Deuxième section

 

Jugement n° 2018-0006

 

Audience publique du 4 juin 2018

 

Prononcé du 19 juin 2018

 

CENTRE HOSPITALIER « COSTE FLORET »

À LAMALOU-LES-BAINS

 

Poste comptable : Centre des finances publiques de Lamalou-les-Bains

 

 codique : 034042 501

 

Exercice 2014 (à compter du 3 février)

 

 

 

 

 

La République Française

Au nom du peuple français

 

 

La Chambre,

 

 

 

VU les comptes, rendus en qualité de comptable du centre hospitalier « Coste Floret » à Lamalou-les-Bains, par M. X…, du 3 février au 31 décembre 2014 ;

 

VU le réquisitoire, pris le 28 mars 2018 et notifié le 3 avril 2018, par lequel le procureur financier près la chambre régionale des comptes a saisi la juridiction de charges présomptives à lencontre dudit comptable au titre dune opération relative à lexercice 2014 (à compter du 3 février) ;

 

VU les justifications produites au soutien du compte ;

 

VU larticle 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

 

VU le code des juridictions financières ;

 

VU les lois et règlements applicables aux établissements publics de santé ;

 

VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

 

VU le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

 

VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de larticle 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de larticle 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;

 

VU le rapport de Mme Valérie RENET, présidente de section, magistrate chargée de linstruction ;

 

VU les conclusions de M. Denys ECHENE, procureur financier près la chambre ;

 

VU les pièces du dossier ;

 

ENTENDU, lors de laudience publique du 4 juin 2018, Mme Valérie RENET, présidente de section, en son rapport et M. Denys ECHENE, procureur financier, en ses conclusions ;

 

ENTENDU, lors de laudience publique du 4 juin 2018, M. X…, comptable du centre hospitalier « Coste Floret » à Lamalou-les-Bains ;

 

Après avoir délibéré hors la présence de la rapporteure et du procureur financier près la chambre, lordonnateur nétant ni présent ni représenté à laudience publique ;

 

 

 

Sur la présomption de charge unique, soulevée à lencontre de M. X…, au titre de lexercice 2014 :

 

 

1 -     Sur le réquisitoire

 

ATTENDU quen application de larticle 60, alinéa I, de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes ; quaux termes de larticle 18 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, ils sont seuls chargés de la prise en charge et du recouvrement des ordres de recouvrer qui leur sont remis par les ordonnateurs ; quainsi, à compter de la prise en charge dun titre de recettes, les comptables sont tenus de poursuivre le recouvrement des créances en opérant des diligences adéquates, complètes et rapides pour en éviter la prescription ; quen application de larticle L. 1617-5-3° du code général des collectivités territoriales, cette action de recouvrement se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre si ce délai nest pas interrompu par un acte comportant reconnaissance de dette par le débiteur ou par un acte interruptif de la prescription ;

 

ATTENDU que sur ces fondements et par réquisitoire susvisé du 28 mars 2018, le procureur financier près la chambre régionale des comptes a requis la juridiction au motif que, en labsence de justification de poursuites valablement notifiées au débiteur, le titre n° 3999 dun montant de 79 048,50  pris en charge le 31 décembre 2010 sur le compte 41151 du budget principal au nom de « GEHA FOREIGN CLAIMS DEPARTMENT » est atteint par la prescription depuis le 31 décembre 2014, soit durant la gestion de M. X…, lequel na pas émis de réserves à lencontre de son prédécesseur ;

 

ATTENDU que la responsabilité du comptable pourrait dès lors être engagée pour un total de 79 048,50  au titre de lexercice 2014 ;

 

 

2 -     Sur lexistence dun manquement du comptable à ses obligations

 

Sur le droit applicable

 

ATTENDU quen application de larticle 18 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, les comptables sont seuls chargés de la prise en charge et du recouvrement des ordres de recouvrer qui leur sont remis par les ordonnateurs ; que larticle L. 6145-9 du code de la santé publique dispose que « les créances des établissements sont recouvrées comme il est dit à larticle L. 1611-5 et à larticle L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales » ; que larticle L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales prévoit en son 3ième alinéa que « laction des comptables publics chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recettes. Le délai de quatre ans mentionné à lalinéa précédent est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription » ;

 

ATTENDU que selon le premier alinéa de larticle 60-I de la loi du 23 février susvisée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables, entre autres, du recouvrement des recettes ;

 

ATTENDU quil est de jurisprudence constante que les comptables doivent apporter la preuve des diligences « adéquates, complètes et rapides » quils ont engagées pour obtenir le recouvrement des créances prises en charge ;

 

ATTENDU que, conformément au troisième alinéa larticle 60-I de la loi du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables se trouve engagée dès lors que, notamment, une recette na pas été recouvrée ;

 

 

Sur les faits

 

ATTENDU quil demeure en solde débiteur du compte 41151 « Autres tiers payants - mutuelles et compagnies dassurances » du budget principal un titre n° 3999 émis au nom dune mutuelle étrangère « GEHA FOREIGN CLAIMS DEPARTMENT » pour un total de 79 048,50 € correspondant à lhospitalisation dune patiente dorigine étrangère et pris en charge en comptabilité le 31 décembre 2010 ; quà défaut de preuve de lexercice de poursuites interruptives de prescription, ce titre aurait pu être prescrit, en application de larticle L. 1617-5-3° du code général des collectivités territoriales, depuis le 31 décembre 2014, soit durant la gestion de M. X… ;

 

 

Sur les éléments apportés à la charge et à la décharge du comptable

 

ATTENDU que, si le titre de recette a été pris en charge le 31 décembre 2010, il a été produit une copie décran du logiciel Hélios indiquant que ce titre a fait lobjet dun avis de sommes à payer du 11 janvier 2011, dune lettre de rappel du 15 juin 2011, dun commandement sans frais du 15 juillet 2011 et dune mise en demeure du 15 mars 2013 ;

 

ATTENDU que, dans ses observations écrites du 26 avril 2018, le comptable fait valoir également quil a envoyé le 1er aout 2014 une lettre de rappel à GEHA FOREIGN CLAIMS DEPARTMENT ainsi quune mise en demeure par lettre recommandée accompagnée dun courrier de relance ; quil a signalé avoir envoyé cette mise en demeure en recommandé lorsquil a saisi sa hiérarchie, le 14 août 2014, pour avis sur la marche à suivre dans ce dossier ; quil na cependant pas en sa possession laccusé de réception du débiteur ; quen raison dun surcroît de travail au 2ème semestre 2014 ainsi que durant les exercices 2015 et 2016, cumulé à une baisse des effectifs du poste, il na pas pu mettre en œuvre la procédure de Poursuites sur saisies extérieures (PSE) à létranger conseillée par sa hiérarchie ; quenfin, selon lui, le débiteur aurait reconnu sa dette par un courrier non daté référencé 106286002704 mais contestait la forme du titre de recette en dépit de lintervention de lhôpital par courrier du 25 octobre 2012 ainsi que de la sienne par courrier du 18 août 2014 ;

 

ATTENDU que le comptable produit à lappui de ses observations écrites complémentaires du 26 avril 2018 une copie de la fiche de dépôt dun recommandé international correspondant à lenvoi de la mise en demeure de payer datée du 1er août 2014 et quil indique quil va formuler une réclamation auprès des services de La Poste pour obtenir la date de notification effective de cet envoi à GEHA FOREIGN CLAIMS DEPARTMENT ;

 

ATTENDU que lordonnateur na apporté aucun élément de réponse ;

 

ATTENDU que, dans ses conclusions, le procureur financier près la chambre fait valoir que le comptable en poste a pris en charge le 31 décembre 2010 le titre de recette n° 3999 dun montant de 79 048,50 € établi à lencontre de la mutuelle GEHA FOREIGN CLAIMS DEPARTMENT ; que les deux mises en demeure, diligences interruptives, auraient été adressées à cet organisme les 15 mars 2013 et 1er août 2014 ; que le comptable revendique également lenvoi dun courrier daté du 18 août 2014 ; que la preuve de notification au redevable des mises en demeure de payer du 15 mars 2013 et du 1er août 2014, font à ce jour toujours défaut ; que le moyen selon lequel le débiteur aurait reconnu sa dette par un courrier non daté devait être écarté dans la mesure où la mutuelle ne se reconnaîtrait aucune obligation de payer, du fait de labsence dune facturation détaillée qui lui aurait, selon elle, interdit de procéder à quelque règlement que ce soit ; que toutes les voies de recouvrement qui étaient ouvertes au comptable vis-à-vis du débiteur nont pas été épuisées, puisquaucun recouvrement contentieux na été mis en œuvre et que la procédure de recouvrement à létranger na pas été initiée ; que dès lors le titre a été prescrit le 31 décembre 2014 ; que le comptable a par conséquent commis un manquement avec un préjudice financier de 79 048,50 € causé au centre hospitalier « Coste Floret » ;

 

ATTENDU que le comptable, présent à laudience, a réitéré les moyens développés dans ses écritures et quil entend maintenir que la dette nétait pas prescrite au 31 décembre 2014 en raison des diligences accomplies par lui-même et son prédécesseur dont témoignent les correspondances entre le centre hospitalier et la mutuelle GEHA FOREIGN CLAIMS DEPARTMENT ;

 

 

Sur la prescription de la créance

 

ATTENDU que le courrier référencé 106286002704 non daté de la mutuelle GEHA FOREIGN CLAIMS DEPARTMENT, en réponse à lavis de sommes à payer émis le 26 janvier 2011, ne conteste pas la créance mais demande que lui soit fourni, non un solde à payer, mais une facture traduite détaillée indiquant le nom du patient, le diagnostic, le détail et la date des prestations et ladresse du prestataire ; quen dépit du courrier de lhôpital du 25 octobre 2012 fournissant cette facture ainsi que de celui du comptable du 18 août 2014 expliquant les modalités de tarification en France, le débiteur na pas payé ;

 

ATTENDU que la quatrième chambre de la Cour des comptes par un arrêt Commune de Papeete du 23 mars 2017 précise que la reconnaissance de dette interrompt la prescription si elle résulte dun acte ou dune démarche par lequel le redevable se réfère clairement à une créance définie par sa nature, son montant et lidentité du créancier ;

 

ATTENDU que dans le cas despèce le courrier de la mutuelle faisait référence à la créance en identifiant layant droit ainsi que son numéro dassuré ; que lidentité et ladresse du créancier figurait en destinataire du courrier ; quenfin la mention sur le courrier « this is in reference to the enclosed » ne pouvait que faire référence à lavis de somme à payer annexé comportant le montant de la créance ;

 

ATTENDU que lexigence de la mutuelle pour payer le titre en question, que celui-ci soit présenté selon un mode de facturation différent de celui retenu par ladministration française, ne saurait faire obstacle à lexigibilité de la créance qui nest pas au demeurant contestée par le débiteur ;

 

ATTENDU que dès lors que le débiteur a admis sa créance, cette reconnaissance de dette intervenue postérieurement à lenvoi de lavis de sommes à payer du 26 janvier 2011 interrompt la prescription ;

 

ATTENDU quil ny a donc pas lieu dengager la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable sur sa gestion 2014 au titre de la charge unique, la créance nétant pas prescrite au 31 décembre 2014 ;

 

ATTENDU quil ny a pas lieu de se prononcer sur un éventuel préjudice financier en labsence de manquement du comptable ;

 

 

 

 


Par ces motifs,

 

DÉCIDE :

 

 

Article unique : Sur la présomption de charge unique, au titre de lexercice 2014 ;

 

Il ny a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de M. X… au titre de la présomption de charge unique.

 

M. X… est déchargé de sa gestion pour lexercice 2014, du 3 février au 31 décembre ;

 

Délibéré le 4 juin 2018 par Mme Hélène MOTUEL-FABRE, présidente de section, présidente de séance, M. Nicolas-Raphaël FOUQUE, premier conseiller, réviseur, M. Jean-Claude MAXIMILIEN, premier conseiller.

 

En présence de Mme Clarisse GOUILLOUX, greffière de séance.

 

 

 

 

 

 

Clarisse GOUILLOUX,

greffière de séance

 

 

 

 

 

Hélène MOTUEL-FABRE,

présidente de séance

 

 

 

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500, avenue des États du Languedoc CS 70755 34064 MONTPELLIER CEDEX 2 T +33 4 67 20 73 00 occitanie@crtc.ccomptes.fr


 

 

 

 

 

 

 

 

Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la chambre régionale des comptes dOccitanie, et délivré par moi, secrétaire générale,

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Brigitte VIOLETTE,

secrétaire générale

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés dappel devant la Cour des comptes dans un délai de deux mois à compter de leur notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code.

Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à létranger.

La révision dun jugement peut être demandée après expiration des délais dappel, et ce dans les conditions prévues à larticle R. 242-29 du même code.

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