S3/2170822/MC | 1 / 4 |
1ère section Jugement n° 2017-0024 J 11 octobre 2017
Prononcé du 14 novembre 2017 | Commune de Savigny-le-Temple
Poste comptable : Trésorerie principale de Savigny-le-Temple
Exercice : 2014 |
République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
Vu le réquisitoire en date du 22 décembre 2016, par lequel le Procureur financier a saisi la Chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X…, comptable de la commune de Savigny-le-Temple au titre d’opérations relatives à l’exercice 2014, notifié le 23 janvier 2017 au comptable concerné ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la commune de Savigny-le-Temple, par M. X…, du 1er septembre 2011 au 31 décembre 2014, ensemble les comptes annexes ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le rapport de M. Yves Bénichou, premier conseiller, magistrat chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du Procureur financier ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendu lors de l’audience publique du 11 octobre 2017 M. Yves Bénichou, premier conseiller, en son rapport et M. Luc Héritier, en ses conclusions ;
Entendu en délibéré M. Hervé Beaudin, premier conseiller, en ses observations ;
Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 de la loi de finances du 23 février 1963 susvisé : « […] les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, du paiement des dépenses, de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, désignées ci-après par le terme d'organismes publics, du maniement des fonds et des mouvements de comptes de disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. […] La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors […] qu'une dépense a été irrégulièrement payée […] ;
Attendu qu’aux termes de l’article 19 du décret du 7 novembre 2012 susvisé : « Le comptable public est tenu d'exercer le contrôle : […] 2° S'agissant des ordres de payer : d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à l'article 20 […] ; que, selon l’article 20 du même décret : « Le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur : […] 2° L'exactitude de la liquidation ; […] 5° La production des pièces justificatives […] ; qu’aux termes de l’article 38 : […] lorsqu'à l'occasion de l'exercice des contrôles prévus au 2° de l'article 19 le comptable public a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe l'ordonnateur. Ce dernier a alors la faculté de requérir par écrit le comptable public de payer. » ;
Attendu que l'article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales dispose qu’ : « Avant de procéder au paiement d'une dépense ne faisant pas l'objet d'un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales […] ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l'annexe I […] » ; que ladite annexe I fixant la liste des pièces justificatives des dépenses publiques locales prévoit à la rubrique 210223 « Primes et indemnités » que, pour procéder au paiement de ce type de dépense, le comptable doit être en possession des documents suivants : « 1. Décision de l'assemblée délibérante fixant la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités ; 2. Décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent » ;
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes d’Île-de-France de la responsabilité encourue par M. X… à raison du paiement, par le mandat collectif n° 2014-9097 du 18 novembre 2014, à deux collaborateurs de cabinet, une prime de fin d’année d’un montant total de 2 259,43 € se décomposant comme suit : 704,17 € à M. Y…, directeur de cabinet ; 1 555,26 € à Mme Z…, collaboratrice de cabinet ;
Attendu que l'arrêté individuel de nomination de M. Y… mentionne seulement l'attribution de l’indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires, de l'indemnité d’exercice des missions de préfecture et de 90 % de la prime de responsabilité ; que le contrat de recrutement de Mme Z… ne mentionne que l’indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires et l'indemnité d’exercice des missions de préfecture ; que toute autre rémunération accessoire est exclue par les arrêtés ;
Attendu que, face aux contradictions qui existaient entre les arrêtés individuels, ne mentionnant pas la prime de fin d’année, et les fiches de paie, portant mention d'une prime de fin d'année, le comptable aurait dû suspendre le paiement et demander à l'ordonnateur des justifications complémentaires ; qu'en s'en abstenant, et en réglant le mandat no 9097 du 18 novembre 2014 à hauteur de son montant (2 259,43 €), le comptable a manqué à ses obligations de contrôle de la validité de la dette, notamment de l'exactitude des calculs de liquidation et de la production des justifications ;
Attendu qu’en l’absence de pièce justifiant l’attribution d’une telle prime, M. X… a manqué à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la dette et a, par suite, engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire au titre de l'exercice 2014 ; que l’existence de crédits suffisants ouverts dans la comptabilité de la commune n’établit pas que les indemnités litigieuses étaient dues ; que, les sommes versées aux deux bénéficiaires ne leur étant pas dues, ce manquement a porté un préjudice financier à la commune de
Savigny-le-Temple au sens des dispositions du troisième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée ; que la chambre n’est pas liée par l’attestation en sens contraire de la commune ;
Attendu qu’aux termes du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 : « Lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné […], le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ; qu’ainsi, il y a lieu de constituer M. X… débiteur de la commune de Savigny-le-Temple pour la somme de 2 259,43 € ;
Attendu que le VIII du même article dispose que : « Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 23 janvier 2017, date de réception du réquisitoire par M. X… ;
Attendu qu’aux termes du deuxième alinéa du IX du même article : « Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du même VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. Hormis le cas de décès du comptable ou de respect par celui-ci, sous l'appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée au comptable public dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu par le juge des comptes, le ministre chargé du budget étant dans l'obligation de laisser à la charge du comptable une somme au moins égale au double de la somme mentionnée au deuxième alinéa dudit VI » ; que, selon le décret du 10 décembre 2012 susvisé : « La somme maximale pouvant être mise à la charge du comptable, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixée à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré » ;
Attendu que le contrôle hiérarchisé de la dépense avait inscrit à son inventaire le contrôle exhaustif des rémunérations principales et accessoires versées au personnel en cas de différence entre deux mois consécutifs ; que cette différence a été manifeste, au cours de l’exercice 2014, entre le mois d’octobre et le mois de novembre ; qu’il en résulte qu’une somme au moins égale à trois millièmes du montant de son cautionnement en 2014 de 176 000 €, soit 528 €, devra être laissée à la charge de M. X… en cas de remise gracieuse par le ministre du budget ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : M. X… est constitué débiteur de la commune de Savigny-le-Temple pour la somme de 2 259,43 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 23 janvier 2017 ;
Article 2 : M. X… est déchargé de sa gestion pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 ;
Sursis à décharge de M. X… est prononcée pour sa gestion allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014, et ce, jusqu’à complet apurement des débets prononcés à son encontre.
Mainlevée peut être donnée et radiation peut être faite de toutes oppositions et inscriptions mises ou prises sur ses biens meubles ou immeubles ou sur ceux de ses ayants cause pour sûreté de ladite gestion et son cautionnement peut être restitué ou ses cautions dégagées.
Fait et jugé par M. Alain Stéphan, président de séance ; MM. Hervé Beaudin, premier conseiller, et Nicolas Sachot, conseiller.
En présence de Mme Marie-Claude Mimbourg, greffière de séance.
Marie-Claude Mimbourg |
Alain Stéphan, président de section
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En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
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