rapport n° 2017-0173

commune de samoens

jugement n° 2017-0037

trésorerie de taninges-samoêns

audience publique du 5 septembre 2017

code n° 074029258

délibéré du 5 septembre 2017

Exercice 2013

prononcé le : 29 septembre 2017

 

 

 

République française

 

Au nom du peuple français

 

La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-ALPES
(Statuant en 5eme section)

 

Vu le réquisitoire 14-GP/2017 à fin d’instruction de charge pris le 21 mars 2017 par le procureur financier près la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes ;

Vu les courriers de notification du réquisitoire adressés le 26 avril 2017 à M. Claude X..., comptable concerné, et à M. Jean-Jacques Y..., maire de SAMOENS, dont ils ont accusé réception respectivement le 28 et le 27 avril 2017 ;

VU le code général des collectivités territoriales ;

VU le code monétaire et financier ;

VU le code des juridictions financières ;

VU l’article 60 de la loi de finances pour 1963 n° 63-156 du 23 février 1963, modifiée notamment par l’article 90 de la loi de finances rectificative n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;

VU le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

VU l’arrêté du 12 décembre 2012 relatif à l’instruction budgétaire et comptable M14 applicable aux communes et aux établissements publics communaux et intercommunaux à caractère administratif ;

VU les arrêtés de la présidente de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes relatifs aux attributions, à la composition et aux compétences des sections et des formations de délibéré ;

VU les arrêtés de la présidente de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes portant délégation de signature au président de la 5ème section ;

VU la décision 48-D du 26 avril 2017 du président de la 5ème section de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, désignant Mme Sandrine FAIVRE-PIERRET, premier conseiller, comme rapporteur pour instruire la charge identifiée dans le réquisitoire susvisé ;

VU les questionnaires adressés le 12 mai 2017 à M. Claude X..., comptable concerné, et à M.  Jean-Jacques Y..., maire de SAMOENS, dont ils ont accusé réception les 13 et 15 mai 2017 ;

VU les observations écrites de M. Claude X... comptable concerné, datées du 6 juin 2017 et enregistrées au greffe le 9 juin 2017 ;

VU les comptes produits en qualité de comptable de la commune de SAMOENS par M. Claude X... pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 ;

VU le rapport n° 2017-0173 de Mme Sandrine FAIVRE-PIERRET, premier conseiller, magistrat instructeur, déposé au greffe de la chambre le 30 juin 2017 ;

VU les lettres du 3 juillet 2017 informant le comptable et l’ordonnateur de la clôture de l’instruction ;

VU les lettres du 7 août 2017 informant le comptable et l’ordonnateur de la date fixée pour l’audience publique et les accusés de réception correspondants délivrés le 8 août 2017 par M. Claude X... et le 8 août 2017 par M. Jean-Jacques Y... ;

Vu les conclusions n° 17-173 du procureur financier en date du 12 juillet 2017 ;

Entendu en audience publique Mme Sandrine FAIVRE-PIERRET, premier conseiller, en son rapport ;

Entendu en audience publique Mme Marie-Odile ALLARD, procureur financier, en ses conclusions ;

En l’absence du comptable en cause et de l’ordonnateur, dûment informés de la tenue de l’audience ;

Après avoir délibéré hors la présence du public, du rapporteur et du procureur financier ;

 

 

En ce qui concerne la charge unique relative à l’absence de régularisation d’un chèque impayé d’un montant de 1 253,95 €, par M. Claude X... sur l’exercice 2013

Sur les réquisitions du ministère public, 

Attendu qu’en son réquisitoire, le procureur financier rappelle qu’aux termes des dispositions du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 : « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes,(), la responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté… » ; qu’il rappelle également qu’aux termes de l’article 19 du décret 2012-1246 du 7 novembre 2012, « le comptable public est tenu d'exercer le contrôle : 1° S'agissant des ordres de recouvrer : (… ) b) Dans la limite des éléments dont il dispose, de la mise en recouvrement des créances et de la régularité des réductions et des annulations des ordres de recouvrer » ;

Attendu que le représentant du ministère public relève que l’état de développement des soldes du compte 51172 « chèques impayé » actualisé à la date du 15 novembre 2016 fait apparaître la prise en charge en comptabilité à la date du 25 avril 2013 d’un chèque impayé de 1 253,95€ au nom de D. C. ;

Attendu que le procureur financier relève que ce chèque non encaissable est assimilable à une non-valeur et donc à un manquant en deniers, imputable à l’inaction du comptable ;

Attendu que le procureur financier conclut de ce qui précède que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Claude X... a pu être engagée pour un montant de 1 253,95 € sur l’exercice 2013, pour n’avoir pas engagé d’action pour régulariser un chèque impayé et qu’il se trouverait ainsi dans le cas prévu par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 ; qu’il y a lieu en conséquence d’ouvrir l’instance prévue au III de l’article L. 242-1 du code des juridictions financières, aux fins de déterminer les responsabilités encourues ;

Sur les observations des parties,

Attendu que, dans sa réponse du 6 juin 2017, enregistrée au greffe le 9, M. Claude X... au indique qu’après avoir contacté le chef de poste de Taninges-Samoëns, il n’a pas reçu d’autre renseignement que le nom et l’adresse du détenteur du chèque ; qu’il précise qu’il n’y a pas eu d’émission de titre de recette exécutoire ; qu’il ajoute que la charge de travail et le déficit chronique en personnel de ce poste qu’il a géré pendant huit ans ne lui a pas permis d’effectuer tous les contrôles nécessaires à la régularisation des comptes ; qu’il n’apporte aucune réponse aux questions posées sur la date d’émission du chèque en question, la nature de la créance concernée et le motif de l’absence de paiement du chèque ; qu’il ne répond pas non plus à la demande de précision s’il s’agissait d’un chèque remis à un régisseur de recettes, comme il semble ressortir de la mention du compte « 47118- versements des régisseurs » sur l’état de développement des soldes et qu’il n’a pas fourni le titre de recettes récapitulatif qui lui était demandé ;

Attendu que M. Jean-Jacques Y..., maire de SAMOENS, n’a pas formulé d’observations ;

 

Sur la charge présumée,

Attendu que la présomption de charge formulée par le procureur financier en son réquisitoire porte sur l’absence de régularisation d’un chèque impayé d’un montant de 1 253,95 € sur l’exercice 2013, conformément à l’état de développent des soldes actualisés au 15 novembre 2016, que ce chèque non encaissable est assimilable à une non-valeur et donc à un manquant en deniers imputable à l’inaction du comptable ;

 

Sur la règlementation relative à l’émission et au paiement des chèques,               

Attendu que l’article L. 131-32 du code monétaire et financier dispose que « le chèque émis et payable dans la France métropolitaine doit être présenté au paiement dans le délai de huit jours » ; que « le point de départ des délais indiqués (…) est le jour porté sur le chèque comme date d'émission » ; que l’article L. 131-59 du même code précise que « (…) l'action du porteur du chèque contre le tiré se prescrit par un an à partir de l'expiration du délai de présentation » ; qu’il résulte de ces dispositions que la validité d’un chèque en métropole est d’un an et huit jours après son émission ; que le comptable public à qui un chèque a été remis dispose alors d’un délai d’un an et huit jours après l’émission du chèque pour agir auprès de l’organisme bancaire pour obtenir son paiement ;

 

 

Sur les obligations du comptable,

 

Attendu que l’article 18 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique stipule que « dans le poste comptable qu'il dirige, le comptable public est seul chargé (…) 4° De la prise en charge des ordres de recouvrer et de payer qui lui sont remis par les ordonnateurs ; 5° Du recouvrement des ordres de recouvrer et des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou tout autre titre exécutoire ; 6° De l'encaissement des droits au comptant et des recettes liées à l'exécution des ordres de recouvrer (…) » ; que l’article 19 du même texte indique que « le comptable public est tenu d'exercer le contrôle : 1° S'agissant des ordres de recouvrer : (… ) b) Dans la limite des éléments dont il dispose, de la mise en recouvrement des créances et de la régularité des réductions et des annulations des ordres de recouvrer ».

 

Attendu que larrêté du 12 décembre 2012 relatif à l’instruction budgétaire et comptable M14 applicable aux communes indique que « le compte 51172 « Chèques impayés » est destiné à suivre les chèques impayés ayant donné lieu à crédit immédiat ; leur régularisation doit intervenir dans les meilleurs délais (…) S’il n’y a pas régularisation, l’apurement du compte 51172 est effectué dans les conditions suivantes : le règlement d’un chèque n’entraînant pas novation, le non-paiement d’un chèque pour défaut de provision laisse subsister la créance d’origine. Aussi, le redevable se trouve placé vis-à-vis de la collectivité ou de l’établissement public, dans la même situation que celle qu’il avait lors du versement du chèque ; l’opération est purement et simplement annulée en constatant une écriture de débit au compte de prise en charge du titre, crédité à l’origine par le crédit du compte 51172 » ; qu’il résulte de ce qui précède qu’en cas de chèque impayé, il appartient au comptable de représenter le chèque dans le délai de prescription de l’action du porteur contre le tiré, soit un an et huit jours après l’émission du chèque, et, si la situation n’est pas régularisée, le comptable doit alors annuler les écritures de constatation de l’apurement de la créance en créditant le compte de redevable par débit du compte 51172, de façon à ramener le débiteur dans la situation antérieure à l’émission du chèque impayé et permettre au comptable d’effectuer les diligences nécessaires au recouvrement de la créance ;

 

 

Sur la responsabilité du comptable au titre de l’absence de régularisation d’un chèque impayé,

Attendu que l’absence d’encaissement de la somme correspondant au montant du chèque constitue un manquant en caisse ;

Attendu que dans sa réponse le comptable n’a pas été en mesure d’indiquer la nature de la créance concernée ni de préciser s’il s’agissait d’un chèque remis à un régisseur de recettes comme il ressort de la mention du compte « 47118- versements des régisseurs » sur l’état de développement des soldes ; que quelles que soient les circonstances précises, il résulte de l’inscription de ce chèque dans les comptes de la commune qu’il a été bien été pris en charge par le comptable ; que par conséquent, dès le rejet du chèque, le comptable devait effectuer les actions de régularisation envers la banque dans les meilleurs délais, et, en tout état de cause, dans le délai de prescription de l’action contre l’établissement bancaire ;

Attendu que ni la date d’émission du chèque ni sa date de prise en charge par le comptable ne sont connues ; que la date exacte de la prescription de l’action du comptable envers la banque ne peut donc être connue avec précision ; que le chèque a nécessairement été émis avant son inscription au compte 51172, c’est-à-dire avant le 25 avril 2013 ; qu’ainsi, en tout état de cause, la prescription de l’action du comptable est intervenue au maximum un an et huit jours après cette date, soit le 2 mai 2014 ; qu’en pratique, compte tenu des délais d’enregistrement comptable au compte 51172, de traitement du chèque par la banque et de la notification de son rejet, de présentation du chèque à la banque par le comptable, de prise en charge du chèque par le comptable et de versement du chèque par le régisseur de recettes, la date d’émission du chèque ne peut raisonnablement se situer après les premiers jours d’avril 2013 ; que, par conséquent, la prescription de l’action du comptable envers la banque n’a pu intervenir après les premiers jours d’avril 2014 ;

 

Attendu qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour des comptes que « la responsabilité peut être sanctionnée dès lors qu’il est établi que le comptable n’a pas fait de diligences suffisantes pour le recouvrement et sans qu’il y ait lieu d’attendre que la recette soit devenue irrécouvrable que les diligences doivent être regardées comme insuffisantes lorsqu'il peut être établi qu'à défaut d'avoir été adéquates, complètes et rapides, les possibilités de recouvrement ont été, de ce fait, compromises » (Cour des comptes 4ème ch, hôpital local de Beaumont sur Sarthe, 18 mai 2017) ;

Attendu qu’au 31 décembre 2013 la date de prescription de l’action du comptable n’était pas atteinte ; qu’en 2013 le comptable n’avait donc pas épuisé les voies de recouvrement de la somme correspondant au montant du chèque, que par conséquent il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité du comptable sur sa gestion au cours de l’exercice 2013.

Par ces motifs,

Décide

Article 1 :

Il est prononcé un non-lieu à charge au bénéfice de M. Claude X... au titre de l’absence de régularisation d’un chèque impayé d’un montant de 1 253,95 € visée par le réquisitoire du 21 mars 2017 du procureur financier près la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes ;

 

Article 2 :

M. Claude X... est déchargé de sa gestion de la commune de SAMOENS pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013.

 

 

Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, en section, le cinq septembre deux mille dix-sept.

Présents : M. Antoine BOURA, président de section, présidente de séance ;

 M. Michel BON, premier conseiller, M. Joris MARTIN, conseiller.

 

 

 

la greffière

le président de séance

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Corinne VITALE-BOVET

Antoine BOURA

 


 

En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.

 

1/6 – jugement n° 2017-0037