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cour des comptes
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quatrieme chambre
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TROISIEME SECTION
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Arrêt n° 55335
INSTITUT FRANÇAIS DE ZAGREB
Exercice 2001
Rapport n° 2009-339-0
Séance du 28 mai 2009
Lecture publique du 25 juin 2009
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DES COMPTES a rendu l’arrêt suivant :
LA COUR,
Vu le réquisitoire à fin d’instruction de charge du Procureur général près la Cour n° 2009-1 RACD du 12 janvier 2009 ;
Vu l’arrêté conservatoire de débet en date du 26 mai 2005, transmis à la Cour le 12 janvier 2009, par lequel le trésorier-payeur général pour l’étranger a mis en jeu la responsabilité de M. X, en sa qualité d’agent comptable de l’INSTITUT FRANÇAIS DE ZAGREB du 1er septembre 2000 au 31 août 2002, pour l’exercice 2001 ;
Vu les notifications, intervenues le 29 janvier 2009, au trésorier-payeur général pour l’étranger, au secrétaire général du ministère des affaires étrangères et européennes pour transmission aux ordonnateurs de l’Institut français de Zagreb, ainsi qu’à M. X de l’ouverture de l’instruction par la Cour ;
Vu le bordereau d’observations de la trésorerie générale pour l’étranger en date du 10 novembre 2003 relatif au compte 2001 de l’Institut français de Zagreb et la réponse de M. Y, successeur de M. X, en date du 28 septembre 2004 ;
CR
Vu le bordereau en date du 25 mars 2005 par lequel le trésorier-payeur général pour l’étranger invitait M. X à produire différents justificatifs ou, à défaut, à rapporter la preuve du reversement dans la caisse de l’Institut français de Zagreb de la somme de 56 462,04 € ou toute justification utile à sa décharge et la réponse de M. X en date du 31 mars 2005 ;
Vu le Code des juridictions financières et notamment ses articles L. 142-1, D. 131-29, D.131-30, D. 131-31, D. 131-32, R. 112-8, R. 141-12 ;
Vu l'article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu l’article 125 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
Vu le décret n° 76-832 du 24 août 1976 relatif à l’organisation financière de certains établissements ou organismes de diffusion culturelle dépendant du ministère des affaires étrangères ;
Vu les comptes rendus par M. X, en qualité d’agent comptable de l’Institut français de Zagreb, pour l’exercice 2001, les pièces produites à l’appui de ces comptes et les éléments recueillis au cours de l’instruction ;
Vu le budget de l’Institut français de Zagreb pour l’exercice 2001 et l’arrêté d’approbation du ministre des affaires étrangères en date du 12 avril 2001 ;
Vu la décision modificative n° 1 modifiant le budget 2001 de l’Institut français de Zagreb de 2001 et la lettre d’approbation correspondante du ministre des affaires étrangères en date du 28 novembre 2001 ;
Vu la lettre du 27 juin 2002 par laquelle le ministre des affaires étrangères a fait savoir au directeur de l’Institut français de Zagreb et à l’agent comptable qu’il n’approuvait pas le projet de décision modificative n° 2 du budget de l’Institut pour 2001 transmise au ministère le 19 juin 2002, soit plus de huit mois après la date limite du 1er octobre prévue par les textes ;
Vu le rapport de M. Roch-Olivier Maistre, conseiller maître ;
Vu les conclusions du Procureur général de la République ;
Entendu, lors de l’audience de ce jour, M. Maistre, rapporteur, en son rapport, M. Feller, avocat général, en ses conclusions, M. X, agent comptable de l’Institut français de Zagreb, informé de l’audience, n’étant ni présent ni représenté ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et entendu M. Jean‑François Bernicot, conseiller maître, en ses observations ;
Par ces motifs,
STATUANT DEFINITIVEMENT,
ORDONNE :
Attendu que l’arrêté conservatoire de débet du trésorier-payeur général pour l’étranger par lequel il propose à la Cour de mettre en jeu la responsabilité de M.X repose sur le constat que le comptable n’a pas satisfait aux injonctions n° 1 et 2 qu’il avait formulées dans son bordereau susvisé du 25 mars 2005 ;
Attendu qu’à l’appui de son injonction n° 1 le trésorier-payeur général pour l’étranger relevait que « l’approbation de deux versions successives de la décision modificative n° 2 a été rejetée par le ministère de tutelle en raison d’une présentation tardive et de dépassements importants de crédits non autorisés. Un examen comparatif entre la décision modificative n°1, la dernière approuvée par le ministère de tutelle, et les dépenses engagées par l’agent comptable fait apparaître un dépassement de crédits de 347 782,00 FF à la fin de l’exercice. En conséquence, attendu que l’agent comptable et, le cas échéant, le ou les mandataires placés sous sa responsabilité directe, sont tenus de contrôler la disponibilité des crédits avant d’engager toute dépense, la somme de 347 782,00 FF, soit 53 019,02 €, devra être reversée par vos soins dans la caisse de l’établissement. »
Attendu qu’il résulte de l’examen des pièces budgétaires et comptables relatives à l’exercice 2001 et des éléments rassemblés durant l’instruction que, si le projet de budget de l’Institut français de Zagreb pour 2001 ainsi que la décision modificative n° 1 ont bien été approuvés respectivement par un arrêté du ministre des affaires étrangères en date du 12 avril 2001 et par une lettre du ministre du 28 novembre 2001, à l’inverse la décision modificative n° 2, transmise de manière tardive et en infraction aux délais réglementaires en vigueur le 19 juin 2002, a fait l’objet d’un rejet explicite par une lettre du même ministère en date du 27 juin 2002 ; qu’en conséquence le montant des dépenses autorisées au titre de l’exercice 2001 se limitait aux montants fixés par la décision modificative n° 1 telle qu’elle avait été approuvée par le ministère le 28 novembre 2001 ;
Attendu que l’examen compte par compte du compte financier de l’Institut français de Zagreb pour l’exercice 2001 fait ressortir des dépassements de dépenses au regard des crédits disponibles qui s’établissent, non pas à 347 782,00 € comme l’indique à tort l’arrêt conservatoire de débet précité, mais à un montant total de 490 799,14 FF, soit 74 931,16 € ;
Considérant qu’aux termes du décret n° 76-832 du 24 août 1976 qui fixe les règles applicables à l’organisation financière de certains établissements ou organismes de diffusion culturelle dépendant du ministère des affaires étrangères et du ministère de la coopération, la gestion financière et comptable de ces établissements est soumise aux dispositions de la première partie du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ainsi qu’aux dispositions de l’article 60 de la loi du 22 février 1963 ; que l’article 10 du décret précité de 1976 dispose que « les crédits ouverts au budget sont limitatifs » ; que l’article 11 du même décret indique que « dans le cas où l’exécution du budget fait apparaître une insuffisance de crédits, un projet de budget modificatif est soumis à l’approbation du ministre compétent dans les conditions fixées à l’article 8 ci-dessus. Ce projet doit être adressé au ministre compétent avant le 1er octobre de l’exercice en cours » ; que les articles 14 et suivants précisent les responsabilités de l’agent comptable et notamment que « lorsque l’agent comptable a suspendu le paiement des dépenses conformément aux dispositions de l’article 37 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, l’ordonnateur peut, par écrit et sous sa responsabilité, le requérir de payer. L’agent comptable défère à la réquisition, sauf dans les cas prévus à l’article 160 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, et rend compte au ministre dont il relève ainsi qu’au ministre de l’économie et des finances » ;
Considérant par ailleurs que l’article 11 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 souligne que « les comptables publics sont seuls chargés … du paiement des dépenses » ; que l’article 12 rappelle quant à lui que « les comptables sont tenus d’exercer en matière de dépenses le contrôle de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué ; de la disponibilité des crédits … » ; que l’article 27 du même texte précise que « les dépenses des organismes publics doivent être prévues à leur budget et être conformes aux lois et règlements » ; qu’enfin, l’article 37 du décret de 1962 indique que « lorsque, à l’occasion de l’exercice du contrôle prévu à l’article 12 (alinéa B) ci-dessus, des irrégularités sont constatées, les comptables publics suspendent les paiements et en informent l’ordonnateur » ;
Considérant qu’il résulte de l’ensemble des dispositions ainsi rappelées que les crédits des établissements culturels à l’étranger ont un caractère limitatif et que les dépenses doivent être contenues dans les limites de l’autorisation budgétaire, limites qui s’apprécient, en règle générale, par compte sauf pour les dépenses de rémunérations, de missions et de réceptions où elles s’apprécient par article ; qu’il est de la responsabilité du comptable de s’assurer de la disponibilité des crédits ; qu’il est également de la responsabilité du comptable de s’assurer de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué ; que, lorsqu’à l’occasion de l’exercice des contrôles précités, des irrégularités sont constatées, il est de la responsabilité du comptable public de suspendre les paiements et d’en informer l’ordonnateur ; que, le cas échéant, il peut être réquisitionné, dégageant alors sa propre responsabilité ;
Considérant que, dans le cas d’espèce, il est avéré que le comptable a procédé, sans être pour autant réquisitionné, à des paiements alors même que les crédits n’étaient pas disponibles ; qu’ainsi M. X a enfreint les dispositions précitées du règlement général sur la comptabilité publique et engagé sa responsabilité ; qu’en conséquence il doit être constitué débiteur de l’Institut français de Zagreb à hauteur des paiements effectués en dépassement des ouvertures de crédits autorisées, soit un montant total de 74 931,16 € ;
Attendu que par son injonction n° 2, le trésorier-payeur général pour l’étranger a enjoint au comptable de produire le contrat passé avec la société « UNEX » ; qu’il résulte de l’instruction et des pièces du dossier que le comptable n’a pas été en mesure de produire ce document justificatif du paiement effectué ;
Considérant que l’article 11 du RGCP rappelle que « les comptables publics sont seuls chargés : … du paiement des dépenses soit sur ordres émanant des ordonnateurs accrédités, soit au vu des titres présentés par les créanciers… » ; que l’article 12 précise qu’en matière de dépenses le comptable est tenu de s’assurer de « la validité de la créance dans les conditions prévues à l'article 13 ci-après » ; que ce dernier article indique qu’« en ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur : la justification du service fait et l'exactitude des calculs de liquidation ; l'intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications » ;
Considérant que, dans le cas d’espèce, le comptable n’a pas été en mesure de produire de justificatif à l’appui du paiement considéré ; qu’ainsi sa responsabilité est engagée au regard des obligations qui étaient les siennes en vertu du règlement général sur la comptabilité publique ; qu’en conséquence, il doit être constitué débiteur de l’Institut français de Zagreb à hauteur du paiement effectué sans justificatif, soit un montant total de 3 350,00 € ;
Attendu qu’à la suite de l’injonction n° 3 prononcé par le trésorier-payeur général pour l’étranger dans son bordereau précité du 25 mars 2005 demandant au comptable de produire toute pièce justifiant du règlement de 93,02 € à l’Institut français de Zagreb correspondant au paiement indu des frais d’hôtel et de téléphone de M. Z, M. X a fait valoir copie d’un chèque en date du 10 mars 2005 d’un montant de 93,02 € par lequel il a réglé, sur ses deniers personnels, la dépense correspondante ; qu’en conséquence, ayant satisfait à l’injonction précitée, acte doit lui être donné de ce reversement dans la caisse de l’Institut français de Zagreb ;
- Acte est donné à M. X du reversement dans la caisse de l’Institut français de Zagreb de la somme de 93,02 € ;
- M. X est constitué débiteur de l’Institut français de Zagreb de la somme totale de 78 281,16 €, portant intérêt au taux légal à compter de la date du 16 décembre 2008, date de notification de l’arrêté conservatoire de débet susvisé ;
STATUANT PROVISOIREMENT,
ORDONNE :
- Il est sursis à la décharge de MX de sa gestion à l’Institut français de Zagreb pour l’exercice 2001.
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Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, troisième section, le vingt-huit mai deux mil neuf. Présents : MM. Pichon, président, Bernicot, président de section, Billaud, Moreau, Barbé, Vermeulen, Guibert, Uguen, et Mme Gadriot‑Renard, conseillers maîtres.
Signé : Pichon, président, et Reynaud, greffier.
Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la Cour des comptes.
En conséquence, la République mande et ordonne à tous huissiers de justice sur ce requis de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Délivré par moi, secrétaire générale.