Sections réunies
Jugement n° 2017-0047
Audience publique du 28 novembre 2017
Prononcé du 12 décembre 2017
| COMMUNAUTÉ DE COMMUNES DU VILLEFRANCHOIS
Poste comptable : CFP de Villefranche-de-Rouergue
N° codique : 012045 949
Exercices 2012 et 2013
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La République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
VU les comptes, rendus en qualité de comptable de la communauté de communes du Villefranchois par M. X…, du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 ;
VU le réquisitoire, pris le 4 septembre 2017 et notifié le 11 septembre 2017, par lequel le procureur financier près la chambre régionale des comptes a saisi la juridiction d’une charge présomptive à l’encontre dudit comptable au titre d’opérations relatives aux exercices 2012 et 2013 ;
VU les justifications produites au soutien du compte ;
VU l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
VU le code des juridictions financières ;
VU les lois et règlements applicables aux communautés de communes ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
VU le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
VU le rapport de Mme Hélène MOTUEL-FABRE, présidente de section, magistrate chargée de l’instruction ;
VU les conclusions de M. Denys ECHENE, procureur financier près la chambre ;
VU les pièces du dossier ;
ENTENDU, lors de l’audience publique du 28 novembre 2017, Mme Hélène MOTUEL-FABRE, présidente de section, en son rapport et M. Denys ECHENE, en ses conclusions ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier près la chambre, M. X…, comptable, et le président de la communauté de communes du Villefranchois n’étant ni présents ni représentés à l’audience publique ;
Sur la présomption de charge unique, soulevée à l’encontre de M. X…, au titre des exercices 2012 et 2013 :
1 - Sur le réquisitoire
ATTENDU qu’en application de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général de la comptabilité publique » ;
ATTENDU qu’en application des articles 12 et 13 combinés du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962, les comptables publics sont, en matière de dépenses, chargés de contrôler l’exactitude des calculs de liquidation et la production des justifications à l’appui des ordres de payer ;
ATTENDU que ces dispositions encadraient la responsabilité des comptables publics en dépenses jusqu’au 31 décembre 2012, et qu’à compter du 1er janvier 2013 elles ont été remplacées par celles du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
ATTENDU que ce nouveau texte n’a pas modifié le périmètre de la responsabilité des comptables en général et en particulier en matière de contrôle de la liquidation et des justifications à produire ; qu’ainsi ses articles 19 et 20 fixent aux comptables des obligations identiques à celles qui étaient les leurs auparavant ;
ATTENDU que les dispositions combinées de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales et de son annexe 1 fixent la liste des pièces justificatives devant figurer à l’appui des dépenses ;
ATTENDU qu’il y a lieu, au-delà du premier paiement, d’appliquer aux dépenses relatives aux primes et indemnités accordées au personnel de la communauté de communes du Villefranchois, la nomenclature des pièces justificatives de la rubrique 210223 de ladite annexe 1, soit :
« 1. Décision de l’assemblée délibérante fixant la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités ;
2. Décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent. » ;
ATTENDU que ces pièces justificatives doivent être produites à l’appui des mandats de dépense correspondants afin que le comptable puisse satisfaire à ses obligations de contrôle et prendre en charge à bon droit lesdits mandats ;
ATTENDU que les comptes 2012 et 2013 font apparaître, au mois de décembre, le paiement d’une « prime de fin d’année » au bénéfice de huit agents, pour un montant total de 28 006,24 € détaillé comme suit :
ATTENDU qu’aucune délibération instituant cette prime n’a été produite à l’appui des mandats ; que, de surcroît, la délibération du conseil communautaire du 31 mai 2012, qui porte mise à jour du régime indemnitaire et fait la liste des primes et indemnités accordées au personnel, n’en fait nulle mention ;
ATTENDU qu’une telle délibération nécessitait, pour être recevable, d’avoir été prise avant l’entrée en vigueur de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 pour être intégrée au régime indemnitaire des agents de la communauté de communes du Villefranchois au titre des avantages collectivement acquis au sens de la loi ;
2 - Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que la communauté de communes fait état d’une délibération de la commune de Villefranche-de-Rouergue du 26 mars 1985 en référence à l’article 111 de la loi du 26 janvier 1984 permettant aux agents titulaires de conserver les avantages ayant le caractère de complément de rémunération qu’ils ont acquis collectivement au sein de leur collectivité par l’intermédiaire d’organismes à vocation sociale ; qu’il y est décidé que la prime de fin d’année versée jusque-là au personnel communal par l’intermédiaire du comité d’action sociale le sera désormais directement par la commune ; que la délibération prévoit que le montant de la prime est équivalent au traitement de base soumis aux retenues du mois de décembre déduction faite des retenues légales et obligatoires ;
ATTENDU qu’à la suite du transfert de la compétence « ordures ménagères » à l’EPCI le 1er janvier 2000, la communauté de communes a décidé, par délibération du 26 septembre 2000 prise en application de l’article 64 de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999, relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale de maintenir, individuellement, les avantages acquis que versait la commune de Villefranche-de-Rouergue au profit des agents affectés à cet établissement au titre de l’emploi qu’ils occupaient antérieurement et donc de leur verser la prime de fin d’année dont il est précisé, comme précédemment, que son montant « sera calculé sur le traitement du mois de décembre, déduction faite des retenues légales et obligatoires » ;
ATTENDU que les agents concernés sont bien ceux employés auparavant par la commune de Villefranche-de-Rouergue ;
ATTENDU qu’il ressort du rapport susvisé et des pièces du dossier que les pièces justificatives produites en réponse manquaient au moment du paiement ; que la responsabilité du comptable s’apprécie, de jurisprudence constante, au moment du paiement ; qu’il aurait dû suspendre le paiement des mandats en cause ;
ATTENDU que le comptable a ainsi commis un manquement susceptible d’engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
3 - Sur l’existence d’un préjudice financier du fait du manquement du comptable
ATTENDU que l’ordonnateur comme le comptable font valoir que la prime de fin d’année a fait l’objet d’une délibération du conseil communautaire du 26 septembre 2000 ; qu’ils estiment dès lors que la collectivité n’a pas subi de préjudice financier ;
ATTENDU que, dans ses conclusions, le procureur financier près la chambre reconnaît, notamment, qu’« il n’est pas rare que les délibérations antérieures à 1984 […] soient perdues [ou] oubliées » ; qu’« il y a lieu d’observer que la délibération de 1985 fait référence expresse aux modalités précédentes du versement de la prime en cause et pose clairement les raisons pour lesquelles son paiement est alors pris en charge par le budget communal (puis intercommunal par délibération de 2000) » ; qu’« on pourrait considérer que cette délibération était, dans ces conditions, […] suffisante pour justifier la dépense » ;
ATTENDU que les déclarations de l’ordonnateur et du comptable sur l’absence de préjudice financier ne sauraient lier le juge financier ; que toutefois aucun préjudice financier n’est avéré pour la collectivité dès lors que les pièces produites en réponse répondent aux exigences de la nomenclature et permettent d’attester de la volonté de la collectivité de payer la prime en cause et d’en assurer la liquidation dans le respect des dispositions légales, en l’espèce l’article 111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
4 - Sur la mise en œuvre de la responsabilité du comptable
ATTENDU qu’aux termes du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : « lorsque le manquement du comptable […] n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ;
ATTENDU que le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ; que ce dernier montant s’établit, au moment de la commission des faits, à 177 000 € pour le poste comptable de Villefranche-de-Rouergue, dont relève la communauté de communes du Villefranchois ;
ATTENDU qu’ainsi, le montant maximum de la somme susceptible d’être mise à la charge de M. X… s’élève par année à deux cent soixante-cinq euros et cinquante centimes (265,50 €) ;
ATTENDU qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce, faible effectif concerné et extinction progressive de l’avantage, en décidant de ne retenir qu’une somme de cent trente-deux euros et soixante-quinze centimes (132,75 €) par année, soit un total, pour les deux exercices en cause, de deux cent soixante-cinq euros et cinquante centimes (265,50 €) ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : Sur la présomption de charge unique, au titre des exercices 2012 et 2013 ;
M. X… devra s’acquitter d’une somme de deux cent soixante-cinq euros et cinquante centimes (265,50 €) en application du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963.
Article final : La décharge de M. X… pour les exercices 2012 et 2013 ne pourra être donnée qu’après acquittement de la somme à acquitter fixée ci-dessus.
Délibéré le 28 novembre 2017 par M. André PEZZIARDI, président de la chambre, président de séance ; Mmes Brigitte ROMAN et Vanina DUWOYE, premières conseillères, MM. Laurent LE NY et Adrien GAUBERT, premiers conseillers.
En présence de Mme Clarisse GOUILLOUX, greffière de séance.
Clarisse GOUILLOUX, greffière de séance |
André PEZZIARDI, président de séance |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre les dispositions dudit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Jugement n° 2017-0047 page 1 sur 5
500, avenue des États du Languedoc CS 70755 34064 MONTPELLIER CEDEX 2 T +33 4 67 20 73 00 occitanie@crtc.ccomptes.fr
Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la chambre régionale des comptes Occitanie, et délivré par moi, secrétaire générale,
Brigitte VIOLETTE, secrétaire générale |
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans un délai de deux mois à compter de leur notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code.
Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger.
La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
Jugement n° 2017-0047 page 1 sur 5
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