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Première section
Jugement n° 2017-0005 J
Audience publique du 28 février 2017
Prononcé du 21 mars 2017 | Communauté d’agglomération de la Plaine Centrale du Val-de-Marne (94)
Poste comptable : Centre des finances publiques de Créteil
Exercice : 2012 |
République Française
Au nom du peuple français
La chambre,
Vu le réquisitoire en date du 24 août 2015, par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X…, comptable de la communauté d’agglomération de la Plaine Centrale du Val-de-Marne, au titre d’opérations relatives à l’exercice 2012, notifié à l’intéressé le 19 septembre 2015 ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la communauté d’agglomération de la Plaine centrale du Val-de-Marne, par M. X…, du 1er janvier au 31 décembre 2012 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
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Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le rapport de Jean-Marc Dunoyer de Segonzac, magistrat chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du procureur financier ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendu en délibéré M. Yves Bénichou, premier conseiller en ses observations ;
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes d’Île-de-France de la responsabilité encourue par M. X…, à raison du paiement en 2012 d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) à deux adjoints techniques territoriaux, sans disposer des pièces justificatives requises ;
Attendu qu’aux termes du deuxième alinéa du I de l’article 60 de la loi de finances du 23 février 1963 : « Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière […] de dépenses […] dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique » ; que, selon le troisième alinéa : « La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors […] qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ; qu’en application de l’article 12 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, alors en vigueur : « Les comptables sont tenus d’exercer […] b) En matière de dépenses, le contrôle : […] de la disponibilité des crédits, de la validité de la créance dans les conditions prévues à l’article 13 ci-après, du caractère libératoire du règlement » ; que l’article 13 du même décret dispose que : « En ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur la justification du service fait et l’exactitude des calculs de liquidation ; l’intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications […] » ;
Attendu que selon l’article D.1617-19 du code général des collectivités territoriales : « Avant de procéder au paiement d’une dépense ne faisant pas l’objet d’un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales […] ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l’annexe I du présent code » ; que selon la rubrique 210224 de ladite liste concernant le paiement des indemnités horaires pour travaux supplémentaires, le comptable doit notamment exiger les pièces suivantes : « 1. Délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effectives d’heures supplémentaires ; 2. Décompte indiquant par agent et par taux d’indemnisation le nombre d’heures effectuées ; 3. Le cas échéant, décision justifiant le dépassement du contingent mensuel autorisé » ; qu’en effet, l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 dispose que : « L’assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale […] fixe les régimes indemnitaires […] » ;
Attendu qu’aux termes de l’article 37 du décret du 29 décembre 1962 susvisé : « Lorsque, à l’occasion de l’exercice du contrôle prévu à l’article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l’ordonnateur » ;
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Attendu que M. X…, en sa qualité de comptable de la communauté d’agglomération de la Plaine Centrale du Val-de-Marne a réglé, au cours de l’année 2012, des IHTS à deux agents techniques territoriaux, en dépassement du contingent mensuel réglementaire de 25 heures par agent, sans disposer de la décision justifiant le dépassement du contingent mensuel autorisé prévue par la nomenclature des pièces justificatives précitée ; que ces paiements ont été effectués à hauteur de 25 970, 93 € en 2012, par des mandats collectifs ;
Attendu que si le versement de ces IHTS se fonde sur la délibération du conseil communautaire du 28 avril 2004 modifiée, qui fixe les catégories de bénéficiaires des IHTS et les cas de dépassement du plafond d’heures supplémentaires, pour des évènements exceptionnels, limitativement énumérés, et pour une période très courte, cette délibération n’est pas suffisante pour justifier ces paiements, en l’absence de la décision prévue par la nomenclature précitée ;
Attendu en outre, que les attestations des 30 mars et 15 avril 2015 du directeur général adjoint des services, ainsi que le tableau récapitulatif établi par la comptable en fonction communiqué à la chambre le 8 avril 2015, sont postérieures aux paiements irréguliers en cause, et ne peuvent donc constituer des pièces justificatives de ces paiements ;
Attendu qu’en payant ces IHTS dans ces conditions, M. X… a manqué à ses obligations de contrôle de la validité de la dépense, en particulier de l’exactitude de la liquidation et de la production des pièces justificatives ; que par suite, le comptable a manqué aux obligations mentionnées au I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu que l’ordonnateur ainsi que M. X…, font valoir que le service fait par les deux agents concernés a bien été effectué et que les paiements concernés n’auraient pas porté préjudice à la collectivité ; que toutefois, lorsque l’instance est ouverte devant le juge des comptes, le constat de l’existence ou non d’un préjudice financier relève de l’appréciation du juge, qui n’est pas lié par une déclaration de l’organe délibérant ou de l’ordonnateur ; qu’en l’absence de la décision de l’autorité compétente justifiant le dépassement du contingent d’heures supplémentaires autorisé, le paiement des indemnités incriminées n’était pas dû ; que leur paiement par le comptable a, de ce fait, entraîné un préjudice financier pour la communauté d’agglomération ;
Attendu qu’aux termes du troisième alinéa VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 : « Lorsque le manquement du comptable mentionné au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; que dans ce cas il n’y a pas lieu de prendre en compte les circonstances de l’espèce mentionnées au deuxième alinéa du VI ; qu’ainsi, le comptable et l’ordonnateur ne peuvent utilement se prévaloir d’éléments de contexte relatifs à l’organisation et à la charge du poste comptable, au regard de la faiblesse du nombre d’agents affectés au contrôle des paies ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer M. X… débiteur de la communauté d’agglomération de la Plaine Centrale du Val-de-Marne pour la somme de 25 970,93 € ;
Attendu qu’aux termes du VIII du même article : « Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 19 septembre 2015, date de réception du réquisitoire par M. X… ;
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Attendu que selon le deuxième alinéa du IX du même article : « Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du […] VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. Hormis le cas du décès du comptable ou du respect par celui-ci, sous l’appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée au comptable public dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu par le juge des comptes, le ministre chargé du budget étant dans l’obligation de laisser à la charge du comptable une somme au moins égale au double de la somme mentionnée au deuxième alinéa dudit VI. » ; qu’aux termes de l’article 1er du décret du 10 décembre 2012 susvisé : « La somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré » ;
Attendu que, selon le plan produit, les règles de contrôle sélectif pour 2012 ne prévoyaient que le contrôle, des heures supplémentaires des agents dont le patronyme commençait par les lettres G et H, ce qui n’était pas le cas des deux agents technique territoriaux concernés ; qu’ainsi, le comptable n’était pas tenu de contrôler les dépenses litigieuse ; que, par suite, eu égard au montant du cautionnement de 234 000 € imposé au titulaire du poste comptable de Créteil durant l’année 2012, le ministre chargé du budget pourra laisser à la charge du comptable une somme inférieure à 702 € ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : M. X… est constitué débiteur de la communauté d’agglomération de la Plaine Centrale du Val-de-Marne au titre de l’exercice 2012, pour la somme de 25 970,93 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 19 septembre 2015.
Article 2 : En cas de remise gracieuse des débets ci-dessus prononcés, le ministre chargé du budget pourra laisser à la charge de M. X… comptable une somme inférieure à 702 €.
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Article 3 : Il est sursis à la décharge de M. X… par sa gestion durant l’exercice 2012, jusqu’à constatation de l’apurement débet prononcé ci-dessus.
Fait et jugé par Alain Stéphan, président de séance ; Mme Catherine Salmon et M. Yves Bénichou, premiers conseillers.
En présence de Reynald Husson, greffier de séance.
Reynald Husson
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Alain Stéphan
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En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-14 à R. 242-16 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-17 à R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-26 du même code.
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