Chambre plénière
Jugement n° 2018-008
Audience publique du 16 mai 2018
Prononcé du 6 juin 2018 | CENTRE INTERCOMMUNAL D’ACTION SOCIALE (CIAS) DE SAINTE-HERMINE (Département de la Vendée)
Trésorerie de Sainte-Hermine
Exercices : 2011 à 2014 |
République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
Vu le réquisitoire en date du 29 novembre 2017, par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X… et de M. Y…, comptables du centre intercommunal d’action sociale (CIAS) de
Sainte-Hermine au titre d’opérations relatives aux exercices 2011 à 2014, notifié le 1er décembre 2017 aux comptables concernés ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptables du CIAS de Sainte-Hermine, ensemble les comptes annexes, par Mme X…, du 1er janvier 2011 au 25 février 2013 et M. Y…, du 26 février 2013 au 31 décembre 2014 ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code civil ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique applicable aux exercices 2011 et 2012, et le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, applicable aux exercices 2013 et suivants ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le rapport de M. Jean-Luc Marguet, premier conseiller, magistrat chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions du procureur financier ;
Vu les pièces du dossier, et notamment les réponses de Mme X… enregistrées au greffe de la chambre les 23 janvier 2018, 24 janvier 2018, 2 février 2018, 21 février 2018 et 23 mars 2018 et celles de M. Y… enregistrées au greffe de la chambre les 8 janvier 2018, 23 janvier 2018, 6 février 2018, 8 février 2018, 16 février 2018 et 30 mars 2018 ;
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Entendu lors de l’audience publique du 16 mai 2018 M. Jean-Luc Marguet, premier conseiller, en son rapport, M. Sébastien Heintz, procureur financier, en ses conclusions, Mme X…, comptable, n’étant ni présente, ni représentée, et M. Y…, comptable, présent ayant eu la parole en dernier ;
Entendu en délibéré M. Michel Soissong, président de section, réviseur, en ses observations ;
Sur la présomption de charge n° 1, soulevée à l’encontre de Mme X… et de M. Y…, au titre des exercices 2011 à 2014 :
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes des Pays de la Loire de la responsabilité éventuelle encourue par Mme X… et M. Y… à raison de l’absence de recouvrement d’un titre n° 215-R-15A-29 émis en 2009 au nom de M. Z… correspondant à un montant à recouvrer de 881,60 € ;
Attendu que figure à l’état de restes à recouvrer du CIAS de Sainte-Hermine, établi au 31 décembre 2015, pour un montant de 881,60 € en principal, une créance non recouvrée comme suit :
Compte | Exercice | Titre | Date PEC | Tiers | Montant | Frais | RAR | Diligences |
4111 | 2009 | T-215-R-15A-29 | 13/11/2009 | Z… | 881,60 € |
| 881,60 € | néant |
Attendu qu’en sa réponse du 23 juin 2017 le comptable en poste avait indiqué « Sa dette est toujours débitrice de 881,60 €. M. Z… est décédé le 31/10/2009. Aucune poursuite engagée » ;
Attendu qu’à cet effet, le procureur financier a requis d’établir autant que possible au cas particulier si la succession a été acceptée et auquel cas la date à laquelle la publicité en a été prononcée, voire d’établir le cas échéant si la ruine de la créance relèverait d'un exercice pour lequel la juridiction a épuisé sa compétence ;
Attendu qu'il résulte de l’instruction que le débiteur est décédé le 31 octobre 2009 ; que le comptable doit procéder, au décès du débiteur, à l’inscription de sa créance auprès de la succession, afin de la recouvrer selon les modalités prévues notamment aux articles 792 et 796 du code civil ; qu’en particulier les créanciers de la succession déclarent leurs créances en notifiant leur titre au domicile élu de la succession ; que faute de déclaration dans un délai de quinze mois à compter de la publicité donnée à l’acceptation de la succession, prévue à l’article 788 du même code, les créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession sont éteintes à l’égard de celle-ci ; qu’en cas de vacance de la succession, soit que les héritiers ne se soient pas fait connaître, soit qu’ils aient refusé la succession ou qu’aucun héritier ne soit connu, il appartient à tout créancier de saisir le juge conformément aux dispositions de l'article 809-1 dudit code pour que la curatelle de la succession vacante soit confiée à l’autorité administrative chargée du domaine, aux fins de régler la dette ;
Attendu que dans le cas où la succession aurait été acceptée et publiée après le décès du débiteur, le délai de 15 mois précité pour produire les créances au domicile élu de la succession s’achevait au plus tôt le 1er février 2011 et qu’aucun élément n’atteste de diligence conduite à cet effet ;
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Attendu que M. Y… a déclaré dans son courriel du 23 janvier 2018, enregistré au greffe de la chambre le même jour, qu’ « aucune déclaration de créance n’ a été faite auprès du domicile élu de la succession dans les 15 mois qui suivent le décès de M. Z…, soit au plus tard le 1er février 2011, qu’il ne dispose d’aucun élément attestant des diligences conduites ni attestant de la saisine du juge pour que la curatelle de la succession soit confiée à l’autorité administrative chargée du domaine aux fins de présenter la dette et d’en interrompre la prescription, que sa demande de renseignement du 8 janvier 2018 auprès du notaire est restée sans réponse » ;
Attendu que Mme X… a déclaré dans son courriel du 23 janvier 2018 enregistré au greffe de la chambre le même jour, que l’étude notariale Fonteny-Veillon a procédé le 5 novembre 2009 à une dévolution successorale au profit de Mme A…, mais que ne disposant pas de ce dossier elle ne peut affirmer si l’héritière a été avisée de la dette existante ;
Attendu que Mme X… a déclaré dans son courriel complémentaire du 24 janvier 2018 enregistré au greffe de la chambre le même jour, qu’il lui semble, après un contact téléphonique avec l’établissement, que la facture du mois de novembre avait bien été adressée à l’étude notariale Fonteny-Veillon qui de fait devait en informer l’héritière, mais qu’elle ne dispose d’aucun moyen de vérifier les éléments du dossier et si des démarches ont été faites par le notaire auprès de Mme A… ;
Attendu qu’ainsi et en dépit des demandes faites aux deux comptables concernés, ceux-ci n’ont pas apporté la preuve de la date de déclaration de la créance au notaire chargé de la succession en notifiant leur titre au domicile élu de la succession ;
Attendu que, par suite, la chambre n’a pas eu connaissance de la date de la publicité donnée à l’acceptation de la succession, prévue à l’article 788 du code civil, l’office notarial ayant simplement attesté le 5 novembre 2009 que l’acte de notoriété constatant cette dévolution successorale avait bien été reçu par lui le même jour ;
Attendu que la prescription de quinze mois en cas d’absence de déclaration des créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession ne trouve donc pas à s’appliquer en l’espèce ;
Attendu que l’ancien comme le nouvel ordonnateur n’ont pas répondu au magistrat rapporteur ;
Attendu que l’article L. 6145-9 du code de la santé publique dispose que « les créances des établissements sont recouvrées comme il est dit à l’article L. 1611-5 et à l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales » ;
Attendu que l’article L. 1617-5 (3e alinéa) du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que « l’action des comptables publics chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge des titres de recettes ; le délai de quatre ans … est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription » ;
Attendu que les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu’ils dirigent, en application de l’article 60-I (1e alinéa) de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée, de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, applicable aux exercices 2010 à 2012, et de l’article 18 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, applicable à partir de l’exercice 2013 ;
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Attendu qu’en application de l’article 60-I (3e alinéa) de la loi n° 63-156 du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable se trouve engagée dès lors qu'une recette n'a pas été recouvrée ; qu’une jurisprudence constante de la Cour des comptes permet au comptable de dégager sa responsabilité en apportant la preuve que ses diligences en vue du recouvrement ont été adéquates, complètes et rapides ; que, lorsque tel n'est pas le cas, son action doit être regardée comme insuffisante et sa responsabilité est engagée s'il est établi que les possibilités de recouvrement ont été, de ce fait, compromises ;
Attendu qu'en application de l'article 21 du décret n° 2008-228 du 5 mars 2008 portant application de l'article 60-111 de la loi du 23 février 1963, la responsabilité d'un comptable ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de ses prédécesseurs que pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n'auraient pas été contestées par le comptable entrant dans un délai de six mois éventuellement prorogé ;
Attendu qu'aucune réserve n'a été émise par M. Y…, comptable à compter du 26 février 2013, sur la gestion de Mme X… ;
Attendu que la prescription de la créance en cause étant postérieure de plus de huit mois à la première date de passation de services en sa qualité d’intérimaire et de plus de deux mois en sa qualité de titulaire, M. Y… était pleinement en mesure de déterminer la date de prescription du titre en cause nonobstant la circonstance qu’il n’était présent que deux jours par semaine à la trésorerie de Sainte-Hermine lors de son intérim ;
Attendu que s'il est constant que, même sans réserves formulées, la responsabilité du comptable entrant ne peut être recherchée lorsque l'origine d'une discordance ou d'un manquant est imputable à l'un de ses prédécesseurs, la démonstration d'une telle circonstance suppose, pour être prise en compte, de disposer de pièces probantes et étayées ; qu'en l'état aucun élément ne permet de statuer sur ce point ;
Attendu que M. Y… a invoqué dans son courrier du 8 février 2018 le fait que la prescription serait intervenue le 30 octobre 2013, le titre ayant été selon lui pris en charge le 30 octobre 2009, soit un mois après sa prise de fonction en tant que titulaire du poste, et non le 13 novembre 2013 comme il est mentionné dans le réquisitoire en raison de la date de prise en charge du titre le 13 novembre 2009, tel que cela ressort de l’état de restes à recouvrer au 31 décembre 2015 produit à la chambre ; qu’il a cependant reconnu à l’audience que la date de prise en charge effective du titre était bien le 13 novembre 2009 ;
Attendu qu’en toute hypothèse et à défaut de document probant, aucun acte de poursuite susceptible d’avoir interrompu la prescription de recouvrement n’a été pris sur les exercices en cause ; qu'il en résulte dès lors que l’action en recouvrement du comptable public est susceptible de s’être trouvée définitivement compromise au plus tard le 13 novembre 2013 ;
Attendu qu’il n’est établi, ni même allégué par M. Y…, aucune circonstance constitutive de la force majeure ;
Attendu qu’ainsi la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Y…, pour défaut de diligences de recouvrement adéquates, complètes et rapides peut être engagée à hauteur de la somme de 881,60 € pour l’exercice 2013 ;
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Attendu qu’aux termes du VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée, « La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue au I est mise en jeu par le ministre dont relève le comptable, le ministre chargé du budget ou le juge des comptes dans les conditions qui suivent » ; que « Lorsque le manquement du comptable […] n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce (…). Lorsque le manquement du comptable (…) a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il est de jurisprudence constante que lorsque le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier ; que cependant, si des éléments produits par le comptable attestent qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme imputable audit manquement ;
Attendu que M. Y… a déclaré dans son courriel du 23 janvier 2018 concernant l’éventuel préjudice causé à l’organisme, qu’il ne pouvait préjuger si l’actif successoral de la succession de M. Z… aurait pu couvrir le règlement de la dette, ce qui aurait conduit le comptable de l’époque à présenter la dette en non-valeur ;
Attendu que Mme X… a déclaré dans son courriel du 24 janvier 2018, qu’il appartenait à l’étude Fonteny-Veillon de payer cette dette ;
Attendu cependant que, faute d’élément probant contraire et conformément à la jurisprudence, le manquement de M. Y… a causé un préjudice financier au CIAS de Sainte-Hermine à hauteur de la somme de 881,60 € ;
Attendu qu’il y a lieu de constituer M. Y… débiteur du CIAS de Sainte-Hermine à hauteur de la somme de 881,60 € pour l’exercice 2013 ;
Attendu qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 1er décembre 2017, date de réception du réquisitoire par M. Y… ;
Attendu qu’en application du IX de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée, les comptables publics, dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans ce cadre, ne peuvent obtenir du ministre chargé du budget une remise gracieuse totale ; que la somme laissée à la charge de M. Y… par le ministre ne pourra être inférieure à 3‰ du montant du cautionnement du poste comptable (fixé à 110 000 € pour 2013) soit une somme de 330 € ;
Sur la présomption de charge n° 2, soulevée à l’encontre de Mme X… et de M. Y…, au titre des exercices 2011 à 2014 :
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des comptes des Pays de la Loire, de la responsabilité éventuelle encourue par Mme X… et M. Y… à raison de l’absence de recouvrement d’un titre émis en 2009 correspondant à la créance n° 84-R-5A-42 de 929,11 €, à l’encontre de Mme B…, correspondant à un montant à recouvrer de 896,38 € ;
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Attendu que sur l’état de restes à recouvrer du CIAS de Sainte-Hermine établi au 31 décembre 2015, pour un montant de 896,38 € une créance non recouvrée comme suit :
Compte | Exercice | Titre | Date PEC | Tiers | Montant | Frais | Diligences |
4111 | 2009 | T-84 R-5 A-42 | 08/06/2009 | B… | 929,11 € |
| Lettre de rappel produit hospitalier créée le 03/05/2010 – règlement de 32,73 € le 22/09/2010 |
Attendu que ce titre a fait l’objet d'une lettre de rappel le 3 mai 2010 et qu’un règlement de 32,73 € a été effectué le 22 septembre 2010, comme l'atteste le mandat n° 645 du 31 août 2010, dont le montant a été comptabilisé le 22 septembre 2010 ; que, par ailleurs, aucun acte de poursuite, pour lequel la preuve de la réception par le redevable aurait été apportée, ne paraît être survenue dans les quatre ans qui ont suivi ;
Attendu que dans son courriel du 23 janvier 2018 enregistré le jour même au greffe de la chambre, M. Y… a déclaré qu’il ne dispose d’aucun autre élément attestant de diligence conduite aux fins d’interrompre la prescription ;
Attendu que, dans ce même courriel du 23 janvier 2018, M. Y… a déclaré que le départ de Mme B… pour l’hôpital de Bort-les-Orgues aurait dû permettre la notification d’une mise en demeure de payer, en recommandé avec accusé de réception, interrompant ainsi la prescription et qu’à défaut une poursuite par opposition à tiers détenteur à la banque aurait pu également permis d’appréhender le montant dû ;
Attendu, cependant, que dans son courrier du 8 février 2018, M. Y… a affirmé, concernant le titre de Mme B…, qu’aucun acte interruptif n'a également été fait, qu’une lettre de relance ne peut être considérée interruptive qu'à la condition qu’elle ait été notifiée au débiteur, ce qui ne peut être corroboré ; qu’il précise également que le titre de Mme B… a été pris en charge le 31 mai 2009 et non le 8 juin 2009 tel qu’indiqué sur l’état de restes à recouvrer au 31 décembre 2015 et que l’imputation d’une somme sur ce titre correspondant à la caution sur frais de séjour ne pouvait suffire à interrompre la prescription étant entendu qu’aucun acte de poursuite n’a été engagé après ;
Attendu que Mme X… a déclaré dans son courriel du 23 janvier 2018 enregistré au greffe de la chambre le même jour, que Mme B… a été transférée en 2010 dans un établissement de soins localisé à Bort-les-Orgues dans le département de la Corrèze et qu’elle est décédée le 24 février 2015, mais qu’elle ne dispose plus des éléments du dossier, conservés à la trésorerie de Sainte-Hermine ;
Attendu qu’il résulte de l’instruction qu'un règlement de 32,73 € a bien été effectué le 22 septembre 2010 comme l’atteste le mandat n° 645 du 31 août 2010 ; que, par ailleurs, aucun acte de poursuite, pour lequel la preuve de la réception par le redevable aurait été apportée, ne paraît être survenue dans les quatre ans qui ont suivi ;
Attendu que l’effet interruptif de prescription n’est certain qu’à la condition que le comptable puisse apporter la preuve que cet acte a été notifié au débiteur ; qu’au cas d’espèce, aucun acte qui aurait interrompu la prescription ne semble avoir été pris suite au versement partiel du 22 septembre 2010 ;
Attendu que, s’il est constant que, même sans réserves formulées, la responsabilité du comptable entrant ne peut être recherchée lorsque l’origine d’une discordance ou d’un manquant est imputable à l’un de ses prédécesseurs, la démonstration d’une telle circonstance suppose, pour être prise en compte, de disposer de pièces probantes et étayées ;
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Attendu que les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu’ils dirigent, en application de l’article 60-I (1e alinéa) de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée, de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, applicable aux exercices 2010 à 2012, et de l’article 18 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, applicable à partir de l’exercice 2013 ;
Attendu qu’en application de l’article 60-I (3e alinéa) de la loi n° 63-156 du 23 février 1963, la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable se trouve engagée dès lors qu’une recette n’a pas été recouvrée ; qu’une jurisprudence constante de la Cour des comptes permet au comptable de dégager sa responsabilité en apportant la preuve que ses diligences en vue du recouvrement ont été adéquates, complètes et rapides ; que, lorsque tel n'est pas le cas, son action doit être regardée comme insuffisante et sa responsabilité est engagée s’il est établi que les possibilités de recouvrement ont été, de ce fait, compromises ;
Attendu que l’article L. 6145-9 du code de la santé publique dispose que « les créances des établissements sont recouvrées comme il est dit à l’article L. 1611-5 et à l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales » ;
Attendu que l’article L. 1617-5 (3e alinéa) du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que « l’action des comptables publics chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge des titres de recettes ; le délai de quatre ans … est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription » ;
Attendu qu’en application de l'article 21 du décret n° 2008-228 du 5 mars 2008 portant application de l’article 60-111 de la loi du 23 février 1963, la responsabilité d’un comptable ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de ses prédécesseurs que pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable entrant dans un délai de six mois éventuellement prorogé ;
Attendu qu'aucune réserve n’a été émise par M. Y…, comptable à compter du 26 février 2013, sur la gestion de Mme X… ;
Attendu que la prescription de l’action en recouvrement du titre effectivement pris en charge le 8 juin 2009 s’établit au 8 juin 2013, date de la prescription quadriennale; que les comptables n’apportent aucun élément à décharge prouvant que les diligences effectuées ont été adéquates, complètes et rapides ;
Attendu que la prescription, acquise le 8 juin 2013, est survenue pendant la période intérimaire de M. Y… ; que, cependant, ce dernier n’a pas été en mesure d’en assurer le recouvrement compte tenu des délais très courts qui lui étaient accordés, et ceci même en l’absence de réserves formulées dans le délai imparti de six mois envers son prédécesseur, la prescription de la créance étant intervenue avant la fin de cette période ;
Attendu, qu’ainsi, Mme X… a manifestement compromis par son inaction les droits du CIAS de Sainte-Hermine sur la créance susvisée au cours de l'exercice 2013 et a manqué à ses obligations en matière de recouvrement de la créance, en l'absence de diligences adéquates, complètes et rapides de nature à interrompre la prescription de l’action en recouvrement ;
Attendu qu’il n’est établi, ni même allégué par Mme X…, aucune circonstance constitutive de la force majeure ;
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Attendu qu’ainsi la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X… pour défaut de diligences de recouvrement adéquates, complètes et rapides, constitutive d’un manquement à ses obligations peut être engagée à hauteur de la somme de 896,38 €, restant due après la prise en charge de la somme de 32,73 € sur le titre litigieux, pour l’exercice 2013 ;
Attendu qu’aux termes du VI de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée, « La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue au I est mise en jeu par le ministre dont relève le comptable, le ministre chargé du budget ou le juge des comptes dans les conditions qui suivent » ; que « Lorsque le manquement du comptable […] n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce (…). Lorsque le manquement du comptable (…) a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu qu’il est de jurisprudence constante que lorsque le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier ; que cependant, si des éléments produits par le comptable attestent qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme imputable audit manquement ;
Attendu que Mme X… a déclaré dans son courriel du 23 janvier 2018 enregistré au greffe de la chambre le même jour, que Mme B… disposait a priori d’une faible retraite, sans doute insuffisante pour couvrir ses frais de séjour courants ainsi qu’un reliquat et que, par ailleurs, elle ne disposait pas de biens propres ; que ces éléments, à les supposer établis, sont cependant sans incidence sur l’existence d’un préjudice financier pour la collectivité concernée ;
Attendu que, sauf à démontrer le caractère irrémédiablement compromis de la créance sur un exercice déjà jugé ou dès sa prise en charge, ce qui n’est pas le cas d’espèce, il existe un lien direct de causalité entre le manquement précité de la comptable et l’absence de recouvrement des titres en cause ; qu’en conséquence, le CIAS de Sainte-Hermine a subi un préjudice financier à hauteur de la somme de 896,38 € ;
Attendu qu’il y a lieu de constituer Mme X… débitrice du CIAS de Sainte-Hermine à hauteur de la somme de 896,38 € pour l’exercice 2013 ;
Attendu qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; qu’en l’espèce, cette date est le 1er décembre 2017, date de réception du réquisitoire par Mme X… ;
Attendu qu’en application du IX de l’article 60 de la loi n° 63-156 précitée, les comptables publics, dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans ce cadre, ne peuvent obtenir du ministre chargé du budget une remise gracieuse totale ; que la somme laissée à la charge de Mme X… par le ministre ne pourra être inférieure à 3‰ du montant du cautionnement du poste comptable (fixé à 110 000 € pour 2013) soit une somme de 330 € ;
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Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : En ce qui concerne Mme X… au titre des exercices 2011 et 2012, présomptions de charges n° 1 et n° 2
Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de Madame X… au titre des présomptions de charges n° 1 et n° 2, pour les exercices 2011 et 2012.
Mme X… est déchargée de sa gestion pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012.
Article 2 : En ce qui concerne Mme X… au titre de l’exercice 2013, jusqu’au 25 février, présomption de charge n° 2
Madame X… est constituée débitrice du centre intercommunal d’action sociale de
Sainte-Hermine pour la somme de huit cent quatre-vingt-seize euros et trente-huit centimes (896,38 €), augmentée des intérêts de droit à compter du 1er décembre 2017.
L’éventuelle remise gracieuse du ministre ne pourra être totale et la somme laissée à charge de Madame X… ne pourra être inférieure à trois cent trente euros (330 €) pour l’exercice 2013 ;
Article 3 : En ce qui concerne M. Y… au titre de l’exercice 2013, à compter du 26 février, présomption de charge n° 1
Monsieur Y… est constitué débiteur du centre intercommunal d’action sociale de
Sainte-Hermine pour la somme de huit cent quatre-vingt-un euros et soixante centimes (881,60 €), augmentée des intérêts de droit à compter du 1er décembre 2017.
L’éventuelle remise gracieuse du ministre ne pourra être totale et la somme laissée à charge de M. Y… ne pourra être inférieure à trois cent trente euros (330 €) pour l’exercice 2013 ;
Article 4 : En ce qui concerne M. Y… au titre de l’exercice 2014, présomptions de charges n° 1 et n° 2
Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité de M. Y… au titre des présomptions de charges n° 1 et n° 2, pour l’exercice 2014.
M. Y… est déchargé de sa gestion pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014.
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Article 5 : Les décharges de Mme X… et de M. Y…, au titre de l’exercice 2013, ne pourront être données qu’après apurement de leurs débets respectifs.
Fait et jugé par M. Michel Soissong, président de section, président de séance, MM. Pierre Cotton et Cyril Andriès, premiers conseillers.
En présence de Mme Marie-Andrée Supiot, greffière de séance.
Marie-Andrée Supiot greffière de séance |
Michel Soissong président de séance
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En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
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Article 5 : Les décharges de Mme X… et de M. Y…, au titre de l’exercice 2013, ne pourront être données qu’après apurement de leurs débets respectifs.
Fait et jugé par M. Michel Soissong, président de section, président de séance, MM. Pierre Cotton et Cyril Andriès, premiers conseillers.
En présence de Mme Marie-Andrée Supiot, greffière de séance.
Signé : Marie-Andrée Supiot, greffière de séance
Michel Soissong, président de séance
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Ampliation certifiée conforme à l’original
Christophe Guilbaud secrétaire général |
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
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