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COUR DES COMPTES

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premiere CHAMBRE

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premiere section

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Arrêt n° 55265

COMPTABLES DES IMPOTS

DE LA LOIRE

 

RECETTE PRINCIPALE

DE SAINT-ETIENNE NORD-EST

 

Exercice 2001 (suites)

 

Rapport n° 2009-286-0

 

Audience publique du 19 mai 2009

 

Lecture publique du 24 novembre 2009

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DES COMPTES a rendu l’arrêt suivant :

LA COUR,

Vu l'arrêt n° 47895 en date du 13 décembre 2006, envoyé à fin de notification le 23 mars 2007, par lequel elle a statué provisoirement sur la gestion des comptables des impôts de la direction des services fiscaux de la Loire pour les exercices 1999 à 2004 ;

Vu les justifications produites en exécution dudit arrêt ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret n° 77-1017 du 1er septembre 1977 relatif à la responsabilité des comptables des administrations financières ;

Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

MNT


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Vu l'arrêté modifié n° 06-346 du 10 octobre 2006 du premier président de la Cour des comptes portant création et fixant la composition des sections au sein de la Première chambre ;

Sur le rapport de M. Deconfin, conseiller maître ;

Vu les conclusions n° 257 du 3 avril 2009 du procureur général de la République ;

Vu la lettre du 28 avril 2009 informant Mme X de la date de la présente audience, ensemble l’accusé de réception de cette lettre ;

Vu la lettre du 10 mai 2009 dans laquelle Mme X, d’une part, indique qu’elle est dans l’impossibilité de participer à l’audience, et d’autre part, présente diverses observations ;

Entendu à l’audience publique de ce jour, M. Deconfin, en son rapport oral, et M. Perrin, avocat général, en ses conclusions orales, Mme X ne s’étant pas présentée à l’audience ;

Ayant délibéré hors la présence du rapporteur et du ministère public et après avoir entendu M. Xavier-Henri Martin, conseiller maître, en ses observations ;

STATUANT DEFINITIVEMENT

ORDONNE :

Mme X comptable

Exercice 2001

Débet

Attendu que la société civile de construction-vente du 14/18 cours Gustave Nadaud était redevable d’un montant de 121 197,58 euros de taxe sur la valeur ajoutée, mis en recouvrement par avis du 4 novembre 1996 ; que cette société a été déclarée en liquidation judicaire le 17 décembre 1996, par jugement publié au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales du 19 janvier 1997 ; que son capital social était constitué de 200 parts, réparties entre la SARL Forézienne de promotion immobilière (SFPI), détentrice de 198 parts et M. Y, détenteur de 2 parts ; que celui-ci a été déclaré solidaire du paiement des droits dus par la société civile immobilière par jugement du tribunal de grande instance du 10 juillet 1997, en application de l’article 1745 du code général des impôts ; que ce jugement  lui a été signifié par voie d’huissier le 3 décembre 1997 ; qu’aucune mesure conservatoire n’a été prise afin d’interrompre valablement la prescription à l’égard de M. Y, la mise en demeure notifiée à l’intéressé le 31 juillet 2000, non suivie de saisie, n’étant pas interruptive de la prescription et l’avis à tiers détenteur du 21 janvier 2001, délivré au locataire d’un local dont M. Y n’était plus propriétaire depuis le 5 mai 1998, ne constituant pas un acte interruptif  de la prescription ;

Attendu, dans ces conditions, que la prescription de l’action en recouvrement à été acquise à M. Y le 3 décembre 2001 à minuit, à l’expiration du délai quadriennal qui a commencé à courir le jour de la signification du jugement le déclarant solidaire du paiement des droits dus, soit sous la gestion de Mme X, comptable en poste du 5 avril 1991 au 7 juin 2002 ; que la Cour a donc enjoint à Mme X d’apporter la preuve du versement de la somme de 121 197,58 euros ou toute justification à décharge ;

Attendu qu’en réponse à l’injonction, Mme X indique que M. Y, dont les biens immobiliers étaient hypothéqués au profit de banques créancières de premier rang et qui ne percevait plus de revenus, était insolvable ;

Attendu que dans son rapport au directeur des services fiscaux du 7 novembre 2003, M. Z, successeur de Mme X, fait état de recherches au premier bureau de la conservation des hypothèques de Saint-Etienne pour connaître la situation du patrimoine de M. Y ; que ces recherches ont permis de constater la cession de 1997 à 2000, de biens de communauté (trois ventes pour un montant total de 450 000 F, soit 68 602 euros) et de 1996 à 2001, de biens en indivision avec sa mère (dix ventes pour un montant de 2 198 000 F soit 335 082 euros) ; que, toujours selon le rapport de M. Z, bien que grevés de sûreté, « ces biens ont été cédés sans l’intervention des créanciers hypothécaires, ce qui laisse à penser que M. Y a disposé d’un actif lui permettant d’envisager le désintéressement de ses multiples créanciers » ; que dans ce même rapport, M. Z indique que des possibilités de recouvrement paraissent exister et que des poursuites ont été reprises récemment contre M. Y dans une autre affaire, la SCI Le Vigny ;

Attendu que dans sa lettre du 10 mai 2009 susvisée, Mme X fait observer que les dates et montants des ventes de biens de M. Y de 1997 à 2000 et de ceux en indivision avec sa mère ne sont pas précisés ; que les ventes faites en 1996 et 1997 ne pouvaient être appréhendées, M. Y n’ayant été déclaré personnellement responsable du paiement des dettes de la société que le 10 juillet 1997, date du jugement l’ayant condamné au paiement solidaire des droits dus par la société ; que pour cette raison il serait utile de connaître le montant des ventes de 1996 et de 1997 ;

Considérant que Mme X n’a pas contesté le fait qu’aucune diligence n’avait été effectuée en vue de recouvrer la créance et d’interrompre la prescription de l’action en recouvrement ; qu’elle invoque la seule insolvabilité de M. Y pour expliquer son inaction ; que ce moyen serait fondé si Mme X établissait que M. Y était insolvable à la date de la notification du jugement le déclarant solidaire du paiement des droits dus par la société ; qu’elle n’apporte pas cette preuve ;

Considérant que Mme X fait également valoir que la Recette avait à gérer un millier de restes à recouvrer, ce qui rendait les diligences difficiles à mettre en œuvre ; qu’à le supposer fondé, ce moyen ne peut être invoqué qu’à l’appui d’une demande de remise gracieuse ;

Considérant que la responsabilité du comptable du fait du recouvrement des recettes s’apprécie au regard de l’étendue de ses diligences qui doivent être rapides, complètes et adéquates ; qu’en n’effectuant valablement aucune poursuite en temps utile, la comptable ne s’est pas acquittée de ses obligations et a donc engagé sa responsabilité ;

Considérant qu'aux termes de l'article 60 modifié susvisé de la loi n° 63-156 du 23 février 1963, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2001 : « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes » (paragraphe I) ; cette responsabilité « se trouve engagée dès lors qu'une recette n'a pas été recouvrée » (paragraphe IV) ; « le comptable public dont la responsabilité pécuniaire est engagée ou mise en jeu a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels une somme égale au montant de la perte de recette subie » (paragraphe VI) ; « le comptable public dont la responsabilité est engagée ou mise en jeu et qui n'a pas versé la somme prévue au paragraphe VI cidessus peut être constitué en débet par arrêt du juge des comptes » (paragraphe VII) ;

Considérant que Mme X n’a ni satisfait à l’injonction de versement prononcée par l’arrêt susvisé du 13 décembre 2006, ni fourni de justification fondée à décharge ; qu’elle se trouve dans le cas prévu par le paragraphe VII de l’article 60 précité de la loi du 23 février 1963 ; qu’il y a donc lieu de la constituer débitrice de l’État de la somme de 121 197,58 euros ;

Considérant que le déficit de 121 197,58 euros, ayant fait l'objet d'un premier acte de mise en jeu de la responsabilité du comptable avant le 1er juillet 2007, les intérêts du débet qui en résulte sont  régis en l’espèce par les dispositions de l'article 60-VIII de la loi n° 63-156 du 23 février 1963, en vigueur au 31 décembre 2001, selon lesquelles : « les débets portent intérêt au taux légal à compter de la date du fait générateur » ; que le fait générateur est l’évènement qui est à l’origine de l’engagement de la responsabilité pécuniaire et personnelle du comptable ; qu’en l’espèce, la date du fait générateur est celle du premier jour qui a suivi la prescription de l’action en recouvrement, soit le 4 décembre 2001 ;

Par ces motifs,

- l'injonction unique de l’arrêt susvisé du 13 décembre 2006 est levée.

- Mme X est constituée débitrice envers l'État, de la somme de cent vingt et un mille cent quatre vingt dix sept euros cinquante huit centimes, augmentée des intérêts de droit à compter du 4 décembre 2001.

 

Aucune charge sur 2001, autre que celle ayant conduit à la constitution du débet ci-dessus prononcé ne subsiste à l’encontre de Mme X.

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Fait et jugé en la Cour des comptes, première chambre, première section, le dix neuf mai deux mille neuf. Présents : MM. Malingre, président de section, XavierHenri Martin, Mme Moati et M. Lair, conseillers maîtres.

Signé : Malingre, président de section, et Rackelboom, greffier.

Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la Cour des comptes.

En conséquence, la République mande et ordonne à tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près des tribunaux de grande instance, d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de force publique, de prêter main-forte, lorsqu’ils en seront légalement requis.

Délivré par moi, secrétaire générale.

Pour la Secrétaire générale
et par délégation
le Chef du Greffe Central par intérim

 

 

 

Catherine PAILOT-BONNÉTAT
Conseillère référendaire