CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES Troisième Section Jugement n° 2017-0012
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Commune de Hyères les Palmiers
(Var)
Trésorerie de Hyères municipale
Exercices 2010 à 2014
Rapport n° 2016-0264
Audience publique du 23 février 2017
Délibéré le 23 février 2017
Prononcé le 18 avril 2017
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur,
VU le réquisitoire en date du 14 septembre 2016, portant sur les exercices 2010 à 2014, par lequel le procureur financier a saisi la chambre de trois présomptions de charges portant sur la gestion de M. X, comptable du 1er janvier 2010 au 15 juin 2014 (charges n° 1, 2 et 3) et de deux présomptions de charges portant sur la gestion de Mme Y, comptable du 16 juin 2014 au
31 décembre 2014 (charges n° 2 et 3) , en vue de la mise en jeu de leur responsabilité personnelle et pécuniaire ;
VU la notification du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de l’instruction à l’ordonnateur et à Mme Y, le 20 septembre 2016 ainsi qu’à M. X, le 21 septembre 2016 ;
VU les comptes de la commune de Hyères les Palmiers pour les exercices 2010 à 2014 ;
VU le code des juridictions financières ;
VU l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée, le décret
n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU l'arrêté n° 2016-16 du 23 décembre 2016 du président de la chambre fixant l'organisation des formations de délibéré et leurs compétences pour 2017 ;
VU l’ordonnance n° 2016-0112 du 14 septembre 2016, prononçant un non-lieu à statuer sur les comptes des exercices 2008 et 2009 en application du IV de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée ;
VU les pièces produites au cours de l’instruction, notamment les justifications en réponse transmises par l’ordonnateur le 10 novembre 2016, par M. X les 12 octobre et
15 novembre 2016, et par Mme Y le 25 octobre 2016 ;
Sur le rapport de M. Jean-François Kuntgen, premier conseiller ;
VU les conclusions du procureur financier ;
Après avoir entendu en audience publique le rapporteur et les conclusions orales de M. Marc Larue, procureur financier, l’ordonnateur et les comptables, informés de l’audience, n’étant ni présents ni représentés ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier ;
En ce qui concerne les circonstances de force majeure
ATTENDU qu’aucune circonstance constitutive de la force majeure n’a été établie ni même alléguée ; que dans la mesure où elle n’était ni extérieure, ni imprévisible, ni irrésistible, « la situation particulièrement difficile » marquée notamment par le caractère « catastrophique » de la « situation des effectifs » du poste comptable que Mme Y a indiqué avoir trouvée lorsqu’elle en a pris la responsabilité le 15 juin 2014 ne saurait s’analyser comme une telle circonstance ; qu’il y a donc lieu pour la chambre de se prononcer sur l’existence de manquements de la part de M. X et Mme Y ;
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a requis la chambre au motif qu’à l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 du compte 4111 « Redevables-amiable », figuraient les titres n° 2377 et n° 2582 émis le 26 octobre 2009 à l'encontre de
la société Z pour un montant respectif en principal de 5 886 € et 293,40 € ; qu’y figuraient également le titre n° 2904, d’un montant en principal de 32,50 €, ainsi que le titre n° 3476, d’un montant en principal de 195 €, émis les 6 novembre 2009 et 21 décembre 2009 à l'encontre de la même entreprise ;
ATTENDU que le réquisitoire a relevé que la lettre de rappel mentionnée dans l’état des restes à recouvrer ne constituait pas un acte de poursuite et que le commandement dont il était fait état dans le même document n'était pas avéré ; qu'au surplus, si la société avait fait l'objet d'un redressement judiciaire le 15 mars 2010 comme cela était indiqué sur l'état des restes à recouvrer, le comptable disposait, en application des dispositions de l'article R. 622-24 du code de commerce, d'un délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture de la procédure de règlement judiciaire au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) pour déclarer les créances, soit au plus tard le 15 mai 2010, sous la gestion de M. X ; qu’il y avait ainsi lieu pour le comptable, chargé du contrôle du recouvrement des créances, de produire les justificatifs correspondants ;
ATTENDU que le procureur financier en a conclu qu’en l’état de son information, M. X, comptable du 1er janvier 2010 au 15 juin 2014, paraissait avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
En ce qui concerne les positions défendues par le comptable et l’ordonnateur
ATTENDU que, dans sa réponse, M. X a indiqué que la notification par sa direction du redressement judiciaire de la société ne lui était parvenue qu’après expiration du délai de déclaration des créances ;
ATTENDU que l’ordonnateur n’a pas formulé de réponse sur la charge n° 1 ;
En ce qui concerne les propositions du rapporteur
ATTENDU que le rapporteur a proposé de considérer que le défaut de diligences pour assurer le recouvrement des créances, et notamment l’absence de déclaration desdites créances dans les délais impartis, était constitutif d’un manquement de la part du comptable ;
En ce qui concerne les conclusions du procureur financier
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a souligné qu'en matière de recouvrement de créances, les comptables publics doivent exercer des diligences adéquates, complètes et rapides ; que pour être complètes, ces diligences doivent comporter une déclaration de créances au passif d'une procédure collective, qui relève de la seule responsabilité du comptable, selon une jurisprudence constante de la Cour des comptes ; qu’ainsi si la créance ne s'est pas éteinte avec la liquidation judiciaire, il n'en demeure pas moins que n'ayant pas été inscrite au passif du règlement judiciaire, elle est, de fait, devenue irrécouvrable ;
ATTENDU que le procureur financier a conclu que M. X avait engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire et se trouvait ainsi dans l’un des cas prévus par les dispositions de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 ;
En ce qui concerne le manquement
ATTENDU qu’aux termes des dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, « Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique. La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors (…) qu’une recette n’a pas été recouvrée (…) » ;
ATTENDU que les titres visés par le réquisitoire n’ont pas été recouvrés ; qu’un jugement de liquidation judiciaire a été prononcée à l'encontre de la société Z le 14 décembre 2009 et publié au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales le 6 janvier 2010 ; qu’en application des dispositions de l'article R. 622-24 du code de commerce, le comptable disposait d'un délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture de la procédure de règlement judiciaire au BODACC pour déclarer les créances, soit au plus tard le 6 mars 2010 ;
ATTENDU que le fait que le gérant de la société à qui avait été notifié un commandement de payer le 19 février 2010, soit près de quatre mois après la prise en charge des titres les plus anciens, émis le 26 octobre 2009, n’ait pas informé le comptable de la procédure ouverte à l’encontre de la société débitrice, ne saurait l’exonérer de sa responsabilité ; qu’il appartenait au comptable, seul chargé du recouvrement des recettes, de s’organiser afin d’être en mesure de suivre la situation judiciaire de l’entreprise débitrice sur le BODACC ;
ATTENDU qu’au surplus le comptable n’a pas demandé à être relevé de sa forclusion alors qu’aux termes de l’article L. 622-26 du code de commerce, à défaut de déclaration des créances, le comptable peut, dans le délai de six mois suivant la publication du jugement d’ouverture, demander au juge-commissaire à être relevé de sa forclusion s’il établit que sa défaillance n’est pas due à son fait ou qu’elle est due à une omission du débiteur ;
ATTENDU que l’absence de production des créances en cause dans les délais légaux a définitivement compromis leur recouvrement à cette date et privé la commune de la possibilité d’être admis dans la répartition de l’actif liquidé ;
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède que M. X a manqué à ses obligations en matière de recouvrement de recettes ;
En ce qui concerne le préjudice financier
ATTENDU qu’aux termes de l’article 60-VI de la loi du 23 février 1963 susvisée : « Lorsque le manquement du comptable (…) a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
ATTENDU qu’à la date de la publication du jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, soit le 6 janvier 2010, la réalité de l’insolvabilité de la société débitrice n’était pas établie ;
ATTENDU qu’il doit, dès lors, être considéré que le manquement du comptable a causé un préjudice financier à la commune et qu’il y a donc lieu de constituer M. X en débet à hauteur de la somme non recouvrée, soit 6 406,90 € ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité des comptables correspond à la notification du réquisitoire, intervenue en l’espèce le 21 septembre 2016 ;
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la juridiction d’une présomption de charge, considérant que sur l'état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 du compte 46726 « Débiteur divers-contentieux » du budget principal de la commune figurait le titre n° 4 émis à l'encontre de M. A le 23 janvier 2009 pour un montant de 37 800 € ;
ATTENDU que le procureur financier a estimé que la lettre de rappel dont faisait mention l’état des restes à recouvrer ne constituait pas un acte de poursuite et que le dernier avis avant poursuites qui y était également mentionné n'était pas avéré ; qu’à défaut de diligences rapides, complètes et adéquates, le titre paraissait prescrit depuis le 23 janvier 2013, sous la gestion de M. X ; que toutefois, la responsabilité de Mme Y pourrait être engagée si des diligences ayant repoussé la prescription étaient avérées ;
En ce qui concerne les positions défendues par la comptable et l’ordonnateur
ATTENDU que, dans sa réponse, M. X a indiqué que le titre de recette n° 4 du
23 janvier 2009 émis au nom de M. A avait fait l'objet de nombreuses oppositions à tiers détenteur qui avaient interrompu le cours de la prescription ; qu’il a joint à sa réponse les accusés de réception produits par les organismes bancaires les 8 avril 2010, 18 octobre 2010, 15 décembre 2010, 18 mars 2011, 27 juin 2011, 20 septembre 2011, 24 octobre 2012 et
11 juillet 2013 et par la caisse d’assurance vieillesse le 23 août 2013 ; que M. X a précisé que le domicile du débiteur au Brésil puis au Paraguay n'autorisait pas d'autres moyens de recouvrement que l'opposition à tiers détenteur bancaire ;
ATTENDU que Mme Y a confirmé la réponse de M. X ;
ATTENDU que l’ordonnateur n’a pas formulé de réponse sur cette charge ;
En ce qui concerne les propositions du rapporteur
ATTENDU que le rapporteur a proposé de considérer que les pièces fournies par le comptable montraient qu’il avait diligenté des poursuites notamment sous forme d’opposition à tiers détenteur auprès de deux banques ainsi qu’auprès de la caisse d’assurance vieillesse, pour obtenir le recouvrement du titre visé dans le réquisitoire ; que suite aux difficultés de recouvrement rencontrées, le débiteur étant de plus domicilié en Amérique du Sud, l’admission en non-valeur avait été acceptée par la commune ;
ATTENDU que par conséquent, le rapporteur a proposé de considérer que les comptables successifs mis en cause avaient réalisé des diligences suffisantes pour assurer le recouvrement de la créance, par ailleurs non prescrite au 31 décembre 2014 ;
En ce qui concerne les conclusions du procureur financier
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a proposé de lever la charge aux motifs que M. X a justifié de diverses oppositions à tiers détenteur diligentées par ses soins auprès des banques et de leurs suites ; qu’il a souligné qu’en tout état de cause, il y avait lieu de considérer que le dernier virement partiel de la banque suite à l’opposition à tiers détenteur du 27 juin 2011 a repoussé la prescription au 28 juillet 2015, exercice non contrôlé ;
En ce qui concerne le manquement
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède que M. X et Mme Y n’ont pas commis de manquement susceptible d’engager leur responsabilité ; qu’il y a donc lieu de prononcer un non-lieu à charge s’agissant de la mise en jeu de leur responsabilité dans le recouvrement de la créance ;
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la juridiction d’une présomption de charge, considérant que les comptables successivement en fonctions au cours des exercices 2012 à 2014 ont réglé une « indemnité » de départ à la retraite à huit agents de la commune, suite à une note de service du 29 juin 2001 par laquelle le maire alors en fonctions avait décidé qu'« à l'occasion de chaque départ à la retraite, le personnel communal bénéficiera des avantages suivant : 3 mois de gratification ; congés annuels acquis au prorata de la période travaillée durant l'année du départ. Ces avantages sont cumulables avec les congés ancienneté et récupérateurs. Ils restent acquis quelle que soit la date de départ au cours de l'année » ; que les versements correspondants ont été réalisés sur le fondement des mandats n° 5562 du 19 juillet 2012, 8306 du 22 octobre 2012 et 9246 du 20 novembre 2012 au bénéfice de quatre agents pour un montant total de 19 407,49 €, sur le fondement du mandat n° 5321 du 19 juillet 2013 au bénéfice de deux agents pour un montant total de 11 641,95 € et sur le fondement des mandats n° 6389 du 18 septembre 2014 et 7326 du 20 octobre 2014 au bénéfice de deux agents pour un montant total de 10 300,60 € ;
ATTENDU que le procureur financier a considéré que l'octroi d'une prime ou indemnité ne peut être décidée par note de service ; que le conseil municipal de la ville de Hyères les Palmiers n'a pas prévu le versement d'une telle indemnité qui, au demeurant, ne repose sur aucun texte réglementaire ; que pendant la phase administrative d'examen des comptes, les services de l'ordonnateur ont indiqué que ce versement était effectué aux agents radiés des cadres « en guise de remerciements pour bons et loyaux services avant le jour de leur radiation (...) cette procédure n'est plus applicable depuis le 1er janvier 2016 (...) » ; que le comptable devait
exiger, au moment du paiement, les pièces prévues à l'annexe I de l'article D. 1617-19 du CGCT, § 210223 « Primes et indemnités », à savoir une décision de l'assemblée délibérante fixant la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités ainsi qu’une décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent ; que ces pièces n'étaient pas jointes aux mandats et n'ont pas été fournies pendant la phase administrative d'examen des comptes ;
ATTENDU que le procureur financier a estimé en conséquence que les comptables paraissaient avoir engagé leur responsabilité personnelle et pécuniaire à raison des paiements en cause ;
En ce qui concerne les positions défendues par les comptables
ATTENDU que, dans leurs réponses respectives susvisées, M. X et Mme Y ont fait valoir que les indemnités de départ à la retraite versées en 2012, 2013 et 2014 sur le fondement des mandats visés dans le réquisitoire constitueraient un « avantage acquis » au sens de l’article 111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dont ils ont observé par ailleurs qu’elles n’avaient pas été mises en cause par la chambre régionale des comptes lors de ses précédents contrôles sur les comptes et la gestion de la commune, tout en reconnaissant que l’octroi de telles indemnités relevait d’une délibération et non d’une note de service du maire, datée en l’espèce du 29 juin 2001 ; que M. X a toutefois précisé que, dans la mesure où le conseil municipal n’avait jamais contesté la décision prise par le maire en fonctions en 2001 et implicitement confirmée par ses successeurs, cette décision devait être réputée avoir été « tacitement acceptée » par l’instance compétente pour instaurer une indemnité de départ à la retraite ; qu’il a ajouté qu’« au surplus, pendant les huit années [qu’il avait] passées à la trésorerie d’Hyères Municipale, [il n’avait] jamais été informé par les services de la mairie de cette mesure dont la détection [était] pratiquement impossible dans les contrôles aléatoires de la paye » ; que Mme Y et M. X ont également soutenu que, dans ce contexte particulier, le paiement des indemnités n’avait pas causé de préjudice financier à la commune de Hyères les Palmiers ;
ATTENDU que Mme Y a ajouté que, compte tenu de « la situation particulièrement difficile » marquée notamment par le caractère « catastrophique » de la « situation
des effectifs » du poste comptable qu’elle a trouvée lorsqu’elle en a pris la responsabilité le 15 juin 2014, elle n’avait « pu que traiter les urgences, et plus particulièrement la reprise des poursuites sur des titres en cours de prescription, car l’automate des poursuites ne fonctionnait plus depuis avril 2014 », de sorte qu’« il était alors [selon elle] totalement impossible d’entamer [sa] gestion par un contrôle des payes » ;
ATTENDU que l'ordonnateur a précisé que l’« indemnité dite de départ en retraite correspondait pour les agents en congé de longue maladie (…) au congé de fin de carrière accordé aux agents communaux » ; qu’« en effet, afin qu’ils bénéficient du même traitement que les autres agents en fin de carrière (qui n’étaient pas en position de maladie), et puisqu’ils n’étaient pas en capacité de bénéficier de cette gratification du fait de leur position administrative, il leur était versé cette dernière sous forme d’indemnité » ; qu’après avoir soutenu que les charges correspondantes n’avaient pas suscité de préjudice financier pour la commune, il a fait savoir qu’il avait mis un terme, le 1er janvier 2016, à « cette pratique historique » ;
En ce qui concerne les propositions du rapporteur
ATTENDU que le rapporteur a proposé de considérer que les comptables mis en cause n’avaient pas apporté la preuve qu’ils disposaient de la délibération prévue à la rubrique 210223 de la liste des pièces justificatives pour procéder au paiement des indemnités visées dans le réquisitoire ; que ce défaut de contrôle des pièces justificatives prévues par la nomenclature en vigueur est constitutif d’un manquement de la part de M. X et de Mme Y ;
En ce qui concerne les conclusions du procureur financier
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a rappelé que la chambre n'était pas tenue, lors de ses contrôles, d’entreprendre des vérifications exhaustives des opérations réalisées par les collectivités concernées ; qu’en effet, il est de jurisprudence constante que le juge des comptes doit dénoncer les erreurs de paiement qu'il constate mais qu’il n'a aucune obligation de vérifier de manière exhaustive tous les comptes qui lui sont produits à fin de jugement ; que le représentant du ministère public a relevé par ailleurs que des avantages acquis ne peuvent découler que de l'application des dispositions susmentionnées de l'article 111 de la loi du 26 janvier 1984 et qu’en l’espèce, les comptables n'avaient produit aucune délibération du conseil municipal de la ville de Hyères les Palmiers actant l'octroi d’une indemnité de départ à la retraite ;
ATTENDU qu’il ressort également des conclusions du procureur financier que les comptables ont selon lui payé, chacun pour ce qui le concerne, une indemnité ne découlant pas d'un texte réglementaire sans décision expresse de l'organe délibérant ni décomptes individuels comportant la référence à cette décision ainsi que les éléments relatifs à l’assiette de l’indemnité, sa liquidation et son montant ; qu'il en a conclu qu’au moment des paiements, les comptables ne disposaient pas des pièces justificatives prévues par la réglementation ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 60-I de la loi du 23 février 1963 susvisée : « Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables (…) du paiement des dépenses (…), des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique (…). La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 12 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962, portant règlement général sur la comptabilité publique, applicable aux paiements effectués en 2012 : « Les comptables sont tenus d’exercer (...) B. - En matière de dépenses, le contrôle : (…) de la validité de la créance dans les conditions prévues à l’article 13 ci-après » ; qu’aux termes de l’article 13 du même texte : « En ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur : (…) l’exactitude des calculs de liquidation ; l’intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications » ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 19 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, applicable à des paiements effectués en 2013 et 2014 : « Le comptable public est tenu d’exercer le contrôle (…) 2° S’agissant des ordres de payer : (…) d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à l’article 20 » ; qu’aux termes de l’article 20 du même texte : « Le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur : (…) 2 ° L’exactitude de la liquidation (…) 5° La production des pièces justificatives » ;
ATTENDU que l’article L. 1617-3 du code général des collectivités territoriales prévoit que « la liste des pièces justificatives que le comptable peut exiger avant de procéder au paiement est fixée par décret » ; qu’au cas particulier, la liste applicable était celle annexée au décret
n° 2007-450 du 25 mars 2007 ;
ATTENDU que le réquisitoire faisait grief aux comptables d’avoir payé une indemnité de départ à la retraite à divers agents en l'absence notamment de la délibération du conseil municipal prévue par la liste des pièces justificatives des dépenses du secteur local ;
ATTENDU que le conseil municipal est seul compétent pour instituer un régime indemnitaire au profit d'agents communaux ; que la production de cette délibération, exigée par la liste des pièces justificatives annexée à l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, permet de vérifier que l’autorité compétente a autorisé le versement des indemnités précitées ;
ATTENDU que les comptables n’ont pu produire ce document ; que, contrairement à ce qu’a soutenu M. X, la décision du conseil municipal ne saurait être tacite, même dans l’hypothèse où l’indemnité de départ à la retraite constituerait un avantage acquis au sens de l’article 111 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ce dont les comptables n’ont pas apporté la preuve ; qu’ainsi, ils ne pouvaient en tout état de cause procéder au paiement des indemnités en l’absence de la décision de l'assemblée délibérante fixant la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen de ces indemnités dont la production est prévue par la nomenclature ;
ATTENDU que la circonstance selon laquelle, dans le cadre de ses précédents contrôles juridictionnels des comptes et de ses précédents examens de la gestion de la commune de Hyères les Palmiers, la chambre régionale des comptes n’a pas identifié l’irrégularité que constitue le versement sans délibération d’indemnités de départ à la retraite à des agents municipaux est sans effet sur l’appréciation de la responsabilité des comptables ; qu’en effet, les vérifications de la juridiction n’étant pas exhaustives, son silence ne saurait s’analyser comme une validation implicite de la régularité des paiements correspondants ;
ATTENDU qu’est également sans effet sur l’appréciation de sa responsabilité la circonstance, invoquée par Mme Y, qu’en 2014 les effectifs du poste comptable de Hyères les Palmiers étaient insuffisants et que le service était alors confronté à des difficultés suscitées par les défaillances de ses systèmes informatiques ; qu’en revanche ces particularités pourraient être invoquées à l’appui d’une demande de remise gracieuse de débets que la chambre prononcerait à son encontre ;
ATTENDU que le fait que les services de la commune n’auraient pas informé M. X du versement d’indemnités de départ à la retraite n’est pas non plus de nature à l’exonérer de sa responsabilité ; qu’il lui appartenait en effet de réaliser les contrôles nécessaires pour constater que la paie des agents concernés incluait de telles indemnités ;
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède qu’en n’exigeant pas la production de la délibération ni celle des décisions individuelles prévues par la liste des pièces justificatives des dépenses du secteur local, M. X et Mme Y ont manqué à leurs obligations en matière de paiement des dépenses ;
En ce qui concerne le préjudice financier
ATTENDU qu’aux termes de l’article 60-VI de la loi du 23 février 1963 susvisée : « Lorsque le manquement du comptable (…) a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
ATTENDU que les paiements visés dans le réquisitoire ont été réalisés en l’absence de
toute délibération ; qu’en l’absence de décision du seul organe compétent pour engager la collectivité, les dépenses correspondantes présentent un caractère indu ; qu’il en résulte que
les manquements des comptables ont causé un préjudice financier à la commune ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer débiteurs de la commune M. X pour la somme de 19 407,49 € au titre l’exercice 2012 et pour la somme de 11 641,95 € au titre de l’exercice 2013 et Mme Y pour la somme de 10 300,60 € au titre de l’exercice 2014 ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité des comptables correspond à la notification du réquisitoire, intervenue en l’espèce le 20 septembre 2016 pour ce qui concerne Mme Y et le 21 septembre 2016 pour ce qui concerne M. X ;
En ce qui concerne le contrôle sélectif des dépenses
ATTENDU qu’en application du deuxième alinéa de l’article 60-IX de la loi du 23 février 1963, les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du paragraphe VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse totale des sommes mises à leur charge s’ils ont respecté les règles de contrôle sélectif des dépenses ; que cette condition est déterminée « sous l’appréciation du juge des comptes » ;
ATTENDU que Mme Y a produit un plan de contrôle de la paye pour l’année 2011, qui ne comporte pas le visa de la direction départementale des finances publiques du Var ; qu’en l’absence de toute mention de son caractère pluriannuel, rien n’indique que ce plan était applicable sur la période de 2012 à 2014 ; que dès lors, les dépenses relatives aux primes de départ à la retraite susvisées ne relevaient pas d’un plan de contrôle valide lorsqu’elles ont été payées ;
DÉCIDE :
Article 1er : S’agissant de la charge n° 1, M. X est constitué débiteur de la commune de Hyères les Palmiers pour la somme de 6 406,90 € au titre de l’exercice 2010, augmentée des intérêts de droit à compter du 21 septembre 2016 ;
Article 2 : S’agissant de la charge n° 2, il n'y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X ni celle de Mme Y ;
Article 3 : S’agissant de la charge n° 3, M. X est constitué débiteur de la commune de Hyères les Palmiers pour la somme de 19 407,49 € au titre de l’exercice 2012 et pour la somme de 11 641,95 € au titre de l’exercice 2013, augmentées des intérêts de droit à compter de la même date, et Mme Y est constituée débitrice de la commune de Hyères les Palmiers pour la somme de 10 300,60 € au titre de l’exercice 2014, augmentée des intérêts de droit à compter du 20 septembre 2016 ;
Article 4 : Il est sursis à la décharge de M. X pour sa gestion au titre des exercices 2012 et 2013 et de Mme Y pour sa gestion au titre de l’exercice 2014, jusqu’à apurement des débets prononcés à leur encontre par le présent jugement.
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur, le vingt-trois février deux mille dix-sept.
Présents : M. Louis Vallernaud, président, président de séance, M. Daniel Gruntz, président de section, Mme Lison Rigaud, Mme Sophie Leduc-Denizot et M. Laurent-Xavier Blelly, premiers conseillers.
Le greffier,
Patricia GUZZETTA |
Le président de séance,
Louis VALLERNAUD |
La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
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