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1ère section

Jugement 2017-0003

 

Audience publique du 3 mars 2017

 

Prononcé du 3 avril 2017

Centre Hospitalier de Guéméné-sur-Scorff (Morbihan)

 

Poste comptable : trésorerie de Guémené-sur-Scorff 

 

Exercices 2011 à 2013

 

 

 

République Française

Au nom du peuple français

 

La chambre,

 

 

Vu le réquisitoire du 5 février 2016 par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, comptable du centre hospitalier de Guémené-sur-Scorff au titre d’opérations relatives aux exercices 2011 à 2013, notifié le 17 février 2016 au comptable concerné ;

 

Vu les comptes rendus en qualité de comptable du centre hospitalier de Guémené-sur-Scorff, par M. X, du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 ;

 

Vu l’arrêté de délégation de la Cour des comptes du 1er juin 2010, relatif au jugement des comptes de certaines catégories d’établissements publics de santé par les chambres régionales des comptes ;

 

Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

 

Vu le code des juridictions financières ;

 

Vu le code général de la santé publique ;

 

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique alors en vigueur et le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

 

Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

 

Vu le rapport de M. Thierry Boutoute, premier conseiller, magistrat chargé de l’instruction ;

 

Vu les conclusions du procureur financier ;

 

Vu les pièces du dossier ; 

 

Entendu lors de l’audience publique du 3 mars 2017 M. Thierry Boutoute, premier conseiller en son rapport, M. Patrick Prioleaud, en ses conclusions, et M. X, comptable, ayant eu la parole en dernier ; 

 

 

 

 

Sur la présomption de charge unique, soulevée à l’encontre de M. X, au titre de l’exercice 2013 :

 

Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes de Bretagne de la responsabilité encourue par M. X pour avoir manqué, en sa qualité de comptable du centre hospitalier de Guémené-sur-Scorff, à l’obligation qui lui incombait d’effectuer des diligences adéquates, complètes et rapides pour le recouvrement de trois titres de recettes, émis à l’encontre de la caisse des dépôts pour 1 215,89 € et 4 068,86 € et à l’encontre du conseil départemental du Morbihan pour 3 158,11 €, pris en charge le 31 décembre 2007 et restant à recouvrer dans ses comptes au 31 décembre 2013 ; que pour les deux premiers titres, de simples lettres de rappel, actes non interruptifs de la prescription, auraient été adressées le 11 avril 2008, et suivies de mises en demeure les 17 et 18 juillet 2013, soit postérieurement à la prescription des créances intervenue le 31 décembre 2011 ; que pour le troisième titre, après une simple lettre de rappel le 22 août 2008, une mise en demeure aurait été adressée le 20 novembre 2008 sans toutefois qu’aucun élément probant ne permette d’attester la notification de cet acte au débiteur et l’interruption du délai de prescription ;

 

Sur le manquement :

 

Attendu quen réponse au réquisitoire du procureur financier, le comptable fait valoir, s’agissant des titres à l’encontre de la caisse des dépôts, qu’ils concernent le « Fonds emploi hospitalier » et sont émis après encaissement ; qu’au fur et à mesure des encaissements, le comptable enregistre les recettes perçues sur un état P. 503 qu’il adresse ensuite à l’ordonnateur en vue de l’émission des titres ; qu’en outre, au cas d’espèce, les titres ont par erreur été émis deux fois et ont fait l’objet d’une annulation par l’ordonnateur par un mandat du 2 novembre 2016 ; s’agissant du titre émis à l’encontre du conseil départemental du Morbihan, le comptable fait valoir qu’il a été réglé par le débiteur au cours de l’exercice 2016 ;

 

Attendu que dans sa réponse l’ordonnateur confirme que les titres sur la caisse des dépôts ont été émis en double et ont fait l’objet d’une annulation, et que la créance à l’encontre du conseil départemental du Morbihan a été soldée en 2016 ;

 

Attendu que, dans ses conclusions, le procureur financier, fait valoir que si des opérations de régularisation des trois titres en cause ont été constatées, elles l’ont été au cours de l’instruction, soit près de quatre ans après la prescription de l’action en recouvrement ; qu’en tout état de cause le comptable n’a pas démontré avoir effectué des diligences adéquates, complètes et rapides pour suivre les créances, et que par son inaction, il n’a pas satisfait aux obligations qui lui incombaient au sens des dispositions de l’article L. 1617-5-3° du CGCT ;

 

Attendu qu’              aux termes du I de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 : « (…) les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes (…), de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique. La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu'un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu'une recette n'a pas été recouvrée (…) » ;

 

Attendu qu’il résulte de l’instruction que trois titres de recettes pris en charge par le comptable le 31 décembre 2007 restaient à recouvrer au 31décembre 2013 ; que le comptable a adressé de simples lettres de rappel puis des mises en demeure, postérieures à la date de prescription pour deux titres émis à l’encontre de la caisse de dépôts, et sans produire la preuve de la réception par le débiteur pour le troisième titre, émis à l’encontre du conseil départemental du Morbihan ;

 

Attendu que les titres de recettes à l’encontre de la caisse des dépôts et consignations ont été émis le 31 décembre 2007 puis réémis par erreur en double en 2008 ; qu’en tout état de cause, s’agissant de recettes perçues avant émission des titres, ces derniers n’ont pas pour contrepartie une créance qui resterait à régler par un tiers mais un encaissement d’ores et déjà enregistré, en attente dans les comptes de l’établissement ; que par suite, aucun manquement à l’obligation de recouvrement des recettes n’est constitué ;

 

 

 

Attendu que pour le titre de recettes à l’encontre du conseil départemental du Morbihan pris en charge le 31 décembre 2007, hormis une lettre de rappel le 22 août 2008 et une mise en demeure le 20 novembre 2008 dont il n’a d’ailleurs pas apporté la preuve de leur réception par le débiteur, le comptable ne fait état d’aucune diligence, la créance en cause figurant toujours dans les comptes du centre hospitalier au 31 décembre 2013 ; qu’ainsi, le comptable, qui ne justifie pas avoir effectué des diligences adéquates, complètes et rapides en vue du recouvrement du titre, a commis un manquement de nature à engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire sur le fondement du I de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ;

 

 

Sur le préjudice financier :

 

Attendu qu’en réponse au réquisitoire du procureur financier, le comptable fait valoir qu’au cours de l’exercice 2016, deux des titres en cause ont été annulés car ils avaient été émis en double et le troisième a été soldé par le débiteur, ce que l’ordonnateur a confirmé ;

 

Attendu que, dans ses conclusions, le procureur financier est d’avis qu’aucun préjudice financier n’a été causé à la collectivité, les recettes ayant été encaissées avant l’émission des titres ou au cours de l’instruction ;

 

Attendu que le comptable a apporté la preuve du recouvrement au cours de l’exercice 2016 du titre de recettes émis à l’encontre du conseil départemental du Morbihan ; qu’en conséquence son manquement n’a pas causé de préjudice financier au centre hospitalier de Guémené-sur-Scorff ;

 

Attendu qu’aux termes du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 : « Lorsque le manquement du comptable […] n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ;

 

Attendu toutefois, eu égard aux circonstances, notamment au mode de gestion de ce type de créances et à la nature du débiteur, qu’il n’y a pas lieu d’imposer au comptable une somme à acquitter au titre du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 ;

 

 

Par ces motifs,

 

 

DÉCIDE :

 

 

Article 1er :

 

Au titre de l’exercice 2013, pour les titres n° 1668 et 7004001021000 du 31 décembre 2007 émis à l’encontre de la caisse des dépôts et consignations :

 

Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de M. X.

 

Article 2 :

 

Au titre de l’exercice 2013 pour le titre n° 700400102042 du 31 décembre 2007 émis à l’encontre du conseil départemental du Morbihan :

 

Le manquement du comptable n’a pas causé de préjudice financier au centre hospitalier. Au vu des circonstances, il n’y a pas lieu d’obliger M. X à s’acquitter d’une somme en vertu du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963.

 

 

 

 

Article 3 :

 

M. X est déchargé de sa gestion pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013.

 

 

Fait et jugé par Mme Francine Dosseh, présidente de séance ; M. Michel Zinger, premier conseiller, M. Thomas Roche, premier conseiller.

 

En présence de Mme Annie Fourmy, greffière de séance.

 

 

Signé de la greffière de séance

Annie FOURMY

 

Signé de la présidente de séance

Francine DOSSEH

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.[1]

 

 

 

La secrétaire générale

 

 

 

 

                     Catherine PELERIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En application des articles R. 242-14 à R. 242-16 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-17 à R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-26 du même code.

 

 

 

 

 

 

3, rue Robert d'Arbrissel - C.S. 64231 - 35042 Rennes Cedex - www.ccomptes.fr

 

 


[1] Sauf si non-lieu à charge