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rapport n°2017-0306

Commune de Bonneville (Haute-Savoie)

jugement n° 2017-0047

Trésorerie de Bonneville

 

 

audience publique du 28 novembre 2017

code n° 074009042

délibéré du 28 novembre 2017

exercices 2011 à 2015

prononcÉ le : 07 decembre 2017

 

 

République Française

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
 

 

LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES d’AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

(STATUANT EN 5ème Section)

 

1/9 – jugement n° 2017-0047


 

 

Vu le réquisitoire n°36-GP/2017 en date du 17 juillet 2017 par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme Sylvie X..., de M. Frédéric Y... et de M. Marc Z..., comptables de la commune de Bonneville au titre d’opérations relatives à la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2015 ;

Vu les comptes produits par Mme Sylvie X..., M. Frédéric Y... et M. Marc Z... en qualité de comptables de la commune de Bonneville, pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2015 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu les lois et règlements relatifs à la comptabilité des collectivités territoriales et des établissements publics locaux ;

Vu l’article 60 de la loi de finances pour 1963 n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

Vu les observations écrites présentées par M. Marc Z... sur la plateforme d’échange « Correspondance JF » le 18 septembre 2017 ;

Vu les observations écrites présentées par Mme Sylvie X... sur la plateforme d’échange « Correspondance JF » le 19 septembre 2017 ;

Vu les observations écrites présentées par M. Frédéric Y... sur la plateforme d’échange « Correspondance JF » le 19 septembre 2017 ;

Vu le rapport de Mme Sophie CORVELLEC, premier conseiller, magistrat chargé de l’instruction ;

Vu les conclusions du procureur financier ;

Vu les pièces du dossier ; 

Entendu lors de l’audience publique du 28 novembre 2017] Mme Sophie CORVELLEC, première conseillère, en son rapport, Mme ROLLAND-GAGNE, procureur financier, en ses conclusions ; 

Après avoir entendu Mme Sophie CORVELLEC, en son rapport et le procureur financier en ses conclusions, les parties n’étant pas présentes à l’audience ;

Après en avoir délibéré hors la présence du public, du rapporteur et du procureur financier ;

 

Attendu que, par le réquisitoire n°36-GP/2017 du 17 juillet 2017, le procureur financier près la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a ouvert une instance juridictionnelle pour les exercices 2011 à 2015 à l’encontre de Mme Sylvie X..., comptable de la commune de Bonneville en fonctions du 1er janvier 2011 au 1er janvier 2013, et de ses successeurs, M. Frédéric Y..., en fonctions du 2 janvier 2013 au 4 janvier 2015 et M. Marc Z..., en fonctions depuis le 5 janvier 2015 ; que ce réquisitoire soulève une unique présomption de charge ;

 

Sur les réquisitions du ministère public,

 

Attendu qu’en son réquisitoire, le procureur financier relève que le titre exécutoire n°133, pris en charge le 12 avril 2011, n’a pas été recouvré à hauteur de 2 085 € au terme de la prescription de quatre ans, sans que les comptables successivement en fonctions entre 2011 et 2015 n’aient mis en œuvre de diligences complètes et rapides par l’utilisation effective de tous les moyens légaux de recouvrement dont ils disposaient ;

 

Attendu que le procureur financier en conclut que les comptables mis en cause ont ainsi commis un manquement à leurs obligations de recouvrement des créances, telles que prévues par l’article 18 du décret du 7 novembre 2012, susceptible d’engager leur responsabilité personnelle et pécuniaire sur le fondement de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 ;


 

Sur les observations des parties,

 

Attendu que Mme Sylvie X... expose que le titre en litige a été réduit de 417 € par un titre de réduction émis le 26 avril 2011, en raison d’une durée de location plus courte que celle initialement prévue, et qu’il ne comportait pas l’intitulé exact du débiteur, rendant impossible toute action en recouvrement efficace ; qu’afin d’assurer son recouvrement, des mises en demeure ont été régulièrement notifiées, sans toutefois être accompagnées de demandes d’accusé de réception, en raison d’une politique nationale de restriction des coûts d’affranchissement ; que, néanmoins, la prescription de l’action en recouvrement n’était pas acquise à la date de son départ du poste comptable ; qu’en outre, avant même la prescription de l’action en recouvrement, la dissolution, à compter du 31 décembre 2013, du syndicat SIVU Actions Ville, débiteur du titre en litige, a éteint toute possibilité d'opérer son recouvrement, la délibération du syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) Actions Ville du 27 novembre 2013 actant cette dissolution et validant le protocole de liquidation ne mentionnant pas de passif à répartir entre ses membres ou de restes à payer ; que l’absence de recouvrement de ce titre n’a pas causé de préjudice à la commune de Bonneville laquelle, membre du SIVU, a reçu, à l’occasion de sa dissolution, 16,20% de l’excédent de fonctionnement constaté à la clôture de ses comptes, soit 5 179,75 € ; que la commune n’a d’ailleurs jamais sollicité le paiement de cette dette auprès du SIVU ni œuvré pour que celle-ci soit prise en compte dans le protocole de liquidation ; que le montant du cautionnement du poste comptable de Bonneville lors de sa gestion était de 149 000 € ;

 

Attendu que M. Frédéric Y... expose que le titre en litige a été réduit de 417 € par un titre de réduction émis le 26 avril 2011, en raison d’une durée de location plus courte que celle initialement prévue, et qu’il comportait, dès son émission, une erreur dans la dénomination du débiteur, rendant impossible toute action en recouvrement efficace ; qu’afin d’assurer son recouvrement, des mises en demeure ont été régulièrement notifiées, sans toutefois être accompagnées de demandes d’accusé de réception, en raison d’une politique nationale de restriction des coûts d’affranchissement ; qu’avant même la prescription de l’action en recouvrement, la dissolution, à compter du 31 décembre 2013, du syndicat SIVU Actions Ville, débiteur du titre en litige, a éteint toute possibilité d'opérer son recouvrement, ni l'arrêté préfectoral n°2014002-0002 du 2 janvier 2014 ni la délibération du SIVU Actions Ville du 27 novembre 2013 actant cette dissolution et validant le protocole de liquidation ne mentionnant de passif à répartir entre ses membres ou de restes à payer ; que l’absence de recouvrement de ce titre n’a pas causé de préjudice à la commune de Bonneville laquelle, membre du SIVU, a reçu, à l’occasion de sa dissolution, 16,20% de l’excédent de fonctionnement constaté à la clôture de ses comptes, soit 5 179,75 € ; que la commune n’a d’ailleurs jamais sollicité le paiement de cette dette auprès du SIVU ni œuvré pour que celle-ci soit prise en compte dans le protocole de liquidation ; que le montant du cautionnement du poste comptable de Bonneville lors de sa gestion était de 151 000 € ;

 

Attendu que M. Marc Z... expose que le titre en litige a été émis dans le cadre d’une convention d’occupation de locaux renouvelée annuellement et, en dernier lieu, au mois d’avril 2011, jusqu’au mois de juin 2011 ; que la convention d’occupation ayant été résiliée par anticipation, le titre émis a été réduit du montant d’un mois de loyer, soit 417 € ; que le syndicat débiteur ayant été dissous le 31 décembre 2013, sans que l’arrêté de dissolution ne permette le recouvrement de ce titre auprès d’une autre collectivité, il a été privé de tout moyen de procéder à son recouvrement et a été contraint d’en demander l’admission en non-valeur, finalement votée en 2016 ; qu’il était, en tout état de cause, difficile d’obtenir un mandatement d’office dans le bref délai qui a précédé la dissolution du syndicat, d’autant plus que le titre n’était pas établi au nom et à l’adresse correcte du débiteur, ce qui nécessitait préalablement l’émission d’un nouveau titre ; qu’il n’est pas en mesure de produire de copies des lettres de rappel ou mises en demeure relatives au recouvrement de ce titre, ni d’accusés de réception, lesquels n’étaient plus demandés jusqu’en 2015 pour des raisons budgétaires ; qu’à sa connaissance, aucune autre diligence n’a été mise en œuvre en vue du recouvrement de ce titre, ni aucun autre évènement n’a eu pour effet de proroger sa prescription ; que ce titre étant, selon lui, irrécouvrable dès sa prise de poste, il n’a pas émis de réserves à son égard 

 

Attendu que M. Stéphane A..., ordonnateur en fonctions de la commune de Bonneville, n’a pas produit d’observations dans la présente instance ;

 

Sur la responsabilité des comptables,

 

Attendu, d’une part, qu’aux termes du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, dans sa rédaction applicable : « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, (…) de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent », ainsi que « des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique » ; que leur responsabilité personnelle et pécuniaire « se trouve engagée dès lors qu'un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu'une recette n'a pas été recouvrée, qu'une dépense a été irrégulièrement payée (…) » ;

 

Attendu qu’aux termes des articles 11 et 12 du règlement général sur la comptabilité publique, dans sa rédaction issue du décret n°62-1587 du 29 décembre 1962 applicable jusqu’à l’exercice 2012 et depuis repris en substance par les articles 18 et 19 du décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012 applicable à compter de l’exercice 2013, les comptables publics sont : « seuls chargés (…) de la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs (…) » et « sont tenus d'exercer : A. - En matière de recettes, le contrôle : (…) dans la limite des éléments dont ils disposent, de la mise en recouvrement des créances de l'organisme public (…) » ;

 

Attendu que ces dispositions instituent, dans l’intérêt de l’ordre public financier, un régime légal de responsabilité pécuniaire et personnelle des comptables publics distinct de la responsabilité de droit commun ; qu’il résulte de leurs prescriptions que, lorsqu’un comptable public n’a pas recouvré une recette qu’il a prise en charge, le juge des comptes apprécie s’il y a lieu d’engager sa responsabilité ; qu’à ce titre, si le juge des comptes doit s’abstenir de toute appréciation du comportement personnel du comptable intéressé et ne peut fonder ses décisions que sur les éléments matériels des comptes, il lui appartient de se prononcer sur le point de savoir si le comptable s’est livré aux différents contrôles qu’il lui incombe d’assurer et s’il a exercé dans des délais appropriés toutes les diligences requises pour le recouvrement de la créance, lesquelles diligences ne peuvent être dissociées du jugement du compte ;

 

Attendu que le comptable dégage sa responsabilité s'il apporte la preuve que ses diligences en vue du recouvrement des recettes ont été adéquates, complètes et rapides dans les circonstances particulières de chaque affaire, compte tenu notamment de la nature et du montant des créances en cause ; que sont considérées comme adéquates, complètes et rapides, des diligences propres à prévenir la disparition ou l'insolvabilité du redevable, la prescription de la créance ou la péremption des garanties ; qu’il lui appartient d’apporter la preuve qu’il a accompli des diligences qui ont effectivement atteint le débiteur ;

 

 

Attendu que cette responsabilité ne pouvant être ni conjointe ni partagée entre les comptables successifs, le défaut de recouvrement d’une créance dont le titre de recette a été régulièrement pris en charge entraîne, en l’absence de diligences adéquates, complètes et rapides, la mise en jeu de la responsabilité du comptable en fonction lorsque la créance est devenue irrécouvrable ; que toutefois, en cas de succession de comptables, le comptable entrant n'est pas susceptible d'avoir à répondre de la prescription d'un titre qui survient dans les premières semaines qui suivent son installation si le défaut de diligences de son prédécesseur l’a privé des possibilités de préserver la validité de la créance, indépendamment de la formulation de réserves ;

 

Attendu, d’autre part, qu’aux termes du 3° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : « L'action des comptables publics chargés de recouvrer les créances (…) des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recettes. Le délai de quatre ans mentionné à l'alinéa précédent est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription » ; que ces dispositions spécifiques encadrent le recouvrement par les comptables de créances détenues sur des tiers, sans considération du caractère public ou privé desdits tiers ; que si le délai à la disposition du comptable d’une collectivité locale pour recouvrer une créance détenue sur un établissement public est ainsi celui prévu par ces dispositions spéciales du code général des collectivités territoriales, seul l’article 2 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée définit les actes susceptibles d’interrompre les délais de prescription des créances détenues sur d’autres administrations ; que, selon cet article, est suspensive du délai de prescription toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative débitrice, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ;

 

Attendu qu’en l’espèce, le titre en litige, émis le 21 mars 2011, concerne une dette de loyer du syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) « Actions Ville 2006 », ultérieurement renommé « SIVU Actions Ville » et a été pris en charge le 12 avril 2011, par Mme Sylvie X..., alors en fonctions ; que le réquisitoire met également en cause les deux comptables qui lui ont succédé, M. Frédéric Y... en fonctions du 2 janvier 2013 au 4 janvier 2015 et M. Marc Z..., en fonctions depuis cette dernière date ;

 

Attendu, en premier lieu, que les comptables mis en cause invoquent, comme une première cause d’irrecouvrabilité de cette créance, l’erreur qui entachait le titre dès sa prise en charge ;

 

Attendu toutefois que, dans l’hypothèse où la prise en charge d’un titre irrégulier a, à tort, été acceptée, il appartient aux comptables successifs, tenus tant de contrôler la régularité du titre de recette avant même d’accepter sa prise en charge, que de mettre en œuvre des diligences adéquates pour le recouvrer, de solliciter auprès de l’ordonnateur l’émission d’un nouveau titre de recettes régulier ;

 

Attendu que s’il résulte effectivement de l’instruction que l’ordonnateur a, à tort, établi le titre en litige au nom du « SIVU ACTION 2006 », alors que la dénomination exacte du débiteur était, à cette date, « SIVU ACTIONS VILLE » et que cette erreur a été réitérée dans le titre de réduction du 26 avril 2011, aucun des comptables mis en cause ne saurait faire valoir cette irrégularité formelle pour s’affranchir de son éventuelle responsabilité ; qu’en effet, il n’est nullement établi que l’erreur en cause en l’espèce, purement matérielle et n’emportant pour autant pas de réels doutes quant à l’identité du débiteur, ait effectivement fait obstacle au recouvrement du titre ;

 

Attendu qu’un même raisonnement peut être appliqué à l’erreur affectant l’adresse figurant sur le titre en litige, laquelle est devenue obsolète avec le changement de siège du SIVU, résultant de l’arrêté préfectoral du 6 juin 2011, la nouvelle adresse du SIVU auquel la commune est membre pouvant facilement être connue ;

 

Attendu que ces premières circonstances évoquées par les comptables, ne sauraient donc être acceptées comme une cause d’irrecouvrabilité de la créance ;

 

 

 

Attendu, en second lieu, que les comptables mis en cause font valoir que le débiteur de la créance a disparu, compte tenu de la dissolution du « SIVU Actions Ville » à compter du 31 décembre 2013 ;

 

Attendu toutefois qu’aux termes de l’article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales : « Les syndicats mixtes constitués exclusivement de communes et d'établissements publics de coopération intercommunale et ceux composés uniquement d'établissements publics de coopération intercommunale sont soumis aux dispositions des chapitres Ier et II du titre Ier du livre II de la présente partie (….) » ; qu’aux termes du huitième alinéa de l’article L. 5212-33 du même code ainsi applicable aux syndicats mixtes composés de communes et d’établissements publics de coopération intercommunale : « L'arrêté ou le décret de dissolution détermine, dans le respect des dispositions des articles L. 5211-25-1 et L. 5211-26 et sous la réserve des droits des tiers, les conditions dans lesquelles le syndicat est liquidé » ;

 

Attendu qu’il résulte de ces dispositions qu’il revient au seul représentant de l’Etat de déterminer, dans le respect du droit des tiers et des dispositions des articles L. 5211-25-1 et L. 5211-26 du même code, les conditions de la liquidation du syndicat mixte, notamment les modalités de répartition des obligations contractées par le syndicat ; qu’en l’absence de disposition, dans l’arrêté de dissolution du syndicat, prévoyant la dévolution de ces obligations, leur bénéficiaire est fondé à en demander l’exécution aux membres du syndicat dissous, solidairement, ou à l’un de ses membres seulement, auquel il appartient dans ce cas de demander au représentant de l’Etat de répartir, s’il y a lieu, la charge finale de ces obligations entre les membres du syndicat ;

 

Attendu qu’en l’espèce, le « SIVU Actions Ville 2006 », devenu à partir de décembre 2006, « SIVU Actions Ville », a été dissous à compter du 31 décembre 2013, par arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 2 janvier 2014, après délibération en ce sens du comité syndical du 27 novembre 2013 ; que ni cet arrêté, ni cette délibération ne règlent le sort de la dette de loyer liquidée par le titre de recette litigieux ; que, toutefois, il résulte de ce qui précède que la dissolution de ce syndicat mixte n’a pas eu pour effet de rendre irrecouvrable la dette de loyer dont il était redevable envers la commune de Bonneville, ni de priver les comptables successivement en fonctions de tout moyen de recouvrement, quand bien même l’arrêté préfectoral de dissolution ne faisait pas état de cette dette ; qu’elle supposait cependant que ceux-ci sollicitent auprès de l’ordonnateur l’émission d’un nouveau titre désignant la collectivité auprès de laquelle il entendait solliciter le paiement ;

 

Attendu, en conséquence, que la dissolution du débiteur ne saurait davantage être regardée comme une cause d’irrecouvrabilité de la créance en litige ;

 

Attendu, dès lors, que si les différents comptables mis en cause font valoir que de nombreuses mises en demeure ont été régulièrement notifiées en vue du recouvrement du titre litigieux, en produisant une capture d’écran informatique issue de l’application Helios, faisant apparaitre des diligences, les diligences ainsi invoquées ne sauraient être tenues pour établies par une telle copie d’écran, aucune preuve de leur réalisation effective auprès du débiteur n’étant apportées par les comptables, qui ont notamment indiqué que ces actes ne sont pas notifiés avec une demande d’accusé de réception ; que, par ailleurs, s’il ressort de l’instruction que, postérieurement à sa prise en charge, le montant du titre litigieux a été réduit de 417 € par l’émission du titre n°2-2011 le 26 avril 2011, une telle circonstance ne figure pas parmi celles susceptibles de proroger le délai de prescription de l’action en recouvrement du comptable, telles qu’énumérées par l’article 2 de la loi du 31 décembre 1968 précédemment rappelé ; que, dès lors, en l’absence de preuve de diligences propres à l’interrompre, l’action en recouvrement ouverte à l’encontre du titre en litige était prescrite au terme de quatre années suivant sa prise en charge, soit le 12 avril 2015, sous la gestion de M. Marc Z... ;

 

Attendu toutefois que la prise de fonctions de M. Marc Z..., intervenue trois mois auparavant, était alors particulièrement récente ; que la poursuite du recouvrement de la créance en litige supposait d’abord d’identifier précisément le SIVU débiteur, nonobstant les erreurs entachant sa dénomination et son adresse, devenue obsolète, telles qu’elles figuraient sur le titre litigieux, avant de procéder à une analyse juridique des conséquences de la dissolution de ce SIVU et d’inviter l’ordonnateur à identifier la collectivité, parmi les anciens membres du SIVU, qu’il entendait poursuivre et ensuite à émettre un nouveau titre à son encontre, avant d’engager des diligences utiles ; que dès lors, et bien qu’il se soit abstenu d’émettre des réserves à l’égard de ce titre lors de sa prise de poste, M. Marc Z... a été privé des possibilités de préserver la validité de la créance, eu égard à la brièveté du délai qui lui était laissé avant la prescription de son action et à la complexité des démarches à mettre en œuvre, lesquelles n’avaient nullement été engagées par son prédécesseur, M. Frédéric Y..., alors même que la dissolution du SIVU est intervenue au cours de sa gestion ;

 

Attendu qu’en s’abstenant d’engager des diligences propres à en assurer le recouvrement avant la dissolution du débiteur, à obtenir un nouveau titre identifiant un nouveau débiteur postérieurement à cette dissolution et ainsi à préserver les possibilités de son successeur d’en poursuivre le recouvrement, M. Frédéric Y... a gravement compromis les chances de recouvrement du titre en litige et a, dans les circonstances particulières de l’espèce, commis un manquement aux obligations lui incombant en matière de recouvrement ; que sa responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve donc engagée au titre de sa gestion de la période du 1er au 4 janvier 2015 ;

 

Attendu en revanche qu’il résulte de ce qui précède qu’aucun manquement ne saurait être imputé à Mme Sylvie X... et à M. Marc Z... ; qu’il n’y a, par suite, pas lieu d’engager leur responsabilité pour les périodes, respectivement, du 1er janvier 2011 au 1er janvier 2013 et du 5 janvier au 31 décembre 2015 ;

 

Sur le préjudice financier causé à la commune de Bonneville :

 

Attendu qu’aux termes des deuxièmes et troisièmes alinéas du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : « Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret en Conseil d'Etat en fonction du niveau des garanties mentionnées au II. Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné (…), le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;

 

Attendu que lorsque le juge des comptes estime que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement des recettes, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l’organisme public concerné ; que le comptable est alors dans l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme non recouvrée ; que, toutefois, lorsqu’il résulte des pièces du dossier, et en particulier des éléments produits par le comptable, qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne qui en était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme imputable audit manquement ; qu’une telle circonstance peut être établie par tous documents, y compris postérieurs au manquement ; que dans le cas où le juge des comptes estime qu’au vu de ces éléments, le manquement du comptable n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, il peut alors décider, sur le fondement du deuxième alinéa du VI de l’article 60, d’obliger le comptable à s’acquitter d’une somme qu’il arrête en tenant compte des circonstances de l’espèce  ;

 

Attendu qu’en l’espèce, il n’est nullement établi que, si les diligences adéquates avaient été menées, la créance n’aurait pu être recouvrée, ni le SIVU, avant sa dissolution, ni les anciens membres de celui-ci, solidairement tenus de cette dette après sa dissolution, n’ayant été insolvables ; que l’absence de recouvrement de cette créance a donc directement causé un préjudice financier à la commune de Bonneville ;

 

Attendu que, pour contester l’existence et le montant de ce préjudice, les comptables mis en cause évoquent l’excédent de fonctionnement qui a été redistribué, en partie au profit de la commune de Bonneville, à l’occasion de la dissolution du SIVU ; qu’il résulte en effet de l’instruction que la commune de Bonneville était, par ailleurs, membre du syndicat débiteur de la créance en litige et qu’à l’occasion de la dissolution de celui-ci, elle a reçu, et réintégré à ses résultats, une partie de l’excédent constaté à la clôture des comptes, selon une clé de répartition fixée dans les statuts du syndicat et rappelée dans l’arrêté de liquidation du préfet de la Haute-Savoie du 2 janvier 2014, soit 5 179,75 € correspondant à 16,20 % des 31 790,35 € d’excédents ; que, cependant, il n’est pas acquis que, si la dette avait été récupérée auprès de l’un des anciens membres du SIVU dissous, une procédure aurait été menée par ce dernier jusqu’à son terme, en se concluant par l’adoption d’une décision préfectorale mettant à la charge de la commune de Bonneville une partie de la dette ainsi récupérée selon la même clé de répartition que celle précédemment appliquée ;

 

Attendu que, dans ces conditions, il y a lieu, en conséquence, de constituer M. Frédéric Y... débiteur de la commune de Bonneville au titre de l’exercice 2015, dernier exercice de sa gestion, sur la période du 1er au 4 janvier 2015 à hauteur du montant restant à recouvrer , après pris en compte du titre de réduction n°2-2011 d’un montant 417 € émis le 26 avril 2011, soit 2 085 € ; qu’en application du VIII du même article, ce débet porte intérêts à compter du 28 août 2017, date de notification du réquisitoire à M. Frédéric Y... ;

 

PAR CES MOTIFS,

DECIDE

Article 1 : En ce qui concerne Mme Sylvie X... :

Mme Sylvie X... est déchargée de sa gestion de la commune de Bonneville pour la période du 1er janvier 2011 au 1er janvier 2013.

 Mme Sylvie X... est déclarée quitte et libérée de sa gestion terminée le 1er janvier 2013.

 Mainlevée peut être donnée et radiation peut être faite de toutes oppositions et inscriptions mises ou prises sur ses biens meubles ou immeubles ou sur ceux de ses ayants cause pour sûreté de ladite gestion et son cautionnement peut être restitué ou ses cautions dégagées.

Article 2 : En ce qui concerne M. Marc Z... :

M. Marc Z... est déchargé de sa gestion de la commune de Bonneville pour la période du 5 janvier au 31 décembre 2015.

 

 

Article 3 : En ce qui concerne M. Frédéric Y... :

M. Frédéric Y... est déchargé de sa gestion de la commune de Bonneville pour la période du 2 janvier 2013 au 31 décembre 2014.

M. Frédéric Y... est constitué débiteur de la commune de Bonneville, au titre de l’exercice 2015, sur la période du 1er au 4 janvier 2015, pour la somme de 2 085 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 28 août 2017.

M. Frédéric Y... ne pourra être déchargé de sa gestion de la commune de Bonneville, au titre de la période du 1er au 4 janvier 2015, et déclaré quitte et libéré de sa gestion terminée le 4 janvier 2015 qu’après avoir justifié de l’apurement en principal et en intérêts du débet prononcé ci-dessus.

Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, cinquième section, le vingt-huit novembre deux mille dix-sept.

Présents : M. Alain LAÏOLO, président de section, président de séance ;

M. Michel BON, premier conseiller ; Mme Sandrine FAIVRE-PIERRET, première conseillère ;

M. Joris MARTIN, conseiller ; Mme Jennifer EL-BAZ, conseillère ;

 

 

 

la greffière

le président de séance

 

 

 

 

 

 

 

Corinne VITALE-BOVET

 

 

 

 

 

Alain LAÏOLO

 

 

En conséquence, la République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.

1/9 – jugement n° 2017-0047