Formation plénière
Jugement n° 2017-0029
Audience publique du 6 juin 2017
Prononcé du 24 août 2017 | COMMUNE DU BARCARÈS
Poste comptable : Saint Laurent-de-la-Salanque
N° codique : 066021 017
Exercice 2012
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La République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
VU les comptes, rendus en qualité de comptable de la commune du Barcarès, par M. X…, du 1er janvier au 31 décembre 2012 ;
VU le décret n° 2015-1199 du 30 septembre 2015 modifiant les dispositions relatives au siège et au ressort des chambres régionales des comptes, par lequel la chambre régionale des comptes de Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées a été créée au 1er janvier 2016 et a, à compter de cette date, compétence sur les anciens ressorts et affaires engagées des chambres, dissoutes, de Languedoc-Roussillon et de Midi-Pyrénées ; ensemble l’arrêté du Premier président de la Cour des comptes du 24 novembre 2015, précisant que les procédures en cours, au sens de l’article L. 212-1du code des juridictions financières, devant les chambres régionales des comptes suivantes sont transférées en l’état, sans qu’il y ait lieu de renouveler les actes, formalités et jugements intervenus antérieurement à cette date ;
VU le réquisitoire pris le 4 janvier 2017, notifié le 16 janvier 2017, par lequel le procureur financier près la chambre régionale des comptes a saisi la juridiction de charges présomptives à l’encontre dudit comptable au titre d’opérations relatives à l’exercice 2012 ;
VU les justifications produites au soutien du compte ;
VU l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
VU le code des juridictions financières ;
VU les lois et règlements applicables à la commune du Barcarès ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l'article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
VU le rapport de M. Stéphane LUCIEN-BRUN, vice-président, magistrat chargé de l’instruction ;
VU les conclusions de M. Denys ECHÈNE, procureur financier près la chambre ;
VU les pièces du dossier ;
ENTENDU, lors de l’audience publique du 6 juin 2017, M. Stéphane LUCIEN-BRUN, vice-président, en son rapport et M. Denys ECHÈNE, en ses conclusions ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier près la chambre, les parties n’étant ni présentes, ni représentées à l’audience publique ;
Sur la présomption de charge unique, soulevée à l’encontre de M. X…, au titre de l’exercice 2012 :
1 - Sur le réquisitoire
ATTENDU qu’en application de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, le comptable public engage sa responsabilité personnelle et pécuniaire au titre des contrôles qu’il est tenu d’assurer et notamment lorsqu’une dépense a été irrégulièrement payée et une recette non recouvrée ; qu’ainsi, aux termes du I de cet article : « […] Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité ; la responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée, qu’une dépense a été irrégulièrement payée. » ;
ATTENDU que, par mandat n° 3229/2012 du 26 juillet 2012, le comptable de la commune du Barcarès a pris en charge dans ses écritures, le 30 juillet 2012, la somme de 11 720,80 € à la société MACAP pour l’achat de 4 000 mètres de banderole imprimée au logo de Port Barcarès ; que ladite facture datée du 16 juillet 2012, d’un montant de 11 720,80 € précise les conditions de livraison suivantes : « 2 000 mètres en départ sous 15 jours soit le 31 juillet 2012 » et « 2 000 mètres en départ pour janvier 2013 » ; que ces dates de livraison sont postérieures au règlement de ladite facture ; qu’il existait au moment du paiement en cause un doute sérieux sur le service fait ; que ce doute n’a pas amené le comptable à suspendre le paiement ;
ATTENDU qu’en application des articles 12 et 13 du décret du 29 décembre 1962 précité, alors applicable, les comptables publics sont notamment tenus d’exercer, en matière de dépenses, le contrôle de la validité de la créance ; qu’en application de l’article 37 de ce même décret, « lorsqu’à l’occasion de ces contrôles des irrégularités sont constatées, les comptables doivent suspendre le paiement et en informer l’ordonnateur. » ;
ATTENDU, dans ces conditions, que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X… pourrait être engagée à concurrence d’un montant de 11 720,80 €, correspondant au mandat précité ;
2 - Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU que M. X…, comptable alors en fonctions de la commune du Barcarès, a pris en charge dans ses écritures, le 30 juillet 2012, le mandat n° 3229/2012 d’un montant de 11 720,80 €, appuyé d’une facture de la société MACAP du 16 juillet 2012 relative à l’achat de 4 000 mètres de banderole imprimée au logo de Port Barcarès ; que ladite facture porte les mentions suivantes : « 2 000 mètres en départ sous quinze jours soit le 31 juillet 2012 » et « 2 000 mètres en départ pour janvier 2013 » ; que ces dates de livraison sont postérieures au règlement de ladite facture ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 20 février 2017 enregistrée au greffe le 27 février 2017, le comptable précise que, d’une part, le règlement de cette facture est intervenu suite à l’attestation du service fait sur la facture par l’ordonnateur et, d’autre part, que les mentions concernant les conditions de livraison sont « des mentions standards, avec date butoir maximum et non une date réelle de livraison » ;
ATTENDU que, dans sa réponse du 15 février 2017 enregistrée au greffe le 20 février 2017, l’ordonnateur précise que la prestation de la société MACAP « ne consiste pas uniquement à livrer des banderoles déjà existantes mais, plus exactement, à créer, fabriquer puis livrer des supports de communication extérieure. Ainsi, l’essentiel de la prestation commandée à la société MACAP est effectué dès lors que les banderoles commandées ont été réalisées. Dans le protocole commercial de cette société, la livraison est un service accessoire à son activité car les supports de communication créés sont tenus à disposition des clients qui peuvent venir les chercher par leurs propres moyens, les laisser en attente ou alors se les faire livrer. C’est la raison pour laquelle la société MACAP a pour usage de prévoir des délais de livraison relativement larges au moment de la commande. […] » ;
ATTENDU que, dans ses conclusions susvisées, le procureur financier considère qu’il peut être admis que le comptable n’avait pas à sa disposition, au moment d’effectuer les contrôles préalables à la prise en charge, d’élément d’information suffisamment manifeste et probant pour mettre en doute sérieux la cohérence et la crédibilité des pièces qui lui étaient présentées ;
ATTENDU cependant que la facture en cause porte la mention explicite d’une livraison au centre technique municipal ; qu’elle mentionne des dates de livraison postérieures à celle de son édition, le 16 juillet 2012, et à celle de sa prise en charge par le comptable, le 30 juillet 2012 ;
ATTENDU, dès lors, qu’il existait, au moment du paiement, un doute sérieux sur le service fait, voire sur la réalité de la contrepartie de la dépense ;
ATTENDU que ce doute n’a pas conduit le comptable à suspendre le paiement en application de l’article 37 du décret du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, alors en vigueur, disposant que « lorsque, à l’occasion de l’exercice du contrôle prévu à l’article 12, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l’ordonnateur. Les paiements sont également suspendus lorsque les comptables publics ont pu établir que les certifications mentionnées à l’article 7 sont inexactes. » ; que M. X… a, par conséquent, commis un manquement à ses obligations de contrôle prévues par les articles 12 et 13 dudit décret ;
ATTENDU qu’en application de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, le comptable public engage sa responsabilité personnelle et pécuniaire au titre des contrôles qu’il est tenu d’assurer ; que M. X… a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
3 - Sur l’existence d’un préjudice financier du fait du manquement du comptable
ATTENDU que l’ordonnateur fait valoir que la totalité de la marchandise commandée, à savoir 4 000 mètres de banderole, a été livrée à la commune ; que, selon lui, cette dernière n’a, de ce fait, subi aucun préjudice ;
ATTENDU que le comptable fait valoir le même argument ;
ATTENDU que la prestation objet de la facture a été réalisée en totalité et conformément à la volonté de la commune ; que le manquement aux obligations de contrôle du comptable n’a donc pas causé de préjudice financier à la commune, au sens des dispositions du troisième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février susvisée ;
4 - Sur la mise en œuvre de la responsabilité du comptable
ATTENDU qu’aux termes du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : « lorsque le manquement du comptable […] n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ;
ATTENDU que le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ; que ce dernier montant s’établit, au moment de la commission des faits, à 149 000 € pour le poste comptable de Saint-Laurent de la Salanque, dont relève la commune du Barcarès ;
ATTENDU que, dans sa réponse, le comptable fait valoir que le règlement de la facture est intervenu en été, période de sous-effectif du poste comptable qu’il dirigeait ; qu’il n’apporte cependant pas de pièces justifiant ou démontrant l’existence d’un tel sous-effectif au moment du paiement en cause ;
ATTENDU que, dans ses conclusions, le procureur financier considère qu’il ne ressort pas des moyens produits qu’une circonstance pourrait être prise en compte pour accroitre ou atténuer la somme non rémissible qui serait laissée à la charge du comptable, sauf à tenir compte du sous-effectif, probable mais non prouvé, du poste en période estivale ;
ATTENDU qu’en l’absence de pièces produites pour prouver l’existence dudit sous-effectif, la chambre fera une juste appréciation de la somme non rémissible laissée à la charge de M. X… pour un montant fixé à deux cent vingt-trois euros et cinquante centimes (223,50 €) ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : Sur la présomption de charge unique au titre de l’exercice 2012 :
M. X… devra s’acquitter d’une somme de deux cent vingt-trois euros et cinquante centimes (223,50 €) en application du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ; cette somme, non productive d’intérêts, ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse conformément au paragraphe IX de l’article 60 précité ;
Article final : La décharge de M. X… ne pourra être donnée qu’après apurement de la somme à acquitter fixée ci-dessus.
Délibéré le 6 juin 2017 par M. André PEZZIARDI, président de la chambre, président de séance, Mme Brigitte ROMAN et M. Mickael DUWOYE, premiers conseillers.
En présence de M. Morad RAMDANI, greffier de séance.
Morad RAMDANI, greffier de séance |
André PEZZIARDI, président de séance |
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre les dispositions dudit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Jugement n° 2017-0029 page 1 sur 4
500, avenue des États du Languedoc CS 70755 34064 MONTPELLIER CEDEX 2 T +33 4 67 20 73 00 occitanie@crtc.ccomptes.fr
Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la chambre régionale des comptes d’Occitanie et délivré par moi, secrétaire générale,
Brigitte VIOLETTE secrétaire générale |
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans un délai de deux mois à compter de leur notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code.
Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger.
La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
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