responsabilité, toutes diligences nécessaires pour le recouvrement des recettes locales ; que ces diligences doivent être adéquates, complètes et rapides ;

 

Attendu que Mme X n’a par conséquent pas satisfait aux obligations qui lui incombaient au sens des dispositions de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ; que ce faisant l’intéressée a commis un manquement de nature à engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire sur le fondement de l’article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963, n’ayant au demeurant pas formulé de réserves sur la gestion de son prédécesseur ;

 

 

Titres n° T-174 R-174 A-60, T-261 R-261 A-62, T-315 R-31 A-64, T-78 R-78 A-65, T-186 R-186 A-63, T-295 R-29 A-63, T-25 R-17 A-66

 

Attendu qu’une lettre de mise en demeure aurait été adressée le 17 avril 2014 pour chacune de ces créances, qui ont le même débiteur ; que ces mises en demeure, faites par l’application informatique Hélios via une chaîne informatisée par courriers simples non signés, ne peuvent être considérées comme des actes interruptifs de prescription, l’instruction codificatrice n° 99-026-AM du 16 février 1999 mentionnant notamment que « ne sont pas interruptifs de prescription l’envoi de la lettre de rappel et les commandement envoyés sous pli simple » ;

 

Attendu que Mme X indique qu’une demande de versement de fonds disponibles, suite au décès du débiteur le 18 août 2011, avait été faite le 6 mai 2013 auprès de la banque, pour un montant de 21 557,09 , sans qu’il ne soit démontré que cette somme corresponde aux titres en cause dont le montant total s’élève à 9 932,54 €, la banque n’ayant pu verser qu’un montant de 0,89 €; qu’en réponse au courrier adressé par la comptable le 7 mai 2013 à l’unique héritière, celle-ci a transmis une copie du récépissé de dépôt de déclaration de renonciation à la succession en date du 28 décembre 2011 ;

 

Attendu que la comptable évoque une demande d’admission en non-valeur pour les titres en cause alors qu’il n’est pas démontré que, avant leur prescription, furent effectuées des diligences adéquates pour les recouvrer, au vu de la situation actualisée des états de restes à recouvrer au 31 août 2016 ;

 

Attendu que, s’agissant du titre n° T-315 R-31 A-64, dont la prescription est effective au 1er janvier 2015, l’instruction codificatrice n° 11-022-MO du 16 décembre 2011 rappelle que « l’appréciation du caractère définitivement compromis du recouvrement d’une créance relève du pouvoir souverain du juge financier et ne se confond pas avec la prescription de l’action en recouvrement du comptable public. Ainsi, la responsabilité du comptable peut être engagée même si le recouvrement de la créance n’est pas prescrit, eu égard aux circonstances de l’espèce que seul le juge des comptes est habilité à apprécier » ;

 

 

 

 

Attendu que Mme X, à défaut d’acte avéré interruptif de prescription, ne justifie pas de l’accomplissement de diligences adéquates, complètes et rapides en vue du recouvrement des titres
T-174 R-174 A-60, T-261 R-261 A-62, T-315 R-31 A-64, T-78 R-78 A-65, T-186 R-186 A-63,
T-295 R-29 A-63 et T-25 R-17 A-66 qui ont respectivement été atteints par la prescription de l’action en recouvrement le 11 septembre 2014, le 6 novembre 2014, le 1er janvier 2015, le 8 mai 2014, le 12 octobre 2014, le 8 décembre 2014 et le 16 avril 2014, au cours de sa gestion, pour un montant total de 9 932,54  ;

 

Attendu que Mme X n’a par conséquent pas satisfait aux obligations qui lui incombaient au sens des dispositions de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ; que ce faisant l’intéressée a commis un manquement de nature à engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire sur le fondement de l’article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963, n’ayant au demeurant pas formulé de réserves sur la gestion de son prédécesseur ;

 

 

Sur l’existence d’un préjudice financier

 

Attendu qu’aux termes du 3ème alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 : « Lorsque le manquement du comptable (…) a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’aux termes du paragraphe VIII du même article : « Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ;

 

Attendu que, dans ses conclusions, le procureur financier considère que la comptable n’a pas satisfait aux obligations qui lui incombaient au sens des dispositions de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales pour les titres n° T-291, T-288, T-289 et T-272 ;

 

Attendu que le défaut de diligences de la part de la comptable a fortement compromis le recouvrement des titres en cause ; que les recettes non recouvrées et prescrites ont causé un préjudice ;

 

Attendu que, s’agissant des titres n° T-174 R-174 A-60, T-261 R-261 A-62, T-315 R-31 A-64, T-78 R-78 A-65, T-186 R-186 A-63, T-295 R-29 A-63, T-25 R-17 A-66, la comptable n’a pas satisfait aux obligations qui lui incombaient au sens des dispositions de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités ; que le défaut de diligences de la part de Mme X a fortement compromis le recouvrement des titres en cause ; que les recettes non recouvrées et prescrites ont causé un préjudice ;

 

Attendu que, du fait de l’inaction de Mme X, le centre communal d’action sociale de Briec de l’Odet – budget annexe « EHPAD Ti-Bras Ar Re Gozh », a subi un préjudice d’un montant de 27 727,25 € correspondant à la somme des onze créances non recouvrées et définitivement compromises durant sa gestion ; qu’il y a donc lieu de déclarer l’intéressée débitrice envers le centre communal d’action sociale de Briec de l’Odet à hauteur de la somme 27 727 ,25  ;

 

Sur les intérêts :

 

Attendu qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée : « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en application de ces dispositions, la somme mise à la charge de Mme X portera intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2016, date de notification du réquisitoire à l’intéressée ;

 

 

 

 

 

 

 

Par ces motifs,

 

DÉCIDE :

 

 

Au titre de l’exercice 2014, présomption de charge unique

 

Article 1 : Mme X est constituée débitrice du centre communal d’action sociale de Briec de l’Odet pour la somme de vingt-sept mille sept cent vingt-sept euros et vingt-cinq centimes (27 727,25 euros), augmentée des intérêts de droit à compter du 23 novembre 2016.

 

Article 2 : La décharge de Mme X ne pourra être donnée qu’après apurement du débet     ci-dessus.

 

 

Fait et jugé par M. Didier GORY, président de séance, MM. Pierre PERROT et Patrick LODS, conseillers.

 

 

En présence de Mme Annie FOURMY, greffière de séance.

 

 

 

Signé : Annie FOURMY

 

 

Signé : Didier GORY

 

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

 

La secrétaire générale

 

 

 

Catherine PELERIN

 

 

 

 

En application des articles R. 242-14 à R. 242-16 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-17 à R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-26 du même code.

 

 

 


 

 

 

 

Annexe

 

 

Compte 4114

Exercice

Titre n°

Restes à recouvrer

2010

T-291

9 949,39 

T-289

4 540,74 

T-272

1 700,86 

 

 

Compte 4111

Exercice

Titre n°

Restes à recouvrer

 

2010

 

T-288

1 603,72 

 

 

Compte 4111

Exercice

Titre n°

Restes à recouvrer

2010

T-174 R-174 A-60

1 483,04 

T-261 R-261 A-62

1 445,53 

T-315 R-31 A-64

1 445,53 

T-78 R-78 A-65

1 413,44 

T-186 R-186 A-63

1 398,90 

T-295 R-29 A-63

1 398,90 

T-25 R-17 A-66

1 347,20