CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES

PROVENCE–ALPES-CÔTE DAZUR

 

Deuxième section

Jugement n° 2017-0034

 

 

Centre communal d’action sociale d’Antibes

Département des Alpes-Maritimes

Exercices 2010 à 2013

Rapport n° 2017-0246

Audience publique du 14 décembre 2017

Délibéré le 14 décembre 2017

Prononcé le 29 janvier 2018

 

 

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

 

La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte dAzur,

 

VU le réquisitoire  2016-0023 en date du 11 février 2016 par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X..., comptable du centre communal d’action sociale (CCAS) d’Antibes, au titre dopérations relatives aux exercices 2010 à 2013 ;

VU la notification du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de linstruction à M. X... et au président du CCAS d’Antibes, intervenue le 17 février 2016 ;

VU les comptes du CCAS d’Antibes pour les exercices 2010 à 2013 ;

VU le code général des collectivités territoriales, notamment son article L. 1617-5 ;

VU le code des juridictions financières ;

VU larticle 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifié ;

VU la loi  68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

VU le décret  62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et le décret  2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

VU le décret n° 2008-227 du 5 mars 2008 abrogeant et remplaçant le décret n° 66-850 du 15 novembre 1966 relatif à la responsabilité personnelle et pécuniaire des régisseurs ;

VU les questionnaires adressés par le magistrat instructeur au comptable et à lordonnateur le 29 février 2016 ;

VU les justifications en réponse transmises par le comptable par mél du 28 juillet enregistré au greffe de la chambre le 9 septembre 2016 et par le président du CCAS par courrier du 4 août enregistré au greffe de la chambre le 8 août 2016 ;

VU l’arrêté n° 2016-16 du 23 décembre 2016 du président de la chambre fixant l’organisation des formations de délibéré et leurs compétences pour 2017 ;

VU la décision du 7 septembre 2016 par laquelle le président de la chambre régionale des comptes a désigné M. Bernard Debruyne, président de section, comme rapporteur en remplacement du rapporteur initial ;

VU la notification du changement de rapporteur à M. X... et au président du
CCAS d’Antibes, intervenue le 12 septembre 2016 ;

VU le rapport déposé le 6 octobre 2017 par M. Bernard Debruyne, président de section ;

VU les conclusions du procureur financier ;

Après avoir entendu en audience publique le rapporteur et les conclusions orales de
M. Marc Larue, procureur financier, M. X... et lordonnateur, dûment informés de laudience, nétant ni présents ni représentés ;

Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier et après avoir entendu M. Laurent-Xavier Blelly, premier conseiller, réviseur, en ses observations ;

ATTENDU quaucune circonstance constitutive de la force majeure na été établie ni même alléguée ;

Charge  1 : Compte 4116 « Redevables contentieux » - Titre  261 pris en charge le 31 décembre 2006 de 7 184,65 

En ce qui concerne le réquisitoire

 

ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé du 11 février 2016, le procureur financier a requis la chambre au motif que le comptable du CCAS d’Antibes naurait pas réalisé de diligences suffisantes pour assurer le recouvrement du titre susmentionné ;

 

ATTENDU en effet qu’après avoir relevé que l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2013 du compte 4116 faisait état d’une « lettre de rappel, acte créé le 05/03/07 et d’une mise en demeure personnes publiques, acte créé le 22/01/2010 », le représentant du ministère public a rappelé que la lettre de rappel ne constituait pas un acte de poursuite et observé que la mise en demeure n’était pas avérée ; qu’il en a déduit qu’à défaut de diligences rapides, complètes et adéquates, le titre avait été atteint par la prescription le 31 décembre 2010, sous la gestion de M. X... ;


Sur le manquement du comptable à ses obligations

 

ATTENDU qu’en réponse au réquisitoire du procureur financier et aux questions du rapporteur, M. X... a indiqué que par une délibération du 23 juillet 2002, la commune d’Antibes s’était engagée à participer à hauteur de 10 % aux charges de copropriété du lot  484 d’un immeuble appartenant au centre communal d’action sociale, situé à Antibes, aux 2 et 4 de l’avenue de la Libération, accueillant le service « social-famille » de la commune, que de 2002 à 2005, les titres émis à ce titre par le CCAS avaient été payés par la commune mais que le défaut de recouvrement du titre émis dans le même cadre pour l’année 2006 s’expliquerait par le fait qu’il était sans objet ; qu’il ressort en effet de ses explications que « l’activité du service « social-famille » devant être reprise par la CASA [communauté d’agglomération de Sophia-Antipolis] dans le cadre de la politique de la ville, à compter de 2007, il avait été convenu entre le CCAS et la ville que la part assumée par la commune pour le local de l’avenue de la Libération serait incluse dans la subvention de fonctionnement versée en 2006 par la ville au CCAS », mais qu’« un titre spécifique [avait] été émis, par erreur, par le CCAS, faisant double emploi avec le titre émis pour la totalité de la subvention » ;

 

ATTENDU qu’à l’appui de ce premier élément de sa réponse, le comptable a produit copie du mandat d’annulation du titre visé dans le réquisitoire, en date du 23 mai 2016, et d’un certification administratif produit le même jour par le président du CCAS, certifiant que le titre était affecté d’une erreur matérielle, « le montant réclamé à la ville d’Antibes [étant] déjà inclus dans le versement de la subvention de fonctionnement de 2006 » ;

 

ATTENDU que M. X... a également fait valoir que, même s’il n’était pas en mesure d’apporter la preuve formelle de la réception de la mise en demeure par la commune d’Antibes, le courrier correspondant ne lui ayant pas été envoyé en recommandé, conformément aux instructions de sa hiérarchie, « les informations données par l’application HELIOS et l’absence de toute contestation (…) de la commune d’Antibes [étaient] des éléments indirects suffisants pour prouver l’interruption de la prescription » ; qu’à la suite de cette diligence, « le CCAS [avait] reconnu que le titre (…) avait été émis par erreur et [s’était] engagé à procéder à son annulation » et que « le comptable [n’avait] donc, logiquement, jamais eu l’autorisation de l’ordonnateur pour effectuer quelque poursuite que ce soit, [ce dernier s’étant opposé] au recours à la procédure de mandatement d’office, seule action à la disposition du comptable pour obtenir un paiement à l’encontre d’une collectivité territoriale » ; que M. X... a ajouté qu’il « se serait rendu coupable de concussion [s’il avait effectué] des poursuites afin de recouvrer un titre qu’il savait illégal » ;

 

ATTENDU qu’aux termes de sa rubrique 142 « Annulation ou réduction de recettes », la liste des pièces justificatives des dépenses des collectivités territoriales et des établissements publics locaux mentionnée à l’article D. 1617-19 et figurant en annexe I du code général des collectivités territoriales prévoit la production d’un « état précisant, pour chaque titre, l’erreur commise » ; que n’étant appuyé d’aucune pièce attestant de l’inclusion de la participation de la commune aux charges de copropriété dans la subvention de fonctionnement que la collectivité a versée en 2006 au CCAS d’Antibes, le certificat administratif susmentionné ne saurait s’analyser comme un tel état ; que l’explication avancée par M. X..., selon laquelle la perspective de la reprise
en 2007 par la CASA de la compétence fondant les activités du service hébergé par le CCAS aurait justifié une modification des modalités de prise en charge en 2006 des charges de copropriétés imputables à ce service ne saurait expliquer l’erreur commise, ces deux événements paraissant dépourvus de tout lien ; qu’il résulte de ce qui précède que les explications avancées par le comptable et les pièces produites à l’appui ne permettent pas de conclure que l’annulation réalisée en mai 2016 du titre visé dans le réquisitoire serait intervenue dans des conditions régulières ;

 

ATTENDU par ailleurs que, contrairement à ce que soutient M. X..., la simple mention dans l’application Hélios de la transmission de la lettre de mise en demeure mentionnée dans l’état des restes à recouvrer au 31 décembre 2013 du compte 4116 et l’absence de contestation de sa dette par la commune d’Antibes ne sauraient constituer des preuves de l’interruption du cours de la prescription de l’action en recouvrement ; qu’en effet si, dans le sens indiqué par le comptable, l’instruction codificatrice  11-021-022-M0 du 16 décembre 2011 relative au recouvrement des recettes des collectivités territoriales et des établissements publics locaux précise que « grâce à la chaîne automatisée des relances de l’application Hélios, [les mises en demeure de payer sont] envoyée[s] par courrier[s] simple[s] et non signée[s] », elle rappelle également que conformément aux dispositions figurant au 3° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, « l’action en recouvrement des titres de recettes des collectivités et établissements publics locaux par les comptables publics se prescrit par quatre ans à compter de [leur] prise en charge », que « ce délai est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de dette de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription », que « la prescription est également interrompue par l’exercice d’une mesure d’exécution forcée ou la notification d’une mise en demeure de payer dans la mesure où le comptable peut apporter la preuve de cette dernière » et qu’« une relance sous pli simple n’interrompt pas la prescription » ; qu’au demeurant, la même instruction précise que « par exception (action manuelle hors Hélios), [les mises en demeure de payer doivent être] envoyée[s] avec accusé de réception et signée[s], notamment en cas de risque de prescription (…), de l’existence d’un contentieux ou de son éventualité, en fonction du montant de la créance ou en cas de procédure collective » ;

 

ATTENDU que les éléments invoqués par M. X... ne permettent non plus de considérer que le cours de la prescription prévue par la loi  68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics aurait été interrompu ; qu’en effet, faute de preuve qu’elle a touché son destinataire, la lettre de mise en demeure susmentionnée ne s’analyse pas comme une « demande de paiement ou [une] réclamation écrite adressée par un créancier à l’autorité administrative » au sens du deuxième alinéa de l’article 2 de cette loi ;

 

ATTENDU que M. X... n’a pas non plus apporté la preuve des affirmations précitées, selon lesquelles, avant l’échéance du 31 décembre 2010, il aurait sollicité l’autorisation du président du CCAS pour effectuer des poursuites et l’ordonnateur se serait opposé à ce qu’il mît en œuvre la procédure de mandatement d’office ; qu’il n’a produit aucune pièce antérieure au mandat d’annulation et au certificat du 23 mai 2016 attestant que le titre de recettes visé dans le réquisitoire aurait été sans objet ; qu’ainsi, il ne résulte pas des pièces du dossier que le comptable savait avant le 31 décembre 2010 que le titre était sans objet et que l’affirmation selon laquelle il « se serait rendu coupable de concussion [s’il avait effectué] des poursuites afin de recouvrer un titre qu’il savait illégal » est donc infondée ;

 

ATTENDU qu’aux termes du paragraphe I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « les comptables sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes » et que leur « responsabilité personnelle et pécuniaire (…) se trouve engagée dès lors (…) qu’une recette n’a pas été recouvrée (…) » ; que selon les dispositions des articles 11 et 12 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, alors en vigueur, le comptable public est seul chargé du recouvrement des recettes et du contrôle de la mise en recouvrement des créances ; qu’il résulte de ces dispositions que le comptable public est tenu de procéder à toutes les diligences nécessaires au recouvrement des recettes ;

 


ATTENDU qu’il résulte de ce qui précède que, faute de diligences suffisantes, le titre visé dans le réquisitoire et la créance correspondante se sont trouvés prescrits le 31 décembre 2010 respectivement sur le fondement des dispositions susmentionnées du 3° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et sur celui des dispositions de l’article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968, aux termes desquelles « sont prescrites, au profit de l’Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, (…) toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis » ; que M. X... a engagé de ce chef sa responsabilité personnelle et pécuniaire au titre de l’exercice 2010 ;

 

En ce qui concerne le préjudice financier

 

ATTENDU qu’aux termes des deuxième et troisième alinéas du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce (…). Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante (…) » ;

 

ATTENDU que M. X... a fait valoir dans sa réponse au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur que « le titre ayant été émis par erreur et désormais annulé, aucun préjudice [n’avait] été subi par le CCAS » ; que dans le même sens, l’ordonnateur a observé que « [le] titre [avait] fait l’objet d’une annulation de [sa] part le 23 mai 2016 et ne constitu[ait] donc plus un préjudice pour le CCAS » ;

 

ATTENDU que le constat de l’existence ou non d’un préjudice et de son imputabilité au comptable relève de l’appréciation que le juge des comptes est amené à porter sur ces deux points à l’analyse des pièces du dossier ;

 

ATTENDU qu’au cas particulier, le titre visé dans le réquisitoire a été annulé dans des conditions irrégulières plus de cinq ans après que sa prescription et celle de la créance en cause ont été acquises ; que de l’absence de recouvrement de ce titre a donc résulté un préjudice financier pour le CCAS ;

 

ATTENDU que lorsque le juge des comptes estime que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au titre du recouvrement des recettes, faute d’avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l’organisme public concerné ; que, toutefois, s’il résulte des pièces du dossier, et en particulier des éléments produits par le comptable, qu’à la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l’insolvabilité de la personne qui en était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme ayant résulté de ce manquement ; qu’en l’espèce, il ne ressort ni de la réponse du comptable ni des pièces du dossier qu’à la date de leur prescription, le titre et la créance en cause étaient irrécouvrables en raison de l’insolvabilité de l’organisme qui en était redevable ; qu’en conséquence, le préjudice qui a résulté de leur défaut de recouvrement doit être regardé comme ayant été causé par le manquement du comptable ; qu’il y a donc lieu de constituer M. X... en débet à hauteur du montant du titre non recouvré, soit la somme de 7 184,65  ;

 


 

ATTENDU qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité des comptables correspond à la notification du réquisitoire, intervenue en l’espèce le 17 février 2016 ;

 

Charge  2 : Compte 429 débiteur de la somme de 750 € au 31 décembre 2013

 

En ce qui concerne le réquisitoire

 

ATTENDU que, par le réquisitoire susvisé du 11 février 2016, le procureur financier a requis la chambre au motif qu’au 31 décembre 2013, le compte 429 « Déficits et débets des comptables » présentait un solde débiteur de 750 € correspondant à une perte de chèques emploi service universel (CESU) imputable au régisseur de la régie de recettes du centre communal d’action sociale ; qu’une vérification de la régie, réalisée le 8 mars 2010, avait révélé une discordance de 6 641,40 entre le compte de dépôt et les écritures comptables, correspondant à des CESU non parvenus au centre de gestion, qui n’avait pu être régularisée qu’à hauteur de 5 861,40  ;

 

ATTENDU qu’après avoir relevé que, pendant la phase administrative d’examen des comptes, le comptable avait fourni la copie d’un courrier, en date du 6 août 2015, par lequel l’inspecteur des finances qui avait contrôlé cette régie avait demandé au président du CCAS d’émettre un ordre de reversement à l’encontre du régisseur pour le solde de 750 , correspondant au montant des chèques qui n’avaient pu être retrouvés, le procureur financier a constaté que ce courrier ne semblait pas avoir été suivi d’effet ; qu’il en a déduit que, dans la mesure où elle constituait en réalité un manquant en deniers, la somme de 750 avait été irrégulièrement imputée au compte 429, qui n’a selon lui vocation à être mouvementé que lors d’une mise en débet, de type juridictionnel ou administratif ; que le représentant du ministère public a également relevé que l’apurement de ce manquant ne paraissait pas avoir fait l’objet de la part du comptable des démarches nécessaires et que M. X... semblait avoir engagé de ce chef sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;

 

Sur le manquement du comptable à ses obligations

 

ATTENDU que dans sa réponse au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur, M. X... a, en premier lieu, observé qu’en application de l’instruction budgétaire et comptable M14, le compte 429 doit être débité dès la constatation d’un déficit concernant
un régisseur de recettes, par le crédit du compte 4711 « Versements des régisseurs » et qu’il « n’a donc pas vocation à être mouvementé uniquement [en cas] de mise en débet » et, en second lieu, fait valoir que « compte tenu de la situation particulière [du] déficit [en cause] (…), il [n’avait] pas été demandé à l’ordonnateur l’émission immédiate d’un ordre de reversement à l’encontre du régisseur pour la totalité du déficit constaté, [dans l’]attente des diligences que celui-ci allait effectuer » ; que M. X... a précisé que, ces diligences ayant permis d’obtenir le remboursement d’une partie des chèques perdus, le montant du déficit était passé de 6 641,50 € à 750  et que ce n’est qu’une fois qu’il avait été constaté que cette somme resterait impayée, « et après que le régisseur a été débouté de la mise en cause des services de La Poste », que « le comptable a sollicité de l’ordonnateur l’émission d’un ordre de reversement de 750 € à l’encontre du régisseur afin de lancer la procédure d’apurement » du déficit ;

 


ATTENDU qu’à l’appui de sa réponse, M. X... a produit copie d’un ordre de versement
de la somme de 750 que le président du CCAS a adressé le 4 avril 2016 au régisseur,
d’un courrier en date du 6 avril 2016 par lequel le régisseur a informé le comptable
du CCAS qu’il avait demandé à l’ordonnateur un sursis de versement et sollicité le bénéfice d’une remise gracieuse de cette somme, d’une lettre du 11 avril 2016 par laquelle le comptable a proposé au directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes d’accorder au régisseur le bénéfice d’une remise gracieuse de la totalité de la somme de 750 € et d’une délibération du 26 mai 2016 par laquelle le conseil d’administration du CCAS d’Antibes a émis un avis favorable sur cette dernière proposition ;

 

ATTENDU que M. X... a conclu sa réponse au réquisitoire et au questionnaire du rapporteur en indiquant que « le dossier complet [allait] (…) être prochainement transmis au directeur départemental des Alpes-Maritimes qui [devait] prononcer une remise gracieuse totale au profit du régisseur » ;

 

ATTENDU qu’ainsi que l’a souligné M. X..., l’instruction budgétaire et comptable M14 prévoit que « le compte 429 est débité : (…) S’agissant d’un déficit concernant un régisseur de recettes, dès la constatation du déficit :

-          par le crédit du compte 4711 « Versements des régisseurs » ;

-          le cas échéant, par le crédit du compte 5412 « Régisseurs de recettes (fonds
de caisse) » » ;

qu’en conséquence il ne saurait lui être reproché d’avoir imputé à ce compte la somme de 750 €, correspondant au montant définitif du déficit ;

 

ATTENDU en revanche qu’à la date du 14 décembre 2017, à laquelle la chambre a statué, preuve n’avait toujours pas été apportée de l’octroi au régisseur, par le ministre chargé du budget ou l’autorité ayant reçu délégation à cet effet, d’une remise gracieuse de la somme ainsi mise à sa charge, dans les conditions prévues à l’article 12 du décret du 5 mars 2008 susvisé, ni de la prolongation du sursis de versement au-delà du délai maximum d’une année dans les conditions prévues à l’article 10 du même décret ;

 

ATTENDU qu’il ressort du rapport établi le 8 mars 2010 par l’inspecteur des finances publiques qui a vérifié la régie de recettes du CCAS que le montant définitif du déficit était alors déjà connu ; que ce rapport indique en effet qu’« après réclamation déposée auprès du centre d’encaissement, des CESU arrivés après la date limite de réception ont été acceptés par le centre et ont fait l’objet d’un remboursement pour un montant de 5 715,51 € (+ 145,89 € de frais) » et que « sur la différence constatée de 6 611,40 €, 750 € n’ont pas fait l’objet de remboursement au motif que [les] CESU [correspondants] ne sont jamais parvenus au centre » ; qu’ainsi que le représentant du ministère public l’avait relevé dans son réquisitoire, l’inspecteur avait souligné en conclusion : « La différence réelle est donc de 750  et compte tenu des éléments présents, la responsabilité du régisseur ne peut qu’être mise en jeu » ; qu’ainsi M. X... aurait dû enclencher dès le mois de mars 2010 la procédure de mise en jeu de la responsabilité du régisseur prévue par les articles 7 à 11 du décret précité du 5 mars 2008 ;

 

ATTENDU que dans ces conditions, le déficit visé dans le réquisitoire s’analyse comme un manquant en monnaie au sens du I de l’article 60 susvisé de la loi du 23 février 1963, aux termes duquel « la responsabilité personnelle et pécuniaire (…) [des comptables publics] se trouve engagée dès lors qu'un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté » et que ce manquant persistant dans les comptes du CCAS engage la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X... ;


Sur le préjudice financier

 

ATTENDU quaux termes des deuxième et troisième alinéas du paragraphe VI de larticle 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I na pas causé de préjudice financier à lorganisme concerné, le juge des comptes peut lobliger à sacquitter dune somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de lespèce (…). Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à lorganisme public concerné (…), le comptable a lobligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante (…) » ;

 

ATTENDU que M. X... a fait valoir dans sa réponse au réquisitoire du procureur financier et au questionnaire du rapporteur que « le CCAS ayant décidé d’accorder la remise totale au régisseur, il [n’avait] (…) subi aucun préjudice du fait du comptable » ; que dans le même sens, l’ordonnateur a soutenu qu’« il n’exist[ait] plus de préjudice puisque le conseil d’administration [du CCAS avait] donné (…) un avis favorable pour la remise gracieuse » ;

 

ATTENDU toutefois qu’il est constant quà la date à laquelle la chambre a statué, le ministre chargé du budget ou l’autorité ayant reçu délégation à cet effet ne s’était toujours pas prononcé sur la demande de remise gracieuse présentée par le régisseur ; qu’en conséquence figurait dans les comptes du CCAS un manquant en monnaie constitutif d’un préjudice financier pour l’établissement public ; que la persistance de ce préjudice, identifié lors de la vérification de la régie de recettes du CCAS intervenue le 8 mars 2010, est imputable au comptable ; qu’en conséquence il y a lieu de le constituer en débet pour la somme correspondante, soit 750  ;

 

ATTENDU quaux termes du paragraphe VIII de larticle 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, « les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » ; que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité des comptables correspond à la notification du réquisitoire, intervenue en lespèce le 12 février 2016 ;


Par ces motifs :

 

DÉCIDE :

 

 

Article 1er : En ce qui concerne la charge n° 1, M. X... est constitué débiteur du centre communal d’action sociale d’Antibes, au titre de l’exercice 2010, pour la somme de 7 184,65 , augmentée des intérêts de droit à compter du 17 février 2016.

 

Article 2 : En ce qui concerne la charge  2, M. X... est constitué débiteur du centre communal d’action sociale d’Antibes, au titre de l’exercice 2013, pour la somme de 750 €, augmentée des intérêts de droit à compter du 17 février 2016.

 

Article 3 : Il est sursis à la décharge de M. X... pour sa gestion au titre des exercices 2010 à 2013 dans lattente de lapurement des débets mentionnés aux articles 1 et 2.

 

Fait et jugé à la chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte dAzur, le quatorze décembre deux mille dix-sept.

 

Présents : M. Louis Vallernaud, président de la chambre, président de séance,
M. Laurent-Xavier Blelly, premier conseiller et Mme Sidonie Reallon, conseillère.

 

 

 

 

 

La greffière adjointe,

 

 

 

 

 

 

Bérénice BAH

Le président de la chambre,

président de séance,

 

 

 

 

 

Louis VALLERNAUD

 

 

 

 

La République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.

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