CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
PROVENCE–ALPES-CÔTE D’AZUR
Chambre
Jugement n° 2017-0028
Département des Alpes-Maritimes
Paierie départementale des Alpes-Maritimes
(006 090 719)
Exercices 2010, du 15 janvier, à 2014
Rapport n° 2017-0170
Audience publique du 19 septembre 2017
Délibéré le 19 septembre 2017
Prononcé le 23 octobre 2017
JUGEMENT
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur,
VU le réquisitoire n° 2017-003 en date du 5 janvier 2017 par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de
M. X pour sa gestion du 15 janvier 2010 au 30 juin 2013 et de M. Y pour sa gestion du 1er juillet 2013 au 31 décembre 2014, en leur qualité de comptables successifs du département des Alpes-Maritimes ;
VU la notification du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de l’instruction, intervenue le 13 janvier 2017 pour ce qui concerne le président du conseil départemental des Alpes-Maritimes et M. Y, et le 14 janvier 2017 pour ce qui concerne M. X ;
VU les comptes produits par les comptables pour les exercices 2010 à 2014 ;
VU le code général des collectivités territoriales, notamment son article L. 1617-5 ;
VU le code des juridictions financières ;
VU l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
VU le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
VU l’arrêté n° 2016-16 du 23 décembre 2016 du président de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur fixant l’organisation des formations de délibéré et leurs compétences pour 2017 ;
VU la décision du 9 janvier 2017 par laquelle le président de la chambre a désigné
Mme Emmanuelle Colomb, première conseillère, comme rapporteur ;
VU les questionnaires adressés par le magistrat instructeur le 23 janvier 2017 et le 11 mai 2017 ;
VU la réponse reçue de l’ordonnateur le 17 février 2017 (enregistrée au greffe le 21 février 2017 sous le n° 292) ;
VU la réponse reçue de M. Y le 22 février 2017 (enregistrée le 23 février 2017 sous le n° 317) ;
VU les réponses reçues de la paierie départementale des Alpes-Maritimes par courriels du 18 mai 2017 (enregistrés le même jour sous les n° 760 et 761), du 23 mai 2017 (enregistré le même jour sous le n° 789) et du 12 juin 2017 (enregistrés le même jour sous les n° 880 et 882) ;
VU les pièces de mutation des comptables ;
VU les attestations de cautionnement des comptables ;
VU l’ensemble des autres pièces du dossier ;
VU le rapport déposé le 21 juin 2017 par Mme Emmanuelle Colomb, première conseillère ;
VU les conclusions du procureur financier ;
VU les lettres du 30 août 2017 informant l’ordonnateur et les comptables de la date fixée pour l’audience publique ;
Après avoir entendu en audience publique le rapporteur et les conclusions orales de Mme Marie-Pierre Laplanche-Servigne, procureur financier, les comptables et l’ordonnateur, dûment informés de l’audience, n’étant ni présents ni représentés ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier ;
ATTENDU que M. X n’a pas réagi au réquisitoire et n’a pas répondu aux questionnaires qui lui ont été adressés ;
Sur les circonstances de force majeure
ATTENDU que, dans sa réponse susvisée au réquisitoire et au questionnaire du rapporteur,
M. Y a fait état des nombreuses difficultés affectant le bon fonctionnement du poste comptable, liées notamment au manque d’effectifs, à l’inertie de l’ordonnateur et à des applications informatiques sous-performantes ou peu ergonomiques, dans un contexte général de surcroît d’activité ; que, s’agissant plus particulièrement du recouvrement des titres, il indique avoir hérité une situation déjà dégradée à raison de l’ancienneté, du nombre et du montant des recettes concernées, mais avoir engagé dès la fin de l’année 2013 les démarches utiles pour y remédier ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a estimé que les circonstances ainsi évoquées n’étaient pas constitutives d’un cas de force majeure ;
ATTENDU que l'existence de circonstances constitutives de la force majeure doit résulter d'événements extérieurs, imprévisibles et irrésistibles ; que tel n'est pas le cas des difficultés du poste comptable exposées par M. Y ; que ces difficultés, insusceptibles dès lors d’exonérer le comptable de sa responsabilité, pourront toutefois être utilement invoquées au soutien d’une demande de remise gracieuse présentée devant le ministre en charge du budget et des comptes publics ;
ATTENDU qu'il y a lieu dès lors pour la chambre de se prononcer sur l'existence de manquements de la part des comptables mis en cause par le réquisitoire ;
Charge n° 1 : Compte 467316 « débiteurs d’indus RMI » : titre n° 3914 pris en charge le 23 novembre 2006
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, dans son réquisitoire du 5 janvier 2017, le procureur financier a relevé que les titres ci-dessous figuraient sur l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 :
Ex. pièce | Num Pièce | ligne | Date PEC | Tiers | Reste à recouvrer (hors frais) | Diligence | Diligence | Diligence |
2006 | T-3914 | 35 | 23/11/2006 | D | 2 286,54 | lettre rappel acte créé - 23/12/06 | Mise en demeure standard acte créé - 27/10/12 | lettre rappel Divers - 23/12/06 |
2006 | T-3914 | 187 | 23/11/2006 | A | 1 043,48 | Phase comminatoire facultative envoyé à huissier - 31/03/15 | Empêchement technique 31/03/2015 - 30/05/2015 | Empêchement technique 26/02/2007 - |
2006 | T-3914 | 68 | 23/11/2006 | C | 1 853,90 | Mise en demeure standard acte créé - 07/03/14 | lettre rappel acte créé - 23/12/06 | Mise en demeure standard Acte de poursuite annulé - 23/10/12 |
2006 | T-3914 | 110 | 23/11/2006 | E | 1 014,11 | Mise en demeure standard acte créé - 21/03/14 | OTD bancaire négative - 28/04/15 | Empêchement technique 28/04/2015 - |
2006 | T-3914 | 224 | 23/11/2006 | F | 1 331,13 | lettre rappel acte créé - 23/12/06 | Mise en demeure standard acte créé - 09/05/14 | lettre rappel acte créé - 05/03/07 |
2006 | T-3914 | 247 | 23/11/2006 | G | 2 149,98 | Empêchement technique 20/12/2006 - | Empêchement technique 08/12/2006 - | lettre rappel acte créé - 23/12/06 |
2006 | T-3914 | 158 | 23/11/2006 | H | 3 098,28 | OTD_CAF Attente de fonds - 05/01/15 | Mise en demeure standard acte créé - 16/04/15 | lettre rappel acte créé - 23/12/06 |
2006 | T-3914 | 268 | 23/11/2006 | B | 2 049,27 | lettre rappel acte créé - 05/03/07 | Empêchement technique 21/03/2007 - | lettre rappel acte créé - 23/12/06 |
2006 | T-3914 | 198 | 23/11/2006 | I | 1 510,88 | lettre rappel acte créé - 23/12/06 | Mise en demeure standard acte créé - 14/07/12 | OTD bancaire acte créé - 25/02/14 |
Total |
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| 16 337,57 |
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ATTENDU que le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable du département des Alpes-Maritimes n’avait pas entrepris de diligences suffisantes pour assurer le recouvrement des créances ci-dessus identifiées procédant du titre collectif n° 3914 pris en charge le 23 novembre 2006, pour un montant de 16 337,57 € ; qu’après avoir rappelé que la lettre de rappel ne constituait pas un acte de poursuite interruptif de prescription, il a relevé, d’une part, qu’aucun des commandements, mises en demeure ou oppositions à tiers détenteur invoqués n’était appuyé d’une justification de sa bonne réception par le débiteur et, d’autre part, que certaines diligences étaient tardives ; qu’il a dès lors conclu que, dans ces conditions, la prescription apparaissait acquise au plus tard le 23 novembre 2010, sous la gestion de M. X dont la responsabilité semblait dès lors engagée ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que M. Y a seulement précisé dans le tableau récapitulatif annexé à sa réponse du 22 février 2017 que, s’agissant des dettes de Mme A et de Mme B, « la cote [n’était] pas prescrite dans l’application Hélios » en l’état, pour la première, d’un « AR 23/04/2014 » et, pour la seconde, d’une opposition à tiers détenteur infructueuse en novembre 2014 ;
ATTENDU que le comptable en poste a fourni le 18 mai 2017, en réponse au second questionnaire transmis à ses prédécesseurs, l’ensemble des bordereaux de situation des débiteurs visés dans le réquisitoire ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 17 février 2017, l’ordonnateur n’a développé aucune argumentation opérante à ce stade de la procédure ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a relevé que, pour l’ensemble des créances visées dans le réquisitoire, aucune preuve n’avait été rapportée d’un acte interruptif de prescription, les oppositions à tiers détenteur notifiées en 2014 à Mme A et à Mme B ainsi que le versement de 60,51 € enregistré le 14 décembre 2016 en paiement partiel de la dette de M. C, non assorti d’une reconnaissance de dette ou d’un renoncement à invoquer la prescription, étant tous trop tardifs pour avoir pu en interrompre le cours ; qu’il a conclu que M. X avait engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire pour avoir laissé prescrire lesdites créances et que ce manquement avait causé à la collectivité un préjudice financier correspondant au montant des sommes non recouvrées ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée, « les comptables sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes (…) » et leur « responsabilité personnelle et pécuniaire (…) se trouve engagée dès lors (…) qu’une recette n’a pas été recouvrée (…) » ;
ATTENDU que le 3° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales prévoit que l'action des comptables publics chargés de recouvrer les créances des collectivités locales se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recettes ; que le juge financier, face à une créance non recouvrée, ne peut dégager la responsabilité du comptable que si ce dernier apporte la preuve de la réalisation de diligences adéquates, complètes et rapides pour en assurer le recouvrement ; que des diligences postérieures à la date de prescription de la créance ne peuvent utilement être invoquées à décharge par le comptable que si ladite créance a été recouvrée, à condition que, le redevable ayant renoncé à opposer la prescription, ce recouvrement revête un caractère définitif ;
ATTENDU qu’en l’espèce les seules preuves de la notification régulière d’un acte de poursuite, nécessaire au comptable chargé du recouvrement pour que le redevable ne puisse être en mesure de lui opposer la prescription, sont datées de 2014 et sont donc trop tardives pour être utilement invoquées à décharge ; qu’au demeurant elles ne concernent que deux débiteurs sur les neuf visés par le réquisitoire ;
ATTENDU par ailleurs que, s’il ressort du bordereau de situation arrêté au 16 mai 2017 que la dette de M. C a fait l’objet d’un paiement de 60,51 € le 14 décembre 2016, ramenant le reste à recouvrer à 1 793,39 €, ce règlement partiel, intervenu alors que l’action en recouvrement était déjà prescrite, ne peut revêtir en lui-même aucun caractère exonératoire de responsabilité à défaut de caractère définitif du règlement et de renonciation expresse du débiteur à opposer la prescription ;
ATTENDU ainsi qu’aucune preuve n’a été rapportée des diligences exercées pour recouvrer les créances visées dans le réquisitoire, avant que l’action en recouvrement du comptable ne soit atteinte par la prescription ; que celle-ci, nonobstant d’éventuelles mentions contraires portées sur l’application Hélios, auxquelles aucune valeur probante ne peut être conférée dès lors qu’elles ne constituent pas la démonstration de la réalisation effective, régulière, complète et opérante des diligences recensées, s’est donc trouvée acquise le 23 novembre 2010 en application des dispositions précitées du 3° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, sous la gestion de M. X ; que le recouvrement de ces créances a ainsi été manifestement compromis du fait du manquement du comptable, dont la responsabilité personnelle et pécuniaire est engagée de ce chef ;
Sur le préjudice
ATTENDU qu’aux termes du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée : « Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce (…). » ; qu’aux termes du troisième alinéa de ces mêmes dispositions : « Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante (…) » ;
ATTENDU que le comptable a fait valoir dans sa réponse au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur qu’il ne lui « sembl[ait] pas que le Département des AM ait subi un quelconque préjudice » et que, « pour la partie recettes, le contexte et les efforts de la Paierie Départementale pourraient conduire à moduler les sommes éventuellement laissées à charge » ;
ATTENDU que l’ordonnateur estime que le département n’a subi aucun préjudice financier ;
ATTENDU que le constat de l’existence ou non d’un tel préjudice et de son imputabilité au comptable relève cependant de l’appréciation que le juge des comptes est amené à porter sur ces deux points à l’analyse des pièces du dossier ;
ATTENDU que lorsque le juge des comptes estime que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement des recettes, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l’organisme public concerné ; que, toutefois, s’il résulte des pièces du dossier, et en particulier des éléments produits par le comptable, qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne qui en était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme ayant résulté de ce manquement ;
ATTENDU qu’il ressort des bordereaux de situation des débiteurs arrêtés au 18 mai 2017, tels que produits par le comptable en poste, que l’intégralité des créances en litige reste à recouvrer, exception étant seulement faite de la dette de M. C, partiellement réglée ainsi qu’il a été dit précédemment ; qu’aucune preuve d’un quelconque autre recouvrement n’a été rapportée avant que la chambre ne délibère le présent jugement ;
ATTENDU que l’absence de recouvrement a causé au département des Alpes-Maritimes un préjudice financier ; qu’il ne ressort d’aucun des éléments du dossier qu’à la date à laquelle la prescription a été acquise, les créances en cause étaient irrécouvrables en raison de l’insolvabilité des personnes qui en étaient redevables ; qu’en conséquence, le préjudice qui a résulté de leur défaut de recouvrement doit être regardé comme ayant été causé par le manquement du comptable ; qu’ainsi, sans qu’il y ait lieu pour la chambre de prendre en considération les difficultés du poste pour l’évaluation dudit préjudice, M. X doit être constitué en débet pour un montant égal à celui des créances non recouvrées procédant du titre collectif n° 3914 pris en charge le 23 novembre 2006, soit la somme de 16 277,06 € correspondant aux créances sur M. D pour 2 286,54 €, M. C pour 1 793,39 € (déduction étant faite de la somme de 60,51 €), M. E pour 1 014,11 €, M. F pour 1 331,13 €, M. G pour 2 149,98 €, M. H pour 3 098,28 €, M. I pour 1 510,88 €, Mme A pour 1 043,48 € et Mme B pour 2 049,27 euros ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité des comptables correspond à la notification du réquisitoire, intervenue en l’espèce le 14 janvier 2017 ;
Charge n° 2 – Compte 467316 « débiteurs d’indus RMI » - titre n° 2473 pris en charge le 13 août 2007
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, dans son réquisitoire du 5 janvier 2017, le procureur financier a relevé que les titres ci-dessous figuraient sur l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 :
Ex. pièce | Num Pièce | ligne | Date PEC | Tiers | Reste à recouvrer (hors frais) | Diligence | Diligence | Diligence |
2007 | T-2473 | 256 | 13/08/2007 | J | 1 524,36 | lettre rappel acte créé - 13/02/08 | Mise en demeure standard acte créé - 21/02/15 | Phase comminatoire facultative envoyé à huissier - 28/04/15 |
2007 | T-2473 | 271 | 13/08/2007 | K | 5 648,95 | Phase comminatoire facultative envoyé à huissier - 21/07/09 | OTD employeur Acte de poursuite annulé - 27/03/15 | OTD (en cours) 27/03/2015 - |
Total |
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| 7 173,31 |
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ATTENDU que le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable du département des Alpes-Maritimes n’avait pas entrepris de diligences suffisantes pour assurer le recouvrement des créances ci-dessus identifiées procédant du titre collectif n° 2473 pris en charge le 13 août 2007, pour un montant de 7 173,31 € ; qu’après avoir rappelé que la lettre de rappel ne constituait pas un acte de poursuite interruptif de prescription, il a relevé, d’une part, qu’aucune des mises en demeure ou oppositions à tiers détenteur invoquées n’était appuyée d’une justification de sa bonne réception par le débiteur et, d’autre part, que certaines diligences étaient tardives ; qu’il a dès lors conclu que, dans ces conditions, la prescription apparaissait acquise au plus tard le 13 août 2011, sous la gestion de M. X dont la responsabilité semblait dès lors engagée ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que M. Y a indiqué dans le tableau récapitulatif annexé à sa réponse du 22 février 2017 que, s’agissant de la dette de M. J, « la cote [n’était] pas prescrite dans l’application Helios » en l’état de l’accusé de réception, par l’établissement bancaire, d’une opposition à tiers détenteur infructueuse en date du 13 janvier 2016 ; qu’il a par ailleurs précisé que la dette de M. K avait été soldée le 15 février 2016 ;
ATTENDU que le comptable en poste a fourni le 18 mai 2017 et le 12 juin 2017, en réponse au second questionnaire transmis à ses prédécesseurs, l’ensemble des bordereaux de situation des débiteurs visés dans le réquisitoire ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 17 février 2017, l’ordonnateur n’a développé aucune argumentation opérante à ce stade de la procédure ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a relevé qu’aucune preuve n’avait été rapportée d’un acte interruptif de prescription concernant la dette de
M. J, l’opposition notifiée en 2016 étant trop tardive ; qu’il en a conclu que M. X avait engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire pour avoir laissé prescrire l’action en recouvrement de cette créance et que ce manquement avait causé à la collectivité un préjudice financier correspondant au montant de la somme non recouvrée ; qu’en revanche, compte tenu du recouvrement intégral de la dette de M. K, il a retenu que la charge devait être levée sur ce point ;
ATTENDU tout d’abord que le bordereau de situation arrêté au 12 juin 2017, corroborant les affirmations du comptable, établit que la dette de M. K a été entièrement acquittée par virement de la Banque de France en date du 15 février 2016 ; qu’ainsi, en application des dispositions précitées du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée, il n’y a pas lieu, à défaut de recette non recouvrée, de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X dans le recouvrement de cette créance ;
ATTENDU en revanche que, s’agissant de la dette de M. J pour laquelle aucun recouvrement n’est attesté, la seule preuve de la notification d’un acte de poursuite, datée de 2016, est trop tardive pour être utilement invoquée à décharge ; qu’au surplus, s’agissant en l’espèce de la notification faite à l’établissement bancaire d’une opposition à tiers détenteur, celle-ci n’emporte aucune garantie que le débiteur en a été avisé ; qu’aucune preuve n’a ainsi été produite des diligences exercées pour recouvrer la créance avant que l’action en recouvrement ne soit atteinte par la prescription prévue par les dispositions du 3° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ; que, nonobstant les indications contraires portées sur l’application Hélios, dépourvues en elles-mêmes de force probante, la prescription s’est donc trouvée acquise le 13 août 2011, sous la gestion de M. X ; que le recouvrement de la créance a été manifestement compromis du fait du manquement du comptable, dont la responsabilité personnelle et pécuniaire est engagée de ce chef ;
Sur le préjudice
ATTENDU que, comme pour la charge n° 1, le comptable a fait valoir qu’il n’estimait pas que le département ait subi un préjudice financier et que les difficultés du poste pouvaient être prises en compte par la chambre pour atténuer le montant des sommes laissées à charge ;
ATTENDU que l’ordonnateur estime que le département n’a subi aucun préjudice financier ;
ATTENDU que le constat de l’existence ou non d’un tel préjudice et de son imputabilité au comptable relève cependant de l’appréciation que le juge des comptes est amené à porter sur ces deux points à l’analyse des pièces du dossier ;
ATTENDU que lorsque le juge des comptes estime que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement des recettes, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l’organisme public concerné ; que, toutefois, s’il résulte des pièces du dossier, et en particulier des éléments produits par le comptable, qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne qui en était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme ayant résulté de ce manquement ;
ATTENDU que l’absence de recouvrement de la créance détenue sur M. J a causé au département des Alpes-Maritimes un préjudice financier ; qu’il ne ressort d’aucun des éléments du dossier qu’à la date à laquelle la prescription a été acquise, cette créance était irrécouvrable en raison de l’insolvabilité du débiteur ; qu’en conséquence, le préjudice qui a résulté de son défaut de recouvrement doit être regardé comme ayant été causé par le manquement du comptable ; qu’ainsi, sans qu’il y ait lieu pour la chambre de prendre en considération les difficultés du poste pour l’évaluation dudit préjudice, M. X doit être constitué en débet pour un montant égal à celui de la créance non recouvrée, soit 1 524,36 €, en application des dispositions précitées du troisième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 ;
ATTENDU que, pour le calcul des intérêts prévus au VIII de ces mêmes dispositions, la notification du réquisitoire est intervenue le 14 janvier 2017 ;
Charge n° 3 – Compte 467316 « débiteurs d’indus RMI » - titre n° 14528 pris en charge le 31 décembre 2009
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, dans son réquisitoire du 5 janvier 2017, le procureur financier a relevé que les titres ci-dessous figuraient sur l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 :
ATTENDU que le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable du département des Alpes-Maritimes n’avait pas entrepris de diligences suffisantes pour assurer le recouvrement des créances ci-dessus identifiées procédant du titre collectif n° 14528 pris en charge le 31 décembre 2009, pour un montant de 5 797 € ; qu’après avoir rappelé que la lettre de rappel ne constituait pas un acte de poursuite interruptif de prescription, il a relevé, d’une part, qu’aucune des mises en demeure ou oppositions à tiers détenteur invoquées n’était appuyée d’une justification de sa bonne réception par le débiteur et, d’autre part, que certaines diligences étaient tardives ;
ATTENDU que, s’agissant plus particulièrement du débiteur L, le procureur financier a retenu que l’avis favorable au rééchelonnement de la dette rendu par la commission de surendettement l’avait été trop tardivement, le 30 septembre 2014, pour avoir pu interrompre le cours de la prescription et que rien ne permettait d’attester des difficultés financières du redevable à la date du manquement ; qu’il a également ajouté que l’instruction devrait conduire à vérifier l’existence de possibles paiements partiels intervenus en application du plan d’apurement de la dette ;
ATTENDU que le procureur financier a conclu que la prescription apparaissait acquise au plus tard le 31 décembre 2013, sous la gestion de M. Y ; que si la responsabilité de ce dernier était dès lors susceptible d’être engagée, il n’a cependant pas exclu celle de son prédécesseur, en charge du recouvrement jusqu’au 30 juin 2013 ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que M. Y a indiqué dans le tableau récapitulatif annexé à sa réponse du 22 février 2017 que, concernant la créance détenue sur M. L, « la cote [n’était] pas prescrite dans l’application Helios » et que « l’admission à la procédure de surendettement résult[ait] d’une démarche du redevable qui déclare et donc reconnaît sa dette », ajoutant qu’il s’agissait là d’une « deuxième demande » de l’intéressé ; que, dans cette même réponse et concernant la dette de M. M, M. Y, se prévalant d’une mise en demeure recommandée du 19 novembre 2013 revenue « NPAI » et d’une opposition à tiers détenteur émise en février 2015, a fait valoir que « la cote [n’était] pas prescrite dans l’application Helios, pas d’autre adresse trouvée, orienté vers ANV » ; qu’enfin, pour ce qui concerne la dette de M. N, le comptable, estimant la prescription valablement interrompue, a transmis un avis de réception d’une mise en demeure adressée au débiteur sous pli recommandé, lequel a été retourné à l’expéditeur sous la mention « pli avisé non réclamé » ;
ATTENDU que le comptable en poste a fourni le 18 mai 2017, en réponse au second questionnaire transmis à ses prédécesseurs, l’ensemble des bordereaux de situation des débiteurs visés dans le réquisitoire, ainsi que la copie d’une mise en demeure notifiée à M. L
le 30 novembre 2013 ; qu’il y a également ajouté la copie de deux accusés de réception au nom de M. M, retournés en paierie sous la mention « NPAI » en date des 9 octobre 2014 et 9 février 2015 ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 17 février 2017, l’ordonnateur n’a développé aucune argumentation opérante à ce stade de la procédure ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a relevé qu’aucune preuve n’avait été rapportée d’un acte interruptif de prescription concernant la dette de
M. M, la notification de la mise en demeure du 19 novembre 2013 n’étant pas justifiée et les seuls accusés de réception produits étant postérieurs au 31 décembre 2013 ; qu’il en a conclu que M. Y avait engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire pour avoir laissé prescrire cette créance et que ce manquement avait causé à la collectivité un préjudice financier à hauteur de la somme non recouvrée ; qu’en revanche, en l’état des pièces nouvelles produites par les comptables, établissant la réalité de diligences interruptives de prescription, il a conclu que les charges devaient être levées en tant qu’elles concernent les dettes de M. L et de M. N ;
ATTENDU tout d’abord que le comptable a justifié de la notification des mises en demeure adressées par voie de courriers recommandés à M. L et à M. N, respectivement présentés au domicile de ces derniers le 29 novembre 2013 et le 2 décembre 2013 ; qu’ainsi, même si le second de ces courriers n’a pas été réclamé par son destinataire, lequel est cependant réputé avoir reçu notification régulière du pli au jour de sa présentation, la prescription a été valablement interrompue et repoussée à une date postérieure à la période en jugement ; qu’il n’y a donc pas lieu, dans ces conditions et à défaut de manquement, de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable dans le recouvrement des deux créances en cause ;
ATTENDU en revanche que, s’agissant de la dette de M. M, qui n’a pas été recouvrée en l’état du dossier, la notification de la mise en demeure du 19 novembre 2013, seul acte de poursuite susceptible en l’espèce d’avoir pu interrompre la prescription, n’est pas attestée ; que l’opposition à tiers détenteur infructueuse de février 2015 dont le comptable se prévaut également, sans d’ailleurs justifier de sa réalité, est trop tardive pour être utilement invoquée à décharge ; que la circonstance, qui n’est pas davantage établie, que la créance ferait ou aurait fait l’objet d’une admission en non-valeur est en tout état de cause sans effet sur l’examen par le juge des comptes du caractère adéquat, complet et rapide des diligences réalisées par le ou les comptables concernés pour en assurer le recouvrement ; qu’aucune preuve n’a donc été produite des diligences exercées pour obtenir paiement de la créance avant que l’action en recouvrement ne soit atteinte par la prescription ; que celle-ci, nonobstant les indications contraires portées sur l’application Hélios, s’est donc trouvée acquise le 31 décembre 2013, sous la gestion de M. Y ;
ATTENDU que M. Y a pris ses fonctions le 1er juillet 2013 et n’a pas émis de réserve sur le titre en litige ; que le recouvrement de la créance doit ainsi être regardé comme ayant été manifestement compromis sous sa gestion ; que sa responsabilité personnelle et pécuniaire est dès lors engagée de ce chef en application des dispositions précitées du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée ;
Sur le préjudice
ATTENDU que, comme pour la charge n° 1, le comptable a fait valoir qu’il n’estimait pas que le département ait subi un préjudice financier et que les difficultés du poste pouvaient être prises en compte par la chambre pour atténuer le montant des sommes laissées à charge ;
ATTENDU que l’ordonnateur estime que le département n’a subi aucun préjudice financier ;
ATTENDU que le constat de l’existence ou non d’un tel préjudice et de son imputabilité au comptable relève cependant de l’appréciation que le juge des comptes est amené à porter sur ces deux points à l’analyse des pièces du dossier ;
ATTENDU que lorsque le juge des comptes estime que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement des recettes, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l’organisme public concerné ; que, toutefois, s’il résulte des pièces du dossier, et en particulier des éléments produits par le comptable, qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne qui en était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme ayant résulté de ce manquement ;
ATTENDU que l’absence de recouvrement de la créance détenue sur M. M a causé au département des Alpes-Maritimes un préjudice financier ; qu’il ne ressort d’aucun des éléments du dossier qu’à la date à laquelle la prescription a été acquise, cette créance était irrécouvrable en raison de l’insolvabilité du débiteur ; qu’en conséquence, le préjudice qui a résulté de son défaut de recouvrement doit être regardé comme ayant été causé par le manquement du comptable ; qu’ainsi, sans qu’il y ait lieu pour la chambre de prendre en considération les difficultés du poste pour l’évaluation dudit préjudice, M. Y doit être constitué en débet pour un montant égal à celui de la créance non recouvrée, soit 1 188,28 €, en application du troisième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée ;
ATTENDU que, pour le calcul des intérêts prévus au VIII de ces mêmes dispositions, la notification du réquisitoire est intervenue le 13 janvier 2017 ;
Charge n° 4 : Compte 467311 « débiteurs d’indus RMI – contentieux » : titre n° 6289 pris en charge le 1er juillet 2009
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, dans son réquisitoire du 5 janvier 2017, le procureur financier a relevé que les titres ci-dessous figuraient sur l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 :
Ex. pièce | Num Pièce | ligne | Date PEC | Tiers | Reste à recouvrer (hors frais) | Diligence | Diligence | Diligence |
2009 | T-6289 | 19 | 01/07/2009 | R | 1 182,48 | Mise en demeure standard acte créé - 07/03/15 | lettre rappel acte créé - 02/09/09 | Mise en demeure standard non reclamé - 04/10/13 |
2009 | T-6289 | 16 | 01/07/2009 | S | 1 774,95 | lettre rappel acte créé - 02/09/09 | Mise en demeure standard acte créé - 07/03/15 | lettre rappel acte créé - 02/09/09 |
2009 | T-6289 | - | 01/07/2009 | U | 1 423,49 | lettre rappel acte créé - 02/09/09 | Mise en demeure standard acte créé - 07/03/15 | lettre rappel acte créé - 02/09/09 |
2009 | T-6289 | - | 01/07/2009 | O | 2 945,67 | Mise en demeure standard acte créé - 07/03/15 | reclamation transmise ordo 02/04/2015 - 30/04/2016 | lettre rappel acte créé - 02/09/09 |
2009 | T-6289 | 81 | 01/07/2009 | P | 1 416,96 | Mise en demeure standard acte créé - 07/03/15 | reclamation transmise ordo 02/04/2015 - 30/04/2016 | lettre rappel acte créé - 02/09/09 |
2009 | T-6289 | 71 | 01/07/2009 | T | 1 188,39 | liquidation judiciaire 08/07/2014 - | lettre rappel acte créé - 01/09/10 | Mise en demeure standard acte créé - 09/09/12 |
2009 | T-6289 | 75 | 01/07/2009 | Q | 9 374,68 | cdt avec frais acte créé - 04/11/09 | OTD bancaire acte créé - 23/01/15 | delai accorde 24/02/2015 - |
Total |
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|
|
| 19 306,62 |
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ATTENDU que le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable du département des Alpes-Maritimes n’avait pas entrepris de diligences suffisantes pour assurer le recouvrement des créances ci-dessus identifiées procédant du titre collectif n° 6289 pris en charge le 1er juillet 2009, pour un montant de 19 306,62 € ; qu’après avoir rappelé que la lettre de rappel ne constituait pas un acte de poursuite interruptif de prescription, il a relevé, d’une part, que les mises en demeure invoquées n’étaient appuyées d’aucune justification de leur bonne réception par le débiteur et, d’autre part, que certaines diligences étaient tardives ;
ATTENDU que, s’agissant plus particulièrement du débiteur O, le procureur financier a également relevé qu’en l’état d’un échéancier de paiement à compter du 20 février 2016 produit par le comptable, l’instruction devrait conduire à vérifier l’existence de possibles paiements partiels intervenus depuis lors ;
ATTENDU que le procureur financier a retenu que la prescription apparaissait acquise le 1er juillet 2013, soit le lendemain de la sortie de fonctions de M. X ; que son successeur ne pouvant matériellement en un jour obtenir le paiement des créances, il a conclu que le recouvrement de celles-ci était déjà irrémédiablement compromis à cette date et que la responsabilité de M. X était donc engagée ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que M. Y a fait valoir dans le tableau récapitulatif annexé à sa réponse que, s’agissant des dettes de M. P, M. T, M. Q et M. O, « la cote [n’était] pas prescrite dans l’application Hélios » et que les dettes de M. R et de M. Q étaient orientées pour une admission en non-valeur ; qu’il s’est également prévalu d’oppositions à tiers détenteur infructueuses effectuées en 2015 (pour M. R et M. S) et en 2017 (pour M. P), d’une demande de remise gracieuse de dette formée le 15 février 2015 par M. T, ainsi que d’une « OTD B positif sans pro, mise en demeure non réclamée, PV de carence sur saisie » pour M. Q ; que, s’agissant de
M. O, le comptable, sous la mention « poursuites en 2015 », a également indiqué qu’« il n’y a pas eu de paiement suite à l’octroi de l’échéancier », que « les poursuites ont été reprises le 29/09/2016, 2 OTDB sans provision » et que « 2 OTD bancaires se sont révélés positifs sans provision » ; qu’il a enfin précisé que la dette de Mme U avait été soldée par l’effet de deux virements du 30 novembre 2015 ;
ATTENDU que le comptable en poste a fourni les 18 et 23 mai 2017, en réponse au second questionnaire transmis à ses prédécesseurs, l’ensemble des bordereaux de situation des débiteurs visés dans le réquisitoire ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 17 février 2017, l’ordonnateur n’a développé aucune argumentation opérante à ce stade de la procédure ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a relevé que, s’agissant des créances détenues sur M. R, M. S, M. P et M. Q, aucune preuve n’avait été rapportée de la réalisation d’un acte interruptif de prescription, les diligences dont le comptable s’est prévalu étant soit non justifiées soit trop tardives ; que si M. T apparaît avoir sollicité une remise gracieuse, aucun document valant reconnaissance de dette n’a cependant été produit ; que le paiement partiel obtenu de M. O le 16 mai 2017 ne peut, pour les mêmes raisons que celles précédemment évoquées concernant la dette de M. C au titre de la charge n° 1, être regardé comme exonératoire de responsabilité, l’échéancier de paiement du 28 janvier 2016 n’étant par ailleurs pas signé du redevable et ne pouvant donc valoir à ce titre reconnaissance de dette ; qu’il en a conclu que M. X avait engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire pour avoir laissé prescrire lesdites créances et que ce manquement avait donc causé à la collectivité un préjudice financier correspondant au montant des sommes non recouvrées ; qu’en revanche, compte tenu du recouvrement intégral de la dette de Mme U, le procureur financier a retenu que la charge devait être levée sur ce point ;
ATTENDU tout d’abord que le bordereau de situation arrêté au 16 mai 2017, corroborant les affirmations du comptable, établit que la dette de Mme U a été entièrement acquittée par deux virements de la Banque de France en date du 30 novembre 2015 ; qu’ainsi, en application des dispositions précitées du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée, il n’y a pas lieu, à défaut de recette non recouvrée, de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable dans le recouvrement de cette créance ;
ATTENDU qu’en revanche, s’agissant des autres dettes visées dans le réquisitoire, les échéanciers de paiements accordés à M. S et à M. O respectivement le 20 novembre 2015 et le 28 janvier 2016, comme la demande de remise gracieuse que M. T a formée auprès du département en 2015, ne sont appuyés d’aucun document propre à établir une reconnaissance de dette antérieure au 1er juillet 2013 et n’ont reçu aucune suite en l’état du dossier ; qu’en outre, les poursuites dont le comptable se prévaut, en ce compris les multiples oppositions à tiers détenteur infructueuses effectuées à partir de 2014, ont été exercées, à défaut de tout acte interruptif antérieur dont la notification au débiteur serait dûment justifiée, alors que la prescription de l’action en recouvrement était déjà acquise au 1er juillet 2013 ; qu’elles ne peuvent donc être utilement invoquées à décharge ; que, s’il ressort par ailleurs du bordereau de situation que seule la dette de M. O a fait l’objet d’un paiement de 5,46 € le 24 septembre 2015, ramenant le reste à recouvrer à 2 940,21 €, ce règlement partiel, intervenu alors que l’action en recouvrement était déjà prescrite, ne peut revêtir en lui-même aucun caractère exonératoire de responsabilité pour les mêmes raisons que celles précédemment évoquées au titre de la charge n° 1 ;
ATTENDU par ailleurs que la circonstance invoquée que tout ou partie des créances feraient ou auraient fait l’objet d’une admission non-valeur est sans incidence sur l’examen par le juge des comptes du caractère adéquat, complet et rapide des diligences réalisées par le ou les comptables chargés d’en assurer le recouvrement ;
ATTENDU qu’ainsi aucune preuve n’a été produite des diligences exercées pour recouvrer les créances détenues sur M. R, M. S, M. O, M. P, M. T et M. Q telles que visées dans le réquisitoire, avant que l’action en recouvrement du comptable ne soit atteinte par la prescription ; que celle-ci, nonobstant d’éventuelles mentions contraires portées sur l’application Hélios, s’est donc trouvée acquise le 1er juillet 2013 en application des dispositions précitées du 3° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ;
ATTENDU que cette dernière date est précisément celle à laquelle M. Y est entré en fonctions ; qu’il ne peut donc être regardé comme ayant été en capacité d’exercer les diligences propres à faire échec à la prescription, acquise le jour-même ; qu’ainsi, le recouvrement des créances a été irrémédiablement compromis sous la gestion de M. X, qui avait la charge de préserver la créance depuis le 15 janvier 2010 ;
Sur le préjudice
ATTENDU que, comme pour la charge n° 1, le comptable a fait valoir qu’il n’estimait pas que le département ait subi un préjudice financier et que les difficultés du poste pouvaient être prises en compte par la chambre pour atténuer le montant des sommes laissées à charge ;
ATTENDU que l’ordonnateur estime que le département n’a subi aucun préjudice financier ;
ATTENDU que le constat de l’existence ou non d’un tel préjudice et de son imputabilité au comptable relève cependant de l’appréciation que le juge des comptes est amené à porter sur ces deux points à l’analyse des pièces du dossier ;
ATTENDU que lorsque le juge des comptes estime que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement des recettes, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l’organisme public concerné ; que, toutefois, s’il résulte des pièces du dossier, et en particulier des éléments produits par le comptable, qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne qui en était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme ayant résulté de ce manquement ;
ATTENDU qu’il résulte des bordereaux de situation arrêtés au 18 mai 2017, tels que produits par le comptable en poste, que l’intégralité des créances détenues sur les redevables susvisés reste à recouvrer, exception étant seulement faite de la dette de M. O, partiellement réglée ainsi qu’il a été dit précédemment ; qu’aucune preuve d’un quelconque recouvrement postérieur n’a été rapportée avant que la chambre ne délibère le présent jugement ;
ATTENDU que l’absence de recouvrement a causé au département des Alpes-Maritimes un préjudice financier ; qu’il ne ressort d’aucun des éléments du dossier qu’à la date à laquelle la prescription a été acquise, les créances en cause étaient irrécouvrables en raison de l’insolvabilité des personnes qui en étaient redevables ; qu’en conséquence, le préjudice qui a résulté de leur défaut de recouvrement doit être regardé comme ayant été causé par le manquement du comptable ; qu’ainsi, sans qu’il y ait lieu pour la chambre de prendre en considération les difficultés du poste pour l’évaluation dudit préjudice, M. X doit être constitué en débet pour un montant égal à celui des créances non recouvrées procédant du titre collectif n° 6289 pris en charge le 1er juillet 2009, soit la somme de 17 877,67 € correspondant aux créances sur M. R pour 1 182,48 €, M. S pour 1 774,95 €, M. O pour 2 940,21 € (déduction étant faite du recouvrement partiel de 5,46 €), M. P pour 1 416,96 €, M. T pour 1 188,39 € et M. Q pour 9 374,68 ;
ATTENDU que, pour le calcul des intérêts prévus au VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée, la notification du réquisitoire est intervenue le 14 janvier 2017 ;
Charge n° 5 – Compte 46721 « débiteurs divers – exercice en cours » - titres n° 12975 pris en charge le 15 novembre 2010 et n° 14269 pris en charge le 30 novembre 2010
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, dans son réquisitoire du 5 janvier 2017, le procureur financier a relevé que les titres ci-dessous figuraient sur l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 :
Ex. pièce | Num Pièce | Date PEC | Tiers | Reste à recouvrer (hors frais) | Diligence | Diligence | Diligence |
2010 | T-12975 | 15/11/10 | V | 18 836,77 | cdt avec frais acte créé - 21/03/11 | autorisation saisie acte créé - 22/08/13 | anv demandée 04/09/2014 - |
2010 | T-14269 | 30/11/10 | V | 970,00 | cdt avec frais acte créé - 08/04/11 | autorisation saisie acte créé - 22/08/13 | anv demandée 04/09/2014 - |
Total |
|
|
| 19 806,77 |
|
|
|
ATTENDU que le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable du département des Alpes-Maritimes n’avait pas entrepris de diligences suffisantes pour assurer le recouvrement desdits titres ; qu’après avoir rappelé que la lettre de rappel ne constituait pas un acte de poursuite interruptif de prescription, il a retenu, d’une part, que la mise en demeure et les saisies invoquées n’étaient appuyées d’aucune justification de leur bonne réception par le débiteur et, d’autre part, que l’admission en non-valeur des créances ne dégageait nullement le comptable de sa responsabilité ;
ATTENDU que le procureur financier a également relevé que, si le décès de la débitrice était avéré, le comptable n’avait cependant justifié d’aucune diligence en vue de déterminer l’actif successoral et les éventuels héritiers ;
ATTENDU que le procureur financier a conclu qu’à défaut de diligences rapides, complètes et adéquates, les titres étaient respectivement prescrits les 15 et 30 novembre 2014, sous la gestion de M. Y dont la responsabilité semblait dès lors engagée ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que M. Y a indiqué que « la demande d’autorisation de saisie transmise à l’ordonnateur [n’avait] jamais été retournée dans le délai d’un mois dès lors que le comptable était fondé à demander l’admission en NV » et que « la demande d’admission en NV mentionnait le décès » ; qu’il a enfin indiqué que l’ordonnateur « [n’avait] donné aucune information sur d’éventuels héritiers » ;
ATTENDU que le comptable en poste a fourni le 18 mai 2017, en réponse au second questionnaire transmis à ses prédécesseurs, le bordereau de situation de Mme V ; qu’il a par ailleurs fourni des copies d’écran issues des application Adonis et BNDP (base nationale des données patrimoniales) concernant la situation fiscale de l’intéressée ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 17 février 2017, l’ordonnateur n’a développé aucune argumentation opérante à ce stade de la procédure ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a relevé que, compte tenu des éléments produits par le comptable attestant, notamment, qu’aucune déclaration de succession n’avait été ouverte, la charge devait être levée ;
ATTENDU, toutefois, que le comptable n’a produit aucune preuve de la notification régulière de l’un quelconque des actes de poursuites mentionnés dans le bordereau de situation de la débitrice établi au 16 mai 2017, pas plus qu’il n’a d’ailleurs fourni un justificatif de la demande d’autorisation de saisie qui aurait été vainement adressée à l’ordonnateur en 2013 ; qu’il n’apparaît pas davantage que, bien que la consultation de l’application Adonis le 8 avril 2014 l’ait informé du décès de Mme V et qu’un délai de plus de sept mois restait encore à courir jusqu’à la date de la prescription de l’action en recouvrement, des investigations particulières aient été menées en vue d’identifier les éventuels héritiers et de déterminer la consistance de l’actif successoral ; que la circonstance, qui n’est d’ailleurs pas établie, que la créance ferait ou aurait fait l’objet d’une admission en non-valeur est en tout état de cause sans effet sur l’examen par le juge des comptes du caractère adéquat, complet et rapide des diligences réalisées par le ou les comptables concernés pour en assurer le recouvrement ; qu’ainsi, faute de diligences adéquates, complètes et rapides, l’action en recouvrement du comptable s’est trouvée prescrite le 15 novembre 2014 pour le titre n°12975 et le 30 novembre 2014 pour le titre n° 14269, sous la gestion de M. Y, dont la responsabilité personnelle et pécuniaire est engagée de ce chef en application des dispositions précitées du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée ;
Sur le préjudice
ATTENDU que, comme pour la charge n° 1, le comptable a fait valoir qu’il n’estimait pas que le département ait subi un préjudice financier et que les difficultés du poste pouvaient être prises en compte par la chambre pour atténuer le montant des sommes laissées à charge ; qu’il a par ailleurs précisé que Mme V, célibataire et décédée en 2013, était « domiciliée dans une fondation pour personnes à mobilité réduite ou précaires socialement » et qu’elle « n’était redevable d’aucune taxe foncière » ; qu’il a également exposé qu’« aucun revenu n’[avait] été déclaré pour l’année 2012 », que les bases de données fiscales « ne [faisaient] état d’aucun patrimoine » et que « la demande de renseignement auprès du Pôle patrimonial ne [faisait] état d’aucun dépôt de déclaration de succession (…) et donc d’informations sur d’éventuels héritiers » ;
ATTENDU que l’ordonnateur estime que le département n’a subi aucun préjudice financier ;
ATTENDU que le constat de l’existence ou non d’un tel préjudice et de son imputabilité au comptable relève cependant de l’appréciation que le juge des comptes est amené à porter sur ces deux points à l’analyse des pièces du dossier ;
ATTENDU que lorsque le juge des comptes estime que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement des recettes, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l’organisme public concerné ; que, toutefois, s’il résulte des pièces du dossier, et en particulier des éléments produits par le comptable, qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne qui en était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme ayant résulté de ce manquement ; que l’irrécouvrabilité de la créance peut être établie par tous documents, y compris postérieurs au manquement ;
ATTENDU qu’il résulte de l’instruction que Mme V, qui était hébergée dans une fondation pour personnes en situation de grande fragilité, avait un revenu fiscal de référence nul pour 2012, n’a pas payé l’impôt sur le revenu en 2013 et ne s’est pas davantage acquittée de la taxe foncière faute de propriété immobilière ; que les bases de données fiscales confirment l’absence de tout patrimoine ; qu’il est avéré qu’aucune déclaration de succession n’a été déposée ; qu’en conséquence, si l’absence de recouvrement de la créance a causé au département des Alpes-Maritimes un préjudice financier, il apparaît suffisamment établi que la situation personnelle de Mme V, à la date à laquelle la prescription a été acquise, était telle que toute démarche en vue de tenter d’obtenir le règlement de la dette était vouée à l’échec ; qu’ainsi, le préjudice qui a résulté du défaut de recouvrement ne peut être regardé comme ayant été causé par le manquement du comptable ; que M. Y ne saurait donc être mis dans l’obligation de verser de ses deniers personnels la somme correspondant aux créances non recouvrées sur le fondement des dispositions précitées du troisième alinéa du IV de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée ;
Sur la sanction du manquement du comptable
ATTENDU qu’aux termes du deuxième alinéa du VI de la loi précitée : « Lorsque le manquement du comptable (…) n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret en conseil d’Etat en fonction du niveau des garanties mentionnées au II. » ;
ATTENDU qu’en application de l’article 1er du décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012, le montant maximal en cause est égal à 1,5 millième du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable, lequel s’établit en l’espèce, à la date du manquement, à 243 000 € ;
ATTENDU que, compte tenu des circonstances de l’espèce, il n’y a cependant pas lieu d’obliger M. Y à s’acquitter d’une quelconque somme sur le fondement des dispositions précitées, au titre de sa gestion pour l’exercice 2014 ;
Charge n° 6 : exercice 2013 : prime de fonctions et de résultats versée à M. W par mandats collectifs n° 37552 du 17 juillet 2013, n° 42623 du 14 août 2013, n° 48753 du 17 septembre 2013, n° 54501 du 17 octobre 2013, n° 60244 du 16 novembre 2013 et n° 65556 du 11 décembre 2013
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par son réquisitoire du 5 janvier 2017, le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable du département des Alpes-Maritimes a procédé au paiement, au bénéfice de M. W, d’une prime de fonctions et de résultats d’un montant mensuel de 1 500 €, sans disposer des pièces justificatives suffisantes à l’appui des mandats susvisés ;
ATTENDU en effet que le procureur financier a relevé que M. W, ayant fait valoir ses droits à la retraite au 15 juillet 2013, a été recruté en qualité d’administrateur hors classe non titulaire par contrat du 28 juin 2013, à effet du 16 juillet 2013 et jusqu’au 31 décembre 2013 ; qu’il a retenu que, si l’intéressé était dès lors en droit de bénéficier de la prime de fonctions et de résultats dont le régime a été organisé, pour les administrateurs, par délibération du conseil départemental du 20 décembre 2010, les coefficients individuels qui lui ont été appliqués, tant pour la part fonctions que pour la part résultats, n’avaient pas été préalablement fixés et ne semblaient pas connus du comptable au moment des paiements ; que seule a été produite une feuille de calcul de rémunération dépourvue de toute valeur juridique et ne permettant pas, de surcroît, de valider le montant mensuel attribué ;
ATTENDU qu’après avoir rappelé que le comptable est réglementairement tenu d’exercer le contrôle de la validité de la dette et, à ce titre, de vérifier l’exactitude des calculs de liquidation et la production des pièces justificatives en application des dispositions des articles 19 et 20 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 susvisé, le procureur financier a conclu que M. Y paraissait avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire de ce chef ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que dans sa réponse au réquisitoire du 22 février 2017, M. Y a indiqué que la prime en cause, « régulièrement octroyée », n’avait pas excédé le montant maximal auquel son bénéficiaire pouvait prétendre en application du barème établi par le conseil départemental et que l’intéressé ayant été au nombre des plus proches collaborateurs du président, il était « fort probable » que le montant ait été fixé d’un commun accord entre eux ; qu’il a ajouté que « le CHD en vigueur (…) prévoyait comme seul contrôle exhaustif des personnels, le contrôle des entrants » et que, faute pour le département d’avoir émis deux bulletins de paie au titre du mois de juillet 2013 pour distinguer sa rémunération d’ancien agent titulaire de celle qui lui était due à titre de nouvel agent contractuel, M. W « n’a pas été repris sur la liste des entrants » ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 17 février 2017, l’ordonnateur n’a développé aucune argumentation opérante à ce stade de la procédure ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a relevé que le comptable ne contestait pas le fondement de la charge et que les arguments avancés, relatifs à l’accord supposé entre l’ordonnateur et l’administrateur ou au non-dépassement du montant mensuel de la prime, n’étaient pas de nature à pouvoir justifier le montant versé ; qu’il a également retenu que l’ensemble de l’argumentation relative au respect des règles de contrôle sélectif des dépenses était à écarter à titre de circonstance exonératoire dès lors qu’il appartenait au comptable de demander à l’ordonnateur d’établir deux bulletins de paie distincts s’il jugeait insuffisantes les informations lui permettant de vérifier les calculs de liquidation ; qu’il a conclu que, faute d’avoir disposé de pièces justificatives permettant de procéder à cette vérification et d’avoir suspendu les paiements, M. Y avait engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire et causé à la collectivité un préjudice financier correspondant au montant des paiements indus ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « les comptables sont personnellement et pécuniairement responsables (…) du paiement des dépenses (…) » et que leur « responsabilité personnelle et pécuniaire (…) se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée (…) » ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 19 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, « le comptable est tenu d'exercer le contrôle : / (…) 2° S'agissant des ordres de payer : / (…) d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à l'article 20 (…). » ; qu’aux termes de l’article 20 de ces mêmes dispositions, « le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur : / (…) 2° L'exactitude de la liquidation ; / (…) 4° La production des pièces justificatives (…). » ; qu’enfin, aux termes de l’article 38 de ces mêmes dispositions, « (…) lorsqu'à l'occasion de l'exercice des contrôles prévus au 2° de l'article 19 le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe l'ordonnateur (…). » ;
ATTENDU qu’il est constant que M. Y ne disposait pas, au moment des paiements, d’une décision de l’autorité compétente arrêtant les coefficients individuels de la prime de fonctions et de résultats allouée à M. W ; qu’à cet égard, le tableau intitulé « simulation de salaire non titulaire indiciaire » que le comptable a fourni, dont l’auteur et la date d’établissement ne sont pas déterminés, est dépourvu de toute valeur juridique ; qu’au demeurant, l’application des coefficients qui y sont mentionnés aux montants annuels de référence ne permet pas de fixer la prime litigieuse à 1 500 euros par mois ; que, s’il est par ailleurs exact que la somme servie n’a pas excédé le montant maximal auquel l’intéressé pouvait prétendre, cette circonstance reste sans incidence sur la responsabilité du comptable, qui ne pouvait en l’espèce vérifier l’exactitude du calcul de liquidation ; qu’enfin, l’accord informel supposément intervenu entre l’ordonnateur et l’agent ne saurait davantage suppléer l’absence de pièce matérielle permettant le contrôle effectif de la validité de la dette ;
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède que M. Y a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire en s’abstenant de suspendre le paiement des mandats visés dans le réquisitoire, alors qu’il se trouvait dans l’impossibilité de procéder aux contrôles auxquels l’obligent les dispositions décrétales susvisées ;
Sur le préjudice
ATTENDU que l’ordonnateur et le comptable, qui se prévaut en particulier du « commun accord » sus-évoqué, estiment que les paiements visés dans le réquisitoire n’ont suscité pour le département aucun préjudice financier ;
ATTENDU que le constat de l’existence ou non d’un tel préjudice et de son imputabilité au comptable relève de l’appréciation que le juge des comptes est amené à porter sur ces deux points à l’analyse des pièces du dossier ;
ATTENDU qu’en l’absence de décision individuelle permettant de fixer le montant de la prime mensuelle de fonctions et de résultats servie à M. W au cours des mois de juillet à décembre 2013, les dépenses étaient indues ; que leur paiement a donc causé un préjudice financier au département des Alpes-Maritimes ;
ATTENDU qu’il convient dès lors de constituer M. Y, comptable en fonctions à la date des paiements en litige, débiteur de la somme de 8 250 € correspondant au montant de la prime indûment versée au cours de l’exercice 2013 ;
ATTENDU que, pour le calcul des intérêts prévus par les dispositions précitées du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifiée, la notification du réquisitoire est intervenue le 13 janvier 2017 ;
Sur le respect des règles de contrôle sélectif des dépenses par le comptable
ATTENDU qu’aux termes du deuxième alinéa du paragraphe IX de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du paragraphe VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse totale des sommes mises à leur charge s’ils ont respecté les règles de contrôle sélectif des dépenses ; que cette condition est déterminée « sous l’appréciation du juge des comptes » ;
ATTENDU que, dans sa réponse au réquisitoire et au questionnaire du rapporteur, le comptable s’est prévalu d’un plan de contrôle hiérarchisé de la dépense (CHD) validé par le supérieur hiérarchique par un courrier du 13 décembre 2010, prévoyant, en matière de dépenses de personnel, le contrôle exhaustif des « entrants » ; qu’il a précisé à cet égard que le nom de M. W n’avait pas figuré sur la liste des payes du mois de juillet 2013 à contrôler, l’unique bulletin de paye édité par le département ne l’ayant justement pas fait ressortir comme « entrant » ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier a estimé que le plan soumis, relatif à l’exercice 2010, ne pouvait être regardé comme applicable à l’exercice 2013 ; qu’à titre subsidiaire, il a retenu que le comptable, n’ayant pu ignorer le départ en retraite du bénéficiaire de la prime, se devait de considérer ce dernier comme un nouvel entrant à compter du 16 juillet 2013 et de procéder en conséquence au contrôle exhaustif de sa rémunération ;
ATTENDU que, s’il peut être admis, à la lecture du courrier sus-mentionné, que le plan de CHD validé pour 2010 revêtait un caractère pluriannuel et s’appliquait encore en 2013, il apparait en revanche que, par l’effet de son changement de statut apparaissant clairement à la rubrique « événements » de sa feuille de paie du mois de juillet 2013 sous la mention « recrutement »,
M. W constituait bien un « entrant » au sens des dispositions dudit plan ; qu’en outre, ce dernier prévoyait un contrôle par sondage de 3 % des payes générées dans l’année ; que le comptable n’a produit aucun élément sur ce point ;
ATTENDU que, pour ces motifs, il ne peut être retenu que le plan de contrôle a été respecté ;
Par ces motifs :
DÉCIDE :
Article 1er : En ce qui concerne la charge n° 1, M. X est constitué débiteur du département des Alpes-Maritimes au titre de l’exercice 2010, à compter du 15 janvier, pour la somme de 16 277,06 € (seize mille deux cent soixante-dix-sept euros et six centimes) augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 14 janvier 2017.
Article 2 : En ce qui concerne la charge n° 2, M. X est constitué débiteur du département des Alpes-Maritimes au titre de l’exercice 2011 pour la somme de 1 524,36 € (mille cinq cent vingt-quatre euros et trente-six centimes) augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 14 janvier 2017.
Article 3 : En ce qui concerne la charge n° 3, M. Y est constitué débiteur du département des Alpes-Maritimes au titre de l’exercice 2013 pour la somme de 1 188,28 € (mille cinq quatre-vingt-huit euros et vingt-huit centimes) augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 13 janvier 2017.
Article 4 : En ce qui concerne la charge n° 4, M. X est constitué débiteur du département des Alpes-Maritimes au titre de l’exercice 2013 pour la somme de 17 877,67 € (dix-sept mille huit cent soixante-dix-sept euros et soixante-sept centimes) augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 14 janvier 2017.
Article 5 : En ce qui concerne la charge n° 5, il n’y a pas lieu de constituer M. Y en débet ni de mettre à sa charge une somme non rémissible au titre de sa gestion de l’exercice 2014.
Article 6 : En ce qui concerne la charge n° 6, M. Y est constitué débiteur du département des Alpes-Maritimes au titre de l’exercice 2013 pour la somme de 8 250 € (huit mille deux cent cinquante euros) augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 13 janvier 2017.
Les règles de contrôle sélectif des dépenses n’ont pas été respectées au cas d’espèce.
Article 7 : Il est sursis à la décharge de M. X dans l’attente de la constatation de l’apurement des débets mentionnés aux articles 1, 2 et 4 du présent jugement.
Article 8 : Il est sursis à la décharge de M. Y dans l’attente de la constatation de l’apurement des débets mentionnés aux articles 3 et 6 du présent jugement.
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur, le dix-neuf septembre deux mille dix-sept.
Présents : M. Louis Vallernaud, président de la chambre, président de séance, M. Bernard Debruyne et M. Clément Contan, présidents de section, M. Jean-François Kuntgen, premier conseiller, et M. Grégory Semet, conseiller.
La greffière de séance,
Patricia GUZZETTA | Le président de la chambre, président de séance
Louis VALLERNAUD |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
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