rapport n° 2017-0353 | Commune de Privas |
jugement n° 2018-0005 | Trésorerie DE PRIVAS
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audience publique du 23/01/2018 | code n° 007 018 186 |
délibéré du 23/01/2018 | exercices 2011 et 2013 |
prononcÉ le : 19 fevrier 2018
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République française
Au nom du peuple français
La chambre régionale des comptes Auvergne, Rhône-ALPES
(Statuant en 5èmesection)
Vu le réquisitoire n° 23-GP/2017 à fin d’instruction de charge pris le 6 avril 2017 par le procureur financier près la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône‑Alpes ;
Vu le courrier de notification du réquisitoire en date du 12 juin 2017 adressé à MM. Jean-Pierre X... et Daniel Y..., comptables, et à M. Michel Z..., maire de Privas, dont ils ont accusé réception le 13 juin 2017 ;
VU le code général des collectivités territoriales ;
VU le code des juridictions financières ;
VU l’article 60 de la loi de finances pour 1963 n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée, notamment par l’article 90 de la loi de finances rectificative n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du § VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifiée ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique ;
VU les lois et règlements relatifs à la comptabilité des communes et des établissements publics locaux ;
VU les arrêtés de la présidente de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes relatifs aux attributions, à la composition et aux compétences des sections et des formations de délibéré ;
VU l’arrêté de la présidente de la chambre régionale des comptes portant délégation de signature à M. Alain LAIOLO, président de la 5ème section ;
VU la décision du président de la 5ème section, agissant par délégation de la présidente de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, en date du 2 juin 2017, désignant M. Nicolas BILLEBAUD, conseiller, comme rapporteur pour instruire la charge identifiée dans le réquisitoire susvisé ;
VU les demandes d’informations adressées le 1er septembre 2017 à MM. Jean-Pierre X... et Daniel Y... ;
VU les observations écrites de M. Jean-Pierre X..., enregistrées au greffe le 12 septembre 2017 ;
VU les observations écrites de M. Daniel Y..., enregistrées au greffe le 11 septembre 2017 ;
VU les comptes produits en qualité de comptables de la commune de Privas par M. Jean-Pierre X... pour l’exercice 2011 et M. Daniel Y... pour l’exercice 2013 ;
VU le rapport n° 2017-0353 de M. Nicolas BILLEBAUD, conseiller, magistrat instructeur, déposé au greffe de la chambre le 22 novembre 2017 ;
VU les lettres du 23 novembre 2017 informant les comptables concernés et l’ordonnateur de la clôture de l’instruction ;
VU les lettres du 3 janvier 2018 informant les comptables concernés et l’ordonnateur de la date fixée pour l’audience publique et les accusés de réception délivrés le 3 janvier 2018 par M. Jean-Pierre X..., le 5 janvier 2018 par M. Daniel Y... et le 4 janvier 2018 par M. Michel Z... ;
Vu les conclusions n° 17-353 du procureur financier en date du 1er décembre 2017 ;
Entendu en audience publique M. Nicolas BILLEBAUD, conseiller, en son rapport ;
Entendu en audience publique M. Denis LARRIBAU, procureur financier, en ses conclusions ;
En l’absence du comptable concerné et de l’ordonnateur dûment informés de la tenue de l’audience ;
Après avoir délibéré hors la présence du public, du rapporteur et du procureur financier ;
Après avoir entendu en délibéré, M. Charles THEROND, conseiller, réviseur en ses observations ;
En ce qui concerne la présomption de charge unique relative au paiement d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires en l’absence de pièces justificatives exigibles
Sur les réquisitions du ministère public,
Attendu que par le réquisitoire n° 23-GP/2017 du 6 avril 2017, le procureur financier près la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a saisi la juridiction sur le fondement du § III de l’article L. 242-1 du code des juridictions financières devenu depuis l’article L. 242-4 du même code, à fin d’ouverture d’une instance à l’encontre de MM. Jean-Pierre X... et Daniel Y... au titre de leur gestion comptable de la commune de Privas, respectivement sur les exercices 2011 et 2013 ;
Attendu qu’en son réquisitoire, le procureur financier relève que les comptables mis en cause auraient payé des indemnités horaires pour travaux supplémentaires, pour un montant de 3 174,83 € en 2011 et de 4 719,41 € en 2013, sans disposer d’une délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ;
Attendu que le procureur financier conclut de ce qui précède que MM. Jean-Pierre X... et Daniel Y... ont pu engager leur responsabilité personnelle et pécuniaire par l’insuffisance des pièces justificatives à l’appui des dépenses auxquelles ils ont procédé ; qu’ils se trouveraient ainsi dans le cas prévu par les dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, et qu’il y a lieu en conséquence d’ouvrir l’instance prévue au § III de l’article L. 242-1 du code des juridictions financières devenu depuis l’article L. 242-4 du même code, aux fins de déterminer leur responsabilité encourue ;
Sur les observations des comptables mis en cause,
Attendu que dans ses observations enregistrées au greffe de la juridiction le 12 septembre 2017, M. Jean-Pierre X... indique ne plus détenir de pièces justificatives du fait de son départ en retraite ;
Attendu que dans ses observations enregistrées au greffe de la juridiction le 11 septembre 2017, M. Daniel Y... produit les plans de contrôle hiérarchisé de la dépense établis en 2010 et 2012 ; qu’il indique ne pas avoir d’observations à formuler ni d’informations complémentaires à apporter ;
Sur la responsabilité des comptables,
Attendu qu’il résulte de l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, qu’avant de procéder au paiement d'une dépense ne faisant pas l'objet d'un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste définie à l'annexe I du présent code ; que, pour ce qui concerne les indemnités horaires pour travaux supplémentaires, la rubrique 210224 de la liste des pièces justificatives des dépenses publiques locales annexée à l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales prévoit, en son premier point, la production d’une « délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effectives d’heures supplémentaires » ;
Attendu que la délibération du 29 janvier 2007 fournie par le comptable en place prévoit que tout agent de catégorie C et les agents de catégorie B avec un indice brut de rémunération inférieur ou égal à 380, peuvent bénéficier d’IHTS ; que la délibération du 11 février 2008 étend le bénéfice des IHTS à l’ensemble des agents de catégorie B ;
Attendu qu’une telle délibération ne peut être regardée comme étant suffisamment précise au regard de la nomenclature des pièces justificatives, à défaut de fixer la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires ; qu’en effet, la référence à des catégories de fonctionnaires n’équivaut pas à une liste d’emplois ;
Attendu que M. Jean-Pierre X... a payé sur l’exercice 2011 des IHTS au profit d’agents de la commune de catégorie B et C pour un montant total de 3 174,83 € ; que M. Daniel Y... a payé sur l’exercice 2013 des IHTS au profit d’agents de la commune de catégorie B et C pour un montant total de 4 719,41 € ;
Attendu qu’en procédant à ces paiements litigieux en l’absence d’une délibération répondant aux exigences de la nomenclature des pièces justificatives, MM. Jean-Pierre X... et Daniel Y... ont manqué à leurs obligations de contrôle de la validité de la créance, telle que définies par l’article 13 du décret portant règlement général de comptabilité publique précité ; que leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve ainsi engagée à hauteur de 3 174,83 € pour M. Jean-Pierre X... et de 4 719,41 € pour M. Daniel Y... ;
Sur le préjudice financier pour la commune de Privas,
Attendu que l’article 60-VI de la loi du 23 février 1963, modifié par la loi n° 2011‑1978 du 28 décembre 2011, dispose que, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret en Conseil d'État en fonction du niveau des garanties mentionnées au II./ Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l'organisme public concerné ou que, par le fait du comptable public, l'organisme public a dû procéder à l'indemnisation d'un autre organisme public ou d'un tiers ou a dû rétribuer un commis d'office pour produire les comptes, le comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
Attendu que les paiements d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires, en l’absence d’une délibération répondant aux exigences de la nomenclature des pièces justificatives, revêtent un caractère non seulement irrégulier mais également indu, ; qu’en effet, une telle délibération est une pièce justificative nécessaire pour considérer que les droits au paiement étaient ouverts par l’autorité compétente ;
Attendu qu’il en résulte que les dépenses ainsi payées, du fait du manquement des comptables à leurs obligations de contrôle de la validité de la dette, ont causé un préjudice financier à la commune de Privas ; qu’il y a lieu, en conséquence, de prononcer un débet à l’encontre de M. Jean-Pierre X..., d’un montant de 3 174,83 € sur l’exercice 2011, et de M. Daniel Y..., d’un montant de 4 719,41 € sur l’exercice 2013 ; qu’en application des dispositions de l’article 60-IX de la loi précitée du 23 février 1963, ledit débet porte intérêts de droit à compter de la notification du réquisitoire intervenue à la date du 13 juin 2017 ;
Sur le respect du plan de contrôle hiérarchisé de la dépense,
Attendu que M. Daniel Y... a joint à sa réponse une copie du plan de contrôle hiérarchisé de la dépense des exercices 2011 et 2013 ;
Attendu que le plan de contrôle hiérarchisé de la dépense de la commune de Privas pour l’exercice 2011 ne présente pas de calendrier thématique pour le contrôle de la paie et n’a été mis en place que dans le courant de l’année 2011 ; que le comptable a pris en charge des mandats de paie comportant le versement irrégulier d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires dès le mois de janvier 2011 ; qu’il devait alors effectuer un contrôle exhaustif de la production des pièces justificatives ;
Attendu que le plan de contrôle hiérarchisé pour l’exercice 2013 prévoit que le contrôle des heures supplémentaires devait être effectué par sondage sur la paie du mois d’avril ; que d’une part, deux agents de la commune ont bénéficié d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires en avril 2013 ; que d’autre part, le comptable n’apporte pas de précisions sur l’échantillon retenu pour le contrôle des heures supplémentaires et donc sur l’éventuelle exclusion des agents concernés ;
Attendu que dès lors, les plans de contrôle hiérarchisé successifs n’ont pas été respectés ; que cette circonstance fait obstacle à la remise gracieuse totale du débet ;
PAR CES MOTIFS
DECIDE
Article 1 : | M. Jean-Pierre X... est constitué débiteur envers la commune de Privas d’une somme de 3 174,83 €, au titre de l’exercice 2011, augmentée des intérêts de droit calculés au taux légal à compter de la date du 13 juin 2017 de notification du réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale des comptes.
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Article 2 : | M. Jean-Pierre X... ne pourra être déchargé et déclaré quitte de sa gestion du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011 qu’après avoir justifié de l’apurement, en principal et intérêts du débet mis à sa charge.
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Article 3 : | M. Daniel Y... est constitué débiteur envers la commune de Privas d’une somme de 4 719,41 €, au titre de l’exercice 2013, augmentée des intérêts de droit calculés au taux légal à compter de la date du 13 juin 2017 de notification du réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale des comptes.
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Article 4 : | M. Daniel Y... ne pourra être déchargé et déclaré quitte de sa gestion du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 qu’après avoir justifié de l’apurement, en principal et intérêts du débet mis à sa charge.
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Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, cinquième section, le vingt-trois janvier deux mille dix-huit.
Présents : M. Alain LAIOLO, président de section, président de séance ;
M. Michel BON, premier conseiller,
M. Antoine LANG, premier conseiller,
Mme Jennifer EL-BAZ, conseillère,
M. Charles THEROND, conseiller.
La greffière | Le président de séance |
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Brigitte DESVIGNES | Alain LAIOLO |
La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Voies et délais de recours :
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.
1/6 – jugement n° 2018-0005