CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
DE PROVENCE–ALPES-CÔTE D’AZUR
Chambre
Jugement n° 2017-0023
Communauté d’agglomération du Grand Avignon
Département de Vaucluse
Exercices 2011 à 2014
Rapport n° 2017-0164
Audience publique du 5 septembre 2017
Délibéré le 5 septembre 2017
Prononcé le 11 décembre 2017
JUGEMENT
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur,
VU le réquisitoire n° 2017-0017 en date du 29 mars 2017 par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de MM. X… et Y…, comptables de la communauté d’agglomération du Grand Avignon (COGA), au titre d’opérations relatives aux exercices 2011 à 2014 ;
VU la notification du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de l’instruction au président de la COGA et à MM. X… et Y…, intervenue le 7 avril 2017 pour ce qui concerne l’ordonnateur et M. Y... et le 12 avril 2017 pour ce qui concerne M. X... ;
VU les comptes de la communauté d’agglomération du Grand Avignon rendus par M. X... pour sa gestion au titre des exercices 2011 et 2012, au 1er janvier, et par M. Y... pour sa gestion au titre des exercices 2012, du 2 janvier, 2013 et 2014 ;
VU le code général des collectivités territoriales, notamment son article L. 1617-5 ;
VU le code des juridictions financières ;
VU l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
VU le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 de finances rectificative pour 2011 ;
VU les questionnaires adressés par le magistrat instructeur à l’ordonnateur, à M. X... et à M. Y... les 18, 19 et 22 mai 2017 respectivement ;
VU les justifications en réponse transmises par l’ordonnateur le 23 mai 2017, enregistrées au greffe le 1er juin 2017 sous le numéro 828 ;
VU les justifications en réponse transmises M. X... le 31 mai 2017, enregistrées au greffe le
1er juin 2017 sous le numéro 853 ;
VU les justifications en réponse transmises par M. Y... les 21 et 24 avril 2017, enregistrées au greffe de la chambre le 18 mai 2017 sous les numéros 752, 753, 754, 755, 756, 757, le
30 mai 2017, enregistrées au greffe le même jour sous les numéros 811, 812, 813, le 27 juin 2017, enregistrées au greffe le même jour sous le numéro 977, le 19 juillet 2017, enregistrées au ministère public sous les numéros 139 et 140, le 3 août 2017, enregistrées au greffe sous le numéro 1194, et le 4 août 2017, enregistrées au greffe sous le numéro 1201 ;
VU le rapport n° 2017-0167 déposé le 13 juin 2017 par M. Matthieu Juving, premier conseiller ;
VU la décision du 30 juin 2017 par laquelle le président de la chambre régionale des comptes a désigné M. Clément Contan, président de section, comme rapporteur en remplacement de M. Juving ;
VU les conclusions du procureur financier ;
Après avoir entendu en audience publique le rapporteur et les conclusions orales de Mme Marie-Pierre Laplanche-Servigne, procureur financier, l’ordonnateur et les comptables, dûment informés de l’audience, n’étant ni présents ni représentés ;
Après en avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier ;
ATTENDU qu’il ressort de ses réponses susvisées que M. Y... impute en large part les manquements relevés par le procureur financier dans son réquisitoire à la situation particulièrement dégradée du poste comptable d’Avignon ; que les difficultés invoquées par le comptable ne s’analysent pas comme des circonstances constitutives de la force majeure et ne sont donc pas susceptibles de l’exonérer de sa responsabilité ; qu’en revanche, M. Y... pourrait valablement en faire état à l’appui d’une demande de remise gracieuse d’un débet prononcé par la chambre ;
Charge n° 1 : Ttitres émis à l’encontre de M. Z…
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé du 29 mars 2017, le procureur financier a requis la chambre au motif que MM. X... et Y... n’auraient pas réalisé de diligences suffisantes pour assurer le recouvrement de quatre titres n° 12 du 25 janvier 2008, 197 du 18 juin 2008, 210 du 2 juillet 2008 et 408 du 14 novembre 2008 émis pour un montant total de 6 455,28 € à l’encontre de M. Z…, correspondant à des loyers dus par l’intéressé ;
ATTENDU que, selon les annotations figurant sur l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 du compte 4146 « Locataires-acquéreurs et Locataires-contentieux », les titres en cause avaient fait l’objet chacun, en 2010, d’une phase comminatoire préalable à la mise en œuvre d’une opposition à tiers détenteur (OTD), mais qu’il ne s’agit que d’un moyen non coercitif assimilable aux lettres de relance pouvant être adressées par le comptable et qu’au cas particulier, ces phases comminatoires auraient été annulées ; que pendant la phase administrative d’examen des comptes, le comptable a précisé « qu’une lettre de rappel, un commandement et une phase comminatoire [avaient] été faits respectivement pour chaque titre en 2008, 2009 et février 2010 » mais que la lettre de rappel n’est pas interruptive de la prescription de l’action en recouvrement prévue à l’article L. 1617-5 susvisé du code général des collectivités territoriales et que les commandements de payer n’étaient pas avérés ; que le comptable a également fourni la preuve de la réalisation d’autres diligences (autorisation de poursuites par voie de saisie-vente demandée le 8 août 2013, demande de renseignement sur le débiteur le 29 avril 2014, recherches sur les fichiers Adonis et Ficoba les 14 mai et 28 octobre 2014, avis d’opposition à tiers détenteur le 27 août 2014, état de poursuite par voie de saisie-vente du 21 novembre 2014, procès-verbal de perquisition établi en 2015 avec la mention « parti sans laisser d’adresse »), mais qu’elles ont toutes été entreprises postérieurement à la prescription des titres, intervenue les 25 janvier, 18 juin, 2 juillet et 14 novembre 2012 respectivement ;
Sur le manquement des comptables à leurs obligations
ATTENDU qu’en réponse au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur, M. X... a indiqué qu’étant retraité depuis le 1er janvier 2012, il n’était plus en mesure de produire les documents établissant les diligences effectuées et renvoyait sur ce point aux réponses de son successeur ;
ATTENDU qu’il ressort des réponses de M. Y... que le titre n° 12 du 25 janvier 2008 a fait l’objet d’un commandement de payer, établi le 10 avril 2008 ; qu’une réponse à ce commandement, adressée par le frère du débiteur et attestant de sa notification à l’intéressé, fait apparaître que ce dernier était reparti en Turquie depuis trois ans ; qu’une réponse du 1er juin 2009 à un commandement de payer du 15 mai 2009 concernant le titre n° 408 du 14 novembre 2008 a confirmé cette information et qu’un procès-verbal de saisie établi le 26 juillet 2010 par un huissier de justice a montré que le débiteur n’avait pas de domicile connu et qu’il était impossible d’identifier sa nouvelle adresse ;
ATTENDU que l’ordonnateur a fait valoir pour sa part que « compte tenu des éléments portés à [sa] connaissance (…) et constitutifs des actes entrepris par les comptables publics pour le recouvrement des recettes sur la base des quatre titres émis, le préjudice d’un montant de 6 455,28 € ne [semblait] pas avoir pour origine un manquement des comptables publics » ;
ATTENDU que les diligences réalisées par MM. X... et Y... pour assurer le recouvrement des titres visés dans le réquisitoire ont été proportionnées à la nature et au montant des créances en cause ; qu’en toute hypothèse, le débiteur ayant sans doute déjà quitté le territoire national lors de l’émission des titres, il était pratiquement impossible d’en assurer le recouvrement ;
ATTENDU qu’en conséquence, ainsi qu’en a convenu le procureur financier dans ses conclusions susvisées, il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de l’un ou l’autre des deux comptables successivement en fonctions au cours des exercices 2011 à 2014 à raison du défaut de recouvrement des titres visés dans le réquisitoire ;
Charge n° 2 : Titres émis à l’encontre de M. A…
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé du 29 mars 2017, le procureur financier a requis la chambre au motif que MM. X... et Y... n’auraient pas réalisé de diligences suffisantes pour assurer le recouvrement de trois titres n° 203 du 18 juin 2008, 215 du 2 juillet 2008 et 414 du 14 novembre 2008 émis pour un montant total de 2 991,60 € à l’encontre de M. A…, correspondant à des loyers ;
ATTENDU que, selon les annotations figurant sur l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2014 du compte 4146 « Locataires-acquéreurs et Locataires-contentieux », les titres en cause avaient fait l’objet chacun, en 2010, d’une phase comminatoire préalable à la mise en œuvre d’une opposition à tiers détenteur, mais qu’il ne s’agit que d’un moyen non coercitif assimilable aux lettres de relance pouvant être adressées par le comptable et qu’au cas particulier, ces phases comminatoires auraient été annulées ; que pendant la phase administrative d’examen des comptes, le comptable a précisé « qu’une lettre de rappel, un commandement et une phase comminatoire [avaient] été faits respectivement pour chaque titre en 2008, 2009 et février 2010 » et qu’une demande de renseignement avait été adressée à la COGA le 5 avril 2011 mais que la lettre de rappel n’est pas interruptive de la prescription de l’action en recouvrement prévue à l’article L. 1617-5 susvisé du code général des collectivités territoriales, que les commandements de payer n’étaient pas avérés et que la demande de renseignement faite auprès de la communauté d’agglomération n’avait pas non plus interrompu le cours de la prescription ; que le comptable a également fourni la preuve de la réalisation d’autres diligences (état de poursuites par voie de saisie-vente du 19 juillet 2013 retournée avec la mention « destinataire inconnu à cette adresse », courriel adressé à l’huissier le 20 juin 2014, procès-verbal de perquisition établi en 2015 avec la mention « parti sans laisser d’adresse », recherches sur le fichier Adonis le 15 septembre 2014, OTD notifiée le 1er avril 2016), mais qu’elles ont toutes été entreprises postérieurement à la prescription des titres, intervenue les 18 juin, 2 juillet et 14 novembre 2012 respectivement ;
Sur le manquement des comptables à leurs obligations
ATTENDU qu’en réponse au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur, M. X... a indiqué qu’étant retraité depuis le 1er janvier 2012, il n’était plus en mesure de produire les documents établissant les diligences effectuées et renvoyait sur ce point aux réponses de son successeur ;
ATTENDU qu’il ressort de la réponse de M. Y... qu’à la suite d’une lettre de rappel qui lui aurait été adressée le 15 janvier 2009, le débiteur a, le 29 janvier 2009, adressé à la trésorerie une lettre par laquelle il a contesté être redevable d’une partie des sommes qui lui étaient réclamées ; qu’il a fait valoir en effet que certains des loyers correspondants portaient sur une période postérieure à son départ de l’appartement concerné, qu’il avait quitté compte tenu de la destruction annoncée de l’immeuble dans lequel il se situait ;
ATTENDU que l’ordonnateur a fait valoir pour sa part que « compte tenu des éléments portés à [sa] connaissance (…) et constitutifs des actes entrepris par les comptables publics pour le recouvrement des recettes sur la base des trois titres émis, le préjudice d’un montant de 2 991,60 € ne [semblait] pas avoir pour origine un manquement des comptables publics » ;
ATTENDU que les informations produites par M. Y... font peser un doute sur la réalité d’une partie de la créance de la COGA sur M. A... et qu’en tout état de cause, les diligences réalisées par MM. X... et Y... pour assurer le recouvrement des titres visés dans le réquisitoire ont été proportionnées à la nature et au montant des créances en cause ; qu’en toute hypothèse, compte tenu des difficultés rencontrées pour localiser le débiteur, il était pratiquement impossible d’en assurer le recouvrement ;
ATTENDU qu’en conséquence, ainsi qu’en a convenu le procureur financier dans ses conclusions susvisées, il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et personnelle de l’un ou l’autre des deux comptables successivement en fonctions au cours des exercices 2011 à 2014 à raison du défaut de recouvrement des titres visés dans le réquisitoire ;
Charge n° 3 : Mandats n° 2217 du 2 juin 2014 de 180 €, 2218 du 2 juin 2014 de 1 632 € et 2219 du 2 juin 2014 de 220 €
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé du 29 mars 2017, le procureur financier a requis la chambre au motif que, sur le fondement des mandats susmentionnés, imputés au compte 673 « Titres annulés (sur exercices antérieurs) », M. Y... a annulé trois titres de recettes n° 425 du 5 septembre 2012, 9 du 5 février 2013 et 58 du 5 mars 2013 émis à l’encontre du conservatoire – école d’art dramatique d’Avignon alors qu’il ne disposait pas des pièces justificatives requises ;
ATTENDU qu’en effet, après avoir rappelé qu’aux termes de sa rubrique 142 « Annulation ou réduction de recettes », la nomenclature des pièces justificatives des dépenses des collectivités territoriales et des établissements publics locaux mentionnée à l’article D. 1617-19 et figurant en annexe du code général des collectivités territoriales prévoit la production d’un « état précisant, pour chaque titre, l’erreur commise », le représentant du ministère public a relevé qu’en l’espèce, la seule pièce jointe à chacun des mandats était la copie d’un courriel de la responsable de la régie du conservatoire du 30 mai 2014 informant la trésorerie que les titres concernaient des chèques loisirs de la commune d’Avignon que cette collectivité n’avait pas remboursés depuis 2011 et que cette explication ne pouvait être considérée comme un motif de nature à justifier l’annulation des titres ;
ATTENDU que le procureur financier a estimé par ailleurs que l’opération ne s’analysait pas en réalité comme une « annulation ou réduction de recettes » pour erreur matérielle mais consistait plus vraisemblablement en une admission en non-valeur, les titres n’ayant pas fait l’objet de poursuites ; qu’après avoir relevé que leur recouvrement ne paraissait pas pour autant prescrit à la date du 31 décembre 2014, le procureur financier a rappelé que dans ce cas, le comptable aurait dû disposer de la décision et de l’état précisant le montant admis dont la rubrique 143 « Admission en non-valeur » de la nomenclature des pièces justificatives des dépenses des collectivités territoriales et des établissements publics locaux mentionnée à l’article D. 1617-19 et figurant en annexe du code général des collectivités territoriales prévoit la production ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU qu’il ressort des réponses de M. Y... et de l’ordonnateur au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur et des pièces produites à l’appui que l’annulation des titres était justifiée par le fait qu’ils n’auraient pas dû être émis à l’encontre de la régie du conservatoire mais de la commune d’Avignon et que leur annulation est intervenue après qu’un titre a été émis le 6 juin 2014 à l’encontre de la commune ; que le comptable a apporté la preuve que ce titre avait été recouvré le 24 octobre 2016 ;
ATTENDU qu’en conséquence, ainsi qu’en a convenu le procureur financier dans ses conclusions susvisées, il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et personnelle de M. Y... à raison des annulations de titres intervenues sur le fondement des mandats visés dans le réquisitoire ;
Charge n° 4 : Mandat n° 3619 du 12 septembre 2014 de 879,16 €
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé du 29 mars 2017, le procureur financier a requis la chambre au motif que, sur le fondement du mandat susmentionné, imputé au compte 6256 « Missions », M. Y... a remboursé des frais de déplacement à des agents de la COGA alors qu’ils ne disposaient pas des pièces dont la production était requise ;
ATTENDU qu’après avoir rappelé qu’aux termes de sa rubrique 21812, la nomenclature des pièces justificatives des dépenses des collectivités territoriales et des établissements publics locaux mentionnée à l’article D. 1617-19 et figurant en annexe du code général des collectivités territoriales prévoit, pour la prise en charge de frais de déplacement correspondant à une « mission accomplie hors la résidence administrative et hors la résidence familiale », la production d’un « ordre de mission indiquant notamment l’objet du déplacement, la classe autorisée et le moyen de transport utilisé », le représentant du ministère public a relevé que les ordres de mission concernant les agents dont les frais de déplacement avaient été remboursés n’étaient pas joints au mandat, qui n’était appuyé que d’une édition informatique détaillant le montant dû par service ; que pendant la phase administrative d’examen des comptes, le comptable avait produit les états de frais de déplacement correspondant aux montants versés à chacun de ces agents, mais pas leurs ordres de mission ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU qu’en réponse au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur, M. Y... a souligné que l’état informatique qui était joint au mandat avait été « édité par le Service « Personnel » du GA au vu des ordres de mission, au terme d’une procédure de suivi très stricte », de sorte qu’il avait pu « sans difficulté justifier de l’exact calcul de la somme globale mandatée puis payée » même s’il ne disposait pas des « états individuels pour ce mandat transmis avec le train de paie » ; qu’il a fait valoir qu’un contrôle par ses soins des ordres de mission aurait été irréaliste au regard du nombre de paies, indemnités et oppositions sur salaires que son poste comptable doit traiter manuellement, soulignant que « dans les faits, ce serait une masse immense de travail à traiter, ce qui renverrait le virement effectif des paies à une date très lointaine par rapport à l’émission des mandats avec les conséquences que chacun peut imaginer, et qui serait opposé à l’un des buts du CHD qui est d’accélérer entre autres le délai global de paiement » ;
ATTENDU que l’ordonnateur a fait valoir pour sa part que « compte tenu du fait que les pièces justificatives de la dépense [avaient] été produites et [étaient] conformes », la COGA n’avait pas subi de préjudice financier ; qu’il résulte de cette réponse que, comme M. Y..., le président de la communauté d’agglomération estime que le comptable a régulièrement procédé au remboursement des frais de déplacement visés dans le réquisitoire, de sorte que la question de l’existence d’un préjudice ne se pose pas ;
ATTENDU toutefois qu’il n’est pas contesté que le comptable ne disposait pas des ordres de mission lorsqu’il a pris en charge le mandat susmentionné ; que la circonstance que leur production par les services et leur contrôle par le comptable auraient retardé la paie des agents de la communauté d’agglomération et que ces opérations seraient contraires aux objectifs du contrôle sélectif de la dépense est sans effet sur l’appréciation de sa responsabilité ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « les comptables sont personnellement et pécuniairement responsables (…) du paiement des dépenses (…) » et que leur « responsabilité personnelle et pécuniaire (…) se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée (…) » ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 19 du décret susvisé du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, « le comptable est tenu d’exercer le contrôle : (…) 2° S’agissant des ordres de payer : (…) d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à l’article 20 (…) » ; que selon l’article 20, « le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur (…) la production des pièces justificatives (…) » ; que l’article 38 dispose que « lorsqu’à l’occasion de l’exercice des contrôles prévus au 2° de l’article 19 le comptable public a constaté des irrégularités (…), il suspend le paiement et en informe l’ordonnateur » ;
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède que M. Y... a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire en s’abstenant de suspendre le paiement du mandat visé dans le réquisitoire alors qu’il ne disposait pas des ordres de mission dont la nomenclature des pièces justificatives des dépenses des collectivités territoriales et des établissements publics locaux impose la production préalablement au remboursement des frais de déplacement correspondants ;
Sur le préjudice financier
ATTENDU qu’aux termes des deuxième et troisième alinéas du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce (…). Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante (…) » ;
ATTENDU qu’il ressort des réponses de M. Y... et des pièces produites à l’appui que des ordres de mission concernant les agents dont les frais de déplacement ont été remboursés sur le fondement du mandat visé dans le réquisitoire avaient été préalablement établis et que des états de frais attestaient de la réalité de leurs déplacements ; qu’il en résulte que les remboursements réalisés par M. Y... étaient dus et que, comme le procureur financier en a convenu dans ses conclusions susvisées, la dépense correspondante n’a donc pas causé de préjudice à la communauté d’agglomération ;
ATTENDU que le montant maximal de la somme prévue au paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 a été fixé par le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 susvisé à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable, soit en l’espèce 265,50 € au titre de 2014, le cautionnement du comptable s’établissant à 177 000 € pour cet exercice ;
ATTENDU qu’eu égard aux circonstances de l’espèce, notamment le fait que, contrairement à ce qu’a soutenu M. Y..., la production des pièces justificatives des frais de déplacement pouvait être dissociée de celles concernant la paie des agents de la COGA, il convient de l’obliger à s’acquitter d’une somme non rémissible d’un montant de 265,50 € au titre de l’exercice 2014 ;
Charge n° 5 : Mandats n° 2836 du 21 juillet 2014 de 522,56 € réglé à M. et Mme B...
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé du 29 mars 2017, le procureur financier a requis la chambre au motif que, sur le fondement du mandat susmentionné, imputé au compte 6257,
M. Y... a payé la facture n° 2014/11 du 17 avril 2014 faisant référence au bon de commande n° 2014000866 et relative à l’hébergement de Mme C... du 24 mars au 16 avril 2014 inclus, pour un montant de 522,56 €, alors que la même facture faisant référence au même bon de commande et relative à l’hébergement de la même personne au cours de la même période avait été payée pour le même montant sur le fondement du mandat n° 2647 du 27 juin 2014 ; qu’ainsi le comptable paraissait avoir effectué un double paiement et qu’il n’avait pas apporté la preuve de sa régularisation ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU qu’en réponse au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur, M. Y... a reconnu que la facture visée dans le réquisitoire avait été payée deux fois ; qu’il a expliqué que les systèmes informatiques du poste comptable étaient paramétrés pour déceler d’éventuels doubles mandatements mais qu’en l’espèce, le premier mandat avait été enregistré dans une ancienne application le 27 juin 2014 alors que le second l’avait été le 21 juillet dans une nouvelle application déployée le 1er juillet 2014 et que l’absence de lien entre l’ancienne et la nouvelle application n’avait pas permis de détecter cette anomalie ;
ATTENDU toutefois que cette circonstance est sans effet sur l’appréciation de la responsabilité du comptable ;
ATTENDU qu’aux termes du paragraphe I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « les comptables sont personnellement et pécuniairement responsables (…) du paiement des dépenses (…) » et que leur « responsabilité personnelle et pécuniaire (…) se trouve engagée dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée (…) » ;
ATTENDU qu’aux termes de l’article 19 du décret susvisé du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, « le comptable est tenu d’exercer le contrôle : (…) 2° S’agissant des ordres de payer : (…) e) Du caractère libératoire du paiement (…) » ; que l’article 38 dispose que « lorsqu’à l’occasion de l’exercice des contrôles prévus au 2° de l’article 19 le comptable public a constaté des irrégularités (…), il suspend le paiement et en informe l’ordonnateur » ;
ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède que M. Y... a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire en s’abstenant de suspendre le paiement du mandat visé dans le réquisitoire alors que la facture correspondante avait déjà été payée sur le fondement d’un mandat antérieur ;
Sur le préjudice financier
ATTENDU qu’aux termes des deuxième et troisième alinéas du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce (…). Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante (…) » ;
ATTENDU que M. Y... a apporté la preuve du reversement de la somme payée deux fois, intervenu le 20 juin 2017 à la suite de l’émission d’un titre de recettes le 25 avril 2017 ; qu’il y a donc lieu de considérer que le manquement du comptable n’a pas causé de préjudice à la communauté d’agglomération ;
ATTENDU que le montant maximal de la somme prévue au paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 a été fixé par le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 susvisé à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable, soit en l’espèce 265,50 € au titre de 2014, le cautionnement du comptable s’établissant à 177 000 € pour cet exercice ;
ATTENDU qu’eu égard aux circonstances de l’espèce, en particulier le reversement obtenu par le comptable, il n’y a pas lieu de l’obliger à s’acquitter d’une somme non rémissible ;
Par ces motifs :
DÉCIDE :
Article 1er : Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X... ou de M. Y... au titre de la charge n° 1.
Article 2 : Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X... ou de M. Y... au titre de la charge n° 2.
Article 3 : Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Y... au titre de la charge n° 3.
Article 4 : En ce qui concerne la charge n° 4, une somme non rémissible d’un montant de 265,50 € est mise à la charge de M. Y... au titre de l’exercice 2014.
Article 5 : Il n’y a pas lieu d’obliger M. Y... à s’acquitter d’une somme non rémissible au titre de la charge n° 5.
Article 6 : M. X... est déchargé de sa gestion pour les exercices 2011 et 2012, au 1er janvier, et déclaré quitte et libéré de sa gestion terminée à cette dernière date.
Mainlevée peut être donnée et radiation peut être faite de toutes oppositions et inscriptions mises ou prises sur ses biens meubles et immeubles ou sur ceux de ses ayants cause pour sûreté de ladite gestion et ses cautionnements peuvent être restitués ou ses cautions dégagées.
Article 7 : M. Y... est déchargé de sa gestion pour les exercices 2012, du 2 janvier, et 2013.
Article 8 : Il est sursis à la décharge de M. Y... pour sa gestion au titre de l’exercice 2014 dans l’attente de l’apurement de la somme non rémissible mentionnée à l’article 4.
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur, le cinq septembre deux mille dix-sept.
Présents : M. Louis Vallernaud, président de la chambre, président de séance, M. Didier Rouquié, Mme Evelyne Gauchard-Mcquiston et M. Renan Mégy, premiers conseillers, et M. Pierre Genève, conseiller.
La greffière adjointe,
Béatrice BAH |
Le président de la chambre, président de séance
Louis VALLERNAUD
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La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
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