rapport n° 2017-304

Centre communal d’action sociale d’aix- les- bains
(savoie)

jugement n° 2017-0048

trésorerie daix-les-bains

audience publique du 16 novembre 2017

code n° 073048999

délibéré du 16 novembre 2017

exercice 2012

prononcÉ le : 07 decembre 2017

 

République française

 

Au nom du peuple français

 

La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-ALPES
(Statuant en 5èmesection)

 

Vu le réquisitoire n° 37-GP/2014 à fin d’instruction de charge pris le 13 novembre 2014 par le procureur financier près la chambre régionale des comptes d’Auvergne, RhôneAlpes ;

Vu les courriers de notification du réquisitoire en date du 3 décembre 2014 adressés à M. Michel X..., comptable concerné, et à M. Dominique Y..., président du centre communal d’action sociale d’Aix-les-Bains, dont ils ont accusé réception le 8 décembre 2014 ;

VU le code général des collectivités territoriales ;

VU le code des juridictions financières ;

VU l’article 60 de la loi de finances pour 1963 n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée, notamment par l’article 90 de la loi de finances rectificative n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;

VU le décret n°1962-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

VU le jugement n°2015-244 du 14 janvier 2016 de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes ;

VU l’arrêté du président de la cinquième section de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes en date du 10 février 2017, désignant M. Bruno VIETTI, président de section, comme rapporteur pour instruire la charge identifiée dans le réquisitoire susvisé ;

VU l’arrêté du président de la cinquième section de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes en date du 2 juin 2017, désignant M. Joris MARTIN, conseiller, comme rapporteur pour instruire la charge identifiée dans le réquisitoire susvisé en remplacement de M. Bruno VIETTI, appelé à d’autres fonctions ;

 

VU la demande d’informations adressée le 30 juin 2017 à M. Michel X..., comptable mis en cause ;

VU les observations écrites de M. Michel X... en date du 14 septembre 2017, enregistrées au greffe de la juridiction le 19 septembre suivant ;

VU le compte produit en qualité de comptable du centre communal d’action sociale d’Aix-les-Bains par M. Michel X... sur l’exercice 2012 ;

VU le rapport n° 2017-0304 de M. Joris MARTIN, conseiller, magistrat instructeur, déposé au greffe de la chambre le 11 octobre 2017 ;

VU les lettres du 17 octobre 2017 informant le comptable concerné et l’ordonnateur de la clôture de l’instruction ;

VU les lettres du 23 octobre 2017 informant la comptable et l’ordonnateur de la date fixée pour l’audience publique et les accusés de réception délivrés le 24 octobre par M. Michel X... et M. Dominique Y... ;  

Vu les conclusions n° 17-304 du procureur financier en date du 18 octobre 2017 ;

Entendu en audience publique M. Joris MARTIN, conseiller, en son rapport et M. Denis LARRIBAU, procureur financier, en ses conclusions ;

En l’absence de l’ordonnateur et du comptable dûment informés de la tenue de l’audience ;

Après avoir délibéré hors la présence du public, du rapporteur et du procureur financier ;

 

En ce qui concerne le sursis à statuer prononcé par le jugement n°2015-244 et la reprise de l’instruction

Attendu que par le jugement n°2015-244 du 14 janvier 2016, la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a sursis à statuer sur l’instance juridictionnelle ouverte par le réquisitoire n°37-GP/2014 et a demandé un complément d’instruction afin, d’une part, d’examiner et d’analyser pour chacun des dix-neuf mandats visés par la présomption de charge, la teneur des dossiers de mandatement constituée à l’appui, en vue de permettre d’apprécier l’insuffisance des pièces justificatives et, d’autre part, de rassembler les éléments afférents à la qualité du signataire des bordereaux de mandats, conditionnant la justification du service fait et l’attestation du caractère exécutoire des pièces justificatives;

Attendu que suite à la reprise de l’instruction, M. X... a transmis à la chambre un arrêté de délégation pris par le maire d’Aix-les-Bains au profit de M. Georges Z... en tant qu’adjoint au maire ; que M. X... a également indiqué ne pas avoir obtenu de réponse de l’ordonnateur sur le point de savoir si un arrêté de délégation avait été pris par le maire en sa qualité de président du centre communal d’action sociale (CCAS) d’Aix-les-Bains ;

Attendu qu’une fois ces éléments de réponses recueillis, il y a lieu pour la chambre de se prononcer au fond sur l’instance ouverte par le réquisitoire n°37-GP/2014 ;

 

 

En ce qui concerne la charge unique relative au paiement d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires sur l’exercice 2012 à des agents titulaires et non-titulaires en l’absence d’une délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires pour un montant total de 9 852,26 €

Sur les réquisitions du ministère public,

Attendu que par le réquisitoire n° 37-GP/2014 du 13 novembre 2014, le procureur financier près la chambre régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-Alpes a saisi la juridiction sur le fondement du § III de l’article L. 242-4 du code des juridictions financières, à fin d’ouverture d’une instance à l’encontre de M. Michel X... au titre de sa gestion comptable sur l’exercice 2012 du CCAS d’Aix-les-Bains ;

Attendu qu’en son réquisitoire, le procureur financier relève que le comptable public mis en cause a payé des indemnités horaires pour travaux supplémentaires via dix-neuf mandats de janvier à décembre 2012, à des agents titulaires et non-titulaires en l’absence d’une délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires, comme l’exige le premier point de la rubrique 210224 « indemnités horaires pour travaux supplémentaires » de la liste des pièces justificatives des dépenses du secteur public local annexée à l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales ;              

Attendu que le procureur conclut de ce qui précède qu’en l’absence des pièces justificatives devant être jointes à l’appui des mandats de paiement en application de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, M. Michel X... paraît avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ; qu’il se trouverait ainsi dans le cas déterminé par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et qu’il y a lieu, en conséquence, d’ouvrir l’instance prévue au § III de l’article L. 242-4 du code des juridictions financières aux fins de déterminer la responsabilité encourue ;

 

Sur les observations de M. Michel X..., comptable mis en cause,

Attendu que par ses observations écrites en date du 9 mars 2015, produites lors de la première phase de l’instruction, M. X... fait valoir que si la délibération relative aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires ne fixe pas de façon détaillée la liste des corps, grades, emplois et fonctions, elle n’en demeure pas moins parfaitement explicite sur la volonté de l’établissement public d’accorder des indemnités horaires pour travaux supplémentaires aux agents de catégorie C et B, toutes filières confondues pour les agents titulaires et non titulaires ;

Sur la responsabilité du comptable,

Attendu qu’en ce qui concerne les points objet du sursis à statuer, il ressort de l’instruction que les bordereaux de mandats litigieux ont pu être signé par une personne ne disposant pas d’une délégation de la part du président du CCAS d’Aix-les-Bains ; que toutefois, il n’appartient pas au rapporteur, conformément aux dispositions de l’article L242-4 du code des juridictions financières, de se prononcer sur un manquement présumé n’entrant pas dans le champ des réquisitions du procureur financier ; qu’au cas d’espèce, la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable ne peut être engagée, conformément au réquisitoire du procureur financier, que pour un manquement à ses obligations de contrôler la production des pièces justificatives prévues par la nomenclature et non pas pour le défaut de qualité du signataire des bordereaux de mandats  ;

Attendu qu'aux termes de l'article 60-1 modifié de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables (…) du paiement des dépenses, (…) de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité » ; que « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière (…) de dépenses» ; que leur « responsabilité personnelle et pécuniaire prévue (ci-dessus) se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;

Attendu que l’article 13 du décret n°1962-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, « qu’en ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur : la justification du service fait et l’exactitude des calculs de la liquidation (…) l’intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications… » ;

Attendu qu’il résulte de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, qu’avant de procéder au paiement d'une dépense ne faisant pas l'objet d'un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l'annexe I du présent code ; que, pour ce qui concerne les indemnités horaires pour travaux supplémentaires, la rubrique 210224 « indemnités horaires pour travaux supplémentaires » prévoit notamment la production d’une délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ;

Attendu qu’il ressort de l’instruction que la délibération du 20 juin 2011 du conseil d’administration du CCAS d’Aix-les-Bains relative au régime indemnitaire dispose que tous les agents des catégories C et B peuvent prétendre à l’indemnité horaires pour travaux supplémentaires ;

Attendu qu’une telle délibération globalisante ne satisfait pas aux exigences de la nomenclature des pièces justificatives, à défaut de comporter une véritable liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ; qu’il y a donc lieu de caractériser l’existence d’un manquement du comptable ;

Attendu que le comptable mis en cause conteste l’existence d’un manquement du fait du caractère insuffisant de ladite délibération ; que toutefois, la liste des pièces justificatives fixe le maximum et le minimum exigible par le comptable pour chaque catégorie de dépenses ; qu’elle s’impose au comptable public et à l’ordonnateur comme au juge des comptes ; que la caractérisation d’un manquement obéit à des considérations purement objectives ;

Attendu qu’en procédant à la prise en charge des mandats litigieux portant paiement d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires, sans disposer de la pièce justificative prévue par la nomenclature des pièces justificatives et sans s’assurer de l’exactitude de la liquidation, M. Michel X... a manqué à ses obligations de contrôle de la validité de la créance, telles que définies par l’article 13 du décret portant règlement général sur la comptabilité publique précité ; que sa responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve ainsi engagée à hauteur de 9 852,26 ;

Sur le préjudice financier pour le centre communal d’action sociale d’Aix-les-Bains,

Attendu que l’article 60-VI de la loi du 23 février 1963, modifié par la loi n° 20111978 du 28 décembre 2011, dispose que, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce » ;

Attendu que le décret n°91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l’application du premier alinéa de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant disposition statutaires relatives à la fonction publique territoriale, modifié notamment par le décret n°2008-145 du 22 décembre 2008, dispose dans son article 1, que « le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et les conseils d’administrations des établissements publics locaux pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l’Etat exerçant des fonctions équivalentes (…) »

Attendu que l’article 2 du même décret précise que « l’assemblée délibérante de la collectivité ou le conseil d’administration de l’établissement fixe, dans les limites prévues à l’article 1er, la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements. L’organe compétent fixe, notamment, la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ouvrant droit aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires » ;

Attendu ainsi qu’en exigeant une délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires, la nomenclature reprend les exigences du décret n°91-875 du 6 septembre 1991, selon lequel l’organe délibérant doit fixer une liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ; que dès lors, une référence à des catégories de la fonction publique, des échelons, des grades ou des filières est insuffisante ;

Attendu que les paiements d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires en l’absence d’une délibération répondant aux exigences de la nomenclature des pièces justificatives revêtent un caractère, non seulement irrégulier, mais également indu ; qu’en effet, à défaut d’une délibération complète et précise, la volonté de l’assemblée délibérante, seule compétente pour désigner les catégories d’agents pouvant bénéficier des indemnités, ne saurait être présumée ;

Attendu que ni l’affirmation de l’ordonnateur selon laquelle la l’établissement public n’a pas subi de préjudice financier, ni la certification du service fait ne font obstacle à la caractérisation de l’existence d’un préjudice financier ;

Attendu ainsi, qu’il y a lieu, en conséquence, de prononcer un débet à l’encontre de M. Michel X..., et de mettre à sa charge une somme de 9 852,26 € sur l’exercice 2012 ; qu’en application des dispositions de l’article 60-IX de la loi précitée du 23 février 1963, ledit débet de 9 852,26 € porte intérêts de droit à compter de la notification du réquisitoire intervenue à la date du 8 décembre 2014 ;

 

En ce qui concerne le respect du plan de contrôle hiérarchisé de la dépense

Attendu que le comptable mis en cause a produit le plan de contrôle hiérarchisé de la dépense relatif à la paye applicable sur l’exercice 2012 ;

Attendu que les indemnités horaires pour travaux supplémentaires ne font pas partie des thèmes retenue par ce plan de contrôle ; que de plus, il ne ressort nullement des fiches de paye produites à l’appui du réquisitoire que des agents aient bénéficié du paiement d’indemnités d’horaires pour travaux supplémentaires sur leur mois d’entrée ou lors d’un mois correspondant à un changement d’échelon ; que dès lors ce plan de contrôle ayant été respecté, le ministre chargé du budget dispose de la possibilité d’accorder une remise gracieuse totale du débet prononcé ;

 

PAR CES MOTIFS

DECIDE

 

Article 1 :

M. Michel X... est constitué débiteur envers le Centre communal d’action sociale du d’Aix-les-Bains d’une somme de 9 852,26 € sur l’exercice 2012, augmentée des intérêts de droit calculés au taux légal à compter de la date du 8 décembre 2014 de notification de réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale des comptes ;

 

Article 2 :

M. Michel X... ne pourra être déchargé de sa gestion du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 qu’après avoir justifié de l’apurement du débet mis à sa charge.

 

Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, 5èmesection, le seize novembre deux mille dix-sept.

 

Présents : M Alain LAIOLO, président de section, président de séance ; 

M. Michel BON, premier conseiller ;

M. Jennifer EL-BAZ, conseillère.

 

 

La greffière

Le président de séance

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Corinne VITALE-BOVET

Alain LAÏOLO

 

 

 

En conséquence, la République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.

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