S3/2170230/MC
1ère section Communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines (78)
Jugement n° 2017-0006 J
Poste comptable : Trésorerie de Saint-Quentin-en-Yvelines
Audience publique du 28 février 2017
Exercice 2013
Prononcé du 21 mars 2017
République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
Vu le réquisitoire en date du 23 mai 2016, par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X, comptable de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines, au titre d'opérations relatives à l’exercice 2013 ;
Vu la notification du réquisitoire, le 25 mai 2016 à la comptable concernée et au président de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la communauté d’agglomération de
Saint-Quentin-en-Yvelines, par Mme X, du 1er janvier au 31 décembre 2013
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement
Vu l'article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le code des juridictions financières
Vu le code général des collectivités territoriales
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l'article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011
Vu le rapport de M. Yves Bénichou, premier conseiller, magistrat chargé de l'instruction ;
Vu les conclusions du procureur financier ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendus lors de l'audience publique du 28 février 2017, M. Yves Bénichou, premier conseiller, en son rapport, Mme Isabelle Banderet, procureur financier, en ses conclusions, et Mme X, comptable concernée présente, ayant eu la parole en dernier ;
Entendue en délibéré Mme Catherine Salmon, première conseillère, en ses observations ;
Attendu que le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes d'Île-de-France de la responsabilité encourue par Mme X pour n'avoir pas exercé dans les délais appropriés toutes les diligences requises lors du paiement de la rémunération d’un agent non‑titulaire (présomption de charge n°1) et du paiement d’une prime informatique mensuelle à cinq agents au titre de l’exercice 2013 (présomption de charge n° 2) ;
Attendu qu’aux termes du I de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : « Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière […] de dépenses […]. / La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors […] qu'une dépense a été irrégulièrement payée […] » ; qu’aux termes de l’article 19 du décret du 7 novembre 2012 : « Le comptable public est tenu d'exercer le contrôle : […] 2° S'agissant des ordres de payer : […] d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à l'article 20 ; que, selon l’article 20 : « Le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur : […] 2° L'exactitude de la liquidation ; […] 5° La production des pièces justificatives. » ;
Attendu que selon l’article D.1617-19 du code général des collectivités territoriales : « Avant de procéder au paiement d’une dépense ne faisant pas l’objet d’un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales […] ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l’annexe I du présent code » ;
Attendu qu’aux termes de l’article 38 du décret du 7 novembre 2012 susvisé : « Sans préjudice des dispositions prévues par le code général des collectivités territoriales […], lorsqu'à l'occasion de l'exercice des contrôles prévus au 2° de l'article 19 le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe l'ordonnateur. Ce dernier a alors la faculté de requérir par écrit le comptable public de payer. » ;
Sur la présomption de charge n o 1
Attendu que l'annexe I mentionnée à l'article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales prévoit à la rubrique 21011 que le comptable doit disposer pour le premier paiement de la rémunération de la pièce suivante : « Acte d'engagement mentionnant : la référence à la délibération créant l'emploi ou à la délibération autorisant l'engagement pour les agents des services publics industriels et commerciaux, les contrats aidés ou les vacataires ; l'identité de l'agent, la date de sa nomination, et, le cas échéant, la durée de l'engagement ; les modalités de recrutement ; les conditions d'emploi (temps complet, non complet, partiel) et la quotité de temps de travail ; le grade, l'échelon, l'indice brut de traitement ou le taux horaire ou les modalités de la rémunération de l'agent » ;
Attendu que Mme X a payé le salaire d’un agent de la commune du mois de juillet 2013 d'un montant de 3 012,89 € par le mandat n o 6502 du 15 juillet 2013, sans disposer de l’acte d’engagement mentionné à la rubrique 210011 de la liste précitée ; qu’ainsi, elle a manqué aux obligations mentionnées au I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée et engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
Attendu que si le service fait par l’agent a été confirmé par l’ordonnateur, la somme payée par la comptable, en l’absence d’acte d’engagement, n’était pas due à la date du paiement ; qu’aucun acte d’engagement à caractère rétroactif pour le mois de juillet 2013 n’ayant été produit, il ne peut être établi que la comptable aurait dû payer cette somme ultérieurement ; qu’ainsi, le manquement de la comptable a causé un préjudice financier à la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines ;
Attendu qu'aux termes du troisième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 : « Lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné […], le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels, la somme correspondante » ; que, dans ce cas, il n’y a pas lieu de prendre en considération les circonstances de l’espèce, telles que les difficultés de gestion du poste comptable ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer Mme X débitrice de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines de la somme de 3 012,89 € au titre de l'exercice 2013 ;
Attendu qu'aux termes du VIII du même article : « Les débets portent intérêts au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu'en l'espèce, cette date est le 24 juin 2016, date de réception du réquisitoire par Mme X
Attendu qu’aux termes du deuxième alinéa du IX du même article : « Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du […] VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. Hormis le cas de décès du comptable ou de respect par celui-ci, sous l'appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée au comptable public dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise enjeu par le juge des comptes, le ministre chargé du budget étant dans l'obligation de laisser à la charge du comptable une somme au moins égale au double de la somme mentionnée au deuxième alinéa dudit VI » ; que, selon l’article 1er du décret du 10 décembre 2012 susvisé : « La somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré. » ;
Attendu que le montant du cautionnement du poste comptable de Saint-Quentin-en-Yvelines s’élevait en 2013 à 243 000 € ; que le paiement du salaire de l’agent municipal concerné ne relevant pas de l’application des règles du contrôle sélectif des dépenses, Mme X était tenue à un contrôle exhaustif ; que par suite, le ministre chargé du budget devra laisser à la charge de Mme X une somme au moins égale à 729 € au titre de la charge n°1 ;
Sur la présomption de charge n o 2
Attendu que l'annexe I mentionnée à l'article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales prévoit à la rubrique 210223 pour le paiement des primes et indemnités la production des pièces suivantes : 1. La décision de l'assemblée délibérante fixant la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités ; 2. La décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent ;
date | 16/01 | 14/02 | 7/03 | 15/04 | 16/05 | 14/06 | 15/07 | 1/08 | 12/09 | 11/10 | 13/11 | 09/12 |
N° mandat | 40 | 1070 | 2014 | 368 | 4360 | 5405 | 99 | 7182 | 8285 | 9120 | 10077 | 11441 |
Attendu que à Mme X a payé au cours de l'année 2013 par 12 mandats d’un montant de 2 580 euros, figurant dans le tableau ci-dessous, une prime informatique mensuelle de 516,02 € à cinq agents, représentant un montant total de 30 961,20 € ;
Attendu que, selon la délibération du comité syndical du syndicat d’agglomération nouvelle du 24 octobre 1979 décidant de l’attribution des primes informatiques : « les primes sont calculées à partir d'un taux moyen mensuel fixé au 1/10 000è du traitement brut annuel de l'indice brut 585, majoré de 25 % : I - Personnel du service informatique - 1 analyste programmeur bénéficiera de la prime de chef d'exploitation (...) - 1 analyste programmeur bénéficiera de la prime de chef programmeur (...). - opérateurs chargés également de saisir les informations, prime de dactylocodeur (...) II - Personnel des services utilisateurs : le personnel chargé d'effectuer les saisies des informations se verra attribuer la prime de dactylocodeur (...) ; que, par une délibération du 10 janvier 1985, le conseil syndical a décidé « de supprimer la fonction d'Analyste programmeur bénéficiant de la prime de Chef d'exploitation et de la remplacer par la fonction de Chef de Projet » et a prévu que « la prime de fonction du Chef de Projet sera versée au taux moyen » ;
Attendu que s’agissant de trois agents, ingénieurs principaux, exerçant leurs fonctions au service « système Information géographique » et au service « systèmes réseaux télécom », les décisions individuelles n’ont pas été produites ; que, s’agissant d’un quatrième agents, un arrêté du 2 mai 1983 porte sur la prime de dactylocodeur, alors qu'en 2013 l'intéressé a bénéficié de la prime de programmeur de système d'exploitation, pour un montant mensuel de 516,02 € ; que, s’agissant de ce dernier agent, ainsi que d’un cinquième agent, les attestations de réussite à l'examen de pupitreur et à celui de programmeur de système d'exploitation ne permettent pas de déterminer le montant des primes auquel elles peuvent prétendre ; qu’en outre, les délibérations précitées ne font pas mention des fonctions de pupitreur et de programmeur de système d'exploitation ;
Attendu qu'en payant ces dépenses sans disposer de la décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent, Mme X a manqué aux obligations mentionnées au I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, et a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ; que la circonstance que les agents concernés percevaient ces primes depuis de nombreuses années ne saurait exonérer Mme X de sa responsabilité ;
Attendu que, nonobstant la réalité du service fait, en l’absence des décisions individuelles requises, les primes versées n’étaient pas dues ; que, dans ces conditions, le manquement de Mme X a causé un préjudice financier à la communauté d’agglomération de Saint‑Quentin-en-Yvelines ; que lorsque le manquement a causé un préjudice financier à l’organisme public, il n’y a pas lieu de prendre en considération les circonstances de l’espèce, telles que les difficultés de gestion du poste comptable ; qu’ainsi, en application du troisième alinéa précité du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963, il y a lieu de constituer Mme X débitrice de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines de la somme de 30 961,20 €, au titre de l'exercice 2013 ; qu’en application du VIII précité du même article, ce débet portera intérêts au taux légal à compter du 24 juin 2016, date de réception du réquisitoire par Mme X
Attendu qu’en application du IX précité du même article 60, compte tenu de l’application des règles du contrôle sélectif des dépenses par Mme X au titre de la charge n°2, le ministre chargé du budget pourra laisser à la charge de Mme X une somme inférieure à 729 € ;
Par ces motifs,
Article 1 er : Mme X est constituée débitrice de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines pour la somme de 3 012,89 €, majorée des intérêts de droit à compter du 24 juin 2016. Le ministre chargé du budget devra laisser à la charge de Mme X une somme au moins égale à 729 €.
Article 3 : Mme X est constituée débitrice de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines pour la somme de 30 961,20 €, majorée des intérêts de droit à compter du 24 juin 2016. Le ministre chargé du budget pourra laisser à la charge de Mme X une somme au inférieure à 729 €.
Article 4 : Il est sursis à la décharge de Mme X pour sa gestion du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013, jusqu'à la constatation de l'apurement du débet et du paiement de la somme laissée à sa charge.
Fait et jugé par M. Alain Stéphan, président de section, président de séance, M. Jean‑Marc Dunoyer de Segonzac, premier conseiller, Mme Catherine Salmon, première conseillère.
En présence de Mme Marie-Christine Bernier-Liparo, greffière de séance.
Marie-Christine Bernier-Liparo, Alain Stéphan,
auxiliaire de greffe président de section,
En conséquence, la République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d'y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu'ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-14 à R. 242-16 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d'appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-17 à R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l'étranger. La révision d'un jugement peut être demandée après expiration des délais d'appel, et ce dans les conditions prévues à l'article R. 242-26 du même code.
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