rapport n° 2017-0272

Centre communal d’action sociale du Puy-en-Velay
(Haute-Loire)

jugement n° 2017-0049

trésorerie du Puy-en-Velay

audience publique du 16 novembre 2017

code n° 043023991

délibéré du 16 novembre 2017

exercices 2008 à 2012

prononcÉ le : 08 decembre 2017

 

République française

 

Au nom du peuple français

 

La chambre régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-ALPES
(Statuant en 5èmesection)

 

Vu le réquisitoire n° 27-GP/2014 à fin d’instruction de charge pris le 9 septembre 2014 par le procureur financier près la chambre régionale des comptes d’Auvergne-RhôneAlpes ;

Vu les courriers de notification du réquisitoire en date du 24 septembre 2014 adressés à M. Jean-Luc X..., M. Paul Y... et Mme Michèle Z..., ainsi qu’à M. Laurent A..., président du centre communal d’action sociale du Puy-en-Velay, dont ils ont accusé réception le 25 septembre 2014 pour M. X... et M. A... et le 26 septembre 2014 pour M. Y... et Mme Z... ;

VU le code général des collectivités territoriales ;

VU le code des juridictions financières ;

VU l’article 60 de la loi de finances pour 1963 n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée, notamment par l’article 90 de la loi de finances rectificative n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;

VU le décret n° 1962-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

VU le jugement n° 2015-134 du 14 janvier 2016 de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes ;

VU l’arrêté du président de la cinquième section de la chambre régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-Alpes en date du 15 février 2017, désignant M. Joris MARTIN, conseiller, comme rapporteur pour instruire les cinq charges identifiées dans le réquisitoire susvisé ;

VU la demande d’informations adressée le 30 juin 2017 à M. Michèle Z..., comptable mise en cause ;

VU les observations écrites de Mme Z... en date du 30 août 2017, enregistrées au greffe de la juridiction le 5 septembre 2017 ;

VU le compte produit en qualité de comptable du centre communal d’action sociale du Puy-en-Velay au titre des exercices 2008 à 2012, pour la période du 1er janvier au 31 août 2008 par M. X..., du 1er septembre 2008 au 2 novembre 2008 par M. Y... et du 3 novembre 2008 au 31 décembre 2012 par Mme Z... ;

VU le rapport n° 2017-0272 de M. Joris MARTIN, conseiller, magistrat instructeur, déposé au greffe de la chambre le 4 octobre 2017 ;

VU les lettres du 9 octobre 2017 informant les comptables concernés et l’ordonnateur de la clôture de l’instruction ;

VU les lettres du 17 octobre 2017 informant les comptables et l’ordonnateur de la date fixée pour l’audience publique et les accusés de réception délivrés le 18 octobre 2017 par les parties ;  

Vu les conclusions n° 17-272 du procureur financier en date du 10 octobre 2017 ;

Entendu en audience publique M. Joris MARTIN, conseiller, en son rapport et M. Denis LARRIBAU, procureur financier, en ses conclusions ;

En l’absence de l’ordonnateur et des comptables dûment informés de la tenue de l’audience ;

Après avoir délibéré hors la présence du public, du rapporteur et du procureur financier ;

 

En ce qui concerne le sursis à statuer prononcé par le jugement n°2015-0024 et la reprise de l’instruction

Attendu que par le jugement n° 2015-244 du 14 janvier 2016, la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a sursis à statuer sur l’instance juridictionnelle ouverte par le réquisitoire n° 27-GP/2014 et a demandé un complément d’instruction afin, d’une part, d’apprécier les incidences de la procédure de surendettement sur la dette du redevable du titre de recettes objet de la première présomption de charge et, d’autre part, d’examiner pour chacun des mandats visés par les présomptions de de charges suivantes, la teneur des dossiers de mandatement et enfin de déterminer le régime de responsabilité s’attachant à chaque incrimination retenue sur l’existence ou non d’un préjudice financier ;

Attendu que suite à la reprise de l’instruction en date du 15 février 2017, Mme Michelle Z... a indiqué que, s’agissant de la première charge présumée, le réquisitoire du procureur financier faisait référence à tort à un titre d’un montant de 1 633,60 € alors que l’état de développement des soldes ne fait état que d’un titre d’un montant de 125  ; qu’en ce qui concerne cette créance, elle précise avoir déposé au dossier d’instruction, une copie de l’ordonnance aux fins d’homologation d’une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire en date du 8 février 2012 concernant le débiteur de ce titre ; que, par ailleurs, le faible montant du titre n’autorisait pas le recouvrement auprès d’un établissement bancaire ; qu’en ce qui concerne les autres charges présumées, Mme Z... a fait valoir que les pièces justificatives déjà produites étaient les seules en sa possession ; qu’elle s’en tenait ainsi aux observations déjà formulées dans son courrier du 17 décembre 2014 ;

Attendu qu’une fois ces éléments de réponses recueillis, il y a lieu pour la chambre de se prononcer au fond sur l’instance ouverte par le réquisitoire n° 27-GP/2014 ;

 

En ce qui concerne la première présomption de charge relative à l’absence de diligences adéquates, complètes et rapides afin d’assurer le recouvrement d’un titre de 125 €

Sur les réquisitions du ministère public,

Attendu que par le réquisitoire n° 27-GP/2014 du 9 septembre 2014, le procureur financier près la chambre régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-Alpes a saisi la juridiction sur le fondement du § III de l’article L. 242-4 du code des juridictions financières, à fin d’ouverture d’une instance à l’encontre de M. Jean-Luc X..., M. Paul Y... et Mme Michèle Z... au titre de leur gestion comptable du CCAS du Puy-en-Velay sur les exercices 2008 à 2012 ;

Attendu qu’en son réquisitoire, le procureur financier relève que les comptables successifs n’ont pas exercé les diligences adéquates complètes et rapides afin de recouvrer, ou à tout le moins, empêcher la prescription de l’action en recouvrement d’un titre de 125 € ;              

Attendu que le procureur conclut de ce qui précède que M. Jean-Luc X..., M. Paul Y... et Mme Michèle Z... paraissent avoir engagé leur responsabilité personnelle et pécuniaire ; qu’ils se trouveraient ainsi dans le cas déterminé par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et qu’il y a lieu, en conséquence, d’ouvrir l’instance prévue au § III de l’article L. 242-4 du code des juridictions financières aux fins de déterminer la responsabilité encourue ;

 

Sur les observations des comptables mis en cause,

Attendu que les comptables mis en cause ont fait valoir que le faible montant de la créance ne justifiait pas le recours à une procédure d’opposition à tiers détenteur ; que par ailleurs, le redevable du titre avait fait l’objet d’une procédure de surendettement ayant d’abord conduit à l’adoption d’un plan de redressement puis à une ordonnance de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire du tribunal d’instance du Puy-en-Velay en date du 8 février 2012, de sorte que l’établissement public n’aurait pas subi de préjudice financier à raison du défaut de recouvrement du titre ;

Sur les observations de l’ordonnateur,

Attendu que l’ordonnateur a indiqué que le titre n’avait pu être recouvré du fait du surendettement du bénéficiaire donnant lieu à un effacement de dette ; que dès lors, le prêt octroyé s’était transformé en une aide financière ;

Sur la responsabilité du comptable,

Attendu qu’aux termes de l’article 60-I modifié de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, du paiement des dépenses, de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public (…), du maniement des fonds et des mouvements de comptes de disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu’ils dirigent » ; que « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique » ; que « leur responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée, qu’une dépense a été irrégulièrement payée » ;

Attendu qu’il résulte de l’article 11 du décret n° 62-1587 du 29 mars 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, applicable jusqu’à l’exercice 2012, que les comptables publics sont seuls chargés de la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs et de la conservation des pièces justificatives des opérations et des documents de comptabilité ; que l’article 12 du même texte dispose qu’en matière de recettes, les comptables sont tenus d’exercer le contrôle, dans la limite des éléments dont ils disposent, de la mise en recouvrement des créances de l’organisme public; qu’en application des dispositions de l’article 19 de ce décret, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des opérations dont ils sont chargés aux termes de l’article 11 ;

Attendu que l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2012 du compte 46726 « débiteurs divers contentieux » fait état d’un titre n°22/2007 pris en charge le 12 mars 2007 pour un montant de 125 € ; que ce titre est relatif au remboursement d’un prêt social ; que c’est par erreur que le réquisitoire du procureur financier a chiffré le montant de ce titre à 1 633,60 € ;

Attendu qu’en son premier alinéa, l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dispose que : « Les dispositions du présent article s’appliquent également aux établissements publics de santé » ; qu’en son 3°, ce même article dispose que : « L’action des comptables publics chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recettes. Le délai de quatre ans mentionné à l’alinéa précédent est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptif de la prescription » ;

Attendu que le débiteur du titre litigieux a fait l’objet d’une ordonnance de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire du tribunal d’instance du Puy-en-Velay ; que cette ordonnance du 8 février 2012 fait mention d’un plan de redressement adopté par la commission départementale de surendettement le 31 octobre 2009 ; que ce plan, qui concernait notamment l’ensemble des dettes du débiteur à l’égard du CCAS du Puy-en-Velay, prévoyait un report de 24 mois, puis le rééchelonnement des dettes sur une durée de 66 mois ;

Attendu que ce plan de redressement personnel du débiteur emporte reconnaissance de dette de la part de ce dernier ; que dès lors le cours de la prescription de l’action en recouvrement a été interrompu à compter du 31 octobre 2009 ;

Attendu qu’il résulte de ces éléments que le titre n°22/2007 n’était ainsi pas atteint par la prescription de l’action en recouvrement sur les exercices en jugement ; que dès lors, aucun manquement ne saurait être relevé à l’encontre des comptables mis en cause ; qu’il y a donc lieu de conclure au non-lieu à charge au titre de cette première charge présumée ;

 

En ce qui concerne la seconde présomption de charge relative au paiement d’aides et de secours en l’absence des pièces justificatives prévues par la réglementation

Sur les réquisitions du ministère public,

Attendu qu’en son réquisitoire, le procureur financier relève qu’au cours de l’exercice 2012, Mme Michèle Z... a pris en charge vingt-trois mandats au compte 6568 « autres secours » concernant le paiement d’aides et de secours soit à des prestataires, soit directement à des bénéficiaires, pour un montant total de 5 044,29 € sans disposer des pièces justificatives prévues par la rubrique 6112 « aides facultatives » de l’annexe I à l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales ; qu’en particulier, le conseil d’administration n’avait pas donné délégation à son président pour accorder ce type d’aide ;

Attendu que le procureur conclut de ce qui précède qu’en l’absence des pièces justificatives devant être jointes à l’appui des mandats de paiement, Mme Michèle Z... parait avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ; qu’elle se trouverait ainsi dans le cas déterminé par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et qu’il y a lieu, en conséquence, d’ouvrir l’instance prévue au § III de l’article L. 242-4 du code des juridictions financières aux fins de déterminer la responsabilité encourue ;

Sur les observations de Mme Z..,

Attendu que dans ses observations initiales, Mme Z… a indiqué que la délibération du conseil d’administration du 16 mai 2008 n’avait pas donné délégation à l’ordonnateur pour accorder de telles aides ; que toutefois, la délibération du 22 février 2013 fait état d’une telle délégation, ce qui tendrait à montrer rétroactivement l’intention du conseil d’administration ;

Sur les observations de l’ordonnateur,

Attendu que l’ordonnateur a indiqué que les aides accordées à deux bénéficiaires avaient été falsifiées par l’agent en charge de la comptabilité au sein du CCAS et qu’une procédure pénale était en cours à l’encontre de cet agent ;

Sur la responsabilité de la comptable ;

Attendu qu’il résulte de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, qu’avant de procéder au paiement d'une dépense ne faisant pas l'objet d'un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l'annexe I du présent code ; que, pour ce qui concerne le paiement d’aides et de secours au sein d’un CCAS, la rubrique 6568 « autres secours  » prévoit notamment la production d’une « délibération fixant les conditions d’octroi et les modalités de l’aide »;

Attendu que la liste des pièces justificatives fixant le maximum et le minimum exigible pour les comptables publics comme pour le juge des comptes, il n’y a pas lieu de s’interroger, contrairement à ce qu’indique le réquisitoire, sur l’existence d’une délégation de pouvoir du conseil d’administration au bénéfice de l’ordonnateur ;

Attendu, en revanche, qu’il ressort de l’instruction, qu’aucune délibération fixant les conditions d’octroi et les modalités de l’aide n’a pu être produite ; que si une délibération du conseil d’administration en date du 8 février 2012 fait mention d’un règlement intérieur d’attribution, celui-ci non présent au dossier ne peut être considéré avec certitude comme ayant été adopté par le conseil d’administration ; qu’en conséquence, le comptable ne disposait pas d’une délibération en bonne et due forme, requise par  l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, pour procéder au paiement ;

 

Attendu qu’il en résulte que Mme Michèle Z... a manqué à ses obligations de contrôle de la production des pièces justificatives telles que définies par l’article 13 du décret portant règlement général de la comptabilité publique ; que sa responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve ainsi engagée à hauteur de 5 044,29 € ;

Sur le préjudice financier pour le CCAS du Puy-en-Velay,

Attendu que l’article 60-VI de la loi du 23 février 1963, modifié par la loi n° 20111978 du 28 décembre 2011, dispose que, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret en Conseil d'État en fonction du niveau des garanties mentionnées au II./ Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné ou que, par le fait du comptable public, l'organisme public a dû procéder à l'indemnisation d'un autre organisme public ou d'un tiers ou a dû rétribuer un commis d'office pour produire les comptes, le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;

Attendu que les paiements d’aides et de secours en l’absence d’une délibération répondant aux exigences de la nomenclature des pièces justificatives revêtent un caractère, non seulement irrégulier, mais également indu ; qu’en effet, une telle délibération du conseil d’administration est une pièce nécessaire pour considérer que les droits au paiement étaient ouverts par l’autorité compétence ;

Attendu qu’il en résulte que les dépenses ainsi payées, du fait du manquement de la comptable à ses obligations de contrôle de la validité de la dette, ont causé un préjudice financier au CCAS du Puy-en-Velay ; qu’il y a lieu, en conséquence, de prononcer un débet à l’encontre de Mme Michèle-Z..., et de mettre à sa charge une somme de 5 044,29 € de même montant que les dépenses irrégulièrement payées ; qu’en application des dispositions de l’article 60-IX de la loi précitée du 23 février 1963, ledit débet de 5 044,29  € porte intérêts de droit à compter de la notification du réquisitoire intervenue à la date du 26 septembre 2014 ;

En ce qui concerne la troisième présomption de charge relative au versement de prêts à des bénéficiaires du CCAS sur l’exercice 2012 pour un montant total de 3 369,70 € en l’absence des pièces justificatives :

Sur les réquisitions du ministère public,

Attendu qu’en ses réquisitions, le procureur financier relève qu’au cours de l’exercice 2012, Mme Z... a pris en charge dix-sept mandats au compte 274 « prêt » pour un montant total de 3 369,70 €, sans disposer des pièces justificatives prévues par la rubrique 621 « prêts » de la nomenclature des pièces justificatives ; que notamment, il n’existait pas de délégation du conseil d’administration en faveur du président du CCAS lui permettant d’octroyer des prêts ;

Attendu que le procureur conclut de ce qui précède qu’en l’absence des pièces justificatives devant être jointes à l’appui des mandats de paiement, Mme Michèle Z... parait avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ; qu’elle se trouverait ainsi dans le cas déterminé par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et qu’il y a lieu, en conséquence, d’ouvrir l’instance prévue au § III de l’article L. 242-4 du code des juridictions financières aux fins de déterminer la responsabilité encourue ;

 

Sur les observations de Mme Michèle Z...,

Attendu que dans sa réponse initiale, Mme Z... expose que les prêts avaient été versés au vu de documents signés par le président du conseil d’administration ; qu’elle précise que le signataire n’avait pas de délégation au moment de l’octroi des prêts ; que toutefois, il ressort de la délibération du conseil d’administration du 22 février 2013 que ce dernier avait entériné l’octroi des prêts ;

Sur les observations de l’ordonnateur,

Attendu que l’ordonnateur a indiqué que les prêts attribués avaient fait l’objet d’une approbation en conseil d’administration et étaient justifiés par un dossier étayé par les travailleurs sociaux ;

 Sur la responsabilité de la comptable,

Attendu qu’il résulte de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, qu’avant de procéder au paiement d'une dépense ne faisant pas l'objet d'un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l'annexe I du présent code ; que, pour ce qui concerne la mise en paiement d’aides remboursables, la rubrique 621 « prêts » prévoit notamment la production d’une « décision de l’assemblée délibérante relative à l’attribution des prêts fixant les conditions d’octroi, les modalités de remboursement et le cas échéant, les bénéficiaires » ;

Attendu qu’une délibération du conseil d’administration du 18 novembre 1986 donne délégation au président d’accorder des aides remboursables jusqu’à 2 500 francs ; que cette délibération précise qu’un contrat établi entre le bénéficiaire et le président fixera les modalités pratiques de l’aide dont notamment les conditions de remboursement ; que par une délibération du 29 mars 2006, le conseil d’administration a limité à 1 000 € le montant des prêts pouvant être accordés par le président du CCAS ;

Attendu que ces deux dernières délibérations sont insuffisamment précises au regard des exigences de la nomenclature ; qu’en effet, à l’exception du montant plafond susceptible d’être alloué, elles ne fixent, ni les conditions d’attribution, ni les modalités de remboursement, indications requises par l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales ;

Attendu qu’il en résulte que Mme Michèle Z... a manqué à ses obligations de contrôle de la production des pièces justificatives telles que définies par l’article 13 du décret portant règlement général de la comptabilité publique ; que sa responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve ainsi engagée à hauteur de 3 369,70 € ;

Sur le préjudice financier subi par le CCAS,

Attendu que l’article 60-VI de la loi du 23 février 1963, modifié par la loi n° 20111978 du 28 décembre 2011, dispose que, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret en Conseil d'État en fonction du niveau des garanties mentionnées au II » ;

Attendu que les délibérations du 18 novembre 1986 et du 29 mars 2006 traduisent la volonté de l’organe délibérant du CCAS du Puy-en-Velay d’octroyer de telles aides remboursables ; que dès lors, bien qu’irréguliers en la forme, les paiements litigieux n’étaient pas indus ; qu’en conséquence, le CCAS du Puy-en-Velay n’a pas subi de préjudice financier ;

Attendu qu’en l’espèce l’ensemble des mandats emportant paiement d’une aide remboursable étaient accompagnés d’une décision individuelle d’attribution précisant le motif ainsi que d’une fiche de remboursement indiquant l’échéancier signé par le bénéficiaire ; que dans ces conditions, il y a lieu, de ne pas laisser de somme à la charge de Mme Michèle Z... au titre de la troisième présomption de charge élevée par le réquisitoire  ;

En ce qui concerne la quatrième présomption de charge relative à des opérations de régularisation sur l’exercice 2012 pour un montant total de 3 795,84 € :

Sur les réquisitions du procureur financier

Attendu qu’en son réquisitoire le procureur financier relève que la comptable mise en cause a procédé à des régularisations sur salaire suite à la prise en charge d’ordres de payer en dehors des mandats collectifs de paye ; que ces ordres de payer semblent avoir été signés par des personnes n’ayant pas la qualité de l’ordonnateur et en l’absence des pièces justificatives requises par la réglementation ;

Attendu que le procureur conclut de ce qui précède qu’en l’absence des pièces justificatives devant être jointes à l’appui des mandats de paiement, Mme Michèle Z... parait avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ; qu’elle se trouverait ainsi dans le cas déterminé par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et qu’il y a lieu, en conséquence, d’ouvrir l’instance prévue au § III de l’article L. 242-4 du code des juridictions financières aux fins de déterminer la responsabilité encourue ;

Sur les observations de Mme Z...,

Attendu qu’en ses observations initiales, la comptable mise en cause a indiqué que des régularisations ont été opérée s’agissant d’agents pour lesquelles un élément de rémunération n’avait pas été intégré dans le train de paye du mois courant, notamment à l’occasion de la mutualisation des services entre la commune et la communauté d’agglomération ; que cependant les payes concernées ont été intégrées dans le train de paye du CCAS et les bordereaux de mandats signés par l’ordonnateur ;

Sur les observations de l’ordonnateur,

Attendu que dans ses observations l’ordonnateur indique que ces montants payés en acompte sur salaire par le comptable public l’ont été à la demande du CCAS en lien avec le service des ressources humaine ; qu’il s’agit de régularisations après service fait ; que le CCAS n’a donc pas subi de préjudice financier suite à ces paiements ;

Sur la responsabilité de la comptable,

Attendu que sur l’exercice 2012, la comptable a effectué sur le fondement de onze ordres de paiement des versements avant mandatement correspondant à des régularisations sur salaire ; que ces régularisations portent sur des heures supplémentaires, des heures complémentaires, des primes et indemnités mais également du traitement indemnitaire ;

Attendu que si ces ordres de payer ont été transmis à la trésorerie de façon indépendante des mandats collectifs de paye, il n’en demeure pas moins que ces derniers auraient dû être accompagnées des pièces justificatives se rapportant à la catégorie de dépense correspondante ; que tel n’était pas le cas en l’espèce, les ordres de payer litigieux n’étant accompagnés d’aucune justification ;

Attendu que si la comptable mise en cause fait valoir que les éléments de rémunération ainsi versés figuraient bien sur les bulletins de paye des agents et avaient donc été intégrés aux mandats collectifs de paye, il a été impossible pour la chambre d’établir un rapprochement exact entre les montants figurants sur les ordres de payer et les régularisations mentionnées sur les bulletins de paye, en sorte que l’exactitude des calculs de la liquidation n’a pas pu être vérifiées ;

Attendu qu’il en résulte que Mme Michèle Z... a manqué à ses obligations de contrôle de la validité de la dette, telles que définies par l’article 13 du décret portant règlement général de la comptabilité publique ; que sa responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve ainsi engagée à hauteur de 3 795,84 € ;

Sur le préjudice pour le CCAS du Puy-en-Velay,

Attendu qu’en l’absence totale de pièces justificatives et en présence de doute sur l’exactitude des calculs de liquidation, la chambre régionale des comptes est fondée à considérer que le manquement de la comptable a causé un préjudice financier pour l’établissement public local, les observations de l’ordonnateur selon lesquelles le CCAS n’aurait subi aucun préjudice financier ne faisant pas obstacle à la reconnaissance d’un préjudice financier par le juge de comptes;

Attendu qu’il en résulte que les dépenses ainsi payées, du fait du manquement du comptable à ses obligations de contrôle de la validité de la dette, ont causé un préjudice financier au CCAS du Puy-en-Velay ; qu’il y a lieu, en conséquence, de prononcer un débet à l’encontre de Mme Michèle-Z..., et de mettre à sa charge une somme de 3 795,84 € de même montant que les dépenses irrégulièrement payées ; qu’en application des dispositions de l’article 60-IX de la loi précitée du 23 février 1963, ledit débet de 3 795,84 € porte intérêts de droit à compter de la notification du réquisitoire intervenue à la date du 26 septembre 2014 ;

En ce qui concerne la cinquième présomption de charge relative à la prise en charge sur l’exercice 2012 d’un mandat au compte 6232 « fêtes et cérémonies » d’un montant de 160 € en l’absence des pièces justificatives prévues par la nomenclature :

Sur les réquisitions du ministère public,

Attendu qu’en son réquisitoire, le procureur financier relève que Mme Michèle Z... a pris en charge au mois de février 2012 au compte 6232 « fêtes et cérémonies » un mandat d’un montant de 160 € correspondant à la réservation d’un gite en l’absence de facture ;

Attendu que le procureur conclut de ce qui précède qu’en l’absence de pièces justificatives à l’appui de ce mandat de paiement, Mme Michèle Z... parait avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ; qu’elle se trouverait ainsi dans le cas déterminé par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et qu’il y a lieu, en conséquence, d’ouvrir l’instance prévue au § III de l’article L. 242-4 du code des juridictions financières aux fins de déterminer la responsabilité encourue ;

Sur les observations de Mme Z...,

Attendu que dans ses observations initiales, Mme Z... expose que le mandat a été payé au vu de la réservation jointe au mandat ; que la dépense correspond à une prestation ayant eu lieu ultérieurement ; que l’établissement public n’a pas subi de préjudice financier ;

Sur les observations de l’ordonnateur,

Attendu qu’en ses observations l’ordonnateur a indiqué que dans le cadre de l’accompagnement social des usagers en situation de précarité, une randonnée est organisée chaque année ; que si le paiement a été effectué sur la base d’une réservation, une facture a été adressée à la trésorerie, une fois la prestation consommée ;

Sur la responsabilité des comptables,

Attendu que le mandat litigieux émis le 15 février 2012 était accompagné d’un relevé de réservation ; qu’en effet, il ne pouvait être accompagnée de la facture, la prestation ayant été réalisée en mai 2012 ;

Attendu que les usages du commerce imposent parfois que le paiement d’un bien ou d’une prestation soit réalisé à la commande ; que l’instruction DGCP n°05-003-M du 24 janvier 2005 relative au paiement à la commande par les collectivités locales et leurs établissement publics prévoit ce type de paiement dérogatoire pour les prestations de voyage ; que le cas des locations immobilières a été explicitement prévu par l’arrêté du 16 février 2015 fixant les dépenses des collectivités territoriales, de leurs établissement publics et des établissement publics de santé pouvant être payées sans ordonnancement ou sans ordonnancement préalable ;

Attendu qu’il ressort de ces éléments qu’au cas d’espèce, la comptable mise en cause pouvait valablement payer la réservation du gite en présence d’un bordereau de réservation ; qu’il y a donc lieu de conclure au non-lieu à charge au titre de cette cinquième présomption de charge ;

 

En ce qui concerne le respect du plan de contrôle hiérarchisé de la dépense

Attendu qu’il résulte du plan de contrôle hiérarchisé produit par Mme Michèle Z... que celui-ci ne concerne que les dépenses de personnel ; que par ailleurs, sur l’exercice 2012, il n’existait pas de formalisation des restitutions des contrôles opérés selon ce plan ; que ces circonstances feront obstacle à la remise gracieuse totale des débets par le ministre chargé du budget ;

 

PAR CES MOTIFS

DECIDE

 

Article 1 :

Il est prononcé un non-lieu à charge au bénéfice de M. Jean-Luc X..., M. Paul Y... et Mme Michèle Z... au titre de la première charge élevée par le réquisitoire du procureur financier ;

 

Article 2 :

M. Jean-Luc X... est déchargé de sa gestion sur la période de 1er janvier 2008 au 31 août 2008 et déclaré quitte à cette même date.

 

Article 3 :

M. Paul Y... est déchargé de sa gestion sur la période de 1er septembre 2008 au 2 novembre 2008 et déclaré quitte à cette même date.

 

Article 4 :

Mme Michèle Z... est constituée débitrice envers le centre communal d’action sociale du Puy-en-Velay sur l’exercice 2012 d’une somme de 5 044,29 € au titre de la seconde charge, augmentée des intérêts de droit calculés au taux légal à compter de la date du 26 septembre 2014 de notification du réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale des comptes ;

 

Article 5 :

Il n’est laissé aucune somme non rémissible à la charge de Mme Michèle Z... au titre de la troisième charge élevée par le réquisitoire du procureur financier ;

 

Article 6 :

Mme Michèle Z... est constituée débitrice sur envers le centre communal d’action sociale du Puy-en-Velay sur l’exercice 2012 d’une somme de 3 795,84 au titre de la quatrième charge, augmentée des intérêts de droit calculés au taux légal à compter de la date du 26 septembre 2014 de notification du réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale des comptes ;

 

Article 7 :

Il est prononcé un non-lieu à charge au bénéfice de Mme Z... au titre de la cinquième charge présumée élevée par les réquisitions du procureur financier ;

 

 

 

Article 8 :

Mme Michèle Z... est déchargée au titre de sa gestion sur la période allant du 3 novembre 2008 au 31 décembre 2011;

 

Article 9 :

Mme Michèle Z… ne pourra être déchargée de sa gestion sur l’exercice 2012 qu’après avoir justifié, de l’apurement, en principal et intérêts, des débets prononcés à son encontre.

 

Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-Alpes, 5èmesection, le seize novembre deux mille dix-sept.

Présents : M Alain LAIOLO, président de section, président de séance ; 

M. Michel BON, premier conseiller ;

M. Jennifer EL-BAZ, conseillère.

 

 

 

La greffière

Le président de séance

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Corinne VITALE-BOVET

Alain LAÏOLO

 

 

 

 

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

 

 

En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R.  242-29 du même code.

 

 

 

 

 

1/12 – jugement n° 2017-0049