COUR DES COMPTES

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CHAMBRES REUNIES

 

FORMATION RESTREINTE

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       Arrêt n° 55531

GESTION DE FAIT DES DENIERS

L’ASSOCIATION DES AMIS DE MERU (AMI)

 

Rapport n° 2009-311-0

 

Audience publique du 27 mai 2009

 

Lecture publique du 15 juillet 2009

 

 

 

LA COUR DES COMPTES a rendu l’arrêt suivant :

LA COUR,

Vu la décision du Conseil d’État du 16 juin 2008 par laquelle celui-ci a annulé l’arrêt 43673 rendu par la Cour des comptes le 24 novembre 2005 qui rejetait la requête des gestionnaires de fait de la commune de Méru (Oise) visant à l’annulation du jugement de la chambre régionale de Picardie, rendu le 15 novembre 2004, sur les comptes de la gestion de fait de l’association « les amis de Méru Information (AMI) » et a renvo l’affaire devant la Cour des comptes ;

Vu le jugement n° 980-104 du 30 avril 1998 par lequel la chambre régionale des comptes de Picardie, statuant à titre définitif, a déclaré comptables de fait de la commune de Méru (Oise), MM. X et Y, respectivement maire et président de l’association « les amis de Méru Information (AMI) » ;

Vu le compte produit au juge des comptes par les auteurs de la gestion irrégulière le 23 octobre 1997 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu l'article 60-XI de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Vu l'arrêté n° 09-001 du Premier président constituant pour l'année judiciaire 2009 les formations plénière et restreinte des chambres réunies ;

Vu les lettres en date du 12 mai 2009 informant les comptables de fait et la commune de la date de l’audience publique du 27 mai 2009, ensemble les accusés de réception de ces lettres ;

Sur le rapport de M. Doyelle, conseiller maître ;

Vu les conclusions du procureur général de la République ;

Vu la transmission du rapport et des conclusions à l’avocat des comptables de fait et à la commune ;

Vu le mémoire en réplique enregistré au greffe le 25 mai 2009 de l’avocat de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, représentant MM. X et Y et sa transmission à la commune ;

Vu la note en délibéré déposée par l’avocat de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, représentant MM. X et Y ;

Entendu, lors de l’audience publique du 27 mai 2009, M. Doyelle en son rapport et M. Bénard, procureur général de la République, en ses conclusions, l’avocat des requérants et M. X ayant été entendu, la défense ayant eu la parole en dernier ;

Attendu que par décision du  16 juin 2008 le Conseil d’État a, annulé l’arrêt 43673 rendu par la Cour des comptes le 24 novembre 2005 par lequel elle avait rejeté la requête de MM. X et Y visant à l’annulation du jugement n° 2004-0166 du 15 octobre 2004 par lequel la chambre régionale des comptes de Picardie a fixé définitivement la ligne de compte de la gestion de fait de l'association « les amis de Méru Information (AMI) » les a déclarés conjointement et solidairement débiteurs des deniers de la commune à hauteur de 95 285,98 €, ladite somme portant intérêt à compter du 31 décembre 1995, et les a condamnés au paiement d'une amende de 300 € chacun à raison de leur immixtion dans les fonctions de comptable public ;

Attendu que par un même jugement du 30 avril 1998 la chambre régionale des comptes a d’une part déclaré la gestion de fait et d’autre part s’est prononcée, à titre provisoire sur le jugement des comptes de l’association, le Conseil d’État, considérant que la composition de la formation de jugement de la chambre régionale des comptes était irrégulière, le rapporteur ayant participé au délibéré dont il avait eu à connaître à l’occasion de son contrôle, a énoncé que ledit jugement n’est passé en force de chose jugée qu’en tant qu’il a déclaré la gestion de fait ;

Attendu que le Conseil d’État a précisé que la seule circonstance de lirrégularité de la formation ayant rendu le jugement du 30 avril 1998 a, malgré l’intervention d’autres jugements provisoires avant le jugement définitif du 15 octobre 2004, entaché d’irrégularité l’ensemble de la procédure de jugement des comptes et de sanction des comptables de fait devant la chambre régionale des comptes et qu’ainsi, ces jugements provisoires des 28 novembre 2000 et 2 décembre 2003, nuls et sans effets, sont, au même titre que le jugement provisoire du 30 avril, réputés ne pas avoir existé ; qu’en conséquence, ils ne peuvent constituer en soi un acte interruptif du délai de prescription et doivent, comme le jugement définitif, être annulés ;

Attendu que l'article 60-XI de la loi n°63-156 du 23 février 1963 modifiée prévoit que : « Les gestions irrégulières entraînent, pour leurs auteurs, déclarés comptables de fait les mêmes obligations et responsabilités que les gestions patentes pour les comptables publics » ; qu’il en résulte que les auteurs de la gestion irrégulière, qui avaient produit leur compte le 23 octobre 1997, ne sont tenus de rendre des comptes qu’après avoir été déclarés comptables de fait et qu’ainsi c’est le 30 avril 1998, date du jugement qui leur a reconnu cette qualité, qui doit être retenu comme date de production du compte de la gestion de fait ;

Attendu que l'article 60-IV de la loi n°63-156 du 23 février 1963 modifiée par la loi n°2008-1091 du 28 octobre 2008 prévoit en son alinéa 2 que : « le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité ne peut intervenir au-delà du 31 décembre de la cinquième année suivant celle au cours de laquelle le comptable a produit ses comptes au juge des comptes… dès lors qu'aucune charge n'a été notifiée dans ce délai à son encontre, le comptable est déchargé de sa gestion au titre de l'exercice concerné. Dans le cas où le comptable est sorti de fonction au cours de cet exercice et si aucune charge n'existe ou ne subsiste à son encontre pour l'ensemble de sa gestion, il est quitte de cette gestion» ;

Attendu que ce même article dispose en son alinéa 3 que : « pour les comptes et les justifications des opérations qui ont été produits au plus tard le 31 décembre 2004, le délai prévu à l'alinéa précédent est décompté à partir de la production de ces comptes ou justifications » ;

Attendu que la procédure de jugement du compte de la gestion de fait ayant été entièrement viciée aucun acte pouvant être pris en considération n’est intervenu depuis le 30 avril 1998, date à laquelle les comptes ont été produits ; que dès lors MM. X et Y sont réputés être déchargés et quittes de leur gestion depuis le 1er janvier 2004.

Par ces motifs,

STATUANT DEFINITIVEMENT,

ORDONNE :

 

Les jugements provisoires sur la gestion de fait de l’association « les amis de Méru Information (AMI) » des 30 avril 1998, 28 novembre 2000 et 2 décembre 2003 et le jugement n° 2004-0166 du 15 octobre 2004 rendus par la chambre régionale des comptes de Picardie sont annulés.

Fait et jugé en la Cour des comptes, toutes chambres réunies en formation restreinte, le vingt-sept mai deux mille neuf. Présents : M. Pichon, président de chambre, président de séance, MM. Lebuy, Duret, Ritz, Durrleman, Mmes Levy-Rosenwald et Fradin et M. Korb, conseillers maîtres.


Signé : Pichon, président, et Depasse, greffier.

Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la Cour des comptes et délivré par moi, secrétaire générale.

Pour la Secrétaire générale

et par délégation

le Chef du greffe central par intérim

 

 

 

 

 

Catherine PAILOT-BONNETAT

Conseillère référendaire

 

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