REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DES COMPTES a rendu l'arrêt suivant :

LA COUR,

Vu l'arrêt n° 49696 du 6 septembre 2007 par lequel elle a statué sur les comptes rendus par M. X, en qualité de comptable public d'AEROPORTS DE PARIS, pour les exercices 2001 à 2004, ce dernier exercice étant arrêté au 30 juin 2004 ;

Vu les justifications produites en exécution dudit arrêt par M. X, enregistrées au greffe central de la Cour le 3 mars 2008, le 1er avril 2008 et le 5 décembre 2008 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu les lois et règlements relatifs à Aéroports de Paris, notamment le décret n° 2004−621 du 29 juin 2004 portant modification des dispositions du code de l'aviation civile relatives au régime comptable d'Aéroports de Paris et l'arrêté du 29 juin 2004 relatif à la fin de gestion de l'agent comptable d'Aéroports de Paris ;

Vu la loi n° 63−156 du 23 février 1963, notamment son article 60 ;

Vu le décret n° 62−1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Vu la lettre de la greffière de la 7ème chambre en date du 4 novembre 2008 informant M. X de la tenue de l'audience publique de ce jour, ensemble l'accusé de réception signé le 7 novembre 2008 ;

Sur le rapport de M. Christophe Garat, conseiller référendaire ;

Vu les conclusions du Procureur général de la République ;

Entendu à l'audience publique M. Christophe Garat, conseiller référendaire, en son rapport, M. Yves Perrin, avocat général, en ses conclusions orales complémentaires, M. X, agent comptable, ayant eu la parole en dernier ;

Ayant délibéré à huis clos hors la présence du rapporteur et du ministère public et après avoir entendu M. Bruno Brochier, contre−rapporteur, en ses observations ;

CONSTATE :

Le total brut des soldes de la balance au 30 juin 2004, date de clôture de l'exercice 2004, égaux en débit et en crédit, est arrêté à 7 590 432 982,59 euros ;

STATUANT DEFINITIVEMENT,

ORDONNE :

1− En ce qui concerne les exercices antérieurs

Attendu que, par décision ministérielle en date du 23 mars 2006, il a été accordé à M. X la remise gracieuse en principal et intérêts du débet prononcé à son encontre au titre de sa gestion du 1er septembre 1997 au 31 décembre 2000 ;

Attendu qu'il résulte de la levée de réserve ci−après prononcée qu'aucune injonction ni charge ne subsiste à son encontre pour sa gestion au titre des exercices 1999 et 2000 ;

M. X est déchargé de sa gestion pour la période comprise entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2000.

2− En ce qui concerne les exercices en jugement

Sur la réserve de l'arrêt du 6 septembre 2007

Attendu qu'une réserve a été prononcée sur les comptes des exercices 1999 à 2004 dans l'attente de la production des balances générales après répartition des comptes, dûment signées, retraçant les soldes débiteurs et créditeurs des bilans d'entrée et de sortie pour les exercices 2000 à 2004 ; que cette réserve était aussi motivée par l'attente de la production des balances des valeurs inactives, dûment signées, pour les années 2001, 2002, 2003 et 2004 ;

Attendu en premier lieu qu'au vu des balances générales produites par l'agent comptable, les soldes arrêtés à la clôture de l'exercice 1999 ont été exactement repris dans la balance d'entrée du compte de l'exercice 2000 ; que le correct enchaînement des soldes entre les exercices 2000 à 2004 a pu être vérifié et la ligne de compte au 30 juin 2004 tracée ; qu'en conséquence le premier motif de la réserve a trouvé une réponse satisfaisante ;

Attendu en deuxième lieu que le fonctionnement comptable d'ADP était assuré dans les conditions prévues pour les établissements publics à caractère industriel et commercial dotés d'un agent comptable par les articles 190 à 225 du décret du 29 décembre 1962, conformément aux dispositions de l'article R. 235−2 du code de l'aviation civile ; que l'article 219 dudit décret ne prévoit pas que le compte financier soit accompagné d'une balance des valeurs inactives ; que le second motif de la réserve prononcée par l'arrêt provisoire n'a plus lieu d'être ;

− La réserve portée sur les comptes des exercices 1999 à 2004 par l'arrêt du 6 septembre 2007 est levée.

Sur l'injonction prononcée par l'arrêt du 6 septembre 2007 a − sur la procédure

Attendu en premier lieu que l'affirmation de l'agent comptable selon laquelle les pièces utiles à sa défense ne lui auraient pas été toutes transmises n'est pas étayée d'une liste des pièces qui auraient fait défaut ; que l'affirmation selon laquelle le jugement provisoire reposerait sur des pièces non comprises dans le dossier n'est pas explicitée ;

Attendu que l'article R. 131−4 du code des juridictions financières dispose que « les comptables peuvent avoir communication des pièces sur lesquelles sont fondées les dispositions provisoires des arrêts. Les demandes de communication de pièces doivent être formulées par écrit au président signataire de l'arrêt qui informe le comptable des conditions dans lesquelles cette communication aura lieu » ;

Attendu que les pièces du dossier sur lesquelles est fondée l'injonction ont été transmises le 7 novembre 2007 par lettre du président de la 7e chambre à l'agent comptable, à la suite de sa demande du 25 octobre 2007 ; que le rapport à fin de deuxième arrêt ainsi que les conclusions du Procureur général lui ont aussi été transmis le 14 novembre 2008 après sa demande du

8 novembre 2008 ; que l'agent comptable a pu prendre connaissance de l'intégralité du dossier à la date de son choix, soit le 2 décembre 2008, comme suite à sa demande parvenue au greffe le 24 novembre 2008 ;

Attendu que l'agent comptable fait valoir que le jugement provisoire se réfèrerait à l'examen de la gestion précédente 1996−2000 et ne se fonderait sur aucun des éléments propres à la gestion 2001−2004 ;

Attendu que le fait que l'injonction de l'arrêt provisoire concerne des faits similaires sur le fond à ceux qui ont valu la mise en débet du comptable pour sa gestion précédente n'entraîne pas que les pièces des exercices en jugement n'aient pas été examinées et que des faits nouveaux à la décharge du comptable n'aient pas été recherchés ;

Attendu que la discussion de l'éventuelle insuffisance des pièces pour justifier la mise en jeu de la responsabilité du comptable fait partie intégrante du caractère contradictoire de la procédure qui ne peut être considérée comme parvenue à son terme qu'au prononcé de l'arrêt définitif ;

Considérant en conséquence que M. X a été mis en mesure de pouvoir répondre aux charges provisoires soulevées par l'injonction, conformément aux dispositions procédurales en vigueur jusqu'au 31 décembre 2008 ;

Attendu en deuxième lieu que les documents produits par M. X tendant à prouver l'absence de préjudice lié aux paiements visés par l'arrêt provisoire ne concernent pas les versements effectués au cours des exercices en jugement, mais ceux de la gestion 1996−2000 ; qu'en outre, l'arrêt provisoire ne s'est pas prononcé sur la question du préjudice que les paiements en cause auraient pu entraîner ; que la mise en débet d'un comptable n'est pas liée à la reconnaissance d'un préjudice ;

Considérant en conséquence que ce moyen est dénué de lien avec l'injonction de l'arrêt provisoire ; b − sur le fond

Attendu que, par l'arrêt susvisé du 6 septembre 2007, la Cour avait formulé une injonction de reversement à défaut d'autres justifications à décharge, d'un montant de 6 136 279,23 € correspondant à cinq règlements, retracés dans le tableau suivants, effectués au bénéfice d'Air France en l'absence de base juridique valide et sans contrôle de l'exactitude des calculs de liquidation ;

Date de règlement

N° de pièce SAP

Montant TTC en €

Libellé

03.12.2001

1500064375

101 616,61

AF J2/J3 1999 Fre 1800000442

03.12.2001

1500064373

189 136,63

J2/J3 1998 Fre 1800000445

03.12.2001

1500064380

48 538,80

J2/J3 1 trim 2000

03.12.2001

1500064381

1 506 845,40

J2/J3 1t2001 Fre1800000438

03.12.2001

1500064377

4 290 141,79

J2/J3 2/3 T 2000 Fre 1800000435

To

tal

 

6 136 279,23€

Attendu que, dans sa réponse, l'agent comptable n'a pas produit de pièces justifiant la validité de ces paiements en lieu et place des conventions, dites J2 et J3, devenues caduques depuis respectivement 1992 et 1989 ;

Attendu que l'agent comptable fait valoir que ces règlements constituaient des compléments aux paiements faits pour deux d'entre eux, la mise en œuvre d'une indexation pour deux autres et une facturation provisoire pour le dernier ;

Considérant que la nature de ces paiements ne constitue pas une réponse recevable ; que l'absence de justification valable aux paiements conduit elle seule à constituer l'agent comptable débiteur ;

Considérant que l'exactitude ou l'inexactitude des calculs de liquidation n'est dès lors pas en cause, non plus que le caractère provisoire d'une des factures visées par l'injonction ;

Attendu que l'agent comptable fait valoir que « les paiements en cause ont été effectués après certification du service fait, la Cour occultant les procédures spécifiques de contrôle des opérations comptables organisées au sein du progiciel SAP » ; que les factures en cause portent certification du service fait ;

Attendu cependant que l'injonction de l'arrêt provisoire n'était pas fondée sur l'absence d'une telle mention ; qu'en outre, la question de la fiabilité d'un progiciel de gestion comptable est

indépendante de celle liée aux pièces justificatives sur lesquelles, indépendamment de leur support matériel, tout comptable public doit pouvoir s'appuyer pour remplir les obligations auxquelles il est tenu au regard des dispositions de l'article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963 et de celles du décret susvisé du 29 décembre 1962 ;

Considérant en conséquence que ce moyen est sans effet ;

Considérant qu'en application des articles 12 et 13 du décret susvisé du 29 décembre 1962, les comptables sont tenus de contrôler la validité des créances et de s'assurer à cette fin de la production des justifications ; qu'en vertu de l'article 37 dudit décret, lorsqu'ils constatent à cet égard des irrégularités, ils doivent suspendre les paiements ; qu'à défaut de le faire, leur responsabilité personnelle et pécuniaire est engagée en application de l'article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963 ;

Considérant qu'il y a lieu de constituer M. X débiteur d'Aéroports de Paris pour la somme de 6 136 279,23 € ;

Considérant que, aux termes du paragraphe VIII de l'article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963, les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics ; qu'en l'occurrence cette date est celle de l'arrêt provisoire du 6 septembre 2007 ;

− L'injonction de l'arrêt du 6 septembre 2007 est levée ;

− M. X est constitué débiteur d'Aéroports de Paris pour la somme de 6 136 279,23 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 6 septembre 2007.

Attendu qu'aucune charge ni injonction ne subsiste à l'encontre de l'agent comptable pour les exercices 2002, 2003 et 2004, ce dernier étant arrêté au 30 juin ;

− M. X est déchargé de sa gestion pour la période comprise entre le 1er janvier 2002 et le 30 juin 2004 ;

*

*       *

Attendu que la décharge de M. X pour sa gestion du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2001 ne pourra intervenir qu'après apurement du débet ci−dessus prononcé ;

− Il est sursis à sa décharge pour l'exercice 2001.

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Fait et jugé en la Cour des comptes, septième chambre, première section, le dix décembre deux mil huit. Présents : MM. Descheemaeker, président, Levy, président de section, MM. Hernandez, président de chambre faisant fonction de conseiller maître, Devaux, Lafaure, Gautier, Brochier, Mme Froment−Védrine et M. Le Méné, conseillers maîtres.

Signé : Descheemaeker, président, et Jouhaud, greffière.

Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la Cour des comptes.

En conséquence, la République mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance, d'y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique, de prêter main−forte, lorsqu'ils en seront légalement requis.

Délivré par moi, secrétaire générale.

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