Sections réunies
Jugement n° 2017-0045
Audience publique du 28 novembre 2017
Prononcé du 12 décembre 2017
| COMMUNAUTÉ DE COMMUNES BEAUCAIRE TERRE D’ARGENCE
Poste comptable : Beaucaire
N° codique : 030005 951
Exercices : 2011 et 2012
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La République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
VU les comptes, rendus en qualité de comptable de la communauté de communes Beaucaire Terre d’Argence, par M. X, du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 ;
VU le réquisitoire, pris le 25 juillet 2017 et notifié le 28 juillet 2017, par lequel le procureur financier près la chambre régionale des comptes a saisi la juridiction de charges présomptives à l’encontre dudit comptable au titre d’opérations relatives aux exercices 2011 et 2012 ;
VU les justifications produites au soutien du compte ;
VU l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
VU le code des juridictions financières ;
VU les lois et règlements applicables aux communautés de communes ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l'article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
VU le rapport de M. Xavier BAILLY, conseiller, magistrat chargé de l’instruction ;
VU les conclusions de M. Denys ECHENE, procureur financier près la chambre ;
VU les pièces du dossier ;
ENTENDU, lors de l’audience publique du 28 novembre 2017, M. Xavier BAILLY, conseiller, en son rapport et M. Denys ECHENE, en ses conclusions ;
ENTENDU, lors de l’audience publique du 28 novembre 2017, M. X, comptable, lors des faits, de la communauté de communes Beaucaire Terre d’Argence ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier près la chambre, le président de la communauté de communes Beaucaire Terre d’Argence n’étant ni présent ni représenté à l’audience publique ;
Sur la présomption de charge unique, soulevée à l’encontre de M. X, au titre des exercices 2011 et 2012 :
1 - Sur le réquisitoire
ATTENDU qu’en application de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général de la comptabilité publique » ;
ATTENDU qu’en application de l’article 12 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 susvisé, les comptables sont notamment tenus d’exercer, en matière de dépenses, le contrôle de la validité de la créance ;
ATTENDU qu’en application de l’article 13 du même décret, ce contrôle doit être exercé au regard, en particulier, de la production des justifications requises à l’appui de la dépense ;
ATTENDU que les dispositions combinées de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales et de son annexe 1 fixent la liste des pièces justificatives devant figuer à l’appui des dépenses ;
ATTENDU qu’en matière de versement de subventions et de primes de toute nature, l’annexe 1 précitée détermine en ses rubriques 7211 et 7212 les formes prises par les pièces justificatives exigibles, dans sa version en vigueur en 2011 et 2012, période de prise en charge des mandats litigieux ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 dans sa version en vigueur en 2011 et 2012, la seule exception à l’obligation de production d’une convention posée par cette loi concerne les organismes qui bénéficient de subventions pour l’amélioration, la construction, l’acquisition et l’amélioration des logements locatifs sociaux prévues au livre III du code de la construction et de l’habitation ;
ATTENDU que l’article 1 du décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 établit le seuil à partir duquel une convention entre l’autorité administrative versante et l’organisme bénéficiaire doit être conclue à 23 000 €;
ATTENDU que la production de telles justifications participe de façon substantielle de la régularité de la dépense ;
ATTENDU qu’en application de l’article 60 de la loi modifiée du 23 février 1963 susvisée, la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable se trouve engagée dès lors qu’une dépense a été irrégulièrement payée ;
ATTENDU qu’au cours des exercices 2011 et 2012, le comptable de la communauté de communes Beaucaire Terre d’Argence, alors en poste, a procédé au paiement de plusieurs mandats correspondant au versement de subventions à l’office de tourisme créé en 2003 sous forme associative ; que cet office constitue donc une personne morale de droit privé ;
ATTENDU que cette association n’a pas pour objet l’amélioration, la construction, l’acquisition et l’amélioration de logements locatifs sociaux ;
ATTENDU que si la mission d’intérêt public qu’elle assure justifie l’octroi de subventions par la collectivité, cette dernière n’est pour autant pas dispensée des obligations conventionnelles rappelées supra ;
ATTENDU qu’il appartenait au comptable de déterminer les pièces justificatives requises à l’appui de la dépense dès le versement du premier acompte de la subvention ; que cette requête devait être effectuée en se référant aux dispositions combinées de l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et du décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 imposant la production d’une convention passée entre l’autorité administrative versante et l’organisme de droit privé bénéficiaire, pour toute subvention d’un montant supérieur à 23 000 € ; que dès lors, au moment où le comptable a effectué les contrôles lui incombant préalablement au paiement du premier acompte, la production d’une convention avec l’association était exigée, le seuil de subvention de 23 000 € étant atteint en 2011 et 2012 ;
ATTENDU que les acomptes et soldes de subventions versés en 2011 et 2012 à l’association excèdent le seuil des 23 000 € à partir duquel une convention doit être passée ; qu’au total, les subventions se sont élévées à 248 000 € pour l’exercice 2011 et à 261 500 € pour l’exercice 2012 ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales et de son annexe I, une telle convention fait partie des pièces justificatives devant être exigées par le comptable public avant de procéder au paiement de la dépense ;
ATTENDU que, sur ces fondements et par réquisitoire susvisé du 25 juillet 2017, le procureur financier près la chambre régionale des comptes a requis la juridiction, au motif que le comptable en cause a pris en charge, aux cours des exercices 2011 et 2012, plusieurs mandats portant sur le paiement de subventions à l’association de l’office de tourisme intercommunal ;
2 - Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU qu’il résulte de ces dispositions que pour procéder au paiement de subventions d’un montant supérieur à 23 000 €, le comptable devait disposer des conventions complètes, intégrant les éléments susmentionnés, passées entre la commune et l’association bénéficiaire ;
ATTENDU qu’il ressort du rapport susvisé et des pièces du dossier que des subventions ont été payées par le comptable en cause au titre de l’exercice 2011 à l’appui des mandats nos 245, 723 et 938, et de l’exercice 2012 à l’appui des mandats nos 255, 652, 1124 et 1273 sans être appuyés par une convention complète au regard des exigences de la nomenclature des pièces justificatives ;
ATTENDU que le comptable a ainsi commis un manquement susceptible d’engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
3 - Sur l’existence d’un préjudice financier du fait du manquement du comptable
ATTENDU que le comptable fait valoir l’existence d’une convention-cadre passée entre l’organisme public et l’association ayant donné lieu à une délibération le 30 mars 2009 ; qu’il a produit les délibérations du conseil communautaire du 27 avril 2011 pour l’exercice 2011 et des 28 mars 2012 et 28 novembre 2012 pour l’exercice 2012 se rapportant aux subventions à verser à l’association « office de tourisme intercommunal » ; que ces délibérations mentionnent le montant des subventions à attribuer à l’association « office de tourisme intercommunal » ; que dès lors, l’organe délibérant avait autorisé le paiement desdites subventions ; qu’ainsi la dépense n’est pas indue ;
ATTENDU que l’ordonnateur n’a pas formulé d’observations ;
ATTENDU que la convention visée par l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations a pour objet de définir « l’objet, le montant, les modalités de versement et les conditions d’utilisation de la subvention attribuée » ; que ces renseignements figuraient sur les pièces à la disposition du comptable public ; qu’ainsi, une délibération du 30 mars 2009 valide une convention-cadre décrivant les droits et obligations des parties ; que les montants des subventions accordées sont indiqués dans les délibérations du conseil communautaire du 27 avril 2011 pour l’exercice 2011 et des 28 mars 2012 et 28 novembre 2012 pour l’exercice 2012 ; que l’ensemble de ces pièces est recevable au regard de la réglementation ;
ATTENDU que pour les exercices 2011 et 2012, le paiement des mandats mentionnés n’était pas indu ; que, dès lors, le manquement reproché au comptable public n’a pas causé de préjudice financier à la communauté de communes Beaucaire Terre d’Argence ;
4 - Sur la mise en œuvre de la responsabilité du comptable
ATTENDU qu’aux termes du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : « lorsque le manquement du comptable […] n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ;
ATTENDU que le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ; que ce dernier montant s’établit, au moment de la commission des faits, à 176 000 € pour le poste comptable de Beaucaire, dont relève la communauté de communes Beaucaire Terre d’Argence ; que le montant maximum de la somme susceptible d’être mise à la charge du comptable s’élève à 264 € par exercice ;
ATTENDU qu’au final, le manquement poursuivi sanctionne l’oubli de production des justifications à l’appui des mandats et non leur inexistence au moment des paiements ;
ATTENDU qu’il y a lieu, dans ces conditions, d’arrêter le montant de la somme non rémissible laissée à la charge du comptable à soixante-six euros (66 €) par exercice, soit cent trente-deux euros (132 €) pour les exercices de 2011 et de 2012 ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1 : Sur la présomption de charge unique, au titre des exercices 2011 et 2012 ;
M. X devra s’acquitter d’une somme de cent trente-deux euros (132 €), en application du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963.
Article final : La décharge de M. X ne pourra être donnée qu’après apurement de la somme à acquitter, fixée à l’article 1.
Délibéré le 28 novembre 2017 par M. André PEZZIARDI, président de la chambre, président de séance ; Mmes Brigitte ROMAN et Vanina DUWOYE, premières conseillères, MM. Laurent LE NY et Adrien GAUBERT, premiers conseillers.
En présence de Mme Clarisse GOUILLOUX, greffière de séance.
Clarisse GOUILLOUX, greffière de séance |
André PEZZIARDI, président de séance |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre les dispositions dudit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Jugement n° 2017-0045 page 1 sur 5
500, avenue des États du Languedoc CS 70755 34064 MONTPELLIER CEDEX 2 T +33 4 67 20 73 00 occitanie@crtc.ccomptes.fr
Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la chambre régionale des comptes Occitanie, et délivré par moi, secrétaire générale,
Brigitte VIOLETTE, secrétaire générale |
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans un délai de deux mois à compter de leur notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code.
Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger.
La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
Jugement n° 2017-0045 page 1 sur 5
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