S2018-1641 1/8
QUATRIÈME CHAMBRE ------- Première section ------- Arrêt n° S2018-1641
Audience publique du 31 mai 2018
Prononcé du 14 juin 2018
| RÉGION ILE-DE-FRANCE
Appel d’un jugement de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France
Rapport n° R2017-1713-1
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République Française
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu la requête enregistrée le 26 février 2016 au greffe de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France, par laquelle M. X, agent comptable de la région Ile-de-France du
1er janvier au 27 octobre 2011, a élevé appel du jugement n° 2015-0030J du 30 décembre 2015, par lequel ladite chambre régionale l’a constitué débiteur de la région, pour les sommes de 3 395,42 € au titre de la charge n°2 et 4 550 € au titre de la charge n°3 ;
Vu la requête enregistrée le 26 février 2016 au greffe de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France, par laquelle M. Y, agent comptable de la région Ile-de-France du 28 octobre 2011 au 27 septembre 2012, a élevé appel du jugement n° 2015-0030J du 30 décembre 2015, par lequel ladite chambre régionale l’a constitué débiteur de la région pour les sommes de 462 273,03 € au titre de la charge n°1 et 3 800 € au titre de la charge n°4 ;
Vu la requête enregistrée le 25 février 2016 au greffe de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France, par laquelle M. Z, agent comptable du 28 septembre au 31 décembre 2012, a élevé appel du jugement n° 2015-0030J du 30 décembre 2015, par lequel ladite chambre régionale l’a constitué débiteur de la région pour la somme de 154 091,01 € au titre de la charge n°1 ;
Vu les pièces de la procédure suivie en première instance ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits ;
Vu le rapport de Mme Adeline BALDACCHINO, conseillère référendaire, chargée de l’instruction ;
Vu les conclusions n° 112 du Procureur général du 28 février 2018 ;
Vu les mémoires complémentaires de MM. Y et Z enregistrés au greffe de la Cour le 25 mai 2018 ;
Entendu, lors de l’audience publique du 31 mai 2018, Mme Adeline BALDACCHINO en son rapport, M. Christophe LUPRICH, substitut général, en les conclusions du ministère public ; les parties informées de l’audience n’étant ni présentes ni représentées
Après avoir entendu en délibéré M. Denis BERTHOMIER, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;
Attendu que, par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes
d’Ile-de-France a constitué M. X débiteur de la région pour avoir payé, d’une part, en mars 2011, 3 395,42 € au titre du solde d’un marché relatif à la construction d'un centre de maintenance nucléaire au lycée André Malraux à Montereau sans avoir déduit les pénalités de retard (charge n°2) ; et pour avoir payé, d’autre part, en juin 2011, 4 550 € au titre du solde d'un marché de travaux de ravalement des façades d'un bâtiment du lycée la Source à Nogent-sur-Marne sans avoir déduit les pénalités de retard (charge n°3) ;
Attendu que, par le même jugement, la chambre régionale des comptes
d’Ile-de-France a constitué M. Y débiteur de la région pour avoir payé, d’une part, en décembre 2011, 3 800 € au titre du solde d’un marché de réfection de la toiture d'une annexe du lycée professionnel Lafayette à Héricy sans avoir déduit les pénalités de retard (charge n°4) et, d’autre part, en 2012, des primes de direction sur le fondement d’une délibération du conseil régional de 1999 et d’arrêtés individuels insuffisamment précis, pour un montant de 462 273,03 € (charge n°1) ;
Attendu enfin que, par le même jugement, la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France a constitué M. Z débiteur de la région pour avoir payé des primes de direction sur le fondement d’une délibération du conseil régional de 1999 et d’arrêtés individuels insuffisamment précis pour un montant de 154 091,01 € en 2012 (charge n°1) ;
Attendu que les trois requêtes susvisées font appel d'un même jugement qui les concerne successivement pour plusieurs charges ; qu’il y a donc lieu de les joindre pour en traiter par un seul et même appel ;
Sur la charge n°1 (paiement de primes de direction)
Attendu que MM. Y et Z contestent l’existence d’un manquement à leurs obligations qui aurait causé un préjudice financier à la région dans des termes identiques ;
Sur l’existence d’un manquement
Attendu que les appelants soutiennent que le jugement méconnaîtrait les limites du contrôle du comptable public, qui devrait tenir compte du principe de libre administration des collectivités locales et du caractère exécutoire des décisions de celles-ci à l’issue du délai imparti pour exercer le contrôle de légalité ; qu’ils font, par ailleurs, valoir des relances écrites concernant la fiche de simulation du directeur général des services et le signalement du défaut de transmission des pièces justificatives, dans le plan de contrôle hiérarchisé de la paie dès 2010, pour considérer qu’ils ont rempli leurs obligations ; qu’ils soutiennent également que la délibération étant ancienne et que, n’ayant jamais été mise en cause, elle pouvait leur apparaître valable ; qu’ils demandent qu’une note du Procureur général près la Cour des comptes du 5 décembre 2014 et adressée aux procureurs financiers près les chambres régionales des comptes, soit prise en considération ;
Attendu que, dans leurs mémoires complémentaires susvisés, les appelants invoquent plusieurs décisions du Conseil d’État pour considérer que les comptables n’auraient pas la compétence la précision ou l’imprécision d’une délibération ;
Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de dépenses et que leur responsabilité se trouve engagée dès qu’une dépense a été irrégulièrement payée ;
Attendu qu’aux termes de l’article 12 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, les comptables sont tenus d’exercer, en matière de dépenses, le contrôle de la validité de la créance ; qu’aux termes de l’article 13 du même décret, « en ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur : la justification du service fait et l’exactitude des calculs de liquidation ; l’intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications » ;
Attendu que les primes de direction payées en 2012 à onze agents pour une somme totale de 616 364, 04 €, à concurrence de 462 273,03 € payés par M. Y de janvier à septembre 2012 et de 154 091, 01 € payés par M. Z d'octobre à décembre 2012 ont été versées sur le fondement, d'une part, d'une délibération du conseil régional n°07.99 du 25 mars 1999, et, d'autre part, d'arrêtés individuels portant attribution du régime indemnitaire aux agents concernés ;
Attendu que la délibération précitée du 25 mars 1999 prévoit en son article 7 que "les fonctionnaires occupant un emploi de direction de la Région bénéficient du régime indemnitaire fixé pour leur grade d'origine. Les agents contractuels fonctionnaires occupant un emploi de direction de la Région peuvent bénéficier soit du régime indemnitaire des administrateurs, soit du régime indemnitaire des ingénieurs en fonction de leur diplôme" ; que les arrêtés individuels définissent un montant d’indemnité sans faire référence au régime indemnitaire fixé pour le grade d'origine ;
Attendu que la rubrique 210223 de l'annexe I du code général des collectivités territoriales, à laquelle renvoie son article D. 1617-19 prévoit que pour procéder au paiement des primes et indemnités, le comptable doit disposer des pièces suivantes : "1. Décision de l'assemblée délibérante fixant la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités ; 2. Décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent." ;
Attendu que s’il n'appartient pas au comptable de s'assurer que le contrôle de légalité a été correctement effectué, il ne peut en revanche arguer d'une absence de déferrement au juge administratif pour se voir exonérer de ses obligations de contrôle quant à l'exactitude des calculs de liquidation et à la production des pièces justificatives ;
Attendu qu’en l'absence de pièces justificatives suffisantes, telles que prévues par la nomenclature visée à l'article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, il doit suspendre le paiement ; qu’il lui appartient, sans se faire juge de la légalité des pièces justificatives qui lui sont produites, de vérifier la conformité desdites pièces aux exigences de la nomenclature ;
Attendu qu’en l'espèce, la délibération du 25 mars 1999 ne fixait ni la nature, ni les conditions d'attribution, ni le taux moyen des indemnités ; que les arrêtés individuels ne faisaient pas référence à des taux applicables, contrairement à ce que prévoit explicitement la rubrique 210223 ; que ces pièces produites n’étant pas conformes à la nomenclature susvisée, les comptables auraient dû suspendre les paiements et solliciter des pièces plus précises ;
Attendu qu’au surplus, la suspension des paiements jusqu’à la production par l'ordonnateur des pièces prévues par la nomenclature n'aurait en rien contredit le principe de libre administration des collectivités territoriales ;
Attendu que si le comptable peut, dans son rôle de conseil, solliciter l'ordonnateur et l'alerter quant à des pratiques potentiellement non conformes à la réglementation, il doit, dans son rôle de payeur, suspendre tout paiement qui ne satisferait pas aux obligations de contrôle de l'exactitude des calculs de liquidation et de la production des pièces justificatives ; qu’en l’espèce les requérants étaient donc tenus de suspendre le paiement ;
Attendu que le comptable ne peut se prévaloir de pratiques non conformes à la réglementation pour considérer qu'elles se substitueraient, par l'usage, aux obligations de sa charge ; qu’au demeurant, le juge des comptes n'est pas lié par des décisions antérieures et que rien ne peut permettre de considérer "implicitement" qu'une délibération serait "de nature à satisfaire aux exigences du juge des comptes" parce qu'elle n'aurait pas été mise en cause à l'occasion de précédents contrôles ;
Attendu que la note interne adressée par le Procureur général près la Cour des comptes aux procureurs financiers près les chambres régionales des comptes invoquée par les appelants, concerne le recouvrement des recettes et non les contrôles en matière de dépenses ; que ce moyen est donc inopérant ;
Attendu qu’il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre régionale des comptes a mis en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de MM. PERY et PARINI au titre de la charge n°1 ;
Sur l’existence et l’évaluation du préjudice financier
Attendu que les appelants contestent l’existence d’un préjudice financier subi par la région au motif que le niveau du régime indemnitaire des bénéficiaires était cohérent dans son montant et ne portait pas préjudice à la collectivité dès lors que cette dernière avait manifesté son intention de le payer en procédant au mandatement de la dépense ; que, par ailleurs, ils estiment qu’il était possible de vérifier l’exactitude des calculs de liquidation et que ceux-ci étaient cohérents avec les fonctions exercées par les bénéficiaires ;
Attendu qu’ils estiment que, dès lors que les agents concernés devaient bénéficier d’un régime indemnitaire en application de la délibération de 1999, le préjudice devrait être établi au niveau du seul différentiel entre les indemnités effectivement versées et celles auxquelles ils auraient eu droit s’il avait été tenu compte du régime indemnitaire des corps d’origine des agents concernés ;
Attendu que les requérants appuient leurs moyens de nombreuses références jurisprudentielles ; qu’ainsi M. Z, dans sa requête, fait référence à un jugement d’une autre chambre régionale des comptes qui, selon lui, aurait considéré que le paiement par le comptable public d’indemnités non instituées par une délibération exécutoire n’est pas de nature à établir l’existence d’un préjudice financier ; que les deux appelants dans leurs mémoires complémentaires citent plusieurs décisions du Conseil d’État pour rappeler, notamment, que le pour déterminer si le paiement irrégulier d’une dépense par un comptable public a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné, il appartient au juge des comptes d’apprécier si la dépense était effectivement due et, à ce titre de vérifier qu’elle n’était pas dépourvue de fondement juridique et que le même juge doit apprécier l’existence et le montant du préjudice à la date à laquelle il statue ;
Attendu que la Cour ne saurait être liée par un autre jugement issu des juridictions financières ; qu’au surplus, les faits de l'espèce invoquée par M. Z étaient différents puisqu’une délibération produite en cours d'instruction, mais adoptée antérieurement aux paiements en cause, attestait de la volonté de l'organe délibérant d'accorder le bénéfice d'indemnités aux agents concernés et comportait les mentions nécessaires au calcul de liquidation et à l’exercice par le comptable des contrôles réglementaires ; que les circonstances ne sont donc pas comparables ; que le moyen doit donc être écarté ;
Attendu que la responsabilité des comptables n'est pas mise en cause du fait de l'illégalité qui pourrait entacher le régime indemnitaire servi mais du fait du caractère insuffisant des pièces permettant de vérifier l'exactitude des calculs de liquidation ; que, dès lors, le manquement n’est pas fondé sur une méconnaissance des montants annuels maximum qui pouvaient être versés mais sur l’absence de vérifications, après production des pièces justificatives prévues par la nomenclature, de la correcte liquidation des montants en cause ; qu’en décidant que les sommes versées n’étaient pas dues du fait de l’insuffisance des pièces justificatives et de l’impossibilité de vérifier l’exactitude des calculs de liquidation et qu’à ce titre elles avaient constitué un préjudice financier pour la région, la chambre régionale n’a pas commis d’erreur de droit ;
Attendu que s’il n’est pas contesté qu’il appartient au juge des comptes d’évaluer le montant du préjudice subi par la collectivité publique, dans les circonstances de l’espèce, les comptables appelants n'étaient pas, à la date des paiements, en mesure d'effectuer le calcul de liquidation ; qu’il ne leur appartenait pas de se substituer à l'ordonnateur en recalculant des montants maximum de prime à verser sur le fondement de délibérations et d'arrêtés individuels trop imprécis; qu’au surplus, même s’ils l’avaient entrepris, ils n’auraient pu que constater une contradiction entre les montants maximum rappelés par l'ordonnateur lui-même et les montants effectivement versés ; qu’ils ne pouvaient préjuger des montants à attribuer à chaque bénéficiaire, ni même déterminer le montant minimum attribuable ; que ni la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France ni la Cour des comptes ne sont a fortiori en capacité d’arrêter ces montants, et de déterminer le préjudice subi par la région ; que c’est donc l'intégralité des mandats qui auraient dû faire l'objet d'une suspension et que le préjudice doit être à bon droit établi à la hauteur de l’ensemble des sommes versées sans que soit vérifié le calcul de liquidation sur des fondements précis ; que le moyen doit donc être écarté ;
Sur les circonstances d’exercice de leurs fonctions
Attendu que les appelants font valoir la difficulté de leur action dans un contexte de réforme ; que sans méconnaître les difficultés pratiques qu'ont pu rencontrer les comptables dans l'exercice de leurs fonctions, qu'ils rappellent dans leurs deux réponses, le juge des comptes ne peut pour autant considérer dès lors que la force majeure n’est pas invoquée, que les circonstances seraient de nature à exonérer les comptables de leurs obligations de contrôle ; que ces conditions d’exercice ne peuvent être utilement présentées devant le juge des comptes mais pourront être invoquées à l’appui d’une demande de remise gracieuse auprès du ministre chargé du budget ;
Attendu que la chambre n’a donc pas commis d'erreur de droit en constituant
MM. Y et Z débiteurs de la région Ile-de-France pour les sommes respectives de 462 273,03 € et 154 091,01 € ;
Sur les charges n°2, 3 et 4 (paiement de soldes de marchés)
Attendu que M. X conteste l’existence d’un manquement à ses obligations ayant été la cause d’un préjudice subi par la région ; qu’il demande l’infirmation de ce jugement (charges n°2 et 3) en faisant valoir que le retard d’exécution n’aurait pas été significatif ; que le constat et le décompte des pénalités de retard relevant de l’ordonnateur, l’absence de liquidation conduit à conclure à la renonciation par l’ordonnateur de ces pénalités ; que le retard n’aurait pas emporté de préjudice pour la collectivité ; et que, s’agissant du marché à procédure adaptée visé à la charge n°3, la production d’une déclaration d’exonération de pénalités n’était pas requise ;
Attendu que M. Y sollicite l’infirmation du jugement (charge n°4) pour les mêmes motifs que M. X ;
Sur l’existence d’un manquement
Attendu que les appelants ne contestent pas avoir réglé le solde de marchés relatifs à des travaux (marché relatif à la construction d'un atelier de maintenance nucléaire au lycée André Malraux de Montereau par M. X à hauteur de 3 395, 42 € par mandat n°7811 du 4 mars 2011 pour ce qui concerne la charge n°2 ; marché à procédure adaptée de travaux des ravalements de façade du bâtiment B du lycée La Source à Nogent-sur-Marne par X à hauteur de 4 550 € par mandat n°24268-1 du 23 juin 2011 pour ce qui concerne la charge n°3 ; marché à procédure adaptée de travaux de réfection de la toiture de l'annexe Fontaineroux du lycée professionnel Lafayette à Héricy par M. Y à hauteur de 14 206, 26 € par mandat n°53784 du 19 décembre 2011 pour ce qui concerne la charge n°4 sans déduire des pénalités de retard ni disposer d’un état liquidatif des pénalités et d’une décision de réduction ou d’exonération, mais estiment n’avoir pas été dans l’obligation de le faire ;
Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables publics sont personnellement pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de dépenses et que leur responsabilité se trouve engagée dès qu’une dépense a été irrégulièrement payée ;
Attendu qu’aux termes de l’article 12 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, les comptables sont tenus d’exercer, en matière de dépenses, le contrôle de la validité de la créance ; qu’aux termes de l’article 13 du même décret, « en ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur : la justification du service fait et l’exactitude des calculs de liquidation ; l’intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications » ;
Attendu que la rubrique 43252 de l'annexe I du code général des collectivités territoriales établit la liste des pièces justificatives exigibles à l'appui du paiement des soldes de marchés formalisés de travaux : "1. Décision de réception prise par l'autorité compétente (…) ; 2. Décompte général et définitif 3. Constat, situation, relevé, mémoire ou facture justifiant le décompte (…) ; 4. Etat liquidatif des pénalités de retard encourues par le titulaire lorsque leur montant est déduit par l'ordonnateur sur les paiements ; en cas d'exonération ou de réduction de ces retenues : délibération motivée de l'autorité compétente prononçant l'exonération ou la réduction" ; que compte tenu des délais de livraison observés, les comptables étaient donc dans l’obligation de procéder à une vérification de l’existence d’un état liquidatif des pénalités de retard ;
Attendu que, si la rubrique 43252 de l'annexe I précitée ne vise pas les marchés à procédure adaptée, les principes généraux régissant la production de pièces justificatives impliquent que "lorsqu'une catégorie de dépenses n'est pas énumérée dans la liste des pièces justificatives, le comptable doit demander, en se référant si possible à une catégorie de dépenses similaires qui y est répertoriée, les pièces justificatives qui lui permettent d'effectuer les contrôles qui lui incombent" (point 1.2 de l'annexe I), et précisent que "la liste des pièces justificatives ne saurait faire obstacle à l'application des clauses d'un contrat produit au comptable" (point 3.1) ; que l'article 4.3 du cahier des clauses administratives particulières des marchés incriminés par les charges n°3 et 4 prévoyait bien l'application de pénalités de retard ; que, dès lors, la circonstance qu’un marché soit à procédure adaptée n’exonère pas le comptable de vérifier les calculs de liquidation du solde du marché et d’application des pénalités de retard, sauf à disposer d’une délibération ad hoc de réduction ou de suppression de celles-ci par l’ordonnateur ; que compte tenu des délais de livraison observés, les comptables étaient dans l’obligation de procéder à une vérification de l’existence d’un état liquidatif des pénalités de retard ;
Attendu que les requérants font valoir des retards d'exécution variables (26 jours sur 8 mois d'exécution pour le marché visé par la charge n°1 ; 33 jours sur 7 mois pour le marché visé par la charge n°2 ; 28 jours sur 8,5 mois pour le marché visé par la charge n°4), qu'ils considèrent tous comme non significatifs au regard de la durée des marchés ;
Attendu cependant que les comptables ne disposent pas d'un pouvoir d'appréciation subjectif sur la gravité d'un retard qui constitue un manquement aux termes d'un contrat et doivent s'en tenir à la lettre de celui-ci pour l'application de leurs contrôles de l’exactitude des calculs de liquidation ; qu’ils ne peuvent donc arguer du caractère limité d'un dépassement pour justifier l’absence d’application de clauses contractuelles explicites ;
Attendu que le comptable ne pouvait présumer de la volonté de l’ordonnateur de ne pas appliquer des pénalités de retard sans disposer d’une délibération ad hoc ; que le comptable était donc tenu de suspendre le paiement dans l’attente d’une décision motivée telle qu’exigée par les textes règlementaires précités ou de déduire les pénalités de retard contractuellement prévues ; que le moyen doit donc être écarté ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
Attendu que les comptables estiment que les retards d'exécution n'auraient pas occasionné de préjudice à la collectivité ;
Attendu que le préjudice financier n'est pas lié au préjudice économique qu’aurait subi la région du fait des coûts supplémentaires induits par les retards de livraison des trois équipements précités, mais à l’absence de pièces justificatives, à l’appui des paiements, permettant de ne pas opérer de réfaction sur les sommes dues, en contradiction avec la nomenclature comptable applicable ; que, d’ailleurs, le jugement de la chambre n’évoquait qu’au surplus la compensation d’un préjudice résultant du retard ; que ce moyen est donc inopérant ;
Attendu que la chambre n’a pas commis d’erreur de droit en constituant MM. X et Y débiteurs de la région Ile-de-France pour les sommes respectives de 3 395,42 € sur l'exercice 2011 (charge n°2, M. X), 4 550 € sur l'exercice 2011 (charge n°3, M. X) et 3 800 € (charge n°4, M. Y).
Par ces motifs,
DECIDE :
Article unique - Les requêtes de M. X, de M. Y et de M. Z sont rejetées.
Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section. Présents : M. Yves ROLLAND, président de section, président de séance, M. Denis BERTHOMIER, conseiller maître, Mmes Dominique DUJOLS et Isabelle LATOURNARIE-WILLEMS, conseillères maîtres ;
En présence de M. Aurélien LEFEBVRE, greffier de séance.
Aurélien LEFEBVRE
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Yves ROLLAND
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En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.
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